Hiatus by Lyssa7
Summary:

Carinwong sur DA, montage de Ielenna

 

James Sirius Potter a seize ans. L'adolescent est dans une mauvaise passe. L'aîné de celui qu'on nomme le Survivant déteste son paternel et son héritage, envie son frère cadet, et ne se supporte plus lui-même. Empli de contradictions et rongé par une colère latente, il est à la croisée des chemins. 

Regulus Black a le même âge lorsqu'il écrit une lettre que sa destinataire ne recevra pas et ne lira jamais. Une lettre qui restera cachée des décennies avant que James Sirius Potter ne la découvre. Une lettre qui, étrangement, trouvera écho en ce dernier. 

 

Définition de Hiatus (au sens figuré) : distance entre deux choses, deux personnes, marquant une différence. Paradoxalement, peut aussi désigner une continuité.

 

Joyeux Noël Bloo !


Categories: "19 ans plus tard", Tranches de vie, Autres portraits de personnages Characters: James S. Potter, Regulus Black
Genres: Epistolaire, Romance/Amour, Tragédie/Drame
Langue: Aucun
Warnings: Aucun
Challenges: Aucun
Series: N comme Next-Gen, Echange de Noël 2019
Chapters: 1 Completed: Oui Word count: 2566 Read: 862 Published: 27/12/2019 Updated: 27/12/2019
Story Notes:

Cet OS a été écrit dans le cadre de l'échange de Noël 2019. Bloo (<3) en a été la destinataire. Je me permets de le poster après avoir eu son retour sur ce texte. Encore merci pour tes précieux compliments qui me vont droit au coeur, si jamais tu passes par ici, Bloo ! <3 <3 <3

Sa fiche mentionnait différentes périodes (celle des Maraudeurs et de la Next notamment), et j'ai été incapable de choisir entre les deux. :mrgreen:

Ce texte parle donc de James Sirius Potter, mais aussi de Regulus Black, de leurs choix et, en terminant ce texte, je reste persuadée que leurs différences engendrent un parallèle assez étonnant.

Bonne lecture !

Lyssa

 

Chapitre unique by Lyssa7

« Tenez, Potter. J’imagine qu’à force de vous retrouver en retenue, vous êtes devenu un expert dans l’art de manier l’éponge à récurer. Faites en sorte que cette pièce soit rutilante à mon retour. »

Le concierge, un homme entre deux âges du nom de Davis, eut un sourire mesquin. Quelques secondes plus tard, par mesure de précaution, il l’enfermait dans la pièce à double-tour. James Sirius Potter contempla le seau d’eau graisseuse et la vieille éponge miteuse d’un sale œil, comme s’ils étaient tous deux responsables de son malheur. Pourtant, le jeune homme ne pouvait s’en prendre qu’à lui-même. Ses nombreuses insolences depuis le début de l’année, ajoutées à ses expéditions nocturnes, lui avaient valu près d’une vingtaine d’heures de retenue. Il semblait même qu’il avait surpassé son record, toutes années confondues.

Le visage de Logan Carter, à la fois blasé et inquiet du comportement de son meilleur ami, s’imposa à son esprit. La remarque qu’il lui avait lancée un soir ne cessait plus de perturber James. Celui-ci secoua la tête d’un air agacé, chassa ses pensées, et s’empara de l’éponge avec une grimace dégoûtée. Cependant, incapable de faire taire la petite voix qui lui serinait que son ami avait raison, il ne put s’empêcher de s’exprimer à voix haute.

« Bordel, c’est des conneries. Mon père n’a absolument rien à voir avec la façon dont je réagis ! »

Toutefois, il dût bien vite se rendre à l’évidence. La seule mention de son géniteur le mettait dans une colère noire. Son géniteur. C’était ainsi qu’il le nommait dans son esprit. Son géniteur. Ce héros que la société sorcière adulait depuis deux décennies le rendait littéralement dingue. Porter ce nom, en plus des prénoms de son grand-père et du parrain de son père, lui donnait l’impression d’être enfermé dans un carcan. Un carcan dont il ne pourrait jamais se défaire. Et il étouffait.

James s’étranglait sous le poids de cette identité. La sienne. Celle à laquelle il avait essayé de se greffer. Il avait tenté de le rendre fier, son père. Il avait tellement voulu coller à cette image, à ce symbole, cette représentation humaine. Aux morts vivants. James. Sirius. Il ne leur ressemblait même pas finalement. Il était roux, ses yeux étaient bleus. Il n’avait rien de James. Rien de Sirius. Il n’était même pas un vrai Potter. Il était un pur produit de la famille Weasley. Du moins, physiquement. C’était au moins cela qu’on ne lui enlèverait pas. Quelle ironie. Quelle foutue ironie.

C’était Albus Severus le parfait écho de son père, pas lui. Et il pourrait essayer, il pourrait tenter mille fois de lui ressembler, d’être sa copie conforme, le fils qu’il aurait souhaité, il n’y parviendrait pas. Égoïste, exubérant, insolent. Il pouvait bien se faire passer pour ce qu’il n’était pas, profiter de la gloire de son père et se satisfaire de la pseudo-célébrité qu’il lui avait arrachée, mais ce n’était qu’un leurre. Au fond de lui, il y avait bien longtemps que la fureur débordait par tous ses pores. Elle dégoulinait tant et si bien qu’il frottait le sol et les meubles à s’en faire saigner les mains, à s’en faire gerber.

« Putain… » marmonna-t-il en se laissant glisser contre une armoire, éreinté d’échapper à ses sombres pensées.

Il jeta un œil à sa montre. Cette montre que son père lui avait offert à son dernier anniversaire. Il était dix-sept heures. Encore deux heures avant que Davis ne revienne le chercher. En attendant, il était coincé. Coincé dans cette pièce, comme dans sa vie. Coincé par son nom, et coincé par lui-même. Piégé. Il était piégé et il aurait voulu hurler. Hurler pour qu’on l’entende enfin. Hurler pour ne plus avoir l’impression d’être enfermé dans son propre corps.

James s’affala contre l’une des portes de l’armoire, et poussa un profond soupir mû par une rage inaudible. Il allait fermer les yeux pour calmer les fracas de son coeur quand il entendit un bruit provenant de l’intérieur du meuble. Comme si quelque chose venait de tomber sous le poids de ses échecs. Il grommela quelques insultes sordides, et se releva. S’il ne voulait pas que Davis lui colle encore une après-midi de retenue, il allait devoir remettre l’objet à sa place d’origine.

Ouvrant les portes en grand, il chercha du regard la source du bruit entendu plus tôt. Il s’agissait d’une boîte. Plus précisément une petite boîte en fer. Ses bordures avaient été rongées par la rouille et le cadenas s’était brisé sous le choc de la chute. Sur le sol de l’armoire, James remarqua une lettre, une seule, écrite sur du parchemin et pliée soigneusement en quatre bords identiques.

Poussé par la curiosité, il la ramassa avec précaution. Savait-on jamais, si elle avait traversé les années, elle aurait pu s’émietter entre ses mains et se transformer instantanément en poussières. Le jeune homme hésitait sur la conduite à tenir. Et si ce parchemin appartenait au corps professoral ? Il grimaça, risquant un coup d’œil vers la porte. Aucun signe de Davis. Et puis, la boîte comme le parchemin paraissaient tellement hors du temps qu’il était presque impossible qu’ils appartiennent encore à qui que ce soit. Ou, si c’était vraiment le cas, il y avait de fortes chances que l’individu en question ait fini par les oublier. Peut-être même que cette lettre, quoi qu’elle puisse contenir, n’avait aucune espèce d’importance aux yeux de son auteur.

Fort de cette hypothèse, James commença à la déplier. L’écriture, si petite et fine qu’il avait du mal à en discerner les mots, s’étalait sur les deux côtés du parchemin. Plissant les yeux, il discerna l’en tête de la lettre. Celle-ci semblait s’adresser à une certaine « Marlene ». L’adolescent poussa un soupir, éprouvant une brève satisfaction à l’idée de ne pas connaître la destinataire du message. Il aurait sûrement été mal à l’aise de découvrir une sorte de correspondance secrète entre deux personnes qu’il croisait tous les jours dans les couloirs de l’école. Et, sans y réfléchir davantage, le jeune homme commença sa lecture.

« Marlene,

J’avais besoin de t’écrire. Un geste purement symbolique, mais surtout égoïste, puisque tu ne recevras jamais cette lettre. Je ne l’écris pas dans le but de te la donner une fois qu’elle sera terminée, ni même de te l’envoyer un jour. Je l’écris pour moi, pour ne pas devenir fou, pour expulser toutes ces phrases qui ne cessent de me hanter et qui sont la cause de mes insomnies, pour avoir une chance de remonter à la surface sans que ton visage ne vienne constamment me narguer.

Je sais, je ne pense qu’à moi, je n’ai pas la moindre once de sensibilité. C’est ce que tu dirais si on avait l’occasion de se revoir, de se retrouver, de s’embrasser. On ne se reverra pas, on ne se retrouvera pas, on ne s’embrassera pas. C’est sans doute pour cette ultime raison que je me retrouve à tremper ma plume dans mon encrier pour t’écrire ces lignes. Ces lignes que tu ne liras pas. Ni demain, ni jamais. Je ne cesse de me le répéter, pour ne pas l’oublier. C’est triste de voir à quel point j’ai l’air d’un damné. Un peu comme si je parlais tout seul. C’est triste, oui, vraiment. C’est pitoyable en fin de compte, tellement pitoyable que j’ai presque envie d’en rire.

Est-ce que tu sais à quel point je lutte quand je t’aperçois ?

Non, bien sûr que non, tu ne le sais pas. J’ai toujours été doué pour cacher mes émotions, à l’inverse de mon frère. Sirius s’en défendra toujours, mais il tient de notre mère. Il a toujours été impulsif, vindicatif, emporté. Quant à moi, je suis exactement comme notre père. Froid, impassible, placide. L’éducation que j’ai reçue m’a appris à agir de cette façon, et j’ai pu constater de nombreuses fois, au cours de mes jeunes années, qu’il valait mieux être l’ombre que la lumière. La lumière est aveuglante, l’ombre est apaisante. La lumière est le centre de toutes les attentions, l’ombre se fond dans le décor sans que personne ne la remarque. Les deux ne peuvent cohabiter car, si cela venait à se produire, la lumière déclinerait, l’ombre blanchirait. Et ce serait la fin puisque l’équilibre aurait été rompu.

Alors dis-moi, pourquoi je me retrouve encore prisonnier de tes rayons Marlene ?

Si tu étais là, tu me répondrais que tu n’en sais rien, que tu n’y es pour rien, que tu ne veux pas le savoir. C’est vrai, ce n’est pas de ta faute, et cela n’aurait pas de sens de te l’avouer maintenant. Tu ne m’as rien promis, je ne t’ai rien promis non plus. Notre histoire s’est dessinée dans l’ombre, jamais en pleine lumière. Au final, il ne s’agit que de cela. De l’ombre et de la lumière. De cette lumière dont je me suis tant protégé et qui a fini par m’aveugler, de cette ombre qui a fini par te recouvrir malgré tes sourires éblouissants. Je ne suis pas fait pour la lumière, tu n’es pas destinée aux ombres, et nous devions reprendre nos places en ce bas monde.

Nous n’étions pas faits pour nous rencontrer.

Et peu importe que j’en brûle, peu importe que tu en sombres. Ce choix est celui qu’on exige de moi, celui qui appartient à ma lignée Je n’ai pas le droit de décevoir ma famille. Je ne suis pas Sirius, Marlene. Je ne le serais jamais, et je suis désolé que tu aies choisi le mauvais frère. Je suis désolé que nos chemins se soient croisés, au coeur d’une bibliothèque poussiéreuse. Et je suis infiniment désolé d’avoir engagé cette conversation. Je crois que j’avais besoin de réponses, de savoir ce que Sirius pensait de moi, s’il ne m’avait pas troqué contre James Potter. C’était le cas, bien sûr. Tu ne m’as pas menti. Tu aurais pu, mais tu ne l’as pas fait. Tu as rendu ton verdict, sans m’épargner. Je t’en suis gré, même si c’est exactement à ce moment précis que mon destin s’est scellé. Sirius était le rebelle, le renégat, je me devais donc d’être le fils prodige, le modèle. Le parfait Serpentard.

Finalement, est-ce vraiment une question de choix ?

Quand j’y repense, j’entends encore le choixpeau délivrer sa sentence. Je me revois marcher vers ma nouvelle famille en sentant le regard de Sirius dans mon dos. C’était le dernier de sa part, le dernier qu’il a posé sur moi. Le premier jour de mon arrivée à Poudlard, il m’a tué. Je n’étais alors plus rien pour lui, j’étais mort. Soit. J’ai fini par en tirer mon parti. J’ai joué ma dernière carte, mon ultime chance, en te posant cette question : Suis-je vraiment mort à ses yeux, McKinnon ? Tu as réduit tous mes espoirs à néant. Je ne t’en veux pas, tu as simplement eu le mauvais rôle du messager funeste. Cruelle, tu as laissé un sourire fleurir sur tes lèvres. Qu’est-ce que je croyais ? Est-ce que j’avais seulement la moindre idée de ce que faisait les personnes avec lesquelles je passais l’essentiel de mes journées ? Je n’ai rien répondu. Le silence a toujours été ma meilleure arme. Ton sourire s’est éteint et tu t’es transformée en brasier. Devant ta hargne, j’ai baissé les yeux et tu as eu le temps d’apercevoir ma faiblesse. Une fraction de seconde. Le temps d’un battement de cils où le soleil a compris ce qu’endurait la lune toutes les nuits. L’obscurité qui la hantait. Tu as soupiré, et tu m’as finalement souhaité une bonne journée. Tu t’en souviens ? Tu te souviens de l’air perdu que j’ai dû arborer ? Je ne saurais jamais ce que tu en as pensé de ton côté, mais tu es revenue le jour suivant. Tu t’es assise face à moi, et tu as ouvert un livre. Tu as renouvelé l’expérience tous les jours, jusqu’à ce que cela devienne un rituel. Je n’ai pas su te repousser.

C’était devenu notre petit secret.

Je n’ai pas besoin d’écrire la suite de cette histoire. Tu la connais aussi bien que moi, même si tu ne liras pas cette lettre. Nous ne parlions pas beaucoup, pas vraiment. Et nous ne nous attardions pas sur un terrain trop personnel. Peut-être que c’est justement cela qui nous a permis de nous rapprocher sans le vouloir. Peut-être que le soleil est bien trop séduisant pour que je lui résiste longtemps. Peut-être aussi que tu avais une part d’ombre, Marlene. Peut-être. Je n’en sais rien. Toujours est-il qu’un jour, sans un mot, tu as posé tes lèvres sur les miennes, et l’univers s’est effondré. Nous n’avions aucune chance d’en réchapper.

Nous n’avions aucun avenir.

Le mien est aux côtés de ma famille, et de ce qu’ils exigent de moi. Je ne peux me résoudre à renier mon honneur et ma loyauté envers ceux qui m’ont élevé, envers les préceptes qu’ils m’ont enseignés. Je dois retourner dans l’ombre, malgré mon amour pour toi. J’ai mis fin à notre relation en sachant que, d’une manière ou d’une autre, je finirais par te perdre pour de bon.

Alors, dis-moi Marlene, pourquoi est-ce que je me sens si peu moi-même en terminant cette lettre ?
Pourquoi est-ce que cette décision est la plus difficile que j’ai dû prendre au cours de ma vie ?

Il s’agit du destin qui m’incombe. C’est aussi simple et compliqué que cela. Je n’ai pas le choix. Je ne peux pas retourner en arrière. Bientôt, je porterai la marque. Bientôt, mon amour sera détruit par la guerre. Et il n’en restera que des cendres. Pourtant, si je souhaite une seule chose, c’est que tu survives.

Je veux que tu sois heureuse, Marlene.
Que le soleil resplendisse.

R.A.B »


James replia délicatement la lettre. Ses doigts tremblaient. Il connaissait l’expéditeur du message. Son père en avait souvent parlé lors des réunions de famille. Il lui avait conté l’histoire de ce jeune mangemort et du faux médaillon. Harry Potter le conservait encore dans l’une de ces vitrines où il exposait fièrement ses trésors et sa gloire. Comme un rappel constant du passé. Ce passé qui venait, une fois de plus, de lui éclater en pleine figure sous la forme d’une lettre. Un parchemin portant le nom de Regulus Black. Ce héros méconnu qui n’avait finalement jamais retrouvé la lumière, et qui était mort dans l’ombre. Sans jamais être véritablement lui-même.

Le jeune homme étira un sourire sur ses lèvres alors qu’il replaçait la lettre dans la boîte en fer. Il referma celle-ci à l’aide d’un sort et la remit méticuleusement à l’endroit où il l’avait trouvé. Il resta ensuite quelques minutes devant le placard, dans un silence serein.

« Merci » murmura-t-il.

James avait pris conscience qu’il devait prendre son destin en main, et ne plus jamais être celui que son père aurait voulu qu’il soit. Il devait être, tout simplement. Pour ne rien regretter et ne pas mourir dans l’ombre. Sans avoir véritablement vécu. Sans avoir réalisé ses propres rêves plutôt que ceux des autres. Il devait tracer son chemin sans se le laisser dicter une seule seconde, et sans vouloir ressembler à quelqu’un d’autre. Quelqu’un d’autre que lui-même.

Finalement, grâce aux mots de Regulus et à son histoire, celui qui avait hérité du prénom de Sirius put faire un choix crucial pour le reste de son existence. Le fils modèle, le Serpentard ayant toujours vécu dans l’ombre, avait trouvé un écho en l’adolescent rebelle, le Gryffondor ébloui par la lumière.

Comme si le temps et l’espace s’étaient mis d’accord pour réparer leurs erreurs…

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