Partir. Me jeter à corps perdu dans le monde extérieur. M’y abandonner. Quitter ceux que j’aime, ma famille. Ce lieu si rassurant qu’est ma chambre. Que fut ma chambre, maintenant. Au passé.
Faire un pas au dehors. Déterminée. Et avancer. Toujours plus loin.
Mon regard survole l’ensemble de ma chambre. A chaque objet est attaché un souvenir, voire plusieurs. Je déglutis. Ma gorge se serre. Et pourtant, au fond de moi, je sais que je n’ai pas le choix. Mais j’ai peur, peur ! Ma respiration se fait haletante. Ma gorge est toujours plus serrée, presque à m’en faire mal.
Mon lit en est la pièce principale. Je passe une main tremblante sur la couette étirée. Sur ce matelas dans lequel plus aucune silhouette n’est imprimée. Sur cet oreiller qui a recueilli tant de larmes, qui a étouffé tant de rires, vide de sens désormais.
Je dois partir, je le sais, et je ne m’en sens pas le courage.
Au dessus de mon lit, mes parents me font signe, sur les photographies. Je les regarde en retenant un sanglot. Oubliée, bientôt. Je ne serai qu’une chimère. Pourquoi, voudrais-je hurler, pourquoi est-ce si dur ?
Mais je sais que je n’ai pas le choix.
Soudain, je détourne le regard. Je me force à relever la tête. Je dois être forte. Presque malgré moi, je place un pied devant l’autre, et j’avance dans le couloir.
En haut de la mezzanine, je les observe, tous les deux. Ils ne se doutent de rien. Ils ignorent que dans quelques instants, ils n’auront plus d’enfant. Et que je serai morte, à leurs yeux. Morte ? Inexistante serait plus exact.
J’attrape ma baguette d’un geste sec en descendant les escaliers. Les regarde une dernière fois. Et, avant de perdre courage, efface tout souvenir de ma personne, de leur fille.