Du haut des pays bleus by PititeCitrouille
Summary:

Citation extraite de "La Lune offensée" des Fleurs du Mal de Charles Baudelaire, mon poète préféré.

Recueil de textes écrits lors des Nuits HPF, publiés dans l'ordre chronologique d'écriture - je conseillerais donc de commencer par la fin. Les textes sont classés par personnages et thèmes sur mon profil.

Les warnings viennent de l'importance accordée à la santé mentale, mais il serait réducteur de dire que je ne parle que de ça. Il y a du pas doux, du très doux et du moins doux, comme partout.

Dernier texte paru :

n°36 : Lorsqu'il est interdit de rêver, alors rêver devient politique.


Categories: Tranches de vie Characters: Famille Black, Famille Potter, Famille Weasley
Genres: Amitié, Famille, Guerre
Langue: Français
Warnings: Conduites addictives, Suicide, Violence psychologique
Challenges: Aucun
Series: Les Nuits d'HPF, Les Soliflores
Chapters: 36 Completed: Oui Word count: 32031 Read: 16590 Published: 25/09/2022 Updated: 26/09/2024
Story Notes:

Certains textes se veulent graves et d'autres légers, certains sont accessibles à tous et d'autres sont un peu plus compliqués...

Comme la vie quoi.

Bon, et comme c'est les Nuits et que j'ai fait le choix de ne pas retoucher, il y en a aussi qui sont bancaux. Ah, comme la vie aussi, non ?

Bonne lecture ♥

Piti

1. 1. Marche ou crève by PititeCitrouille

2. 2. Au nom du frère by PititeCitrouille

3. 3. Les raisons de la colère by PititeCitrouille

4. 4. La guerre du chocolat est déclarée by PititeCitrouille

5. 5. A la vie, à la mort by PititeCitrouille

6. 6. Dolor, doloris, m by PititeCitrouille

7. 7. Amitié brisée by PititeCitrouille

8. 8. Le test du mouton by PititeCitrouille

9. 9. Toujours soeurs by PititeCitrouille

10. 10. La norme fait le héros by PititeCitrouille

11. 11. Lacrimosa by PititeCitrouille

12. 12. Circle of the Gremlins who are Tired by PititeCitrouille

13. 13. Calme flocon by PititeCitrouille

14. 14. November Rain by PititeCitrouille

15. 15. La Danse de la compagne errante by PititeCitrouille

16. 16. La Reine des Dryades by PititeCitrouille

17. 17. Nuit de Lune by PititeCitrouille

18. 18. Inhibition sélective by PititeCitrouille

19. 19. Le Soleil se lève et rien n'a changé depuis hier by PititeCitrouille

20. 20. Eclosion by PititeCitrouille

21. 21. Je m'appelle Pétunia by PititeCitrouille

22. 22. Autre chose by PititeCitrouille

23. 23. Des chiffres, rien que des chiffres by PititeCitrouille

24. 24. Leçon de tricot by PititeCitrouille

25. 25. Partie de plage by PititeCitrouille

26. 26. Le moment parfait by PititeCitrouille

27. 27. Le Gryffon et le Serpent by PititeCitrouille

28. 28. Intello by PititeCitrouille

29. 29. Il faut bien quelqu'un pour tenir l'échelle by PititeCitrouille

30. 30. Faut vérifier, Fred, non mais la honte, quoi by PititeCitrouille

31. 31. Cryptophasie by PititeCitrouille

32. 32. Douche froide by PititeCitrouille

33. 33. Verre brisée, vie biaisée by PititeCitrouille

34. 34. Drag ! by PititeCitrouille

35. 35. Modern poetry by PititeCitrouille

36. 36. L'ode aux fleurs by PititeCitrouille

1. Marche ou crève by PititeCitrouille
Author's Notes:

CW - endométriose

Nuit insolite du 24 septembre 2022, thème scénaristique : votre personnage marche pendant toute l'histoire.

 

 

Narcissa se demandait si sa belle-mère ne cherchait pas à la faire souffrir de la façon la plus sournoise qui soit. Il était évident qu’elle savait que sa bru était atteinte d’un « léger mal » qui allait probablement l’empêcher d’engendrer un héritier.

C’était ce que sa propre mère avait dit lors de la signature du contrat, qu’on avait évidemment faite à huis-clos au Ministère – pas question de laisser les autres fouiner dans les comptes et les arrangements, et puis il y aurait la cérémonie publique pour briller. Mais la jeune mariée n’avait pas déjà assez souffert, non ! Les Malefoy avaient entrepris de lui faire visiter dès le lendemain l’intégralité du château, de son jardin et de ses dépendances.

Narcissa marchait, affichant un air hautain, approuvant d’un ou deux mots un commentaire quelconque de sa belle-mère, le cerveau entièrement tourné vers la principale action de son après-midi. Et, bien qu’elle soit au demeurant heureuse d’avoir épousé Lucius, rien ne l’intéressait présentement dans cette présentation. Elle n’avait pas assez de concentration pour écouter, voir, apprécier, parler, et marcher. Marcher était de fait la principale action de son après-midi, aussi incongru que cela puisse paraître pour une jeune femme de dix-huit ans.

Marcher.

Un pas en avant, ne le fais pas trop grand pour ne pas trop tirer dans le pubis, avance, expire. Tiens-toi droite, relâche le ventre quand elle ne te voit pas, une douleur pointe, serre les dents, plie un peu la jambe, allez, continue.

Marche.

Marche.

MARCHE.

Que ton bas-ventre pèse une tonne, que ton sang épais déborde de ta protection, que la douleur irradie sur le pubis, se pique au niveau des ovaires, s’étende jusque dans le dos, descende le long de tes jambes jusque derrière tes genoux, que tous les muscles de ton dos soient raides à en être endoloris pour espérer contrecarrer les convulsions… quoi qu’il advienne, marche, marche, MARCHE.

Ta douleur ne compte pas et ne comptera jamais. Allons voir la fontaine du parc ? Bien sûr. Revenons en passant par le jardin des simples ? Quelle agréable proposition. Voulez-vous voir nos appartements avant les vôtres ? Je vous en sais gré.

Narcissa n’est plus qu’une automate dressée dans l’unique but de marcher. Elle ne sait pas ce qu’elle répond, c’est son éducation rigide, austère et dénuée de compassion qui répond pour elle. Elle ne sait pas si elle est élégante, c’est son éducation rigide, austère et dénuée de compassion qui la rend élégante. Elle ne sait pas si elle respecte le protocole, c’est son éducation rigide, austère et dénuée de compassion qui lui fait respecter le protocole.

Et Narcissa a dû apprendre toute seule à marcher. Pour les autres, être une jeune fille de bonne famille est un apprentissage à plein temps. Pour Narcissa, c’est une couverture, un rôle, qui lui permet de masquer parfaitement à tous ce dont elle a honte. La chose de la vie qui a été la plus dure à apprendre pour elle, ce n’est pas de marcher de façon droite, gracieuse, mesurée. C’est de marcher de cette façon avec des palpitations de douleurs lancinantes dans le ventre.

Alors, quand elle entre enfin dans sa chambre, elle en pleurerait presque de soulagement – oh il ne sera que de courte durée, de toute façon. Bientôt, ce sera de rester allongée qui lui demandera de la concentration.

Ces derniers pas lui semblent d’une longueur interminable. Elle doit marcher jusqu’à la première fenêtre, puis la seconde, puis la troisième, comme si chacune d’elle ouvrait sur un paysage différent, mais non, il faut marcher, c’est la dédication de cet après-midi, tout est prétexte à marcher.

Et alors qu’elle raccompagne sa belle-mère jusque vers la porte, les pieds de plus en plus lourds et traînants, cette dernière lui dit que le souper sera servi à dix-huit heures trente et qu’elle est attendue dans la salle de réception de l’appartement des parents Malefoy, à l’autre bout du manoir.

Elle n’a pas refermé la porte après un échange courtois de politesses, que l’horloge sonne.

Il est dix-huit heures.

Narcissa sent que trente minute ne seront pas de trop pour enchaîner escaliers et couloirs jusque là-bas, et ce d’autant plus qu’elle n’a pas vraiment fait l’effort d’apprendre le chemin.

Alors, elle soupire, réouvre la porte, et se jette dans la bataille contre son supplice.

Marcher quand on est en phase d’inflammation d’une endométriose.

 

End Notes:

Heureusement que l'humain est bipède.

Plus sérieusement, le personnage de Narcissa tel que je me l'imagine est effectivement atteint d'une forme sévère d'endométriose. Le texte est écrit de son point de vue ; il est donc évident qu'avec le genre d'éducation qu'elle a reçue, elle ne peut qu'avoir honte et se lamenter des difficultés à concevoir un enfant.

Ce ne sont pas mes idées : si vous avez cette maladie, je suis de tout coeur avec vous, et je respecte vos choix, quels qu'ils soient. Il n'y a pas d'obligation à avoir un enfant, pas d'obligation à se résigner à ne pas avoir d'enfant, on peut décider de donner le change ou de ne pas le donner, on peut décider de mener une vie la plus ordinaire possible ou non, on peut trouver que ce que pensent les autres relève de la pression sociale ou non, bref, son corps, ses choix.

Dans la limite où on n'a pas choisi de souffir comme ça évidemment. 

 

Comme dans la société moldue où on ignore ou minimise la douleur des femmes, c'est la même chose côté sorcier. Donc, il n'existe ni potion ni sortilège contre la douleur, puisqu'on ne peut pas créer des antidotes à quelque chose qui n'existe pas, pas vrai ? Ou alors seulement "un peu", donc on crée des remèdes "un peu" efficaces.

Soupir.

2. Au nom du frère by PititeCitrouille
Author's Notes:

CW - un peu de lime et mentions de dépression et de deuil

Nuit insolite du 24 septembre 2022, thème scénristique : votre personnage trahit un ami proche.

 

George se trouvait lui-même malsain. Il se dégoûtait de lui-même.

Bien sûr qu’il aimait bien Angelina, qu’ils s’entendaient bien tous les deux. Après le décès de Fred, elle et lui avaient suivi une thérapie, pas pour les mêmes raisons, et pas avec la même fréquence. Il n’existe pas de gradation dans l’amour, bien sûr. Mais on ne peut pas comparer un amour d’adolescence avec ce lien si fort qui unissait Fred et George.

Néanmoins, comme George avait passé un temps absolument conséquent dans le service de psychiatrie de Sainte-Mangouste, il avait bien fini par la croiser alors qu’elle se rendait à une séance.

Leur relation était fondée sur la perte commune d’un être cher. Angelina ne cherchait pas à combler l’absence de Fred ; elle avait même fini par aimer George très sincèrement. Son amour était seulement différent, pour Fred, c’était une passion vive, pour George, c’était quelque chose de certes moins intense, mais de plus grave, peut-être même plus profond.

George, lui, était tombé amoureux d’elle parce qu’elle avait été la seule qui n’avait pas peur d’évoquer Fred devant lui. Elle ne le regardait pas craintivement quand il rentrait dans une pièce, ne murmurait pas avec les autres quand il en sortait, ne lui assénait pas des phrases inutiles comme « il ne reviendra pas » mais ne sombrait pas dans la dévotion non plus.

En fin de compte, personne d’autre n’avait suivi de thérapie et George pensait en son for intérieur qu’ils en auraient tous eu bien besoin, et pas que parce que Fred avait été tué. Angelina n’était pas empesée, compassée dans ses sentiments, elle avait admis qu’elle avait besoin de se faire aider, et George trouvait que c’était très honnête de sa part.

Au début, ils s’étaient inscrits à pas mal d’ateliers ensemble, poterie, peinture sur verre, sortilèges colorés, potions et confettis. Ensuite, quand George avait pu redevenir plus indépendant, ils étaient allés voler, s’étaient rendus à des matchs de Quidditch, elle lui parlait de ses études et lui, qui retrouvait peu à peu goût à la vie, inventait de nouvelles farces et attrapes. Alors, de fil en l’aiguille, ils s’étaient tenus la main, s’étaient embrassés, s’étaient excusés, puis avaient recommencé, malgré tout.

Ce n’est pas parce qu’on est au fond du trou que la vie s’arrête, et on ne choisit pas de qui on tombe amoureux.

Mais, ce soir-là, George et Angelina s’étaient rendus dans un cinéma Moldu, et puis ils avaient mangé une pizza. C’était bon de s’éloigner un peu de la magie parfois. Ca la rendait plus… magique. Ils avaient longuement papoté, et puis Angelina devait rentrer chez elle, c’est-à-dire dans son studio de la banlieue londonienne.

Mais ni elle ni George n’avaient eu envie qu’elle parte, et tous deux avaient fait passer le temps, si bien que les bus ne circulaient plus. Puis, il fut exclu pour elle de prendre le Magicobus – elle rendrait son repas, c’était sûr, et ils étaient tous les deux extrêmement d’accord sur ce point, c’était très risqué.

Alors, ils s’étaient rendus dans l’appartement que George louait juste au-dessus de son magasin. Il avait transformé le canapé en un lit confortable, un t-shirt et un pantalon à lui en un pyjama à sa taille, prêté une serviette de bains. Mais aucun des deux n’avait voulu aller se coucher. Ils avaient discuté encore et encore, longuement, se rapprochant peu à peu. Comme il n’y avait plus de canapé, George s’était assis par terre, puis au bout du lit, puis à côté d’Angelina, et puis…

Et puis il ne saurait trop comment expliquer comme ceci advint, mais ils s’étaient embrassés et enlacés, et pris dans cette sensation enivrante du désir, ils avaient fini par se donner l’un à l’autre. Sur l’instant, ni l’un ni l’autre ne pensa à Fred, ce qui n’est pas égoïste, et même je dois dire que c’était une bonne chose, ils arrivaient à avancer sans cette béquille terrible qui leur manquait si souvent.

George se réveilla au beau milieu de la nuit, le cœur palpitant, transpirant sous l’effet de l’angoisse. Au début, il se demanda où il était, et puis il vit Angelina étendue sereinement à ses côtés, et se rappela qu’il n’était pas dans sa chambre mais dans son canapé transformé en lit dans son salon, lit sur lequel Angelina et lui avaient fait l’amour quelques heures auparavant.

Et George se rappela aussi et soudainement qu’avant, quand Angelina passait dans l’appartement, elle allait dans la chambre de Fred pour dormir, et qu’évidemment ils ne faisaient pas que dormir, et que les deux tourtereaux filaient le parfait amour, et que…

George fut pris d’une envie urgente de vomir et se précipita dans les toilettes.

Essoufflé, il se redressa et se rinça la bouche à l’évier. Dans le miroir, son reflet le narguait. Prends Fred et ôte-lui une oreille, c’est la même gueule, avait dit un jour ce connard de Ron à il ne savait plus quel fournisseur d’ingrédients de potions, qui avait dû croiser Fred une fois, probablement.

Ca y est, la colère revenait, la culpabilité revenait, et elles charriaient des idées grises et des idées noires et des idées sombres de nuit et de douleur et de mort.

Tant de thérapie pour se refaire du mal en couchant avec la fille avec laquelle il ne fallait pas coucher, persiffla la voix intérieure de George, désagréable.

« Tais-toi ! hurla-t-il, en se donnant une gifle. »

Puis, il s’effondra sur le sol, en se mordant les poings pour sentir que sa rage et sa tristesse sortaient à l’extérieur de lui – en vain. Et derrière le rideau de larmes qui ruisselait, il vit les deux jambes d’Angelina, probablement réveillée par ses conneries, quel abruti.

« George, murmura-t-elle, d’une voix étranglée par les sanglots, en se penchant vers lui et en tentant tendrement de l’empêcher de se faire du mal, George, je suis là, avec toi. Si tu as besoin de quelqu’un, de quelque chose, je peux appeler quelqu’un, je peux t’emmener quelque part, je peux partir si tu veux, je peux ne plus jamais te revoir si tu le souhaites, mais je t’en prie ne fais pas de bêtises.

— Angelina, je suis un monstre. »

Et il vit à son air doux et compréhensif qu’elle était disposée à le laisser vider son sac. Voilà, elle n’allait pas dire cette phrase creuse et vide de sens « non George, tu n’es pas un monstre » que n’importe qui aurait dite et qui n’aurait strictement rien changé au problème. C’était exactement pour ça qu’il était tombé amoureux d’elle.

« J’ai trahi Fred, tu te rends compte ? Putain, Fred… »

Et il éclata tout d’un coup en sanglots.

Angelina le prit dans ses bras, évaluant d’abord s’il acceptait un contact physique avant d’y aller plus franchement, et lui caressa longuement le dos, le temps qu’il assèche ses larmes et se calme. Quand elle sentit que sa respiration se faisait à nouveau mesurée, elle affirma :

« George, tu n’as trahi personne car tu n’as jamais rien promis à Fred sur ce qu’il se passerait dans ta vie sentimentale. Tu n’as pas piqué sa copine, et même tu n’as piqué la copine de personne puisque, la première fois que nous nous sommes embrassés, j’étais célibataire. Et même, si tu cherches la petite bête et que tu tiens absolument à ce que quelqu’un ait trahi Fred, c’est moi. Normalement, quand on change de petit copain avant de mettre au courant la personne avec qui on est engagé, si on est engagée, ça veut bien dire qu’on la trahit, non ?

— Je ne comprends pas. »

Angelina sourit faiblement.

« J’étais célibataire mais techniquement engagée auprès de Fred puisqu’étant décédé alors qu’il était mon copain, il ne saura jamais que je ne suis plus sa petite amie. »

C’était jouer sur les mots, peut-être. Mais il n’y a rien de niais à dire à quelqu’un qui souffre quand ça lui permet de construire quelque chose.

George et Angelina mirent un certain temps et eurent encore besoin de thérapie pour assumer et afficher leur relation, et George changea d’appartement. Débarrasser la chambre de Fred ne fut pas une épreuve aussi insurmontable qu’il l’aurait pensé. Ils le firent ensemble, lui et Angelina.

Toutefois, George crut être un traître à son frère encore très longtemps, si longtemps qu’il se sentit obligé de prénommer son premiers fils Fred, pour intégrer ce nom dans la famille d’Angelina.  

 

 

End Notes:

En vérité,le dernier paragraphe ne me satisfait pas totalement, mais je n'arrivais pas à conclure, et je me suis décidée à ne pas retoucher les textes pour les publier. Ainsi je reste vraiment sur ce qui a été écrit sous les diverses contraintes (durée d'écriture, thèmes, et je dirais même heure à laquelle le texte est écrit).

En fait, je la trouve un peu maladroite, voire pas forcément cohérente avec ce qui est développé au cours de l'histoire. Qu'en pensez-vous ?

3. Les raisons de la colère by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit insolite du 24 septembre 2022, thème scénaristique : votre personnage est en colère (comment ça j'ai du mal avec les thèmes stylistiques ?).

Je dois souligner aussi que le thème général de la soirée était "le Royaume-Uni", et qu'en fin de compte, c'est le seul texte que j'ai écrit qui le respectait vraiment, puisque la mobilisation des mineurs en Angleterre dans les années 1970-1980, c'est vraiment un fait politique marquant de l'histoire anglaise moderne.

Titre issu d'un jeu de mots douteux sur la traduction française d'un titre d'un roman de John Steinbeck (The Grapes of Wrath ie Les Raisins de la colère).

 

C’était toujours comme ça les soirs de grève.

Bien sûr, ils savaient tous qu’ils allaient perdre de l’argent, mais ils faisaient tous corps. Il n’y a que quand ils criaient tous ensemble, qu’ils occupaient l’espace physique et sonore, qu’ils avaient l’impression de pouvoir peut-être changer quelque chose.

Ils s’étaient préparés, avaient distribué des tracts, avaient décidé du jour, des modalités, avaient désigné ceux qui iraient parler aux patrons, et ceux qui répondraient aux questions du journal local. Certains avaient préparé des affiches, des bannières. L’action avait été menée conjointement avec les ouvriers de la ville d’à côté, qui allaient arrêter leur production de toiles en même temps qu’eux fermeraient la mine. Ils espéraient être entendus, tous.

L’inflation battait des records ; or, les conditions de vie des mineurs n’avaient jamais vraiment été enviables. Alors, quand même les prix de la pomme de terre et du pain explosèrent, les salaires ne compensèrent pas et les portions dans les assiettes se firent plus réduites. Certaines usines fermaient, licenciant à tour de bras – une main d’œuvre plus économique et moins revendicatrice les attendait ailleurs. A Cokeworth, les chômeurs les plus précaires s’entassaient dans les tristes baraques du quartier des Tisserands.

C’était le cauchemar de Ginger et Violet que d’envisager qu’un jour ils dussent suivre la même voie, pas tant pour eux-mêmes que pour leurs filles. Oui, ils avaient peur, qu’elles tombent enceinte à quinze ans, qu’elles vendent leur corps pour acheter leur pitance, et qu’elles tombent dans l’indifférence la plus totale du reste du corps social.

De ces angoisses naissaient un douloureux mélange de résignation et de colère. Et parfois, il arrivait que la colère l’emporte et qu’on décidât de faire la grève.

Il fallait se lever tôt le matin pour se poster devant les entrées des usines et des mines, occuper les routes, arpenter les places publiques, avec organisation et méthode. Il y avait malgré tout un sentiment grisant, celui d’appartenir à cette classe fière et unie, et alors, il y avait de l’espoir et même un peu de joie, de cette joie triste et amère qui advient quand un rayon de soleil touche une terre nue et désolée.

La journée permettait d’évacuer le trop-plein de non-dits, de se sentir avec les autres en lutte, de ramener de la dignité là où d’autres ne font que compter les bras, et de redresser le torse en hurlant son existence et son droit à exister.

Mais le soir, à l’heure des comptes, ils étaient soudain assaillis d’un doute terrible, celui d’avoir tout perdu, une journée de salaire, leur voix dans le vent, leurs poumons par la poussière de la mine. Le patron avait bien discuté de longues heures avec les délégués, mais à leur air sombre en sortant de là, ils n’avaient pas besoin de leur demander ce qui s’était passé.

Puisqu’il ne s’était rien passé de concret, finalement, lors de cette discussion.

« Dix livres par mois ».

Ils étaient abattus.

Lily et Pétunia faisaient encore sagement leurs devoirs quand ils rentraient, et malgré le jeune âge des deux fillettes, leur air grave et sérieux indiquait qu’elles se préoccupaient déjà – trop tôt – des motifs d’inquiétude de leurs parents. Quand ils refermaient la porte, elles se précipitaient vers eux, avides de nouvelles, comme s’il y avait quelque chose à raconter.

Mais il n’y avait rien à raconter.

Violet prenait sur elle et leur réchauffait la soupe, leur donnait un morceau de pain, et les accompagnait au lit.

« Je te sers, Ginger ?

— Non Violet, je n’ai pas faim, répondit-il en soupirant bruyamment, avec un geste de profonde lassitude de sa main droite. »

Il s’asseyait sur le vieux canapé contre la fenêtre, regardait ses petites manger silencieusement, la gorge nouée. Il sentait l’air froid couler contre ses épaules et l’humidité s’infiltrer jusque dans ses os. Alors, il secouait la tête, dépité, dégoûté. Et de ses yeux brillants coulaient des larmes silencieuses qu’il ne prenait même pas la peine d’essuyer.

Un soir, Lily, qui était un peu plus curieuse que Pétunia, se leva à pas de loups quelques minutes après que leur mère fut redescendue dans la cuisine, et ouvrit silencieusement la porte.

« Lilou, qu’est-ce que tu fais ?

— Chut, Tunie, chuchota-t-elle, mettant un doigt sur sa bouche pour lui intimer le silence. »

Un rai de lumière filtra contre le mur, et Pétunia grommela.

« Chuis fatiguéééée, il fait froid, revieeennnns. Si on se met l’une contre l’autre, on va réussir à bien dormir.

— Attends, répondit Lily, agacée, et elle s’avança un peu. »

Pétunia, râlant mentalement, dégagea la couverture, frissonna, et la suivit. Elles s’assirent toutes les deux sur la dernière marche de l’escalier. Leurs parents murmuraient, car pour tout ce qu’ils en savaient, les fillettes étaient déjà au lit.

Violet, la bouche contractée, caressait le dos de son mari, qui avait la tête enfouie dans ses mains rouges et calleuses. Puis, elle s’agenouilla, les lui prit tendrement, et le regarda.

« Rendons nos alliances à la banque.

— Ca ne nous fera pas tenir l’hiver.

— Et vendons l’un des vélos des filles au ferrailleur. Elles se prêteront le restant à tour de rôle. »

Ginger retira vivement ses mains. Ses joues rosirent et la veine sur son front commença à palpiter. Il ne dit rien, se dirigea vers la porte d’entrée, enfonça son béret sur sa tête et annonça d’une voix étouffée, contenue :

« Je reviens. »

Avant que Violet ait pu s’avancer pour quémander une explication, il avait claqué la porte. Lui avait besoin de prendre l’air. Leur vélo, leur cahier et leur crayon, c’était tout ce que ses filles avaient. Et ses filles, c’était tout pour lui.

Il pouvait encore laisser passer que la misère s’abatte sur lui et sa femme. Après tout, la politique, c’était un conflit d’adultes. Mais qu’on y mêle des enfants de huit et six ans… C’était tout bonnement insupportable.

A l’intérieur de la froide maison, la femme et les deux filles entendirent les hurlements de rage d’un homme qui n’était plus que colère.  

 

 

End Notes:

Je pense que la communauté hpfienne est ouverte d'esprit, ce qui fait que je me permets de publier un texte à forte portée politique en espérant que seuls soient commentés le style, le respect des contraintes, etc., et pas les grèves en tant que telles. 

L'histoire d'Harry Potter est fondamentalement politique même si on la prend souvent sous l'angle de l'histoire d'une société de familles déchirées. Parler de précarité et de lutte sociales chez les Moldus me paraît presque naturel dans cette continuité, et je le fais d'ailleurs souvent dans la fic principale que j'écris en ce moment.

 

 

4. La guerre du chocolat est déclarée by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit insolite du 24 septembre 2022.

Thème scénaristique, le personnage doit contredir un ami sur un sujet sensible.

 

« Il a l’air très corsé, ton chocolat.

— Oui, en fait je fais fondre des carrés de chocolat de cuisine, je rajoute une ou deux cuillérées de lait, je touille, je rajoute une épice – cumin, cannelle, poivre, et voilà.

— C’est scandaleux !

— Comment ça, c’est scandaleux ? Comment tu fais, toi, Môssieur le chef étoilé Remus Lupin, grand manitou ès chocolaterie, hein ?

— Et bien je fais réchauffer d’abord un volume d’une tasse de lait, puis je mets deux cuillères de chocolat en poudre, Mary, tu m’entends, en poudre, et je touille jusqu’à obtenir un mélange onctueux. »

Mary haussa les épaules.

« C’est commun, ordinaire, usuel, vulgaire même.

— Le problème, Mary, c’est que le chocolat en poudre sert à être touillé dans des boissons, comme moi-même j’en fais le bon usage, tandis que le chocolat à pâtisserie, comme son nom l’indique, ne sert exclusivement qu’à la pâtisserie.

— Mais ce n’est que le résultat d’une norme, et à quoi sert une norme ?

— A répartir correctement les productions de produits chocolatés primaires et les consommations de produits chocolatés secondaires réalisés grâce aux produits chocolatés primaires susmentionnés.

— A être dépassée, Remus.

— Si une norme doit être systématiquement dépassé, est-ce que tu ne viens pas de définir une norme sur l’arbitrage d’une norme ?

— Regardez-le, s’écria Mary, en pointant du doigt Remus, regardez-le, ce garçon professe la mauvaise foi et a l’outrecuidance de me contredire sur la façon de préparer un chocolat chaud ! »

James et Peter assistaient, absolument hilares, à cette scène entre les deux amateurs de chocolat. Ils riaient à gorge déployée, des larmes aux yeux, les abdominaux douloureux, à en perdre haleine. Sur la table à laquelle ils étaient installés, quatre tasses, fumantes il y avait encore quelques minutes, narguaient leurs narines.

La porte du dortoir s’ouvrit sur Sirius et Marlene.

« Marlene, défends-moi ! Je suis ta petite amie !

— Contre quoi ou qui ?

— Remus Lupin ici présent ! Il prétend que son chocolat chaud est meilleur que le mien.

— Oh Remus, nous allons nous fâcher alors, prévint Marlene en mimant un air extrêmement grave. Pour que notre Mary nationale, si timide, crie aussi fort sans que Lily ou moi ne soit dans la même pièce qu’elle pour lui donner du courage, c’est que le tort est grand, et le dommage, conséquent.

— Excusez-moi de déranger vos palabres, fit Sirius, mais vos boissons refroidissent, ce qui faussera grandement les résultats de l’enquête gustative. 

— On n’a qu’à les réchauffer, proposa James en sortant sa baguette.

— SURTOUT PAS ! s’écrièrent Mary et Remus d’une même voix.

— Oula, pardon, fit James avec des gros yeux et en levant les mains en signe de défaite.

— Il n’existe en effet qu’une et une seule façon de réchauffer un chocolat refroidi, expliqua doctement Remus.

— Je suis d’accord, approuva vigoureusement Mary.

— Trois minutes sur feu doux en touillant légèrement.

— Mais ce n’est pas possible Remus ! Comment tu peux dire ça ? Il faut le faire sur feu vif puis doux, dans cet ordre.

— Et les voilà repartis, marmonna Sirius, en se passant la main sur le front. »

 

 

End Notes:

Quiconque ose me dire que le chocolat n'est pas un sujet sensible se verra impliqué de gré ou de force dans la guerre du chocolat.

Par souci de cohérence, il convient de noter que concernant la dissension entre Mary et Remus, je suis la Suisse.

5. A la vie, à la mort by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit Classique du 21 octobre, 21h, citation de Catherine II (Tasrine de Russie) :

Il est plus facile d'écrire sur une feuille de papier, qui supporte tout ; que sur la peau humaine, qui ne supporte rien.”

TW - évocation d'une tentative de suicide

 

 

Sirius, angoissé, jetait fréquemment des coups d’œil à la fenêtre, espérant voir à travers le feuillage des tilleuls un signe quelconque, qui pourrait, de près ou de loin, lui signifier l’arrivée imminente d’Euphémia. Quand il en avait marre de tourner en rond, il ouvrait à grand peine le battant de la fenêtre, dilaté par la chaleur, et s’asseyait sur le rebord pour fumer, une, deux, trois cigarettes. Et les heures brûlantes de l’après-midi passaient, une, deux, trois.

Un, deux, trois jours sans nouvelles…

Dans la torpeur du crépuscule, lorsque des raies de nuages bleues se fondent dans un ciel rose et métallique, il tendait l’oreille. Il ne percevait rien d’autre qu’un léger souffle annonciateur d’une nuit lourde, comme une chappe de plomb qui s’abat en silence pour clore un monde silencieux et languissant de fatigue moite. Une, deux, trois nuits de canicule.

Et alors, surgissant des ténèbres d’un minuit noir et clair, Euphémia avait illuminé de sa prestance et de sa bienveillance le carrelage bruyant et froid de l’atrium des Black. Ses yeux semblaient de ceux qui ont vu la mort sans pouvoir la toucher, et elle venait enfin apporter à Sirius la confirmation de la vie de James, ultime lumière qui évapora les doutes de Sirius.

« Walpurga, je vous le prends jusqu’à la rentrée de septembre.

— Comment osez-vous, Euphémia ? Vous n’avez déjà pas assez fait en corrompant votre fils, encore faut-il que vous corrompissiez le mien ? »

Et le regard d’Euphémia lui rappela, à elle, Walpurga, qu’elle vivait dans une maison de plomb et de silence et elle se mura dans ce silence de plomb. Seul Sirius, lorsqu’il était enfermé dans cette haute prison noire, avait la préférence de ses hurlements insultants, parce que d’un enfant à un parent le seul silence commun qui prévaut est celui qui fait tout taire, en rempart, à ce qui est au-dehors.

La liberté guida Sirius dans le petit havre de paix des Potter, château biscornu et moyenâgeux surplombant une campagne riche et dorée de blés et d’herbes.

L’aurore balaya d’un revers de Soleil la brume du matin et les souvenirs embrumés de doutes. Dans ces brumes d’il y a trois jours, Sirius avait cru voir la mort aussi.

« Il a tenté de mettre fin à ses jours. Il a eu, je ne sais pas, une fulgurance… Je ne sais pas comment il a fait pour te joindre si vite…

— Nous avons un miroir à double sens. »

Sirius sortit de sa poche cet instrument qui le liait, lui, à James, à la vie avant et à la mort maintenant, cet objet qui réfléchit les rayons de lumière et sonde les âmes en peine à la vitesse folle de trois fois dix puissance huit hésitations par minute. La dernière d’entre elles avait rencontré encore un grain de désir de vie dans le cœur de son ami. Tout était allé encore si vite et si lentement après, que Sirius n’avait pas été mis au courant de ce que James avait fini par voir au fond de ce miroir, la lumière aveuglante du ciel ou la sombre paix de la Terre ?

Et la vie de Sirius avait été de suspens en suspensions au ralenti depuis cette tentative de mort, accrochée à ce souffle de vie qu’il avait pu percevoir chez son ami, avec l’angoissante incertitude de ne pas savoir si c’était le dernier, ou non.

Et non.

« J’ai trouvé ça. Il nous a écrit, à Fleamont et moi. Je ne suis pas sûre qu’il voulait vraiment nous quitter. »

Euphémia égrène les feuillets sur la table, les mots de James prennent toute la place disponible sur la table, plus que ne l’avait jamais fait n’importe quel petit déjeuner. Ils envahissent l’espace de leur importance, c’est un cri de plume, un cri de cœur impossible à transcrire.

« Il voulait juste… partir un peu loin de tous ses problèmes. Il te racontera à la rentrée, il doit rester en soin, loin de ses problèmes justement – et donc de nous aussi. Quant à moi, je voulais tout simplement te remercier. »

Sirius avait bravé les insultes sonores de sa mère qui lardaient la pesanteur du manoir Black de leur acide rancœur. Il avait bravé l’interdiction de transplaner à son âge. Il avait appelé des adultes de confiance, ceux qui seront bientôt – il commence à le concevoir dans sa tête, à le vouloir de toutes ses forces – ses parents. Car lui aussi veut fuir loin des ses problèmes, mais ceci est une autre histoire.

Pour le moment, tout ce qui compte, plus que la reconnaissance d’Euphémia, c’est que sa vie fraternelle avec James continuera d’exister, plus que jamais. Une, deux, trois secondes pour se rendre compte de l’importance des mots qui aiment et des mots qui donnent confiance et des mots qui valorisent et des mots qui consolent. James s’était accordé ces quelques heures, une, deux, trois, pour adoucir ses doutes et ses peines dans un torrent de larmes et d’écriture, trace tangible qui avait maintenu son corps là.

Sirius tourne la tête, alourdie d’une, deux, trois nuits blanches et chaudes. Plus que son mal de crâne, ce qu’il dissimule, ce sont ses émotions bloquées au fond de sa gorge et de ses rétines. 

Un, deux, trois mois avant qu’il n’abîme sa peau dans ses propres malheurs, ne se souvienne lui aussi des mots en écriture dont la nécessité a sauvé celle de son meilleur ami, et ne quitte définitivement la maison noire. 

 

 

End Notes:

Si vous désirez en savoir plus sur cette histoire justement, comme j'essaie de garder une cohérence dans mon "univers", c'est quelque chose que je développe dans ma fic longue en ce moment.

Instant prévention : nous, humbles moldus, ne disposons pas de miroirs à double sens, mais nous avons souvent un téléphone, sur lequel nous pouvons composer le 3114, numéro national de prévention du suicide. Souffrant, aidant, en questionnement, en recherche d'infos, en désespoir, en ami, en voisin, en parent : ce numéro est fait pour vous. 20% des Français connaissent à un moment ou à un autre de leur vie un épisode dépressif : nous sommes tous concernés pour aider ceux qui souffrent.

Courage à tous <3

Pitite Citrouile

6. Dolor, doloris, m by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit Classique du 21 octobre, 23h, image.

L'image en question représente un tissu de tulle rose brodé de perles de même couleur, travaillé à la machine à coudre.

 

Pour l’Etudiant, cette année fut particulièrement insupportable. Perdu dans la grande masse devenue impersonnelle et uniforme des élèves, il devait se plier à un règlement absurde, un de ceux qui, en aliénant le corps pour des choses apparemment futiles, aliène en réalité l’esprit critique en profondeur. L’âme de l’Etudiant était rongée de l’intérieur par ces insinuations sournoises, ces semblants de bon sens, ces textes noirs d’hypocrisie et de subdivisions absconses et incompréhensibles.

Pour peu que l’Etudiant soit tout au moins particularisé par son appartenance à l’Armée de Dumbledore, cette année fut une année de lutte et de colère. Il fallait soutenir Harry, lâché jusque par le Ministère, par peur de devoir assumer politiquement le retour de Celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom, sans doute. Et ceci passait par braver les ordres déblatérés par la Grande Inquisitrice.

La Grande Inquisitrice, ah ! L’Etudiant aurait pu en écrire des poèmes sur elle, des roses mais pas des tendres, non ! Ce rose dégoulinant de mièvrerie, qui allait jusqu’à affecter ses poses, sa voix, ses petits toussotements agacés et la régularité de ses pas sur les dalles des couloirs. Ce rose teintait tout ce qu’elle touchait, sauf l’écusson des Serpentards.

Ce rose, c’était comme une peinture au plomb, une couche toxique qui s’infiltre là où se trouvent les fissures, les doutes. La Grande Inquisitrice savait comment y faire ; ses manières soigneusement étudiées ne servaient qu’à la rendre plus distante, moins atteignable. Et derrière sa forteresse rose gardée par des chats et adoubée par les plus hautes autorités, elle lançait soigneusement ses flèches.

Elle blessait en perçant les âmes et les chairs de ses petits aiguillons lancés depuis son poste feutré. Elle tricotait son empire en piquant, à coups réguliers, ceux qui la contredisaient. Et sa cruauté s’étendait jusqu’à darder la peau de Harry jusqu’au sang, de cette pointe qui cherchait à lui faire mentir sa vérité sur les mensonges des autres.

Un constat amère pour l’Etudiante était que tout ce rose personnifiait cette femme, la précédait comme un prélat annonce l’arrivée de l’impératrice – de l’inquisitrice. C’était bien ça, au fond, le projet de cette grande inquisition : traquer les moindres idées progressistes pour les faire revenir au temps du Grand Tribunal de l’Inquisition, les faire juger par le tribunal arbitraire de la peur, celui qui, au lieu d’éclairer les faits par les lois de la justice, préfère les cacher sous les draps sombres et sales de l’obscurantisme. Ainsi, l’Etudiante, en tant que jeune fille, se sentait doublement visée par cette opprobre sur les soutiens de Harry et l’attribution du rose à la femme, à cause d’une femme, d’une tortionnaire.

Il fallut attendre le bout du bout de l’année – les examens ! pour que le calvaire s’arrête, ce que les vacances auraient tout aussi bien pu faire, du point de vue égoïste d’un élève qui rentre chez lui, content de passer à l’étape supérieure. En réalité, l’Etudiant et l’Etudiante savaient parfaitement que le calvaire s’était arrêté à cause de ce qui avait éclaté à la face du Ministère, un feu d’artifice rose parti en miettes qui avait révélé, en trame de fond, les machinations jusque dans le Ministère.

Ombrage n’avait pas eu le temps d’étrenner un premier cardigan rose bonbon à Poudlard à asséner perfidie sur perfidie, que Voldemort déclarait la Guerre au sein même du lieu où résidait son employeur. Même son départ, ce n’était qu’une hypocrisie ; elle sut bien se racheter, deux ans plus tard, auprès d’un nouvel employeur – dont, par pure affectation d’une coïncidence indépendante d’elle-même, elle avait tant nié l’existence.

Ce retournement de veste était peut-être plus douloureux qu’aucune aiguille qu’elle n’avait jamais lancé sur un Etudiant ou une Etudiante.

 

 

End Notes:

Sur une idée de BébéCitrouille, pseudo qui n'existe pas sur ce forum et c'est normal, c'est ma soeur <3

PititeCitrouille

7. Amitié brisée by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit classique du 19 novembre 2022, 20h, thème : image d'une salamandre brisée

Lily poussa une dernière fois son vélo contre le sable, et, enfin arrivée dans ce qu’elle appelait sa petite crique personnelle, soupira de soulagement. Elle était enfin loin, loin de sa sœur, loin de ses parents, loin des voisins, loin des problèmes. Surtout du problème, mais ce problème-là précisément, elle essayait de mettre un point d’honneur à ne surtout pas y penser.

Le temps était franchement maussade, si bien qu’elle ne savait plus si c’était à cause de la cheminée des hauts fourneaux, ou non, que de gros nuages gris s’amoncelaient au-dessus de Cokeworth. Le port commercial de la ville d’à-côté jetait son béton dans la mer et la rivière locale y déversait son eau boueuse et sale. Le paysage n’était pas vraiment idyllique. Même si c’était là qu’elle avait grandi, et que cette crique, courte et étroite, découverte bien avant Poudlard, bien avant que sa vie ne bascule finalement, représentait beaucoup pour elle, elle devait reconnaître que, l’âge passant, elle l’aimait de moins en moins.

Et beaucoup de choses avaient changé cette année encore une fois. Bien sûr, Pétunia était d’humeur exécrable, ses parents avaient abandonné toute forme de discussion à ce sujet, alors, ça n’aidait pas à se sentir attachée ici. Pas plus qu’elle ne se sentait vraiment attachée à Poudlard d’ailleurs, mais enfin, ceci venait d’une autre raison, à laquelle elle ne voulait définitivement pas penser.

Et pourtant, la voilà qui sort précautionneusement de sa besace un chaudron, un réchaud, quelques ustensiles, et des bocaux remplis d’ingrédients. Oui, quoi de mieux que de s’entraîner sur les potions de sixième année pour se détendre et fuir la réalité qui l’oppresse ? Lily adore faire ça. Elle adore réaliser le breuvage pour mieux le comprendre, écrire des lignes d’équations chimiques et aboutir aux propriétés magiques qui expliquent les raisons pour lesquelles on le prescrit. Ensuite, elle essaiera de trouver des formules équivalentes, et d’en améliorer la recette. Ce n’est pas une passion si étrange que ça. D’autres gens à Poudlard le font bien, mais elle ne veut pas y penser davantage.

Elle ouvre son manuel et le pose précautionneusement face à elle. Puis elle ajoute à son plan de travail sa balance, et, tâchant de se concentrer, marque du doigt sur la première page du premier chapitre le premier ingrédient.

Trois pelures de peau de salamandre brisée.

Ca commence bien. Elle n’est pas sûre d’avoir ça en réserve. Elle regarde son inventaire, et, effectivement, non, elle ne l’a pas. Et ce n’est pas demain, ni après-demain, qu’elle le trouvera : elle est allée une fois à Londres, au tout début des vacances, pour acheter le strict nécessaire des affaires scolaires de l’année prochaine. C’est souvent le meilleur moment pour croiser des élèves des promotions précédentes qui revendent leurs vieux livres, voire les donnent pour vite s’en débarrasser. Quant à l’encre et au parchemin, leur prix n’a pas encore subi l’augmentation qui accompagne souvent le début d’une hausse de la demande, vers la mi-août.

Lily n’a jamais dit à ses parents qu’elle n’en avait jamais assez pour tenir toute une année ; Mary et Marlene la dépannent toujours de bon cœur depuis qu’elles savent qu’elle appartient à la grande famille des mineurs anglais. Lily n’a jamais non plus acheté l’intégralité d’une liste d’affaires scolaires : toutes ses affaires de potion, par exemple, sont le fruit des cadeaux de Noël et d’anniversaire de Mary, Marlene et Remus. Ils lui offrent, en particulier, les ingrédients les plus courants, œufs de têtard, tubercules et queues d’orvet.

Pas de la peau de salamandre brisée.

Lily feuillette distraitement son manuel, puisqu’elle n’a plus que ça à faire, à moins de tenter une autre potion. Elle se rend bien vite compte que ce sera peine perdue : il y a un net saut de niveau entre les potions de cinquième et de sixième année. Tant pis, elle ne fera que la partie théorique et calculatoire, mais cette perspective lui serre le cœur. Qu’est-ce qu’elle va bien pouvoir faire, pendant deux mois, afin d’oublier d’une part de se préparer au maximum à Poudlard d’autre part ?

Marlene et Mary ne se posent pas autant de questions, mais Lily, parce que ses parents veulent à tout prix la faire sortir de ce misérable corps social auquel elle et Pétunia sont prédestinées, lui ont bien fait comprendre que la voix du salut, c’est l’école. Or, à l’école, on lui fait bien comprendre que son statut est inférieur à d’autres, et pas pour des raisons économiques cette fois-ci. Cependant, ce n’est pas là-dessus qu’elle veut se pencher aujourd’hui.

« Il te manque quelque chose ? »

Pourquoi maintenant ? Pourquoi ? Qu’est-ce qu’elle a fait pour mériter ça ? Bon, d’accord, il est au courant de l’existence de cette crique, c’est une des premières choses d’elle qu’elle lui a fièrement montré. Mais ce temps est fini, il l’a sommé lui-même.

« Tu me réponds ? »

Lily, butée, fait comme si elle n’avait pas entendu. Ca fait quand même du mal d’entendre le son de cette voix, et elle a de la fierté à revendre. Severus s’assied à côté d’elle, à distance respectable néanmoins, en tailleur. Il sort sa baguette et joue distraitement à dessiner des choses imaginaires dans le sable.

« Pour le premier filtre, tu n’as pas forcément besoin de peau de salamandre brisée. »

Il a piqué la curiosité de Lily, elle n’arrive pas à se contenir, bat de la paupière et baisse un peu la tête. Severus annone d’une voix sans âme le calcul que lui-même a fait et qui l’a conduit à trouver une formule optimisée pour cette potion. Un an auparavant, la situation était difficile, mais ils se parlaient encore et ils avaient encore passé un certain temps, dans cette crique, à jouer aux apprentis chimistes et s’amuser sur des sujets qui les passionnent.

C’est si dommage ; après tout, beaucoup de gens trouvent un brin étrange qu’on puisse trouver son compte de divertissement dans un manuel scolaire. Et cette curiosité et cette rigueur qui caractérisent Lily et Severus, c’était aussi un des fondements de leur belle mais désormais révolue amitié. Ils les ont emportées, chacun de leur côté.

Lily voudrait crier sur Severus de partir, de la laisser toute seule, mais elle ne peut s’empêcher de vouloir vérifier l’équation elle-même. De ce qu’elle a entendu, il y a une étape qu’elle n’a pas bien comprise. Ce qu’elle ne sait pas encore, c’est qu’il a dû faire une faute d’inattention et l’a traînée jusque dans le résultat final. Et ce qu’elle saura encore bien après, c’est qu’elle n’a pas assez confiance en elle et dans ses capacités magiques pour le corriger à la volée. Pourtant, quelle cynique coïncidence, c’est en partie de sa faute à lui, si elle se censure à chaque fois qu’elle pense vite, car elle a peur de penser trop vite, car elle d’origine Moldue. 

Elle jette un coup d’œil sur le côté ; Severus a tout de même sorti son manuel, écornant distraitement quelques pages. Il en a déjà griffonné les trois-quarts de son écriture serrée. Ensuite, Lily remarque qu’il a aussi décoré la page de garde. Prince de Sang-Mêlé. Ah bon ? Un délire de Mangemort, ça, non ? Pourquoi accorder de l’importance à son statut de sang ?

Et puis les pensées de Lily s’enchaînent très vite, parce ça lui rappelle que dans la grande échelle de la pureté de sang, elle est inférieure à lui, c’est lui-même qui le lui a dit devant, quoi, cinquante personnes ? Il a brisé beaucoup de choses ce jour-là. Pas qu’une amitié, non ! Plutôt deux destins. Il a fait son choix, elle le sien, très bien. Ca lui fait le même effet que si elle était rentrée maintenant en courant dans la mer.

« J’en ai rien à foutre de ce que tu peux penser de cette putain de peau de salamandre brisée, Sev’. T’as l’outrecuidance de d’abord penser par la pureté de sang : applique donc tes principes de merde, je suis trop inférieure à toi, dégage, je risque de t’abîmer. »

C’est grossier, mais ça fait du bien des fois, et puis au moins il est parti.

End Notes:

Comme toujours, la fin n'est probablement pas du tout du meilleur goût, mais je reste fidèle à mon idée de ne pas repasser sur un texte écrit pendant les Nuits.

8. Le test du mouton by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit du 19 novembre 2022, 21h, thème écrit : résilience.

J'explique en note de fin ce titre étrange.

CW - évocation de problèmes de santé mentale

HP = hôpital psychiatrique

 

Sirius a l’air d’aller beaucoup mieux quand même. Un mois dans une clinique psychiatrique, ce n’est pas rien, mais il fallait bien un début à tout et en particulier à sa nouvelle vie. Ses amis, de leur côté, ont eu le temps de faire le point entre eux. Quant aux autres élèves, ils se disent juste que Sirius a dû faire une énorme bêtise pour être exclu un mois de Poudlard – certes, c’était vraiment une énorme bêtise. Pour Remus, toutefois, c’est aussi une libération, parce que son secret est bien gardé, Severus ayant eu, malgré tout, une forme de justice à son encontre.

Ils sont bien, là, dans leur dortoir, tous les quatre, à discuter et refaire le monde, pour ce premier samedi soir à nouveau réunis.

« J’ai dit aux filles de passer, dit soudain Sirius. Après tout, c’est Lily qui a trouvé la solution, et puis je dois bien une explication à Marlou. Et comme Mary a dû récupérer des pots cassés du côté de Marlou, et de vous aussi, James et Remus, bon et bien, voilà, elles passeront bientôt, quoi. »

Non, Sirius n’est pas encore très loquace et précis quand il s’agit d’exposer ses sentiments et ses émotions.

« Je sais pas pourquoi tu dis ça, se plaint Peter. Elles ont rien en particulier de plus avec James et Remus, non ? On ne serait pas beaucoup mieux… juste tous les quatre ?

— N’aie pas peur, souffle Remus, on restera toujours les quatre Maraudeurs, quoi qu’il arrive. Mais ce que veut dire Sirius, c’est que lui ayant une affinité particulière avec Marlene, James avec Mary, moi avec Mary et Lily, que les trois filles sont particulièrement soudées et que Mary sort avec Marlene, et bien, tu vois que ces relations sont compliquées, et que donc les explications et les spéculations telles qu’ont dû être partagées, transmises, entre personnes inquiètes toutes pour la Sirius finalement, ont également dû être compliquées. Et maintenant que Sirius nous donne à tous moins de motifs d’inquiétude, il a envie aussi de partager ça avec les filles, dans la mesure aussi où Lily l’a beaucoup aidé.

— Oui, bon. »

La douceur et la sollicitude de Remus ont l’air de vraiment toucher Sirius, qui ne peut s’empêcher de sourire. Il leur fait à chacun un geste équivoque du bras. Un coup discret est frappé à la porte ; ce sont elles !

« Entrez ! s’exclame James.

— Tadaaaam ! s’écrie Marlene, un magazine de rock entre les mains. Sirius, je vais te faire découvrir un tout nouveau groupe, Téléphone ! Pour une nouvelle vie, c’est pas trop mal, non ? »

Ah, le rock, cette grande passion échevelée de Marlene et Sirius, écouteurs intrépides de nouveaux tubes et de vieux disques. Sirius vient lui faire un gros câlin, ça lui fait tout chaud au cœur que Marlene ait pensé à lui.

James et Peter se décalent pour leur faire de la place, et elles s’assoient toutes par terre. Mary reste bien silencieuse – c’est la grande timide du groupe, mais le simple fait qu’elle soit venue est, de ce point de vue, un grand signe, et son regard est éloquent. Elle n’a même pas trop l’air si mal à l’aise que ça, c’est dire. Sirius fait une très longue étreinte à Lily aussi, elle a été si importante au moment de la bascule.

Evidemment, ça va bien parce qu’au fond, ni Remus ni Severus n’ont été atteints physiquement et ça tenait quand même du miracle, si tant est que James qui fonce dans la Cabane Hurlante sous forme humaine un soir de pleine lune est un miracle. Peut-être bien que non, car après tout, il y a une différence entre la témérité stupide d’un adolescent en quête de sensations fortes et le courage immense qu’il a fallu à James pour descendre les escaliers, sortir dehors, courir dans le parc, sans revenir sur sa décision.

De voir tous ces gens qui ont tenu à lui et qui continuent à le faire rassure Sirius sur le fait qu’on peut choisir sa famille de cœur. Alors, il sort de sa poche un parchemin froissé, abîmé, gribouillé de mots raturés. Et il lit, un peu maladroitement, ces quelques mots soupesés précautionneusement depuis trois jours. C’est du Sirius tout craché, il y a un peu d’humour cynique, quelques blagues sur les filles, et beaucoup de bon cœur, de remerciements, de dévotion presque. Remus s’essuie subrepticement l’œil.

« Bah alors mon Lunard ? »

Et tandis que le Lunard en question saute au cou d’un Sirius qui ne s’y attendait pas, à ce que la barrière se rompt aussi vite après son retour, James joint ses deux mains sur sa bouche, un large sourire traversant de part en part son visage heureux, et fait un petit signe qui ressemble à un applaudissement silencieux.

Peter dit alors :

« Oh là là Sirius, quelle résilience tu as, c’est trop beau ! »

Sirius et Remus se retournent, l’un arborant un air très neutre, l’autre haussant un sourcil de manière circonspecte. Mary a relevé la tête, et le sourire de James se crispe légèrement tandis que ses yeux s’écarquillent. Lily pouffe dans son coin, la bouche fourrée dans son poignet. Peter sent bien que l’atmosphère a changé.

« Quoi, j’ai dit un truc ? Pourquoi tu rigoles, Lily ?

— Parce que le concept de résilience, c’est tout nul. Rien à en tirer mon gars, rien, explique Sirius.

— Ah bon ? On en parle quand même pas mal non ?

— Ah, tu verras quand la guerre sera finie, on parlera de résilience à tort ou à travers car ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort et autres poncifs du même tonneau.

— Moi je trouve ça très juste.

— Moi je trouve ça très faux, répond Sirius sur le même ton. A ce que je sache, tu n’es jamais entré dans un HP, donc… »

Peter se renfrogne.

« Bah alors, c’est quoi la résilience ?

— C’est une propriété d’un matériau à absorber ou non l’énergie d’un choc qui se produit sur lui, en se déformant ou non. C’est très lié aux propriétés d’élasticité et dureté, et on quantifie cette notion par des tests normalisés. »

Tout le monde regarde Lily.

« T’as plié le match, Evans ! rugit Sirius. »

Et devant les autres hilares, à part Peter qui grogne et Remus qui lui intime d’être un peu plus subtil car on ne parle pas de la même manière à quelqu’un qui a des problèmes de santé mentale à quelqu’un qui n’en a pas, ils se font une poignée de mains.

 

 

End Notes:

Le test de Mouton-Charpy est un de ces test normalisés que Lily évoque. J'apprends des trucs avec des noms rigolos à l'école, certes (irl je fais de la science <3).

Je ne connais pas l'histoire du mot résilience. Mais il me semble que quand on regarde bien la définition que Lily donne de la résilience, on pressent quelque chose si on assimile l'énergie à une situation violente psychologiquement et le matériau au cerveau d'une personne...

Personnellement, je trouve qu'il y a un parallèle avec la notion qui est faite de résilience pour la psychologie. Il se peut néanmoins que j'ai un point de vue relativement négatif sur la notion parce que chaque fois que je l'ai entendue traitée par quelqu'un, ça finissait sur le genre de phrases que dénonce Sirius. Je ne me suis pas davantage renseignée pour démêler mon ressenti de ce qu'il en est vraiment et de ce que j'ai entendu à ce sujet. Ca me plaisait juste de faire une métaphore avec ce que j'ai appris en science des matériaux.

Bon et alors pourquoi le titre ? Déjà pour la référence à la résilience pour les matériaux, et ensuite, parce que l'usage du mot résilience que fait Peter et la façon dont le rembarre Sirius, globalement on peut se dire que Sirius pense que Peter répète "ce qu'on entend" donc c'est un mouton, donc l'usage du mot résilience est un test pour savoir si l'interlocuteur est un mouton.

J'avais pas précisé que l'explication ne serait pas tordue hé hé.

Enfin, comme d'habitude, je tiens ici à souligner à quel point le sujet de la santé mentale me tient à coeur.

A bientôt,

Pitite Citrouille

9. Toujours soeurs by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit classique HPF du 19 novembre 2022, thème écrit : réconciliation.

 

Dring ! Toc, toc, toc.

Pétunia regarda l’heure, surprise. Ce n’était pas à sept heures du soir qu’elle attendait Vernon, il devait aller dans pub fêter un gros contrat avec quelques-uns de ses collègues. Elle baissa le feu sur la gazinière, essuya ses mains sur les poches de son tablier, et alla ouvrir la porte. Et manqua de tomber à la renverse.

« Lily ? Mais qu’est-ce que tu fais ici ?

— Bonjour Pétunia. Je suis désolée de venir remuer des choses dont tu voulais te détourner, mais il fallait que je te prévienne, et comme rien n’est sûr en ce moment… »

Elle avait l’air un peu gênée et cherchait manifestement ces mots. Elle avait la mine de quelqu’un qui va annoncer une mauvaise nouvelle. Or, une mauvaise nouvelle annoncée de surcroît par Lily, ce ne pouvait qu’être très important pour Pétunia. Bon gré mal gré, elle ne lui claqua donc pas la porte au nez. Et puis après tout, c’était sa sœur. On ne claque pas la porte au nez de sa sœur, même si elle est plus jolie, intelligente, populaire, serviable, bienveillante, encouragée par vos parents que vous. Et surtout quand c’est la petite sœur. Une grande sœur protège sa petite sœur, c’est ainsi.

Bref, Pétunia trouva assez de raisons pour ne pas faire tout ce qu’elle avait promis, juré, craché, à Vernon qu’elle ferait si d’aventure sa sœur se présentait un jour sur le seuil de leur maison.

« Il y a une guerre dans le monde des sorciers, avança enfin Lily. L’objet de la guerre est le racisme, rien de moins que ça.

— Comme partout, dit Pétunia sèchement. »

Sauf que Lily ne la contredit absolument pas. Tout au plus elle la regarda vraiment.

« Oui, bien sûr ! Donc, pour faire simple, très simpliste, ceci oppose le camp d’un dénommé Voldemort, qui veut que seuls les sorciers descendant de sorciers puissent pratiquer la magie, et Dumbledore, qui défend que quiconque dispose de pouvoirs magiques devrait pouvoir apprendre à les maîtriser et à s’en servir. Après comme dans tout ce genre d’idéologie, il y a des corollaires concernant les créatures magiques, je n’aime pas le mot ‘créatures’ mais c’est comme ça que c’est dit, les gens qui naissent sans pouvoirs magiques dans des familles de sorciers, etc.

— Oui, s’impatienta Pétunia. Tu vas donc revenir chez papa et maman ?

— Mais enfin, ce serait trop dangereux ! s’emporta Lily. »

Et Pétunia réalisa tout d’un coup qui Lily était pour son monde à elle d’une part et pour le monde des sorciers d’autre part.

« Tu veux entrer ? »

C’était une phrase de politesse, de convenance, pour occuper ses mots, pour occuper ses mains, pour surtout occuper son cerveau. Elle pressentait quand même que la petite sœur, la si courageuse petite sœur, si brillante élève, qui sortait, si elle avait bien compris, avec un sorcier de la haute parmi les sorciers, avait une cible dans le dos. Pétunia, qui avait si souvent hurlé qu’elle ne voulait plus voir Lily, réalisa que sa mort signifiait qu’elle ne la verrait effectivement plus du tout, mais que c’était une perspective intolérable. Et sa poitrine se serrait beaucoup plus que ce à quoi elle se serait attendue elle-même.

Lily ôta ses chaussures, et sortit sa baguette. Pétunia l’invita dans son salon, lui proposa un siège, quelque chose à boire.

« C’est spacieux, chez toi.

— Oui, ça change de chez nos parents, pas vrai ? »

Les sœurs sourirent de connivence, mais aucune n’osa encore l’admettre et elles baissèrent toutes deux le menton.

« Tu vas faire quoi ? demanda Pétunia.

— Les instances politiques des sorciers sont malheureusement très gangrenées par les idées répandues par Voldemort, ce qui fait que même les sorciers censés nous protéger, nos policiers en quelque sorte, ne sont pas nécessairement tous fiables. Dumbledore, comme tu le sais, est directeur de Poudlard ; il nous connaît donc bien. Il a fondé un groupe de résistance. Moi et quelques-uns de mes camarades, dont mes plus fidèles amis et mon copain, avons décidé d’en faire partie.

— Papa et maman sont au courant ? glapit Pétunia, trahissant sa peur.

— Oui, je les ai prévenus avant de passer ici. C’est comme ça que j’ai eu ton adresse.

— Ah oui, c’est vrai, je suis bête.

— Non, ne dis pas ça, Tunie, tu n’es pas bête parce que tu n’es pas au courant de la façon dont j’ai récupéré une adresse… »

Ah, elle l’avait appelée Tunie. Pétunia songea fugacement qu’elle avait encore deux heures à peu près devant elle avec sa sœur, jusqu’à la prochaine fois qui sera… quand ?

« Moi et mon copain, pour m’assurer une certaine sûreté à cause de mon origine, avons décidé de nous fiancer, ce qui sera fait dans le courant de l’été. On ne se mariera qu’au dernier moment lorsqu’il y aura une urgence. Je ne vais aussi plus habiter à la maison, évidemment. Mon copain est… très aisé et ses parents ont, euh, un genre de maison secondaire, que nous occuperons, avec trois de nos amis qui sont aussi dans des situations compliquées pour se loger avec toutes ces idées discriminatoires. Nos autres amis ont chacun un endroit où loger.

— C’est risqué ? s’enquit Pétunia, de plus en plus inquiète. »

Le regard vert de sa sœur devint grave. Elle ancra ses yeux dans les siens et hocha de la tête.

« C’est aussi pour ça que je suis passée.

— C’est bien, merci de m’avoir prévenue, il n’y a pas de quoi.

— Tunie, tu es ma sœur, je ne vais pas t’abandonner, promis.

— Lily ! Est-ce que tu es vraiment en train de dire que… ?

— Oui, Pétunia. Je te promets que je ferai tout ce que je peux pour que tu ne sois, toi, personnellement, jamais en danger, tout comme Papa et Maman.

— Oh Lily… »

Il y eut un silence, le temps que Pétunia digère toutes ces informations.

« Et tes études ?

— Je vais les continuer, tant que j’ai encore le droit de le faire. L’activité de résistance est clandestine et mes études utiles aussi à court terme pour la guerre, donc, c’est très bien comme ça. »

Tout avait été pensé, réfléchi, mesuré. A dix-huit ans. Et pas qu’elle ! Non, elle avait parlé en tout d’au moins cinq personnes : elle, son copain, et leurs trois amis dans des situations compliquées. Quel courage, vraiment. Pétunia admirait beaucoup sa sœur pour ça, même si elle préférerait se jeter du haut d’une falaise que de l’admettre à voix haute, car après tout, elle avait une jalousie à tenir.

Les deux sœurs discutèrent encore de longues minutes, puis Pétunia lui fit visiter sa maison, elles parlèrent de choses plus futiles mais importantes – Pétunia, en tant que grande sœur, ne pouvait pas ne pas faire de remontrances à sa petite sœur au sujet de la contraception par exemple, de la vie de Pétunia et de Vernon. C’était bon, mine de rien.

Dring ! Toc, toc, toc.

« C’est Vernon ! s’exclama Pétunia. On va se disputer s’il te voit…

— Je comprends, Pétunia. Moi-même ça m’ennuie vraiment d’osciller entre deux mondes différents, d’avoir des semblants d’identité, alors oui, je comprends. Mais je peux partir d’ici sans qu’il ne me voit.

— Lily, alors, juste, un dernier truc… C’est risqué, de s’écrire ?

— Euh… Pourquoi ?

— J’aimerais… Enfin si j’ai de tes nouvelles de temps en temps, rien de long, même deux mots, juste pour savoir de temps en temps que, et bien, tout va bien pour toi ? »

Impossible pour Pétunia de dire à voix haute « pour savoir que tu n’es pas morte ».

« Je le ferai, promis, Tunie.

— Désolée, Lily, pour, euh… Enfin, j’ai grandi moi-aussi.

— Allez, il faut vraiment que je parte. »

Pétunia ne put résister, elle se jeta dans ses bras et lui fit une étreinte. Puis, un craquement, et la voilà qui serrait du vide. L’impression laissée dans son cœur fut à peu près identique.

En bas, Vernon posait ses affaires et délaçait ses chaussures.

« Pétunia, je suis rentré ! Tu es où ?

— Oui, je… je, euh… je rangeais du linge, j’arrive ! »

 

End Notes:

Certes, ce qu'ont fait les Dursley à Harry relève ni plus ni moins de la maltraitance. Toutefois, les deux soeurs échangent encore longtemps après la sortie de Poudlard de Lily (celle-ci reçoit un vase de la part de sa soeur, tandis que Pétunia connaît le prénom de Harry...), ce qui sigifie que la relation entre les deux est un peu plus complexe que juste une absence de relation. Alors je me susi demandée comment ça se fait qu'elles ont continué à s'écrire des lettres malgré le ressentiment manifeste qu'a Pétunia contre Lily ?

J'espère que ça vous a plu,

Pitite Citrouille

 

10. La norme fait le héros by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit classique HPF du 19 novembre 2022, thème musical : Heroes de David Bowie.

Ah là là quelle chanson, merci Winter pour cette magnifique inspiration <3

Les deux ou trois bouts de phrase en italique sont traduits de la chanson.

CW - mention ténue de dépendance à l'alcool

 

« Une chanson qui parle d’héroïsme et d’alcool, c’est pour moi ça, lança Sirius.

— Je déteste quand tu fais ce genre d’humour, dit prudemment Remus.

— C’est de l’humour noir, ça me détend, ne t’inquiète pas mon Lunard.

— Ça marche. »

Remus lui fit une petite tape dans le dos et alla s’asseoir à côté de James, qui lisait l’édition du jour de La Gazette. Il la lui subtilisa des mains.

« On ne lit pas ces déblatérations à table, ça nuit au moral. D’abord on mange, et après seulement, on réfléchit. »

James entreprit donc de beurrer une tartine, avec cette sorte de classe étrange sortie tout droit de son éducation chez des aristocrates sorciers, même si ça avait été moins rigide que chez Sirius.

« Cornedrue, même quand tu beurres une tartine, tu as de la classe. 

— Ah oui, on parle vraiment futilités au petit-déjeuner.

— J’ai un truc encore plus futile, si tu veux, interrompit Sirius.

— Balance, balance ! encouragea Peter.

— Comme vous le savez, je m’intéresse à vos vies sentimentales proportionnellement à l’absence d’intérêt que j’ai pour la mienne…

— Ça n’a aucun sens, reprit Remus. Aucun de nous n’ai jamais sorti avec quiconque.

— Il est vieux jeu, le petit Lunard, on n’est pas obligé d’avoir des sentiments pour sortir avec des gens !

— Bon bref, balance, dit Peter, concerné en son for intérieur par cette dernière remarque.

— Et donc, comme vous le savez aussi, le seul parmi nous qui expose ses sentiments en large et en travers…

— Regarde-moi ce faux frère, fit James qui commençait à sourire.

— Voilà, maintenant que je vous ai mis l’eau à la bouche, c’est à l’intéressé de s’exprimer. »

James lui tira la langue mais il fut quand même bien obligé de raconter par le menu que, hier en fin d’après-midi, en sortant de la bibliothèque dans laquelle il travaillait avec Lily, comme il faisait beau, il s’était promené avec elle, et voilà, il n’y avait pas trois pattes à casser à un hippogriffe.

« Siiii, siiiii, fit Sirius d’un ton aigu et dramatique.

— Bon, très bien. Elle m’a embrassé. Content ?

— C’était comment ?

— Oh non, ça c’est nul comme question, intervint Remus.

— Elle a posé ses lèvres sur les miennes.

— C’est tout ?

— Mais tu voulais qu’elle fasse quoi d’autre ? »

Sirius éclata de rire.

« Ah ouais, vous êtes peu détendus. Ça passera avec le temps. Ma Marlou adorée ! Viens par ici que je te cause !

— Black, c’est le petit-déjeuner, pas obligé de rameuter toute la salle, grogna un Préfet de Serdaigle qui passait là. »

Marlene le poussa gentiment.

« Mais qui te dit que je ne suis pas importante ? On est à Gryffondor ici, un peu de respect, que diable ! »

Les deux étaient très en forme effectivement, comme toujours.

« Si ça se trouve, il a juste fait la fête toute la nuit, supposa Remus, et il a très mal à la tête.

— Laisse, c’est juste un Serdaigle.

— Ne dis pas ça devant Lily si tu veux qu’elle t’embrasse une nouvelle fois.

— D’accord Marlene. »

Marlene attaqua un jus d’orange et un œuf dur avec énergie et détermination.

« Marlou, il y a une chanson du tonnerre qui est sortie.

— Vas-y, dis-moi tout.

— Heroes, de David Bowie.

— Ce titre et cet artiste, ça ne peut être qu’un bon son parmi les bons sons. Ah je t’aime. Ah non je suis lesbienne. Mais je t’aime quand même. Allez, envoie.

— C’est le petit-déjeuner, suis un peu, Marlene, dit Remus.

— Mais qu’est-ce que vous êtes taciturnes et ringards ! »

Ils rigolèrent tous. Effectivement, ce repas était beaucoup plus drôle que si Remus avait laissé James commenter un à un les articles du dossier de presse sur la guerre de La Gazette.

« Comme je le disais à Remus ce matin, c’est une chanson qui parle d’héroïsme et d’alcool, ça me convient parfaitement. Marlou, pitié, rigole, je ne vais pas pleurer parce que je suis sobre.

— Je rigole, je rigole.

— Ça parle d’amour, d’interdit, tout ça, tu sais que Bowie est homosexuel, le son va te toucher droit dans le cœur, comme ça, boum, tu verras. Il y a une de ces basses, c’est incroyable, il faudra l’écouter avec une bonne radio, histoire qu’on les entende. Et puis la guitare électrique qui couine comme ça… »

Sirius tenta de reproduire le son.

« On dirait que tu imites un camion qui freine, commenta Marlene. 

— Vous êtes donc conviés à une session radio ce soir, après le dîner, dans le parc.

— Te fatigue pas Sirius, il n’y a que Marlene qui va venir, tempéra Peter.

— Ma Marlou adorée ! Tu as du goût musical, toi !

— Je viens pour l’effort collectif, annonça James.

— Je traduis pour toi Marlou : il vient pour faire bonne impression devant Lily. Regarde Lily, je m’intéresse aussi à tes copines, et j’écoute de la super musique moldue…

— Vous êtes incroyables, tous les deux.

— James, tu es désabusé si vite, lança Marlene, amusée. »

Le soir, dans la douceur de ces premières soirées d’automne, Marlene et Sirius se retrouvèrent sous un arbre du parc. Et, allongés dans l’herbe qui leur chatouillait le cou, ils écoutèrent la mélodie puissante, la voix résonante de l’artiste, et le texte. Cette sorte d’ode à l’amour et l’interdit, ce mantra du rock, cette ode à la liberté, avec aussi ses travers et ses fragilités, à l’image de ce que renvoyaient en ce moment-même les deux adolescents.

La jeune femme, lesbienne avec des parents qu’elle avait homophobes, elle ne se le cachait plus à elle-même. Le jeune homme, qui n’avait trouvé comme refuge que les bars lorsqu’il cherchait à fuir le Manoir Black – les bars et tout ce qui allait avec.

« Putain Marlou, des fois ça me vient sans prévenir, ça me redonne envie de boire.

— Te tracasse pas, Sirius. Tu n’as pas rayé ton passé en allant dans cette clinique, tu as juste tenté de changer ce que ce passé allait conditionner dans ton présent.

— Je vais reboire un jour, c’est obligé.

— Ce qui compte, c’est le chemin, Sirius. Tu demandes un effort colossal à ton corps, c’est normal qu’il ne puisse pas te suivre. »

Elle se releva et cala sa tête contre le torse de son ami.

« Et du coup, c’est moi qui ne me suis pas moi-même.

— Hein ?

— Rien, laisse tomber. La volonté, tout ça.

— Oui, je me suis renseignée sur le concept de volonté. Je crois que je saisis.

— Tu es vraiment une amie, Marlou, tu le sais ça ? Il n’y a que les vrais qui se renseignent. Toi, les filles, les gars… »

Marlene sourit. Ça lui semblait normal, mais c’était très difficile de saisir vraiment le concept de normalité. Normal pour elle, en tout cas. Normal de se soutenir entre gens mis de côté de la normalité.

« Marlou, j’ai une bonne nouvelle pour toi. La chanson, c’est pas qu’un single. Il y a tout un album derrière.

— Génial !

Et la honte était de l’autre côté, fredonna Sirius. Tu verras Marlou, on va la gagner cette guerre. Contre les autres, contre nous-mêmes, contre Voldy, tout ça. On va encore pouvoir écouter plein de tubes de rock et on finira par convaincre ta copine de faire de même.

— La honte, elle n’était pas vraiment de l’autre côté, mais on va l’y pousser, ça c’est sûr.

— On est déjà en mission, là, assis, à écouter du rock. Plus rien ne nous atteint.

— Et on écoute des camions qui freinent.

— Même eux ne nous atteignent pas. Et nous on se fera jamais écraser, parce que nous pouvons les battre pour toujours. »

 

End Notes:

La chanson parle de beaucoup de thèmes que j'aime exploiter, dont les relations homosexuelles et la prise de psychoactifs... Le rock, pour moi, c'est un style musical qui fait vrombir les tripes et le cerveau, ça a souvent été un style anticonformiste sur le plan sociétal (c'est probablement moins vrai aujourd'hui... mais je suis restée bloquée dans les seventies sur le plan musical). Il y a aussi les mauvais côtés évidemment, qui questionnent malgré tout le rapport de la société à la liberté, à la jeunesse, bref, plein de choses.

Et la norme fait le héros, titre maladroit probablement (je ne change pas ce que je fais pendant les nuits), car oui, de ce fait, est héros celui qui sort de la norme par le haut, mais si on change les normes, peut-être qu'on change aussi notre signification du mot "héros" ?

Et donc, je me suis trompée aussi, j'ai vu ça a posteriori, Bowie est bisexuel et non pas homosexuel, mais je reste fidèle à ma ligne de donner le produit tel qu'il a été fini en une heure et quelques. Ceci étant dit, la chanson évoque bien une relation homosexuelle.

Dans mon univers, Marlene et Sirius sont des rockeurs dans l'âme certes parce que c'est un peu la mode mais surtout car ça leur parle jsuqu'au fond du coeur.

Pitite Citrouille

11. Lacrimosa by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit insolite du 16 décembre 2022, prompt 20h : "des chants dans la nuit..."

TW - Dépression

Je passe mon tour pour l'originalité du titre.

Harry dormait paisiblement dans son berceau, soigneusement recouvert de plusieurs couvertures. James était enroulé dans la sienne, les paupières fermées, mais Lily savait qu’il ne dormait pas. Il attendait simplement que le temps passe, que tout ça finisse, la guerre, les exactions, les lois raciales, le confinement obligé pour lui et sa famille tandis que ses amis tombaient les uns après les autres – tout ça, quoi. Ca faisait tellement longtemps qu’il passait le plus clair de ses journées, ainsi.

Lily les regardait, lentement, longuement. Tout semblait figé, même son souffle à elle, même sa posture, debout, près de la fenêtre, emmitouflée sous un châle, le coulis d’air du dehors s’incrustant contre elle, qui ne frissonnait même pas. Pas un mouvement.

Dans sa tête, il n’y avait rien d’autre que le sentiment d’avoir passé une journée de plus, d’avoir survécu plus que vécu une journée de plus, et c’était bien l’essentiel, même si elle en était de moins en moins sûre chaque jour. Pour Harry, sûrement, tout du moins. Mais pour James, non, certainement pas. Non pas que l’Ordre du Phénix et ses missions périlleuses fussent des raisons d’être joyeux, mais au moins, il y avait de l’action et de la réflexion. Peut-être que c’était mieux pour James de mettre plein de choses négatives dans sa tête qui venaient d’ailleurs plutôt que de lui-même.

Le seul mouvement visible au-dedans de cette chambre sombre et froide venait des lumières clignotantes des guirlandes de la rue qui longeait la maison. Elles imprimaient régulièrement leurs tâches jaunes sur le dessus de lit, soulignaient l’épaule de James, léchaient la coque du berceau, et mouraient sur la poignée métallique de la porte. C’était Noël, et le premier Noël de Harry, mais au-delà de ça, c’était surtout le premier Noël sans les amis, sans la famille, sans la vie. Avec tout ce vide, ce morceau de vie qui reste ressemble déjà un peu à la mort, avait dit James. Je fais des jolies phrases pour tuer le temps et espérer que l’esthétique touche un peu mon cerveau, ma sensibilité qui s’est abîmée dans ce grand trou. C’est beau je fais de la poésie de dépressif.

Lily ferme les yeux, elle voudrait chasser ces images de sa tête, ces images qui s’agitent devant ses yeux comme des feux follets, comme les lumières des guirlandes du dehors sur les corps inertes du dedans – la mémoire des visions, la mémoire des sons, ça te rattrape une sensibilité in extremis mais des fois ça te remet en pleine figure tout ce que tu voudrais oublier et tu ne peux pas y échapper, même en ouvrant grand les yeux.

De toute façon, même en ouvrant les yeux, il n’y qu’un semblant de vie sous les yeux de Lily. Peut-être que c’est ça le vide dont parle James ? Elle n’en sait rien, elle ne le perçoit pas, elle. Chance, ou pas, peu importe, on s’en fout, si Voldemort vient demain, que tu souhaites la mort ou non, il va te la donner, et pourtant, s’il vient demain, tout d’un coup James se souviendra qu’il est en vie, qu’il ne veut pas la mort encore, et surtout tout ça pour Harry. Ce serait beau un vrai Noël, pas un Noël d’hypocrites attablés mais il ne faut pas penser maintenant à Pétunia qui doit arroser le chapon avec son jus, juste un vrai Noël de gens qui s’aiment, même en pyjama en mangeant des pâtes, mais avec une bougie, des guirlandes et une esquisse de sourire, peut-être esquisse mais surtout sincère.

Et, dans le silence d’une nuit mortifère et bleue d’un Noël gelé, une mélodie s’est élevée et a couru dans les rues du village. C’était un de ces canons conçus pour chanter la gloire à Dieu, l’immortalité, cette chose que Voldemort voulait et que James ne voulait pas, composé par l’humain faible mais suffisamment tout-puissant pour concéder que ça, c’est un chant de louanges vrai et intemporel. Et la mélodie est entrée doucement par les fenêtres et a toqué au tympan de Lily avec ses mélopées envoûtantes et ses lettres aigües et modulées.

La première chose qui s’est mise en mouvement ce sont les tripes de Lily, et peut-être aussi celles de James parce qu’il a vraiment bougé, il s’est retourné et il a vu Lily, pâle, l’arrière du crâne accolé à la vitre de la fenêtre, les guirlandes qui font briller ses yeux, même de loin, et surtout, deux ou trois larmes qui coulent doucement sur sa joue, un clignement d’œil pour qu’elles descendent plus vite et son nez qui se retrousse quand elle renifle, une fois, puis une deuxième fois plus franchement.

Ce chant est beau et émouvant. Il sonne vivant, surtout. Peut-être que James s’est penché un peu sur le grand trou en foutoir de sa vie confinée, mais en tout cas il a pu ramasser par terre, pas trop bas, un petit morceau de sensibilité et il y a eu une lueur dans ses yeux. C’est comme pleurer quand tu as déjà épuisé ta réserve de larmes, parce que quand tu es fatigué, crevé, épuisé, c’est dur de maintenir la vanne fermée. Donc James a pleuré, et d’avoir le cœur ému comme ça, ça l’a mu, si on peut le dire ainsi, et il s’est levé, oh lentement, longuement, mais il s’est levé.

Dehors il y avait un autre chant tout aussi langoureux et chaud qui a commencé à courir après l’autre qui s’était déjà perdu dans les oreilles des âmes esseulées ; et il y en aurait d’autres, car la porte de l’église est ouverte, et parce qu’il y aura encore deux offices jusqu’à la fin de la nuit. Les sorciers ne croient pas comme les Moldus, car ils ont une mystique de la prédestination, mais là, James pourrait presque dire que les Moldus lui ont rendu un brin d’espoir.

Pas de quoi tenir toute la guerre, mais de quoi descendre dans la cuisine avec Lily et Harry, préparer des pâtes, allumer un feu dans la cheminée, et, cahin-caha, dans le désordre mais c’est pas grave, c’est rien que la vie, et puis c’est toute la vie de James ça, le désordre, fêter un peu Noël à leur façon.

Après, ils se sont enroulés sous un plaid, tous les trois, Harry entre ses parents, face à la cheminée mordorée, et ils ont fait une esquisse de sourire, peut-être même une esquisse de baiser, et ils ont dormi. Pas forcément du sommeil le plus apaisé, pas forcément du sommeil le plus réparateur, mais ce bon feu, ces présences aimées, et ce chant qui caresse les oreilles au loin et auquel s’associe les craquements sonores des bûches, ça fait du bien.

Ce n’était peut-être pas le meilleur Noël, mais ça valait le coup d’y être, de sentir les corps de l’enfant et de l’autre en se tenant chaud comme une compagnie de pingouins sur la glace. C’était le dernier Noël, on l’a su après. C’était donc la dernière fois qu’ils étaient émus par un cantique de Noël, émus aux larmes même, et il n’y a rien de plus beau que d’être ému aux larmes par un truc aussi vivant et chaud que l’humain sait produire comme l’art.

End Notes:

J'ai une vision très sombre de la guerre. Je ne vois pas comment c'est possible que ça n'affecte la santé mentale de personne, même, et j'allais écrire, surtout, quand on parle d'un personnage décrit par optimiste comme James.

Lily évoque dans sa lettre à Sirius qu'il ne dit rien mais que sortir lui manque beaucoup... Ca m'a fait beaucoup penser au confinement, a posteriori. Le contexte de la guerre en moins. Alors un confinement dans un contexte de guerre...

Prenez soin de vous, et d'abord de vous <3

Pitite Citrouille

12. Circle of the Gremlins who are Tired by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit insolite du 16 décembre 2022, prompt 21h : "un lutin du Père Noël se révolte et décide d'organiser une grève le soir du 24 décembre".

 

La première fois que son père lui avait expliqué ce qu’était une grève, Lily avait sept ans. Elle et Pétunia étaient assises toutes les deux sur le miteux canapé du salon, les genoux ramassés contre elles pour conserver leur chaleur corporelle, et leur maman leur avait apporté un gros plaid dans lequel elles étaient enveloppées. Elles se faisaient des messes basses, se racontaient des historiettes, et rêvaient de la neige dehors. Elles attendaient leur petit cadeau d’enfants sages – oh leurs parents n’étaient pas bien riches, c’était souvent des chaussettes, des culottes, ou alors leur maman détricotait des pulls et des gants trop petits ou usés pour récupérer la laine et leur faire un cadeau comme neuf et à leur taille.

Mais ce Noël, il n’y eut rien du tout.

Pétunia se contenta de baisser les yeux à l’annonce de la nouvelle, elle était assez vieille pour avoir compris que c’était l’argent, tandis que Lily, curieuse, voulut savoir pourquoi.

« Et bien, je vais vous raconter une histoire, dit Ginger. »

Il prit les deux fillettes dans ses bras (ho ! hisse !), s’assit lui-même dans le canapé et en plaça une sur chaque genou (heureusement que j’ai que deux merveilleuses petites filles, comment je ferais si j’en avais trois ? Et Pétunia proposait un troisième genou !).

« Les enfants ayant été sages toute l’année, et les enfants étant aussi nombreux, il y eut beaucoup de travail tout au long du mois de décembre pour les fabriquer. Cela demande des matières premières, c’est-à-dire du bois pour les petits chevaux à bascule, du plomb pour les petits soldats en plomb, des tissus pour les petites poupées, etc… Il faut les acheter en quantité suffisante, car il faut contenter tous les enfants, et donc, avoir de quoi fabriquer tous les cadeaux ! Ensuite, il faut les fabriquer : tailler le bois, fondre le plomb, couper le tissu… Puis les emballer, et enfin le soir de Noël, il faut les distribuer !

Mais comment tout ceci fonctionne-t-il ? C’est assez simple ; il y a des lutins qui sont chargés de recevoir les lettres des enfants sages, ils font le tri. Il y a ensuite des équipes qui sont dédiées à la fabrication exclusive des chevaux de bois : il y a en a une qui s’occupe d’acheter le bois, une qui s’occupe de le tailler, une de les emballer. C’est pareil pour les autres jouets, les soldats et les poupées. Toutes les équipes qui achètent discutent entre elles, pour savoir combien en tout combien elles vont payer. C’est pareil avec les autres équipes. Vous comprenez ?

— Oui Papa !

— Bien. Mais, maintenant, vous pourrez me dire, mais comment on sait à qui on doit parler dans les autres équipes ?

— Oui Papa !

— Et bien il y a un principe de hiérarchie : supposons qu’il y a cent lutins en tout. Le chef des lutins est le Père Noël. Le Père Noël ne discute qu’avec, par exemple, cinq lutins. Chacun des cinq lutins s’occupe donc de vingt lutins. C’est clair ?

— Oui Papa !

— Et maintenant, prenons vingt lutins. Il peut y avoir deux équipes de dix, chacune dirigées par un lutin. Au total, nous avons donc une pyramide avec le Père Noël, qui dirige cinq lutins, chacun d’entre eux dirige deux lutins, et tous ces lutins-là dirigent eux-mêmes dix lutins. Vous voyez l’idée ?

— Oui, c’est un peu comme à l’école, on a les maîtresses, puis la directrice qui dirige les maîtresses ! »

(Convenez que Ginger fut un peu étonné du rendu de sa prestation à ce stade de l’explication. Confondre l’école avec une entreprise, non mais !).

« Mais vous voyez la masse de cadeaux qu’il faut faire ? Les lutins ont beaucoup de travail ! Alors, que font-ils ?

— Ils travaillent beaucoup Papa !

— Oui, c’est vrai. Mais pourquoi travaillent-ils beaucoup ? Après tout, ce ne sont pas leurs cadeaux !

— Parce qu’ils sont obligés, Papa !

— Par qui ou quoi ?

— On travaille pour gagner de l’argent pour acheter à manger Papa !

— Oui Pétunia ! Mais l’argent qu’ils gagnent, qui le leur donne ?

— Les parents qui achètent les cadeaux ?

— Non, Lily. En fait, ce qui se passe, c’est que les parents achètent les cadeaux et donc l’entreprise de fabrication des cadeaux gagne beaucoup d’argent, puisqu’il y a beaucoup de cadeaux à faire et à vendre. Celui qui dirige l’entreprise, c’est le Père Noël : c’est son entreprise, donc c’est lui qui décide combien il donne aux lutins. Bien sûr, la loi l’oblige à certaines choses, et puis les lutins peuvent essayer de négocier aussi, mais sur le principe, c’est bien le Père Noël qui a une importance.

Et maintenant, revenons-en aux usines de fabrication de cadeaux. Comme je l’ai dit, il y en a beaucoup à faire. Les lutins travaillent dur, ils sont épuisés, parfois ils se blessent avec les machines : vous voyez comme c’est petit et fragile un lutin ! Il faut donc qu’ils fassent beaucoup d’efforts. Comme je vous l’ai dit, le Père Noël décide de l’argent qu’il donne au lutin et de l’argent qu’il garde donc pour lui ensuite. Si vous étiez le Père Noël, que feriez-vous ?

— Je donne tout aux lutins !

— Lily, c’est très généreux, mais le Père Noël travaille un peu aussi, certes beaucoup plus confortablement que les lutins, donc c’est normal qu’il garde un peu pour lui aussi.

— Et qu’est-ce qui se passe alors ?

— Il se passe que le Père Noël garde beaucoup pour lui, et donne très peu aux lutins.

— C’est injuste Papa !

— Oui c’est injuste. Mais j’ai dit que la loi oblige le Père Noël à certaines choses. Par exemple, les lutins ont le droit de négocier, dans certaines conditions. Que peuvent-ils donc faire ?

— Négocier ?

— Oui, Pétunia. Mais comment ?

— Ils vont le voir et lui demander plus d’argent !

— Oui, mais s’il refuse ?

— Euh…

— C’est justement pour ça, mes chéries adorées, que la loi donne aux lutins plusieurs façons de se faire entendre. Notamment, les lutins ont le droit de faire la grève ; cela signifie qu’ils organisent une journée pendant laquelle ils ne travaillent pas. Ils ne gagneront pas d’argent ce jour-là, mais, puisqu’ils fabriquent moins de cadeaux, cela fait moins d’argent au total pour l’entreprise, donc le Père Noël peut aussi perdre de l’argent comme ceci. Vous comprenez ?

— Oui Papa !

— Est-ce que vous comprenez donc que les lutins ont intérêt à faire grève le jour de l’année où l’entreprise est censée gagner le plus d’argent ?

— Oui Papa !

— Et bien c’est ce qui se passe. Les lutins font grève le 24 décembre.

— Qu’est-ce qui se passe ensuite, Papa ? »

Ginger soupira fortement.

« Il se passe que les lutins peuvent décider de faire grève le 25 décembre, aussi, si jamais le Père Noël ne cède pas, et ainsi de suite.

— Mais ils vont perdre beaucoup d’argent, les lutins ! s’exclama Lily.

— Oui, ma loupiotte.

— Et donc les enfants n’auront pas de cadeaux ? demanda Pétunia.

— Oui, nécessairement. Et c’est là que la question devient importante. Il vaut mieux quoi, selon toi ? Que les enfants n’aient pas de cadeaux un Noël mais que les lutins finissent par être bien payés, qu’ils puissent travailler dans de meilleures conditions, éviter de se blesser, de se fatiguer, ou que les enfants aient des cadeaux à tous les Noëls, faits par des lutins exténués, si bien que ces cadeaux sont de moins en moins de bonne qualité ? »

Pétunia hoche la tête en silence. Elle commence à comprendre où son père veut en venir, mais pas Lily, qui est encore un peu jeune.

« C’est parce que les lutins ont fait grève qu’on n’aura pas de cadeaux cette année ?

— En fait, ma chérie, ni les lutins ni le Père Noël n’existent, tu le sais, ça.

— Oui Papa !

— Mais, ta mère, moi, nos voisins, nos amis, tout le quartier, nous travaillons dans la même mine, et avons donc le même patron. Et, en quelque sorte, nous travaillons dur et fort et dangereusement comme les lutins pour une entreprise dont le patron gagne beaucoup d’argent comme le Père Noël.

— Aaaaaah. Vous avez fait grève ?

— Exactement. »

Lily est une enfant extrêmement expressive : son visage change du tout au tout, et sa moue, de curieuse, passe aussitôt à triste.

« Et donc vous ne gagnez pas d’argent pendant ces jours-là ?

— Oui, petite fleur.

— Et c’est pour ça que vous n’achetez pas de cadeaux pour Noël ?

— Exactement. 

— Et pourquoi Maman ne tricote pas de pull alors ? demande Pétunia.

— Car quand tu fais grève, c’est que tu en es arrivé à un point où tu es extrêmement fatigué moralement et physiquement. Ta maman a besoin de se reposer, aussi, et tricoter, ça prend du temps.

— Oui Papa ! »

Et comme les deux fillettes ont bon cœur au fond, elles vont voir leur maman qui fait une sieste, se pelotonnent contre elle. Leurs parents sont soucieux et épuisés, certes, mais elles, ce sont des enfants pleines de vie et de bons sentiments. Alors, elles pensent que Noël à faire un gros câlin à quatre bien au chaud sous une couverture, c’est quand même un joyeux Noël non ?

 

 

End Notes:

Ma ligne c'est de ne pas retoucher mes textes des Nuits. C'est un peu comme le travail brut, la réflexion et l'écriture en moins d'une heure. Alors je me suis rendue compte qu'en lisant attentivement, il y a un léger problème de concordance des temps... Pourquoi pas casser le rythme en introduisant le présent, mais pourquoi à cet instant-là du chapitre ? Mystère.

Et désolée pour le titre, j'ai phasé XD

¨Pitite Citrouille

13. Calme flocon by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit insolite du 16 décembre 2022, prompt 22h : "quand il neige à gros flocons".

 

Quand il neige à gros flocons, c’est comme si la nature rabattait doucement sur elle une couverture de laine moelleuse et que chacun respectait sa volonté de dormir : il n’y a presqu’aucun bruit qui monte dans le ciel, si ce n’est parfois le croassement d’un corbeau ou le hululement d’une chouette encore éveillée. Mais autrement, il n’y a qu’un léger froufrou qui emplit l’air, même le son de la neige qui tombe est cotonneux, c’est dire ! C’est comme si le monde mettait ses pantoufles et marchait sur la pointe des pieds pour ne pas réveiller la nature qui dort.

Quand il neige à gros flocons, ça fait des spirales dans le ciel, et parfois avec un peu de vent, on a l’impression de voir une danse un peu vive, mais comme des légères ballerines, les gouttes de neige ralentissent bien vite et ce n’est pas une chute de neige mais un tombé de neige, un posé de neige, un petit pas de neige, même. C’est beau et ça endort aussi un peu l’esprit de qui regarde le spectacle, tranquillement assis dans son fauteuil confortable.

Quand il neige à gros flocons, on dirait que Poudlard elle aussi s’apprête pour Noël, à tisser lentement puis revêtir doucement sa belle parure blanche, un tissu soyeux, un peu lourd, tout brillant et scintillant, et qui éblouira les yeux sous le gris Soleil d’hiver. Elle met délicatement ses derniers bijoux, stalactites de glace qui ourlent les gouttières, les chambranles et les pignons, diamants constellés et ouvragés. Et le soir, elle s’impose à tous dans la lumière blafarde de la Nuit, avançant ses plus hautes tours vers le ciel, montrant ses beaux atours et jouant avec le rideau de neige qui tombe.

Quand il neige à gros flocons, dans la Grande Salle, le plafond est gris, violet, bleu, noir, blanc, tout à la fois, il brille, scintille, et il fait rêver assurément les élèves, peut-être même aussi les professeurs, les fantômes et puis les bêtes. Qui n’a jamais imaginé danser avec la neige à l’aube d’un Noël à Poudlard ? Les lumières de la salle se reflètent dans les vitraux qui, à leur tour, renvoient des teintes glacées de neige, là-haut c’est l’alliance du chaud et du froid et ça donne des couleurs en feux d’artifice.

Quand il neige à gros flocons, les étudiants chaussent les bottines, enfilent les gants, ajustent les bonnets, montent bien haut le col des manteaux. Quand la neige cessera, trois choses capitales devront être faites : marcher le premier sur une portion de neige immaculée, pour la sensation et l’excitation, faire un bonhomme de neige, pour immortaliser l’instant pendant quatre ou cinq jours avant que tout ne fonde, et s’envoyer des boules de neige pour rire et s’essouffler avec ses amis. Puis, on rentre, on prend qui un thé brûlant, qui un chocolat chaud, et on s’enveloppe dans la douce chaleur qui émane des murs et des cheminées.

Quand il neige à gros flocons, on a tous une âme soit d’enfant soit de poète. Parfois on voudrait être l’un et on est l’autre. Dumbledore peut toujours rêver à l’existentialité mystique de son combat face à Grindenwald, se rappelant les falaises abruptes des Alpes autrichiennes, qu’il se laissera entraîner à une excursion dans le parc par McGonagall. Hagrid voudrait jouer avec son chien et se rouler dans le blanc et soyeux manteau avec lui, qu’il s’assied sur un muret et regarde les remparts, Crockdur fidèlement allongé à ses pieds, songeant au temps qui passe et à la vie qui demeure, aux élèves qui viennent et qui sont venus et au cycle infini des enfants des uns et des autres qui viendront, à leur tour, admirer Poudlard la belle sous la neige.

Quand il neige à gros flocons, tout est calme à Poudlard ; c’est la nature qui dicte la paix, pour une fois, et tous la respectent… pour une fois.

 

 

 

End Notes:

Je n'écris pas que sur des sujets tristounes. J'aime aussi juste le calme, le silence, le bruit du vent dans la nature et les beaux paysages.

Un peu de sérennité en cette période, c'est bien aussi.

Bonnes fêtes de fin d'année à celles et ceux auxquels ça importe, à l'année prochaine à tous <3

Pitite Citrouille

 

14. November Rain by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit classique HPF du 20 janvier 2022, 23h, thème écrit : "sur la route"

 

 

Quitte à détruire son monde, il irait jusqu’au bout, songeait-il amèrement.

J’ai failli, j’ai dévoilé le secret de mon ami, je l’ai dévoilé à un futur Mangemort, je suis une merde humaine, je ne vaux rien.

Je me suis fait virer de Poudlard, je le mérite, c’est bien fait pour moi. Un mois d’exclusion, c’est même pas assez pour ce que j’ai fait, Dumbledore est trop sympa avec moi, juste parce que j’ai de bonnes notes et que McGonagall a pitié de moi…

Il reste encore un truc à faire, pour tout raser du passé, définitivement.

Il pensait, ou plutôt laissait ses pensées coléreuses le submerger, car oui, qu’est-ce qu’il allait en avoir besoin, de la colère ! Le courage ne suffit pas pour ce que qu’il a à faire, ah ça non, car il est peu de Gryffondors qui seraient capables, à son âge, de savoir dire non, irrémédiablement, à leurs parents.

Fin d’après-midi automnale, pluvieuse, asphalte détrempé, couleurs bleues entre chien et loup, gouttières qui laissent tout tomber par terre, réverbères sur lesquels la pluie glisse, est-ce que ça serait cliché de dire que tout ça reflète bien son état d’esprit présent ? Il avance d’un pas élastique et déterminé, tourne un coin de rue, une autre, boucle suivi de près par son imaginaire qui retourne sans cesse ses pires souvenirs. Dans sa tête, ça n’avance pas, non, clairement pas, il faut en finir, vite, sinon il ne passera jamais à autre chose, il faut d’abord franchir la barrière infranchissable.

***

Elle l’attendait, la lettre d’exclusion à la main. Il l’attendait, le relevé de retenues à la main. Leurs baguettes à la main, ces mains vilaines, tordues par la rage, blanches par l’oisiveté, pernicieuses par les intentions qu’on leur donnait.

Eux aussi avaient manifestement des choses à lui dire, ou plutôt à lui hurler, preuves et coups à l’appui, sorts et contre-sorts à lui appuyer.

***

La même route, dans l’autre sens, mais ce n’est pas un retour en arrière, oh non, c’est une libération.

Il a récupéré la lettre, le relevé de retenues. Surtout, il a récupéré deux ou trois certitudes. Oui, il n’avait aucune affaire à prendre – tout est déjà à Poudlard, sa guitare acoustique, son harmonica, sa collection de vinyles, ses magazines de rock moldu, ses amis, sa liberté. Il était juste venu dire « je pars », et il est parti.

Bon ok, il n’a pas vraiment dit « je pars ». Il a crié lui aussi, il a tempêté, il a regardé par la fenêtre avec l’envie de devenir une goutte de pluie mêlée aux autres, parce que même à ce moment-là, ça a été dur. Rien n’a été épargné à personne, oh non.

Est-ce qu’il se sent mieux ? Il a du mal à définir clairement une réponse à cette question. Il a vidé sa colère, ça, c’est sûr, et par le même coup, lui d’ordinaire si énergique, a vidé toute son énergie. Ce n’est pas grave, il se remettra d’aplomb avec sa famille de cœur.

Cette famille de cœur… Il en pleurerait bien de cette réalité désormais tangible, s’il ne s’essuyait déjà pas les joues à cause de la bruine qui commence à perler sur sa peau refroidie.

C’est bon, il est parti.

Sirius Black, dans cette petite rue londonienne, commence à tracer les premiers pas de la nouvelle route qu’empruntera sa vie nouvelle et choisie.

 

End Notes:

La chanson de Guns and Roses, évidemment <3

Instant prévention. Si vous avez l'habitude de me lire vous savez déjà où je veux en venir avec encore une note de fin preventive... C'est mon cheval de bataille. En l'occurrence, penser régulièrement des phrases du type "je suis une merde" ou "je ne vaux rien" est un signe clinique assez précoce que quelque chose ne va pas... Ca paraît une évidence, mais ce genre de pensées fait du mal et il ne faut pas normaliser ce qui fait du mal.

Des mots peuvent blesser, alors, d'autres mots peuvent aimer, encourager et soutenir <3.

15. La Danse de la compagne errante by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit insolite du 18 février 2023, 20h, défi stylistique : quinze mots du champ lexical du romantisme doivent apparaître.

J'en ai bien plus que quinze, car si on élargit le 'romantisme' à l'art sensible comme dans le mouvement artistique éponyme, on peut compter vraiment beaucoup.

Pour le contexte, dans mon petit univers personnel, Mary est élève danseuse à l'Ecole de Danse de l'Opera de Paris avant qu'on vienne la voir pour Poudlard, et ses parents ont arrangé pour elle un genre de sport-études, car la magie, elle n'en a rien à faire...

 

 

L’avantage d’avoir beaucoup de filles d’une même promotion dans la même Maison, c’était qu’elles étaient divisées entre plusieurs dortoirs. Par un beau mélange de hasard et de rencontres sympathiques lors de la cérémonie de répartition, les petites Lily, Mary et Marlene avaient décidé d’occuper ensemble le premier, tandis que le second avait été choisi par leurs quatre autres futures camarades de classe.

L’amitié était apparue ensuite, et elle avait été forte, solide, constructive. C’était une de ces amitiés qui prend l’autre comme elle est, avec ses attraits bien sûr, mais aussi ses défauts, ses doutes, ses failles, et qui ne s’embarrassait pas des convenances. De toute façon, Marlene et Lily avaient toujours été bien trop révoltées pour ne pas faire de leur franchise et de leur honnêteté deux de leur plus belles qualités.

Bien sûr, Mary et Marlene avaient connu un début de relation plutôt compliqué – non pas à cause de leur comportement l’une envers l’autre, non, mais bien à cause de celui des autres. Mary, si timide, avait été une cible privilégiée de Avery et Mulciber, deux vilains personnages de Serpentard spécialisés en harcèlement scolaire en tout genre. Ca n’avait pas vraiment aidé à lui donner assez de confiance en elle pour beaucoup de choses, assumer ses sentiments pour Marlene inclus.

Alors, partager son dortoir seulement entre leur groupe de filles, ça avait été si salvateur. Un mélange de havre de paix, de groupe de paroles pour jeunes filles nées-Moldues, de cachette secrète à petits secrets qu’elles trois seules partageaient. Maintenant qu’elles avaient bien grandi, elles se comprenaient mieux, plus intimement. Et ce jour-là, Lily avait compris d’un très subtil frémissement de Marlene lorsqu’elle était entrée dans le dortoir à la sortie des cours qu’elle ferait bien mieux de revenir sur ses pas et d’aller travailler à la bibliothèque.

***

Mary avait dû batailler, ou plutôt ses parents l’avaient fait pour elle, afin de conserver sa place de petit rat de l’Opéra après son admission à Poudlard. Dumbledore et McGonagall avaient trouvé l’accord parfait pour qu’elle suive ses cours en lien avec cette formation exigeante tout en étant intégrée dans le cursus éducatif de Poudlard. C’était en particulier cet emploi du temps très allégé qui avait fait beaucoup jaser les jaloux et les racistes. Mais qu’est-ce qu’elle fait là, à user de notre place, de notre temps, alors que la moitié du temps justement, elle n’est pas à Poudlard ?

Bref, Marlene adorait voir Mary heureuse, Mary danseuse, pousser la porte du dortoir, encore habillée de ses survêtements de danse et coiffée de son chignon impeccable. Et bien sûr, en tant que bonne élève, Mary prenait environ dix minutes de pause avant de se relancer, inlassablement, à faire et refaire et retravailler ses exercices, sa musculature, sa souplesse, son maintien, sa rapidité, son souffle, ses omoplates légèrement rejetées en arrière, l’isolement de ses articulations, sa résistance à la douleur – non, il fallait avouer que ce n’était pas forcément sain. Mais c’était ainsi, et Marlene admirait l’abnégation de Mary fatiguée qui y retournait encore et encore.

Marlene la regardait faire avec un réel intérêt. Elle connaissait presque par cœur le corps de Mary danseuse, les ligaments sur son coup-de-pied, ses mollets en acier, ses genoux cagneux, la fin dessin de ses muscles sur ses jambes si fines qu’on n’aurait su soupçonner qu’elle avait suffisamment travaillé pour passer seize fouettés – autrement dit, elle montait sur la même pointe seize fois d’affilé en moins de quinze secondes, sans s’appuyer sur autre chose. Et puis il y avait la taille peut-être un peu trop fine, le léger dessin de ses côtes qui affleuraient sous son justaucorps, le décompte de ses vertèbres qui se perdaient entre ses omoplates subtilement rejetées en arrière, puis qui montaient le long de son cou de cygne. Et encore les veines qui palpitaient sur ses mains un peu rouges quand elle avait beaucoup dansé, ses doigts qu’elle faisait danser aussi – car Mary maîtrisait tout ce corps, et puis en haut, tout en haut, son air concentré et serein et stoïque alors qu’elle exécutait des choses incroyables avec ses jambes.

Et ce jour-là, comme Marlene y pensait depuis quelques semaines déjà sans forcément se l’être avoué aussi nettement que maintenant, il y avait eu ce désir de connaître un peu le corps de Mary amoureuse, ou plutôt Mary amante, Mary lesbienne, Mary qui était autre chose et bien plus qu’une danseuse ou une lesbienne ou une adolescente.

Mary avait l’air dépité de ne pas passer quatre pirouettes, ce soir ; dernière année à Poudlard, dernière année à l’Ecole de danse, année stressante et importante, plus pour la danse que pour la magie d’ailleurs. Mary, au moins, elle était acceptée là-bas, et on la jugeait sur sa technique, alors qu’ici, de toute façon… A part les rencontres, les amitiés, et bien sûr Marlene, elle aurait tout aussi bien pu quitter le navire dès la deuxième année que ça ne lui aurait fait ni chaud ni froid.

Et sous sa timidité, Mary avait pour elle cette hypersensibilité, sa passion, son cœur qui vibrait pour beaucoup de choses – pour l’art, cela allait sans dire. Mais ce soir, au lieu de s’acharner à passer quatre pirouettes, elle avait eu envie d’autre chose, de faire une pause, de laisser reposer tout ça et de revenir le lendemain avec une calme détermination à passer cinq pirouettes et elle le ferait assurément parce qu’elle le sentait.

Et puis on n’était qu’en septembre, elle avait encore une marge de progression phénoménale. Les perfectionnistes aiment être sûrs de leur excuse lorsqu’ils abandonnent une tâche. Là, c’était vraiment le cas.

***

Marlene vivait un rêve tout éveillée, c’était cette fameuse connexion entre elle et Mary qui faisait qu’elles sentaient les mêmes émotions au même moment. Mary d’abord s’était assise et l’avait regardée et elle avait su de suite que dans son regard il y avait plus de désir pour elle que d’envie de passer sérieusement ces quatre pirouettes – ou du moins, à cet instant.

Elles s’étaient mises d’accord de quelques regards et quelques bribes de mots, l’une parce qu’elle en avait perdu l’usage des mots de cette tournure des événements, l’autre parce qu’elle ne parlait pas forcément beaucoup en règle générale. Oui, Mary s’exprimait bien mieux avec son corps, corps auquel elle ordonnait ce qu’il devait exprimer et qui lui répondait au doigt et à l’œil.

Et de sentir les cheveux de Marlene dans son cou puis contre son torse et ailleurs sur ses cuisses menues, même si la sensation n’était pas forcément la meilleure parce que Marlene avait des fourches ; d’onduler son dos et sa taille malgré les courbatures ; d’avoir auprès d’elle la silhouette de Marlene, une silhouette qu’elle aurait abhorrée pour elle-même car Marlene n’était pas une ballerine et Mary était un peu formatée quand même à ne vivre que par la danse, et pourtant silhouette ici aimée, désirée et désirable ; de vivre quelque chose de fort que le ballet n’offrait pas, un moment de liberté et pourtant de synchronisation, d’écoute des corps, d’écoute des autres, de danser en corps de ballet ailleurs que dans un studio…

Toutefois, Mary était moins économe de mots quand la nécessité l’exigeait. Et là, maintenant, tout de suite, elle avait urgemment besoin de guider un peu Marlene, de lui montrer comment elle souhaitait être touchée et caressée et aimée, et finalement de perdre un peu le contrôle de son corps pendant quelques minutes volées au temps qui passait trop vite, et de murmurer des doux mots à sa petite amie.

Marlene voulait bien de tout alors elle acceptait, et il lui semblait que les derniers vinyles de hard rock qu’elle partageait avec Sirius lui vrillaient moins les oreilles que les sensations provoquées par n’importe quel acte sexuel partagé avec Mary lui vrillaient tout le corps.

« J’aurai dû faire de la danse contemporaine, en fin de compte.

— Il y a un rapport ? murmura Marlene.

— Certainement.

— Tu es mystérieuse, comme fille, parfois. Tu m’échappes un peu. »

Mary sourit gentiment en retour.

« Bien sûr que la danse peut exprimer littéralement, métaphoriquement, mais presque tout aussi intensément, un acte d’amour entre deux personnes. »

Marlene se sentit sourire encore plus fort, suivant en cela les battements de son cœur.

« Je t’emmènerai voir Le Chant du compagnon errant dès qu’il passera quelque part.

— Il y a un rapport ? souffla à nouveau Marlene.

— Toujours. »

Mary se pencha vers elle et l’embrasse tout doucement.

« J’ai bien aimé, Marlene.

— Moi aussi Mary. Je t’aime. Même si je ne comprends pas tout à la danse, je t’aime avec ça puisque de toute façon il y a beaucoup de danse en toi. »

 

 

 

 

End Notes:

... car pour elle, ♥ est seulement ce qui est danse ♥

Amnesie (allez la lire, c'est une autrice très stylisée !) m'a appris à faire des coeurs alors j'en profite héhé.

J'interviens sur le fait que le physique de Mary n'est pas censé être beau, seule sa danse l'est - du moins on peut l'imaginer. Qu'on puisse voir les côtes et la colonne vertrébrale d'une jeune fille de 17 ans à travers un vêtement de surcroît, même si près du corps, n'est pas un bon signe pour la santé. Ma description se veut réaliste, mais n'est pas un modèle à suivre.

Autre chose, Marlene elle-même évoque, dans le fil de ses pensées, que l'accoutumance à la douleur n'est pas une chose si saine que cela. J'adore la danse, vraiment, de tout mon coeur, mais ce n'est pas un milieu très sain. Les choses tendent à s'améliorer, doucement, et certaines choses qui se faisaient dans les années 1970 sont proscrites aujourd'hui, fort heureusement.

Bref, soyez Marlene, lucide et bienveillant en même temps ♥

Piti

16. La Reine des Dryades by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit insolite du 18 février 2023, 23h, défi image : tableau Le Foyer de la Danse à l'Opéra de la rue Le Peltier d'Edgar Degas, vers 1872, musée d'Orsay.

J'avais écrit deux heures plus tôt un texte sur la danse, et voilà qu'on me donne ce magnifique tableau comme source d'inspiration ♥

J'ai donc réécrit sur Mary et la danse...

 

 

Mary se concentrait.

Elle avait passé ses trois petites Aspics, elle aurait les notes requises pour que sa formation soit validée par Dumbledore parce qu’elle avait travaillé juste ce qu’il fallait aux dires de Lily qui l’avait beaucoup aidée. Et Lily ne se trompait jamais quand il s’agissait de parler de scolarité. Poudlard était derrière eux, maintenant.

Ils allaient tous rejoindre l’Ordre du Phénix. Mary se demandait si elle était égoïste, mais elle avait envie de vivre ce pour quoi elle avait toujours vécu. Dans sa tête, le plan était limpide ; elle allait se battre là, dans deux heures, pour passer l’audition d’entrée dans le corps de ballet de l’Opéra de Paris. Si elle était recalée, elle rejoindrait directement l’Ordre. Si elle était acceptée, elle danserait seulement le premier ballet, poserait sa démission ensuite, et rejoindrait l’Ordre. Non, décidément, comment faire une croix sur le corps du ballet du Lac des Cygnes, qui avait été annoncé comme ballet d’ouverture lors de la révélation de la saison 1978-1979 ?

Savoir qu’elle finirait inéluctablement à l’Ordre lui donnait une force incommensurable. Beaucoup de ses camarades ballerines parlaient de le nécessité de réussir comme une victoire pour une carrière nécessairement trop courte. Mary ne disait rien évidemment – elle avait pris soin de se lier d’amitié avec personne ici, parce que personne ne devait savoir qu’elle était une sorcière – mais pour elle, la question était plus profonde. Ce n’était pas sa carrière qui allait être trop courte, ce serait probablement sa vie. Elle devait avoir ce concours parce que ce serait l’unique façon qu’elle aurait de s’accomplir en tant que danseuse, elle n’avait aucune voie de secours, aucune compagnie plus petite pour laquelle auditionner, rien.

L’Opéra ou rien, c’en était presque cliché à pleurer, mais Mary considérait que tous les efforts qu’elle avait faits, à l’aune de ce qu’elle allait devoir faire à l’Ordre, méritaient un peu d’égoïsme. Ses amis étaient au courant, et ça lui avait donné une détermination incroyable que de se sentir soutenue dans ses choix. Pour cette journée particulière, Mary avait souhaité être accompagnée seulement par ses parents et son petit frère John, parce qu’elle savait que, quoi qu’il adviendrait, elle les verrait moins souvent ensuite, et elle voulait qu’ils soient fiers d’elle, une dernière fois en famille.

Ils s’étaient quittés avec un gros câlin devant l’entrée des artistes, eux allaient angoisser dans un café quelconque avant de s’installer dans le public sous le magnifique plafond de Chagall. Mary avait senti le trac descendre un peu au fond de son estomac, elle avait soufflé un bon coup, elle allait gérer, comme d’habitude.

Elle avait un petit peu mal dormi la veille, car elle devait s’avouer avoir senti beaucoup d’émotions à l’idée de savoir que demain, sa vie changerait, et mangé sa nourriture des grands jours comme il fallait – un litre et demi d’eau le matin pour bien s’hydrater, un muesli léger de pommes et de bananes et de yaourt, et elle avait une salade de pâtes dans son sac qu’elle finirait deux heures tout pile avant son passage.

Là, elle était en train de vivre le début de quelque chose qui la dépassait, elle qui, comme les autres filles, voulait tout maîtriser de sa danse, de son corps, de son apparence, de sa technique. Elle était dans le foyer de la danse, son chignon de gala très tiré et très laqué bien ajusté, ses vêtements de chauffe empilés car ce serait trop bête se faire une élongation maintenant, en train de choisir sa paire de pointes pour sa première variation. C’était la Reine des Dryades, une variation lente avec des équilibres suspendus. Elle s’en donc était gardée trois, suffisamment « faites » comme elles disaient toutes dans leur jargon, mais encore assez rigides pour bien la soutenir, et pas trop sales sur la plateforme, bien sûr.

Ensuite, échauffements, tout doux d’abord. Délier chaque muscle, chaque articulation, chaque ligament, chaque tendon. Puis assouplissements, puis une barre très technique portée sur les levers de jambe parce que c’est ce dont elle allait avoir besoin, dans désormais une heure et demie. Puis, inspection des petits bobos sur les pieds, réparation, protection, enfilage des pointes. Elle ne faisait pas cela à chaque fois qu’elle passait sur scène, mais là, c’était tellement vital, qu’elle ne pouvait se permettre de perdre un ruban, alors elle les noua puis les cousit.

Ensuite, elle prépara consciencieusement ses pieds.

Elle aimait cette atmosphère, elle se prit à sourire toute seule. Tout le monde était silencieux, parfois un petit chuchotement entre deux filles bourdonnait, la musique des petits pas rythmait le temps qui passait, et les couinements de pointes de celles qui travaillaient les pirouettes finales de la variation finirent par devenir majoritaires. Les plus braves se donnaient entre elles des dernières corrections, s’aspergeaient les cheveux de laque entre elles, se défroissaient mutuellement les rangées de tulle des tutus.

Mary enfila aussi le sien, une fille lui en boutonna le corsage. Elles avaient toute le tutu blanc réglementaire. La seule distinction entre elles se ferait sur la danse pure : la technique, la musicalité, la dimension artistique, la capacité à se projeter jusqu’au dernier rang des spectateurs.

Et puis leur professeur, habillée d’un élégant tailleur en lainage bleu marine, avec de hauts escarpins, vint leur dire, à elle et à ses autres camarades de l’Ecole de danse que le concours allait commencer, et leur souhaiter une bonne chance. Ce n’était pas vraiment l’heure d’avoir pitié des autres candidates qui ne venaient pas de la formation la plus prestigieuse en France, même si à la vérité c’était un peu triste car, il fallait bien l’avouer, elles partaient avec du retard.

« N’oubliez pas, les filles, c’est la version de Noureev, donc ce n’est pas une fée lyrique, c’est une femme forte qui influe sur le destin des autres avec sa magie. »

Mary recueillit cette parole dans son cœur qui était encore un peu un cœur de sorcière même si l’immense majorité battait pour la danse à cet instant.

Enfin, une voix retentit dans un haut-parleur.

« Mesdemoiselles, dans dix minutes, début du concours d’admission pour le corps de ballet féminin de l’Opéra de Paris. Variation imposée : La Reine des Dryades, Don Quichotte, acte II, chorégraphie de Rudolf Noureev. »

Mary passait en première. C’était une position difficile, car le jury se souviendrait forcément moins d’elle à la fin de l’après-midi, mais elle serait en quelque sorte l’étalon pour la notation.

« Tu es prête ?

— Oui, professeure.

— Bien. N’oublie pas, Mary, quoiqu’il arrive, que tu tombes, que tu t’arrêtes, que tu trébuches, tu restes dans le personnage et tu danses au moins avec tes bras et ton dos. »

Mary jeta un dernier regard autour d’elle. Les autres filles qui commençaient à stresser, hésitant entre se fatiguer en continuant à s’entraîner et se refroidir à arrêter de s’entraîner. Le Foyer, ses dorures, son ambiance, qu’elle souhaitait ardemment revoir, mais cette fois-ci dans un autre tutu blanc, celui du Lac des Cygnes.

Elle inspira fortement, souffla tout l’air de ses poumons, le refit trois fois, et passa la porte, emprunta les couloirs en dédale et en moins de deux minutes, se trouva derrière le rideau de la coulisse.

La scène était encore plus immense que dans tous ses souvenirs. En même temps, pour les spectacles, il y avait des décors, des figurants, de l’animation en coulisse.

Elle monta une dernière fois sur ses pointes. Elle sentait ses cuisses bien fortes, prêtes à faire l’effort. Ses genoux ne tremblaient pas. Son cœur allait s’envoler.

« Première candidate. Mary MacDonald, dix-huit ans. »

Elle fit sa préparation, et posa un pied, puis deux sur la scène de sa vie. 

 

 

 

 

 

End Notes:

Je pensais beaucoup au Lac des Cygnes parce que c'est vraiment un ballet qui a quelque chose en plus des autres, je ne sais si c'est la musique, si c'est parce que c'est l'un des plus beaux corps de ballet féminin qui soit...

Et je n'aurai jamais pensé qu'on puisse trouver le récapitulatif d'une saison en moins de dix secondes sur internet ! Et donc roulement de tambours... le ballet d'ouverture de la saison 1978-1979 était Romeo et Juliette et Le Lac fut programmé en décembre ! Mais je garde Le Lac, j'ai trop imaginé Mary répéter sur la musique de Tchaikovsky ♥

Quant à la variation de la Reine des Dryades, si vous tapez ces mots suivis du nom "Alice Renavand" dans un moteur de recherche de vidéos bien connu, vous passerez deux très jolies minutes de votre vie ♥

En revanche je suis sûre que Noureev avait déjà créé son Don Quichotte, ballet dans lequel est incluse la Reine des Dryades, en 1978. La phrase dite par la professeure de danse, je l'ai entendue dite par une professeure dans un reportage sur l'Ecole de Danse de l'Opera de Paris (actuelle !). Je l'ai reprise comme une petite référence personnelle à ce reportage qui était magnifique et bien sûr à ce qui caractérise les personnages de Noureev, que j'adore également.

Piti

17. Nuit de Lune by PititeCitrouille
Author's Notes:

Texte écrit lors de la Nuit insolite du 18 février 2023, thème de 22h, défi image - qui représentait une pleine lune (je crois, si je me souviens bien haha).

 

Maman, je t’aime et tu me manques.

J’ai toujours aimé les plafonds. Il y en a qui disent que je suis toquée à toujours regarder là-haut. Mais je m’en moque, je sais que tu es toujours quelque part, assise dans un coin, à veiller sur moi.

Sur le plafond de ma chambre à la maison, j’ai mis les portraits de mes amis ou de personnes que je considère comme telles même si elles ne le savent pas toujours. Ginny, la fidèle qui m’a prise telle que je suis. Neville, moqué même au sein de sa propre Maison, comme moi, mais ce n’est pas grave car on est là l’un pour l’autre aussi. Ron, parce qu’être l’ami de Harry Potter en passant au-dessus des rumeurs, c’est être l’ami du monde. Harry donc évidemment, Maman, tu me manques, mais lui il ne peut même pas en pleurer dans les bras de son père. Et enfin Hermione, une fille qui juge peut-être un peu vite mais une chouette fille qui tient à ses idées et qui donnerait sa vie pour que j’aie toujours le droit de raconter ce que les autres appellent des ramassis de bêtises.

A Poudlard, j’ai attaché en haut de mon lit des guirlandes et des fleurs et des boutons et des fils en laine, j’ai tissé mon univers intérieur, mes couleurs et ma poésie, personne ne me comprend et c’est parfois tant mieux.

Toi, je t’ai partout avec moi, et je te sens encore plus lorsque je suis étendue, comme maintenant, sur l’herbe humide et froide de la nuit, au bord du Lac Noir, pas assez noir pour ne pas refléter le ciel. La nuit est claire et douce et fraîche et lumineuse et il y a des étoiles dans le ciel.

Dis-moi que c’est toi Maman, tes multiples potions, tes multiples équations, des multiples équations, parce que tu cherchais à donner un sens à tout, à toute chose existante, même aux choses loin de nous, aux étoiles par exemple. Et dans chaque étoile quand je perçois un scintillement, je crois voir un battement de ton cœur, un clin d’œil, une attention de toi à moi. Je ne crois pas être égoïste car je suis seule dehors ce soir, je n’ai pas à partager la beauté du ciel avec d’autres, et je me sens enveloppée et protégée, bien plus que si j’étais quelque part sous un toit.

C’est aussi pour ça que je décore mes plafonds. Je ne veux pas que mon esprit soit enfermé. Si mon esprit croise des images de mes amis ou sa propre image, alors il peut s’évader ailleurs, quelque part dans l’informe universel. Je ne veux pas être enfermée, Maman, je veux que mon esprit puisse toujours courir après le tien, qu’on puisse cavaler ensemble à la recherche de l’inconnu et de l’étrange.

Quand je regarde les étoiles, quand je suis seule dans la nuit, je n’ai pas peur Maman, et je sais de mieux en mieux qui je veux être. Plus tard, je serai magizoologiste. On ira ensemble par-delà les montagnes par-delà les forêts par-delà les lacs et on ira s’installer à observer des êtres qui vivent en complète et totale liberté.

Maman, je t’aime, et plus je t’aime, plus j’arrive à me dire que tu me manques de moins en moins car je sais que tu seras toujours avec moi en esprit, et il n’y a plus que ça qui compte. 

 

End Notes:

Luna est un personnage que j'adore depuis le fond de mon coeur ♥ 

J'espère que vous avez aimé passer ce temps avec elle.

Cette histoire de plafond décoré, je l'avais un peu dans ma tête depuis un certain temps, mais je l'ai vraiment conscientisée en regardant la série Mental, où un personnage s'exprime via ce moyen.

A bientôt,

Piti

18. Inhibition sélective by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit insolite du 18 février 2023, 21h, défi scénaristique : votre personnage fait une rencontre qui bouleverse ses sens et ses émotions.


CW - dépression et anti-dépresseurs

Dans mon univers personnel, James a une tante qui décède fin juin 1975, ce qu'il vit mal en plus d'un tas d'autres raisons non nécessaires à la compréhension du texte. Ceci l'amène à une dépression puis un suivi en psychiatrie à Sainte-Mangouste en août 1975 (ui je tiens une chronologie détaillée). C'est là que se passe le texte.

 

Trop de colère, trop de rage, trop de trop-plein et trop de trop.

Vivre dans un monde en guerre. Perdre sa tante. Si c’était bien cela être amoureux, aimer une fille qui vivait en fin de compte avec un Avada Kedavra planant au-dessus de sa tête. S’inquiéter, se tourner le sang, se tourner l’estomac.

Bien sûr, ne pas être un ange, en fait, il faut dire les mots, un harceleur, lui aussi, soi-disant pour la bonne cause, mais un harceleur. S’en vouloir, mais recommencer, puis s’en vouloir, puis recommencer, jusqu’à en avoir mal au fond des tripes. Pleurer dans son coin car « Sirius, lui, a une vie pire que la mienne puisqu’il vit un enfer chez ses parents alors que moi j’adore mes parents », car « Peter, lui, a une vie pire que la mienne puisque ses parents ne s’occupent pas vraiment de lui, et il crève de leur indifférence », car « Remus se transforme tous les mois dans la fatigue et les blessures, se prend les pires préjugés de la société et est aussi dans le viseur de la guerre ».

Ne pas comprendre qu’on peut être privilégié et dépressif, et continuer à faire des « choses pas bien ».

Et puis un jour, un concours de circonstances, la salle d’attente, le pédopsychiatre de Sainte-Mangouste. Raconter sans fard, avec dureté parfois, mais aussi du courage et de la sincérité, hésiter à éluder des détails mais dans son regard faire passer tout ce qui est tu.

Thérapie, groupes de parole, rendez-vous échelonnés sur l’année scolaire, « personne ne saura rien » et c’est vrai qu’il passe déjà beaucoup trop de temps dans le bureau de McGonagall pour que quelqu’un se doute vraiment de quelque chose si c’est elle qui s’occupe de l’acheminer là-bas à heure fixe tous les quinze jours.

Et surtout, les antidépresseurs en fiole. Ce sont des antidépresseurs sorciers, « on commence par ceux-ci, ils sont plus doux que ceux Moldus », pourquoi pas, il fait confiance au professionnel.

Quand il les prend, ça lui fait du bien. Ca change beaucoup de choses, mais ça fait indéniablement du bien. Au début, c'est sûr qu’il a un peu l’impression d’être abruti, de somnoler, mais tant qu’à faire, ça lui permet de passer des vraies nuits, les premières depuis combien de temps ? Il ne pense plus, il s’allonge, ses yeux se ferment, et rien ne vient le troubler, et surtout rien qui n’existe déjà dans son propre cerveau ne vient le troubler.

Les jours qui suivent, il n’irait pas jusqu’à dire qu’il est devenu heureux. Mais il a moins envie de partir en vrille dès qu’on lui parle, il est moins irritable, et il ne s’énerve pas pour rien – quand on lui dit bonjour, ça ne le retourne pas qu’on lui dise bonjour, et quand on ne lui dit pas bonjour, ça ne le retourne pas non plus qu’on ne lui dise pas bonjour, alors qu’avant… Et ça l’aide à se concentrer sur ce qui importe vraiment, à ne pas se miner sur des futilités, et avoir un peu plus de lucidité sur le monde qui l’entoure.

Quand James s’amuse à faire filtrer la lumière du matin du huitième jour au travers de la texture légèrement opaque du filtre, il dit à voix haute au médicament :

« Merci, vieux. »

End Notes:

La santé mentale est un sujet qui revient très régulièrement dans mes textes. Par exemple, sur celle de James, j'ai déjà écrit des texte lors des Nuits (Chap 5. A la vie, à la mort, Chap 11. Lacrimosa...) et surtout j'ai énormément développé cet aspect dans mon gros projet de coeur Le Temps est à Mère - qui reviendra dans quelques semaines promis juré craché, je n'abandonne jamais ce que je commence, qu'importe le temps consacré. En l'occurrence l'irl est fantasque et capricieuse ; en tout cas je suis en phase de finition de la partie 2 et j'ai même commencé à écrire un peu la partie 3.

Il est parfois difficile d'entendre "prenez soin de vous" lorsqu'on ne sait plus trop ce que ça veut dire ou qu'on n'a plus la force d'entendre des phrases à l'impératif. Si tel est le cas, je ne suis pas formée pour quoi que ce soit, mais je vous envoie tout mon soutien, et rappelle qu'un psy est une personne dénuée d'affect qui peut tout écouter, au moins en théorie.

Des bisous à tout le monde ♥

Piti

19. Le Soleil se lève et rien n'a changé depuis hier by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit classique du 17 mars 2023, 20h, thème écrit : aurore.

CW - évocation de mort, de deuil

Fred avait beau fanfaronner tant qu’il le voulait, il cachait bien au fond de son cœur tout ce que représentait George pour lui. Pour les autres, ils seraient éternellement les copains du Quidditch, les faiseurs d’inventions magiques en tout genre, les créateurs de rires et de bonne humeur. Et il n’y avait donc pas de raison, pour les autres, que les deux frères ne représentent pas autre chose l’un pour l’autre – au fond, ils étaient jumeaux, mais surtout, ils étaient drôles tous les deux.

Pourtant, quand Fred avait vu le visage de George bariolé de sang en arrivant au Terrier, il avait cru qu’il allait s’évanouir. Oh non, la vue du sang, ça ne l’inquiétait ni plus ni moins que d’autre, voir son frère en piteux état aussi – car seuls les vrais mordus de Quidditch savent qu’il est possible d’être maculé de boue à la fin d’un match pluvieux à souhait. Non, là, c’était le tout, le contexte, la menace, il voyait bien que quelque chose n’allait pas. Et il avait compris, bien sûr, que sa mère aille de suite au-devant de son fils, mais il aurait voulu pouvoir exprimer librement à George ce poids qui s’était soudainement formé dans sa poitrine.

Il n’en avait pas eu le courage, comme ça, devant tout le monde, entre ceux qui s’affolaient, ceux qui étaient contents d’arriver, ceux qui commentaient, englouti sous tant de bruit et tant d’empressement. Et puis comme d’autres binômes arrivaient, au fur et à mesure, il avait lâché l’affaire, emmenant avec lui sa nausée dans leur chambre, sans avoir pu partager autre chose avec George qu’une blague si pourrie qu’il lui avait fallu y réfléchir deux fois pour la comprendre.

Il en voulait un petit peu à sa mère d’avoir aménagé un chevet pour George sur le canapé du salon. Elle le privait s’en sans rendre compte d’une retrouvaille avec son frère.

Et toute la nuit, les questions lancinantes.

D’abord, des questions qu’il se forçait à se poser, alors que ce n’étaient que des interrogations subsidiaires, qui n’avaient absolument pas l’âme de retranscrire ce qui lui pesait si fort. La plaie pouvait-elle s’infecter ? Rogue était-il vraiment un agent double ? Ce genre de choses. Mais ce sont des choses qui ne l’occupèrent pas beaucoup, et donc pas assez longtemps.

Alors quand la nuit fut encore plus noire, et pourtant qu’il y voyait assez pour distinguer l’absence de George sur le lit d’à côté, il ne put éviter de se faire tarauder par ce qui comptait vraiment, et avait toujours compté, et compterait toujours. Et si George était tombé de son balai ? Et si ça avait été un sort mortel ? Et s’il y avait un venin fatal dans la plaie ? Et pour finir à l’essentiel, et si la mort de George était advenue ou adviendrait ?

Il avait l’impression très nette que c’était comme une sorte d’entraînement à pour quand ça arriverait. Avec la guerre, il y pensait de plus en plus. Ils restaient alors, si c’était possible, encore plus ensemble que jamais. Vivre ou mourir, mais à deux, toujours. La question de savoir qui partirait en premier était insupportable. Elle rendait presqu’indolore la perspective de mourir ; il suffisait d’être touché en même temps que l’autre. Voilà tout.

Il était donc là, en train de hoqueter dans son lit, à agripper de la paume de sa main son drap-housse, à la recherche désespérée d’un réconfort quelconque. Il avait été séparé de son frère quelques dizaines de minutes tout au plus, et voilà comment ça finissait. Qu’est-ce qui se passerait, alors, le jour où ils devraient partir chacun de leur côté une journée ? Comment savoir ? Comment s’y préparer ?

Et Fred se retournait, dans le sens horaire, puis dans le sens anti-horaire, passait son bras sous l’oreiller, puis au-dessus, gigotait une jambe, puis l’autre, à se battre contre les démons invisibles qui grignotaient son âme et sa nuit. Ils ne lâchèrent guère, les bougres !

Fred fut certain de n’avoir pas encore fermé l’œil lorsqu’il entr’aperçut, par les jours du volet, la couleur grise du ciel. C’était l’aurore. Il n’y tint plus.

Ca faisait plus de six heures qu’ils ne s’étaient pas retrouvés comme il le fallait, qu’ils avaient subis une atteinte sur l’un deux qui les atteignait tous les deux, qu’ils avaient la preuve à vif que leur vie valait si peu seule. Il se leva et descendit l’escalier.

Dans le salon, les volets aussi étaient ouverts. Non, ce n’était pas un oubli.

C’était juste George qui s’était levé, comme lui, toujours, réglés ensemble, comme leurs flèches respectives sur l’horloge de leur mère l’avaient toujours été. Il avait ouvert les volets pour observer un peu le ciel changeant de l’aurore, accoudé à l’une des fenêtres.

« Hey ! »

Ce fut le seul mot que Fred se sentit capable de prononcer lorsqu’il effleura le dos de George, d’une voix étranglée, qu’il ne reconnut pas de prime abord.

« Oh non Fred… »

Ce fut la réponse à peine plus élaborée de George. Il se retourna bien vite et fondit sur la poitrine de Fred, les bras resserrés, le nez fourré dans son cou, la respiration légèrement haletante. Fred cala sa tête contre la sienne, et entreprit de lui caresser le dos, les épaules et le bas de la nuque. George passa ensuite ses mains autour de sa taille afin de se rapprocher encore, et ils sentirent tous les deux qu’ils allaient commencer à pleurer.

A la fin, quand ils furent calmés, ils relevèrent la tête en même temps – toujours en même temps. Il faisait déjà chaud dehors, mais la perte de contact immédiate sur sa joue donna bien plutôt à Fred une impression de fraîcheur.

« J’ai eu si peur.

— Chut, répondit George. C’est fini maintenant.

— Et ça ? fit Fred en désignant le bandage de son menton.

— Rien, je te jure. Je préfère être en pièces à pouvoir encore être avec toi et à te faire des câlins, que dans une cabane en bois séparé de toi. »

Il ponctua sa dernière phrase d’un bisou sur la pommette de Fred.

« En revanche, tu as l’air défoncé.

— Ha, ha, ha, j’ai pas dormi.

— T’es bête. Pour ma part, j’ai eu une potion spéciale petits bobos douloureux de Maman, j’ai dormi un peu trop lourdement pour dire que mon sommeil a été vraiment efficace, mais j’ai dormi, au moins.

— Tu es donc aussi défoncé que moi, mais pour une autre raison.

— T’es bête, Fred.

— T’es bête, George. Bon, je vais me coucher.

— A tout à l’heure.

— A tout à l’heure. »

Et voilà Fred qui remonte le cœur encore tourmenté mais bien plus léger les escaliers, tandis que George se sert une rasade de la potion « spéciale petits bobos douloureux » qui est, en réalité, un très puissant antalgique, mais peu importe, Fred n’est pas aussi bête qu’il se donne l’air de l’être et il aura compris.

Le soleil est maintenant assez haut dans le ciel et chauffe la moitié des murs du salon.

« J’ai raté l’aurore à cause de toi, Fred, murmure George. »

En même temps, il pensait : qui d’autre, à part toi, me connaîtrait assez pour venir me voir à l’aurore, d’un, et m’empêcher de la voir car il aurait plus important à m’offrir, de deux ?

 

 

 

End Notes:

Piti

20. Eclosion by PititeCitrouille
Author's Notes:

Une petite lecture toute douce aujourd'hui, oui ça m'arrive ♥

Nuit classique du 17 mars 2023, 22h, thème écrit : "floraison"

 

Ginger avait trouvé amusant de se marier avec une femme prénommée Violet. C’était la rencontre de deux fleurs ou deux parfums. On ne décide pas de ce genre de sentiment, évidemment.

Pétunia était venue si vite. Elle était un petit peu la raison de leur mariage, mais elle représentait tellement plus. Lily était venue ensuite, une fleur de plus dans le jardin familial.

Ils étaient jeunes, et ils avaient ces petites fleurs toutes fragiles à aimer et chérir. Tant pis pour les rumeurs, les fleurs ne fanent pas sous les rumeurs.

Les fleurs prospéraient et grandissaient heureuses sous le soleil.

End Notes:

Merci à vous pour votre lecture,

PititeCitrouille

21. Je m'appelle Pétunia by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit classique du 17 mars 2023, 22h, thème écrit : "floraison".

 

Pétunia aimait peu son prénom. Après tout, rien de moins commun que ce prénom. Pétunia. Un nom de fleur, certes, mais elle ne la connaissait même pas.

Et puis un jour, sa maman lui montre une potée de pétunias. Une expérience amusante, parce que ses pétales collent au nez quand on inspire fort dessus. Autre chose, elles sont très douces au toucher. Ce jour, quelque chose a changé, Pétunia connaît sa fleur éponyme, ce qui représente déjà beaucoup.

Mais Pétunia est butée. Plutôt, on ne change pas comme ça ce genre de sentiment.

Alors, elle aime encore peu son prénom.

22. Autre chose by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit classique du 19 Mai 2023, thème écrit de 21h : "rupture"

 

 

Luna avait toujours senti ce décalage, sans jamais vraiment se l’avouer. Elle le mettait sur le compte des autres différences, bien plus évidentes, qu’il y avait entre elle et ce que les gens appelaient « la normalité », comme ses vêtements, ses sujets de prédilection, ou encore sa façon de s’exprimer et même de marcher. Ce ne devait être que ça, qu’un signe de plus, au fond, qu’elle ne pourrait jamais avoir la même vie que les autres.

Toutefois, elle sentait qu’elle avait besoin de poser un mot dessus.

Elle aimait très fort Rolf.

Elle adorait discuter avec lui car sa conversation était intéressante, se tapir dans des prairies ou des buissons pour observer des bêtes et sentir leurs souffles à l’unisson devant l’attente et la beauté de la nature, les surprises culinaires qu’ils se faisaient l’un à l’autre, lire un ouvrage à la même vitesse que lui, échanger des habits et des bijoux avec lui, l’embrasser du bout des lèvres en imitant les coléoptères, reprendre le chant des oiseaux et siffler dans les oripeaux qu’ils fabriquaient eux-mêmes.

Elle se confiait librement sur cette relation avec son père.

Et elle ne comprenait pas pourquoi elle n’y arrivait pas avec d’autres personnes, en particulier celles de son âge. Ou plutôt, si, mais elle préférait éviter ce constat. Elle ne voulait pas avoir de comptes à rendre sur des perspectives plus intimistes de leur vie, d’autant que pour elle, c’était précisément cette liste mentale qui constituait, bouts à bouts, l’intimité qu’elle partageait avec lui.

Elle n’avait jamais compris les questions torturées de ses camarades de dortoir sur la sexualité, et avec toute l’empathie dont elle avait été capable, avait écouté, ou plutôt entendu, les confidences d’une Ginny un peu perdue une fois la guerre finie. Elle avait essayé de s’y intéresser vraiment, parce que Ginny était son amie, à tel point qu’elle savait être la seule à laquelle Ginny se confiait.

Rolf avait manifesté plusieurs fois déjà son désir. Elle avait toujours refusé d’y répondre. Bien sûr, il l’avait respectée, ce n’était pas là la question. Elle se demandait simplement s’il y avait une sorte de délai intangible à partir duquel les amoureux en couple commencent à exprimer leurs désirs, et s’attendent à ce que l’autre y réponde favorablement.

Au fil du temps, bien que Rolf ne lui faisait aucun reproche et n’avait pas changé son attitude à son égard, elle avait pris peur. Cette situation durerait-elle toute la vie ? Finirait-il par la quitter ? Était-elle crédible à se prononcer en faveur de la liberté sexuelle et de l’émancipation lorsqu’il fallait se prononcer politiquement ? Qu’est-ce qui n’allait pas ?

Ces questions-là, elle ne les posa pas à son père. Elle avait peur des réponses que pouvait lui apporter l’un de ses modèles de vie. Elle se trouvait ridicule à avoir peur, puisque son père l’écoutait badiner sur le potager de Rolf depuis des mois sans jamais lui demander quoi que ce soit sur leur vie sexuelle.

Ginny trouva la faille, un jour qu’elle lui rendait visite, et que Luna était un tantinet taciturne puisque Rolf avait, la soirée dernière, simplement émis un « pourquoi ? » qui s’était voulu doux et compréhensif, mais qui avait exacerbé, comme un aiguillon percé dans son cœur, ce sentiment de rupture complète avec le cours attendu de la jeunesse.

Luna finit par exposer piteusement sa situation. La honte prenait le pas sur la peur, maintenant. Elle se trouvait gauche, maladroite, à vingt ans passés, de raconter ce qu’elle croyait être un problème d’immaturité, de gaminerie, à une jeune femme qui, elle le savait déjà, menait une vie tranquille et sereine avec Harry – ou en tout cas plus tranquille et sereine depuis que les douleurs de la guerre s’étaient étouffées.

Plus elle avançait dans son récit, plus elle se sentait en rupture complète avec son âge et son époque.

A sa grande surprise, Ginny eut une réaction d’une banalité désarmante.

« Ah, ça me rappelle Charlie. Il est célibataire, tout le monde le sait, mais peu savent que c’est vraiment par choix. Il est asexuel, il y en a plein partout et c’est la vie. Lui, il ne tombe pas amoureux, mais il dit qu’il y en a qui construisent des couples, des foyers, et qui ont même des enfants. C’est juste un truc à se dire, j’imagine. Enfin, c’est peut-être quelque chose sur lequel tu pourrais te renseigner, vérifier que ça te correspond et en parler à Rolf. C’est un bon gars, il comprendra. »

Luna commença à sentir quelques larmes perler à la commissure de ses paupières.

« Oh non Luna, je ne voulais pas te faire pleurer ! s’écria Ginny, en se précipitant pour la prendre dans ses bras.

— Ça va, répondit Luna en souriant et fermant les yeux. Il suffit juste que je dise à Rolf que j’ai trouvé ce que je suis. »

Elle prit un instant pour énoncer lentement.

« Je suis asexuelle et je souhaiterais continuer à vivre avec toi. »

 

 

End Notes:

Un peu de douceur, je l'espère, pour les fiertés asexuelles ♥

Piti

23. Des chiffres, rien que des chiffres by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit du 19 mai 2023, thème écrit de 22h : "croissance".

La TSF chevrotait en grésillant quelques extraits de l’interview de Thatcher, la nouvelle cheffe des Tories.

« Elle va finir Première Ministre, putain ! s’étrangla Ginger. »

Violet ramassa ses deux mains sur la table, faisant pianoter ses doigts sur la toile cirée. Elle secouait négativement la tête.

« Misère…  enchérit-elle, plus pour elle-même que pour son mari. Que des chiffres, rien que des chiffres. L’humain – rien, rien. Rien. »

Lily avait appris récemment que Dumbledore siégeait au Magenmagot. Elle se demanda ce qu’il en pensait, lui, de l’économie, de la croissance, du droit de grève, tout ça. Personne n’en parlait à Poudlard.

 

End Notes:

Merci pour votre lecture !

Piti

24. Leçon de tricot by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit classique du 19 mai 2023, 22h, thème écrit : "croissance"

Elle n’en revenait pas.

Elle prenait pourtant bien soin de prendre leurs mesures le dernier jour avant la rentrée… On ne sait jamais !

Rien n’y faisait. Quand Bill et Charlie tentaient de passer leur tête dans le pull offert à Noël, les oreilles rentraient en chauffant – au mieux. En deuxième année, Bill n’avait même pas pu l’enfiler.

Tout le monde en avait ri. Les enfants, en particulier, sont impitoyables !

Alors, Molly décida de prendre des mesures exceptionnelles. Il fallait que la croissance des pulls l’emporte sur celle de ses enfants !

Le secret de la réussite : deux centimètres de plus.

End Notes:

En pensant à ma bien-aimée grand-mère tricoteuse ♥

Merci pour votre lecture,

Piti

25. Partie de plage by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit classique du 22 juillet 2023, thème de minuit, image : cette dernière représentait la plage de St-Andrews.

Lily poussa son vélo sur la côte, riant à s’en décrocher les mâchoires de ne pas y parvenir. Il faut dire qu’elle n’était pas aidée, Severus étant assis sur la jante arrière, les jambes pendantes dans le vide, déséquilibrant le cycle à chaque tour de pédalier !

« Bon, allez, je descends, fit le garçon, riant lui aussi à perdre haleine. Ce serait plus simple si j’avais un vélo à moi.

— Mon vélo est le tien, Sev, proposa spontanément la fille de bon cœur. »

Le vélo était la richesse unique des gamins du coin, des enfants des miniers. Dans la hiérarchie sociale de la ville de Cokeworth – mais c’était valable pour la ville d’à côté et ses usines de toile de jute et la ville de l’autre côté et sa forge monumentale – les enfants des travailleurs, pauvres, étaient donc pauvres, mais ils avaient un vélo, signe qui les dissociait des enfants des chômeurs. Eileen Rogue n’avaient ainsi pas de quoi offrir un vélo à son unique fils.

Lily, comme Pétunia avant elle, avait eu son vélo vers treize ans – lorsque sa croissance avait assez ralenti pour qu’on puisse préjuger qu’elle pourrait le garder longtemps.

Severus se contenta de sourire et comme elle descendait de selle et plaça résolument devant lui l’engin, il fut bien obligé d’accepter de monter dessus à sa place. Lorsque c’était Lily, ça paraissait si simple, mais flûte, comment fallait-il procéder ?

« Tourne tes jambes !

— Ah ! Je vais tomber !

— Tourne-les plus vite, ça te tiendra debout ! »

Après quelques hésitations et coups de volants intempestifs, Severus arriva à faire avancer la machine et il cria « rendez-vous dans la crique ! », emmenant pour ces quelques secondes passées tout seul le souvenir du rire si joli de Lily, ignorant le petit pincement de cœur qui lui rappelait qu’il était heureux de l’aimer mais qu’il aurait été encore plus heureux qu’elle le sache.

A Poudlard, la situation était parfois tendue, mais il avait parfois l’impression qu’elle était un peu plus qu’amie avec lui, ou juste parce qu’il était son seul ami garçon. Quoi qu’elle s’entendait bien avec Lupin, mais ce n’était pas pareil – ils ne passaient pas autant ensemble. C’était juste difficile à concilier avec tout ce qui se passait dans la salle commune de Serpentard – mais si la quatrième année se passait à peu près comme la troisième année, ça pourrait aller, non ?

Bien sûr, Severus n’était pas naïf au point de croire réellement que les choses allaient s’améliorer ou même juste ne pas évoluer : s’il ne disait rien à Lily, même pendant ce temps béni des vacances, c’est parce qu’il sentait tout au fond de lui que ce n’était pas si simple. En attendant, il était juste heureux de les passer avec elle, à Cokeworth, comme si Poudlard n’existait pas, ou plutôt, comme si Poudlard qu’ils connaissaient n’existait pas, comme s’ils étaient encore seulement et uniquement émerveillés de la magie.

Enfin, elle surtout. Il n’avait jamais su lui dire clairement qu’il s’y connaissait volontiers en magie noire, et donc qu’il n’avait pas été si surpris que ça des choses qui se produisaient à Poudlard et qui avaient étonné, et même, disons, choqué, Lily. Il avait le sentiment indistinct que ça ne lui plairait pas, or, il voulait plaire à Lily.

Il arriva enfin en haut du faux-plat.

Elle avait oublié de lui dire comment freiner.

Il posa un pied dans le sable, ce qui le fit chuter. Derrière lui, il entendit qu’elle courrait, riant encore et toujours.

« Désolée, Severus, j’ai oublié la moitié de l’information utile, je crois. »

Elle était rouge d’avoir couru et pétillante d’avoir ri. Elle l’aida à ramasser son vélo tandis qu’il époussetait le sable collé à ses genoux, et enfin ils descendirent dans ce qu’ils appelaient leur petite crique personnelle.

C’était une plage de taille raisonnable, bordée par des dunettes en sable parsemée d’oyats. Il y avait aussi du liseron. Severus ne se trouvait jamais gauche ou ridicule avec elle, parce qu’elle ne jugeait jamais et était toujours si bienveillante, si belle, si…

Bon, d’accord, il était très attachée à cette fille. Il arrivait à se dire qu’il l’aimait « je l’aime », pas encore qu’il était amoureux « je suis amoureux d’elle », non cette phrase ne sortait pas, c’était comme quelque chose placé tout en haut d’une étagère, mis en évidence, impossible à attraper. Ça lui venait sans doute de ce qu’aimer recouvre un champs plus large – Severus aimait étudier, il aimait lire, il aimait cultiver des plantes sur le rebord de sa fenêtre. Il aimait sa mère. Il n’aimait pas son père.

Amour, c’était autre chose. A part Lily, ça ne se référerait à rien, et c’était beaucoup à imaginer.

Severus plaça ses mains en coupe devant le liseron et parvint d’abord à le multiplier et ensuite à faire voler les toutes nouvelles fleurs autour de Lily. Cette dernière rit encore – sa réserve de joie était inépuisable, elle était comme le soleil, douce, nécessaire. Elle tenta ensuite d’en attraper une ou deux, mais elles s’envolèrent tout-à-fait.

Severus savait faire de la magie sans baguette – ce n’était pas qu’une astuce pour ne pas se faire avoir par la Trace, c’était surtout une technique qui datait des temps anciens où les sorciers n’avaient pas inventé les baguettes pour distordre efficacement les champs magiques. Toutefois, il ne savait pas encore en faire suffisamment pour maintenir des sortilèges, même simples, dans le temps. Encore une autre chose qu’il aimait, s’entraîner à maîtriser des pouvoirs originaux.

« Je voudrais bien savoir faire ça aussi ! »

Severus lui apprit de bon cœur comment faire.

Les deux adolescents ne se préoccupèrent pas de la théorie physique qui sous-tendait la possibilité du phénomène. Lily fut seulement gagnée par l’émerveillement d’y parvenir assez bien. Severus fut émerveillé de voir qu’elle avait appris rudement vite ce petit sortilège, et surtout qu’elle en était émerveillée.

Ils passèrent toute une partie de l’après-midi, dans cette crique, à multiplier et faire virevolter des liserons, Severus fasciné parce qu’elle n’avait pas encore fait le rapprochement entre la fleur et son prénom, alors qu’elle le remerciait mille fois de lui faire apprendre des magies très stylisées « qu’on ne fait même pas à Poudlard ! ».

Severus ne lui dit pas qu’il avait vu d’autres gens en faire à Poudlard, du temps où Malefoy était là par exemple… Ou même encore par ce petit Regulus, un garçon de l’année d’en-dessous avec qui il avait réellement pu tisser un lien proche de l’amitié – deux conditions respectées tacitement par tous les deux : ne jamais parler de chez soi, de sa famille, et ne jamais commenter ce qu’on pouvait voir du frère Black en-dehors des salles de cours.

Ils tentèrent de se baigner un peu aussi — Lily avait tout prévu, comme d’habitude, et emmené deux grandes et vieilles blouses de son père qu’ils enfilèrent en guise de maillot. L’eau était froide, Lily avait la peau si blanche qu’elle en paraissait bleue. Severus regarda ses propres mains et elles étaient violettes.

Ils essayèrent de nager un peu, chose peu évidente en claquant des dents, alors ils sortirent, et encore une fois, le rire de Lily inonda de chaleur toute la crique. Ils posèrent les blouses au soleil pour les faire sécher, et s’attelèrent ensuite à une autre partie importante de leur activité, à savoir l’étude des manuels scolaires d’Eileen Rogue – ils rentraient certes en quatrième année, mais ils en étaient à parcourir la théorie de la cinquième année.

Alors, sagement, comme deux écoliers en période de révisions, ils s’agenouillèrent près du livre et firent tous les exercices des pages qu’ils s’étaient fixées, jusqu’à ce qu’ils les comprennent tous. Ensuite, ils essayèrent de se créer des questions encore plus compliquée, de faire les formules pour voir si on pouvait ajouter tel ou tel ingrédient en mélangeant dans le sens anti-horaire, allez savoir !

C’était leur activité favorite, en réalité.

Lorsque le soleil commença à décliner, et qu’on s’aperçut que Lily n’avait peut-être pas tout prévu car elle n’avait pas de gilet, ils décidèrent de rentrer, en faisant un dernier détour par la grande plage de la ville d’à côté.

La route était cette fois bien dessinée et légèrement pentue en descente, et Severus put se hisser sans peine sur la jante, tenant entre ses bras la taille de Lily qui se laissait filer. Ils regardaient en silence le soleil dorer l’eau de la mer au loin, calme entre deux marées, quelques cheveux de Lily voletant contre le visage de Severus. Le bruit des roues qui tournaient se mêlait au roulis et aux cris de quelques goélands tournoyants dans le ciel.

Severus aurait voulu que ces vacances durent toujours.

End Notes:

Merci pour votre lecture,

Piti

26. Le moment parfait by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit classique du 22 juillet 2023, thème écrit de 22h, "lâcher-prise"

 

Mary entendit encore le claquement de ses pointes contre le sol.

Elle s’entendit pester en chuchotement, secouant le tambourin dans sa main, espérant y déverser ainsi son énervement.

« Une ballerine ne fait pas de bruit ! »

« On ne doit pas entendre vos descentes, les filles ! »

« Retiens ta jambe, retiens ! »

Telles étaient les stances de la maîtresse de ballet.

Mary appuya vaguement sur la plateforme de sa pointe droite, tentant de faire disparaître la sourde douleur de la compression du chausson contre son pied, puis le balança d’avant en arrière – peine perdue, évidemment. Elle souffla un bon coup. Elle en était capable. Elle devait justement donner du moelleux, imaginer le personnage d’Esmeralda, jouer avec le tambourin.

Plus facile à dire qu’à faire.

Elle fatiguait.

Pourtant, elle ne lâcha pas de suite. Si elle voulait passer dans la classe supérieure, la dernière classe de sa scolarité de danseuse, elle devait en passer par là, comme James répétait inlassablement ses figures de Quidditch sur un terrain vide, comme Lily révisait ses cours jusqu’à ce que sa tête en choit de fatigue, comme sa Marlene jouait ses gammes de guitare jusqu’à ce que ses doigts s’engourdissent.

Mary sourit brièvement à cette évocation de ses amis – ils étaient un réel moteur de son existence mais aussi de sa formation de danseuse. Ils ne le savaient probablement pas consciemment. Mary dansait pour elle-même d’abord mais pour un public ensuite, et elle avait choisi depuis longtemps le public du cœur, celui qui ne juge pas et qui aime, même s’il n’y connaissait rien en danse. C’était le meilleur public, facilement émerveillé d’un rien, hypersensible à la beauté d’un mouvement qui n’était pas commun pour lui.

Elle se replaça au fond de la diagonale, se retourna, visa son objectif – arriver raisonnablement, à la fin de ce passage, au niveau du lit de Lily, fixer, et finir le morceau plutôt vers la porte.

Cette fois-ci, ses pointes ne claquèrent pas contre le sol, mais bientôt ce fut la crampe qui gagna sa cuisse. Elle avait levé sa jambe comme un bourrin, voilà le résultat. Grimaçant sous le coup de la douleur, elle s’accouda au bureau de Marlene et entreprit de tirer doucement le muscle en tension.

Lily était sagement en train de travailler – Mary ne l’enviait pas mais pouvait comprendre, en un certain sens, ce qu’elle faisait – sur sa propre table, non loin de là.

« Mary, tu devrais boire un peu d’eau, dit-elle gentiment. N’oublie pas que tu es une sportive.

— Tu as raison. »

Elle dévissa le bouchon de sa bouteille, et se rendit alors compte seulement qu’elle avait négligé cet aspect depuis une bonne demi-heure. Qu’elle en ait des crampes n’était que plus évident…

« Merci Lily, chuchota-t-elle. D’où tu savais ça ?

— Ca quoi ?

— Pour l’eau ?

— J’ai entendu James en parler à un coéquipier l’autre jour. »

Mary hocha la tête. Elle était timide – elle le savait, oh que oui – mais ce trait de caractère avait eu pour conséquence indirecte et étonnante de la rendre très observatrice.

« Chaque fois que tu dis son nom, la modulation de ta voix change très légèrement. »

Lily bougea imperceptiblement la tête, continuant d’écrire sur un parchemin propre les résultats du brouillon posé en évidence juste à côté. Mary finit de boire son eau, et retourna à son travail – elle était discrète, aussi. Elle pouvait faire des remarques à Lily, mais ce n’était ni pour la juger, ni pour la forcer à s’exprimer – elle voulait simplement que son amie aille bien, et lui faire savoir par des signaux comme ceux-ci qu’elle était prête à l’écouter.

Pour ne pas faire revenir de suite la crampe, elle se focalisa sur les ports de bras et de tête, sur le maniement du tambourin, sur la façon de courir sur scène lors de l’entrée pour venir se placer.

Trop agressive.

Trop molle, maintenant.

Non, pas sensuelle comme ça.

Marquée, oui, ça, c’est bien.

Ne pas non plus exagérer les ralentis et les accélérations.

Libérer peut-être plus les épaules mais éviter de les faire rouler vers l’avant.

Peut-être donner du caractère sur certains détails clefs de la variation, pour ne pas paraître trop lisse non plus.

« C’est vrai que je crois être amoureuse de lui, fit la voix de Lily, coupant la silence studieux du dortoir. 

— Il y a quelque chose qui te retient de le lui dire ? Ce n’est pas comme s’il y avait doute sur ses sentiments.

— En fait, il le sait, corrigea Lily. Mais il s’est passé énormément de choses très difficiles dans sa famille depuis deux ans, et j’aurais trouvé incorrect de venir lui imposer ma frimousse, comme ça. »

Elle leva les yeux de son parchemin, ses pommettes à peine un peu roses.

« Le seul problème, c’est que maintenant je ne sais plus très bien à partir de quand je pourrais considérer que je peux envisager un autre type de relation avec lui. »

Mary tapota le tambourin sur ses ongles en baissant la tête, sentant malgré elle un large sourire lui traversa le visage.

« Tu peux te faire confiance, et à lui aussi, hein. Puisqu’il le sait, il est assez grand pour prendre en compte ça dans son référentiel.

— Pourquoi tu souris comme ça ?

— Rien. Parce que tu es mignonne quand tu es amoureuse et pleine de doutes. Mais tu le serais encore plus si tu étais amoureuse et un peu plus confiante là-dedans, tu vois ce que je veux dire ?

— Mary, c’est toi qui me parles de lâcher-prise ? »

Mary ne prenait pas mal ce genre de commentaires – elle connaissait la franchise de Lily et puis, elle avait surmonté sa timidité aussi avec cette auto-dérision qu’elle ne permettait qu’à ses amis les plus proches, en plus d’elle-même.

« Oui, ça m’arrive des fois. »

Elle égrena le tambourin, dont le son métallique clinqua dans l’air.

« Je t’observe depuis tout à l’heure, et je pense que ce qu’il te manque, dans cette variation, c’est non pas de chercher à toucher le tambourin avec ton pied, mais de chercher à toucher ton pied avec ton tambourin. 

— De profundis, cette histoire. »

Lily éclata de rire pour toute réponse, entraînant Mary à sa suite.

« Désolée, je suis fatiguée.

— Il n’y a pas de mal.

— J’étais sérieuse.

— Je sais, j’ai juste trouvé que c’était une façon amusante de présenter les choses. De toute façon, c’est mon plus grand défaut – en fait, c’est le défaut de beaucoup de filles dans la classe. Ne penser qu’à la technique, tenter l’artistique, tenter même de mêler les deux, mais ne jamais oser se présenter sur scène en ne pensant qu’à s’amuser. 

— Ça viendra avec la maturité, suggéra Lily.

— Il faut quand même bien maîtriser aussi la technique pour se permettre de s’en moquer.

— La maturité, donc, appuya son amie. Le temps, si tu préfères. Evidemment que dans deux ans tu seras plus forte techniquement, puisque tu auras plus dansé. 

— Tu sais quoi ? Moi aussi je suis fatiguée, je vais arrêter pour ce soir, et penser très fort à comment j’envisage tout ça. »

Elles se sourirent mutuellement.

La perfection n’existe pas, mais mettez deux perfectionnistes dans une pièce, elles sauront toujours trouver les mots justes pour aider l’autre, sans s’apercevoir – ou refusant de s’apercevoir ? – qu’elles pourraient s’aider ainsi elle-même.

L’amitié parfaite existe peut-être, alors.

End Notes:

Merci pour votre lecture ♥

Piti

27. Le Gryffon et le Serpent by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit du 25 août 2023, thèmes de 20h :

- écrit : "fable" ;

- scénaristique : "votre récit commence ou s'achève par une morale"

Le Griffon et le Serpent

 

Maître Griffon, sur ses gardes tenu,

Tenait en sa main sa baguette.

Maître Serpent, pour bagarre impromptue,

Y vint sur ces entrefaites.

 

« Hé, Bonjour, Monsieur Du Griffon !

Que vous êtes traître, que vous me semblez bourbon !

Sans mentir, si votre rang

Se rapporte à votre sang

Vous êtes le Phénix des hôtes de ce bois. »

 

A ces mots, le Griffon ne se sent pas de joie

Et pour montrer son bon droit

Il sort sa baguette, émet un sort adroit.

 

« Apprenez, Monsieur Du Serpent,

Qu’on dit bourbeux et non pas bourbon,

Si j’en suis, l’esprit - tel vous ! -, tout con,

Votre logique de médisant.

 

Et que le Phénix me protège

Car il vient de Dumbledore,

Mais vous n’êtes pas si stratège,

Et je n’ai pas peur de Voldemort. »

 

Le Serpent, honteux et confus,

Jura, mais un peu tard, qu’on ne l’y prendrait plus.

 

« James, Sirius, appela Fleamont, venez à table et arrêtez de glousser comme des dindons, s’il vous plaît.

— On a le droit de rire, on ne va pas pleurer ! rétorqua James.

— Mais on ne sait pas pourquoi vous riez ! Et cela fait trois jours que vous vous faites des messes-basses que l’on ne comprend pas !

— Rien, on écrit de la poésie, répondit Sirius.

— C’est vrai, renchérit James. »

Euphémia et Fleamont se regardèrent d’un air dubitatif.

« En quoi est-ce si émoustillant ?

— Ecoute, chez les Black, tu le sais, Euphémia, nous n’avons pas accès à la grande culture, alors James m’a gentiment montré votre bibliothèque. J’en ai donc sorti un livre fabuleux de la Fontaine.

— Merlin ! s’offusqua Euphémia.

— Je ne vois pas Merlin, où est-il ?

— Sirius, tu n’as pas… lu…

— Si, j’ai lu, j’ai trouvé ça très drôle. »

James commença à pouffer de rire.

« Cornedrue, défends-moi un peu, là.

— Ah non, non, je ne vais pas te défendre du tout !

— Mais c’est lui qui t’a montré… Comment as-tu trouvé ? bégaya Euphémia.

— James, réponds à ta mère, insista Fleamont.

— Mais je n’ai rien fait de mal, répondit James théâtralement. Rien.

— Mais de quoi vous parlez tous donc ? Je ne comprends rien. »

Il y eut un instant de flottement.

« Il faut croire qu’en plus des Fables de la Fontaine, mes parents ont donc les Contes de la Fontaine. »

James continua d’un ton badin en servant de la salade.

« Des contes libertins. Je ne savais pas que vous aviez ce genre de lecture, Papa et Maman.

— Je vous le dis franchement, je veux savoir où est ce livre, il a l’air très intéressant. »

James et Sirius rirent encore de plus belle. Euphémia et Fleamont avaient les joues un peu roses.

« Morale de l’histoire, Maman : ne nous prends plus des enfants, et nous ne saurons pas tes petits secrets. »

28. Intello by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit du 25 août 2023, thème écrit de 22h : le harcèlement scolaire.

Ce texte décrit donc une personne victime de harcèlement scolaire.

 

Hermione était pétrifiée de tristesse et d’angoisse.

« Ce sera donc ça ma vie… Tous les jours… Tous les jours ! »

Hermione n’avait jamais eu d’amis – on l’appelait « intello » parce qu’elle aimait les livres, parce qu’elle était sage, parce que les professeurs l’aimaient bien. Et pourtant, Hermione n’avait pas l’impression que les professeurs l’aimaient vraiment. Par exemple, John et Paul avaient de moins bonnes notes qu’elle, étaient turbulents, se faisaient parfois reprendre en cours, et l’institutrice disait qu’ils étaient brillants. Quant à elle, elle était seulement travailleuse, et elle devait peut-être prendre exemple sur eux pour s’intégrer au groupe. C’était ce qu’on lui disait. Ses parents étaient contents, elle aussi était contente bien sûr, mais… elle aimait autant l’école en tant qu’études qu’elle détestait l’école en tant que lieu de sociabilisation. Et de ça, elle n’en parlait jamais à ses parents.

Elle avait espéré, depuis qu’elle savait qu’elle allait à Poudlard, que ce mauvais sort se briserait, qu’elle croiserait d’autres enfants de son âge, auxquels elle ne dirait évidemment pas ses anciennes mésaventures. Elle avait cru qu’elle serait enfin acceptée, qu’elle rencontrerait des personnes comme elle, calmes, studieuses, qui aimaient passionnément les livres.

Le revers était très, très douloureux.

Séparée de ses parents – pas de câlins après dîner, pas le documentaire du samedi sur les dinosaures ou la paléontologie, pas les jeux de sudoku avec son père, pas les livres de collégienne de sa mère.

Moldue – elle venait de comprendre, indiciblement, qu’avant même de connaître son caractère, ses goûts, ses aspirations, et donc, qu’avant même qu’elle pût se présenter aux autres, elle avait déjà été cataloguée. D’une façon différente, mais tout aussi déplaisante.

Intello – ça lui collait à la peau, comme étiquette. Ici, comme ailleurs, toujours. Il n’y avait rien de mal à aimer faire ses devoirs, en quoi cela pouvait-il donc déranger les autres ? Elle ne comprenait pas.

Elle ne disait rien aux adultes.

D’abord, parce que, à l’école, aucun adulte ne lui était jamais venu en aide. « Il a une enfance difficile, il faut le comprendre ». « La bave du corbeau n’atteint pas la blanche colombe ». « C’est à toi de te blinder, tu fais trop attention aux commentaires des autres, alors que tu ne fais aucun effort pour t’intégrer ».  Même sur des aspects plus évidents, comme une gifle en fin d’année dernière, ou sa trousse volée : « ça n'arrive qu’une fois, c’est donc exceptionnel », « bon, ça suffit, ça arrive à tout le monde de perdre des stylos ».

Ensuite, les pions d’ici n’étaient pas des adultes. C’étaient des élèves, et très vite, Hermione eut ce sentiment indistinct que la plupart des préfets étaient populaires, et ça lui fit très peur. Dans son cerveau de petite fille, où se combattaient beaucoup de choses, elle essayait de faire le vide en rendant tout binaire : elle était seule, pas jolie, première de la classe, les personnes populaires étaient jolies, intégrées et a fortiori pas premières de la classe. En plus de la défiance, en grandissant, Hermione se protégeait en arguant qu’elle ne voulait pas être comme eux.

Quitte à manquer de boucher par trois ou quatre fois le trou de ses boucles d’oreille, tant elle négligeait de s’en attacher. Quitte à continuer à porter ses jeans même lorsqu’ils étaient troués, pour montrer qu’elle n’était pas ce genre de fille superficielle qui juge sur l’apparence. Quitte à redoubler d’efforts pour s’assurer qu’elle serait effectivement la meilleure.

« Tu ne t’es pas brossé les cheveux, Granger, gloussa Lavande.

— Tu as des boutons sur le front, renchérit Parvati. Dépêche-toi d’enlever tout ça, tu vas être en retard en cours ! »

Elles quittèrent le dortoir.

« Je m’en moque de mon apparence, je m’en moque de mon apparence, je ne suis pas comme elles, je ne suis pas comme elles, je m’en moque… »

Elle se répétait cela, se matraquant le crâne de phrases toutes faites tout au long de la journée. Il y avait quelque chose d’indicible au fond de tout cela. « Il faut tenir ». Mais combien de temps ? En parallèle de cela, y pensant finalement toute la journée, elle finit par développer tout un tas de complexes sur son corps : ses cheveux trop ébouriffés, ses dents trop longue, son front trop grand « d’intello », ses petits boutons.

Au fond d’elle, c’était un abîme de tristesse qui s’ouvrait.

Elle se demandait déjà si elle allait tenir sept ans – sept ans, comme c’est long ! Quelle perspective effrayante ! Est-ce qu’ils n’avaient pas raison, les autres qui disaient qu’elle n’avait rien à faire à Poudlard ? Est-ce qu’elle aurait dû aller au collège… Et en même temps, est-ce qu’elle n’avait pas un gros doute sur l’acceptation de la différence d’autrui du collégien moyen ?

Elle méritait sa place ici. Oui, elle allait travailler, leur prouver à tous qu’elle existait, qu’elle avait sa place, qu’elle réussirait à tracer sa voie, mieux qu’eux tous réunis, qu’elle aurait ce choix-là dans son existence, elle.

Lorsqu’elle travaillait, tous ses soucis s’envolaient. Elle apprenait des choses dans les livres, elle les lisait, les relisait, les connaissait déjà par cœur, allait en emprunter de nouveaux, apprenant encore et encore. Elle complétait tous ses devoirs, bien en avance, pour pouvoir les pousser jusqu’au plus grand degré de perfection possible. Elle voyait dans ses notes qu’au moins, les professeurs aimaient son niveau, à défaut de l’aimer suffisamment pour la défendre lorsqu’elle se faisait alpaguer devant eux.

Plus elle travaillait, plus les professeurs pensaient qu’elle était suffisamment mature pour se défendre seule et plus les élèves pensaient qu’il fallait pousser les remarques pour l’atteindre un jour. Plus elle travaillait, plus elle naviguait seule au milieu de la mer démontée des insultes.

Cela ne faisait pas deux mois que Hermione était entrée à Poudlard, que déjà elle avait la nausée en se levant le matin et en se couchant le soir. Elle promenait ainsi son parpaing dans l’estomac – le poids de sa peine – du matin au soir ; car les heures avec les professeurs n’étaient pas suffisantes, non ! Il fallait encore passer les heures d’études, les heures de repas, les heures dans la salle commune, les heures dans le dortoir… Comment survivre lorsqu’on est irrémédiablement seule et pourtant sans cesse entourée de personnes hostiles ?

Il ne lui restait plus qu’une seule cachette, et ce n’était ni son lit, puisqu’il y avait toujours quelqu’un dans le dortoir, ni la salle de bains, puisque si elle y passait trop de temps, on toquait : « Hé Granger, ça sert à rien pour les filles comme toi ce que tu fais ! ».

Elle avait trouvé une cachette pour y déverser en paix toutes ses larmes. Un endroit qui n’était fréquenté par personne une fois les cours finis. Un endroit où elle pouvait enfin se laisser aller, se décharger de tout ce que la journée avait pu emmagasiner en elle. Un endroit où elle se disait que « si ça se passe comme ça pendant sept ans, ça reste encore tenable ».

Les toilettes des filles.

 

 

End Notes:

Je suis désolée pour les fans de Lavande et Parvati, mais j'ai décidé, dans mon headcanon, qu'au moins au début l'intégralité des filles du dortoir de Hermione la harcelait. En fait, je pense que c'est tout à fait possible que Parvati et Lavande et les autres deviennent, plus tard, des personnes tout-à-fait fréquentables, gentilles, tolérantes, etc. Je pense que la responsabilité du harcèlement scolaire imcombe en grande partie aux adultes, qui montrent des mauvais modèles, voire encouragent leurs enfants en se moquant de tel ou tel camarade à la maison ; aux encadrants qui ne croient pas ou ne soutiennent pas toujours celleux qui osent s'exprimer ; au manque de moyens de plus en plus flagrant dans les services publics comme l'école, qui fait que les enseignants et surveillants doivent gérer de plus en plus d'élèves....

Et que dire lorsqu'en plus le climat général est à la haine des adultes entre eux ? Lorsqu'il devient encore plus permissif qu'avant de dégainer des agressions racistes, LBGTQIA-phobes ou misogynes sous le prétexte d'une poussée de l'extrême-droite ? Oui, le monde des adultes est plein d'une violence qui ne peut pas épargner les yeux et les oreilles des générations futures.

Cependant, l'avenir s'écrira bien avec elles, et malgré tout, en lame de fond, tout doucement, les choses s'améliorent sur la prise en compte, prise en charge et détection du harcèlement, notamment en milieu scolaire. Il existe une personne de confiance à qui parler ; car tous les adultes sont loin d'adhérer à la violence de l'intolérance et sont, au contraire, prêts à accueillir l'altérité.

Et enfin, c'est le titre de cet OS : on a le droit d'aimer apprendre des choses, on a le droit d'être passionné.e par le fait d'étudier, on a le droit de se fondre dans les livres. "Intello", répété ad nauseam chaque jour, sous-tendu par le rejet de ce qui est différent, oui, c'est du harcèlement. Arrêtez de traiter d'"intello" les gens.

Merci pour votre lecture ♥

Piti

29. Il faut bien quelqu'un pour tenir l'échelle by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit HPF du 25 août 2023, 23h, deux thèmes :

- écrit : amitié

- scénaristique : votre personnage a la meilleure note à un contrôle ou une interrogation

C’est triste à dire, mais pour les perfectionnistes, c’est très, très confortable d’avoir une échelle de notation avec critères. Un perfectionniste est toujours heureux non seulement de remplir les critères mais encore de les dépasser. Tendre vers la perfection est un style de vie qui peut rendre très malheureux, alors, cette échelle soigneusement gravie, c’est un petit peu le signe que les choses ne sont pas aussi mauvaises que le perfectionniste s’imagine de prime abord. Voyez plutôt.

***

1970, Mary MacDonald, Ecole de Danse de l’Opera de Paris.

Mary sortit de la salle d’examen, l’impression lessivée d’avoir les jambes en coton et d’être partie en regardant le sol. Il restait encore trois filles, les autres avaient déjà remis leurs habits de chauffe et patientaient, anxieuses. Mary passa son cache-cœur et ses guêtres et alla s’asseoir avec le groupe.

Il y avait deux catégories de filles.

Celles qui ressassaient leur passage en silence. Mary faisaient partie de celles-ci. Mentalement, elle se faisait défiler le film de sa prestation et notait tous les défauts : la jambe pas assez tendue sur cette arabesque, les pieds pas assez pointés sur les sauts, un manque cruel d’en-dehors sur sa cinquième finale, le bras peut-être raide ici, et sur ce passage, une absence de sensation qui signifiait nécessairement qu’elle n’avait pas fait été assez attentive, et qu’en conséquence, ça avait été mauvais.

Celles qui ressassaient leur passage dans le bruit. Elles avaient le défaut de cumuler leurs défauts et de se monter la tête à un tel point que l’angoisse finissait aussi par atteindre les premières.

Si on les écoutait, elles étaient de bien piètres petites ballerines, elles avaient tout raté, elles devraient quitter l’école ou redoubler.

L’attente jusqu’aux résultats fut interminable. Les petites avaient rejoint leurs parents, dans le hall, et une tension insoutenable émergeait des conversations entre les adultes, qu’on sentait polies, bien sûr, mais à peine cordiales. Chacun devait penser à sa progéniture avant celles des autres, ce qui était, un tant soit peu, logique. Mary patientait, toujours en silence, la main dans celle de sa mère, qui lui faisait un grand sourire de temps à autre : « ça ira, et quel que soit le résultat, je serai toujours fière de toi ».

Enfin, les délibérations furent finies et la professeure de danse se présenta devant tout le monde, une feuille de papier dans les mains. Elle commença pas saluer les parents, les remercier, comme c’en était l’usage, de les suivre dans la passion de leurs filles, etc., puis félicita ses élèves, lesquelles touchaient au supplice. Enfin, elle donna les résultats à voix haute, en même temps qu’elle punaisait la feuille sur le tableau d’affichage.

Un mouvement général la suivit et chacun lut fébrilement son résultat. Il y eut quelques pleurs du côté d’une fille qui n’était pas retenue et d’une autre qui devrait redoubler. Toutes les autres se perdirent en effusions diverses : elles passaient au niveau supérieur !

Mary, éberluée, vit qu’elle était même la première !

Un sourire benêt lui coula sur le visage et ne la quitta pas durant toutes les vacances.

« Tu étais magnifique, Mary, assura son père.

— Magnifique, répéta sa mère, soulignant la force du mot. »

Ainsi, elle n’avait peut-être pas dansé si mal que cela par comparaison au niveau qui était attendu d’elle ! Bien sûr, elle devrait s’acharner pour arriver ne serait-ce qu’à la cheville de l’immense Claude Bessy.

***

1971, Lily Evans, Ecole de Magie de Poudlard.

« Un peu de silence… Je vais donc vous rendre les copies de votre premier devoir de métamorphose. Il y a du bon, et du moins bon. Pour certains d’entre vous, c’était l’une de vos premières réflexions à mener sur la magie, et je tiens tout de même à vous féliciter pour votre application. Maintenant, je vais procéder à quelques explications d’ordre général à propos de ce qui était attendu. »

Lily prit sa plume, écrivit sur sa feuille « Métamorphose – DM1 – Correction », et commença à prendre des notes. Au fur et à mesure que son écriture se berçait au rythme de la voix de la professeure, une sorte de germe d’angoisse, puis de plante d’angoisse et enfin de baobab d’angoisse poussa dans son ventre.

Lily avait l’impression de n’avoir strictement rien fait de bien. Le plan proposé, les détails attendus, le type de rédaction à privilégier, la construction du raisonnement, les idées essentielles, tout ce que disait la professeure ne se trouvait pas dans sa copie. A la réflexion, elle avait même l’impression d’apprendre encore des choses sur le thème alors qu’il lui semblait qu’elle connaissait le cours par cœur.

Marlene, à côté, faisait les gros yeux, et la regarda, en croisant les bras d’un air dépité.

« J’ai rien fait de tout ça, moi. Qu’est-ce que je fais ici ? Je ne sais pas.

— Moi non plus, gémit Lily. 

— Le carnage que ça va être… Je voudrais voir ma copie tout de suite.

— Et je vais procéder désormais à la distribution des copies. »

Lily la suivait du regard. Elle se promena vers le fond de la salle, au milieu, à droite, à gauche.

« Alleeeez, murmura Marlene. J’en peux pluuuus. »

Lily ne répondit pas, elle se sentait submergée.

Enfin, MacGonagall se dirigea… Vers elle… Le cœur qui cogne… La main saisit une feuille… La lui donne.

« Miss Evans. Optimal, franchement mérité. Il y a tout ce que j’attendais dans ce devoir, et ce qui m’a vraiment surprise, c’est votre capacité de synthèse, qui s’approche plutôt de celle qu’on attend plutôt en fin d’année scolaire. Mes félicitations, continuez ainsi. »

Lily ouvrit grand la bouche, se refusant à voir l’insigne « O » sur sa copie et les petites marques de la professeure qui jonchaient son travail : « très bien », « on pourrait se demander si… mais excellente remarque », « bien vu et développé », etc.

***

1973, Marlene MacKinnon, dortoir des filles de Gryffondor de troisième année.

« Et du coup, je suis première en quoi, moi ? Mary enquille ses examens de danse, Lily enquille ses examens de magie, et Marlene enquille quoi ?

— Tu es la première en amitié ! cria Mary, avec beaucoup de chaleur, cette chaleur propre aux gens timides légèrement désinhibés lorsqu’ils sont heureux.

— Ouiiiiii ! hurlèrent alors Lily et Marlene.

— Non mais, pas besoin de parler plus fort que moi, grogna Mary en se bouchant les oreilles.

— Câlins collectifs ! reprit Lily sur le même ton. »

Elle se précipitèrent les unes sur les autres, en riant, pleines de tendresse et d’amitié.

Marlene aimait bien quand ses perfectionnistes adorées revenaient sur Terre, et appréciaient aussi les belles choses impossibles à quantifier de la vie : joie, bonheur, amitié. Marlene était leur plus belle échelle d’à quel point l’amitié, c’est beau et ça ne se compte pas.

 

 

End Notes:

Merci pour votre lecture !

Piti

30. Faut vérifier, Fred, non mais la honte, quoi by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit du 27 octobre 2023, 22h : thèmes image (une fiole avec des araignées autour) et stylistique (je ne me souviens plus...).

C'est un texte qui parle d'arachnophobie.

Non, ça ne s’arrange pas avec le temps, tout ça.

George est allé se faire aider.

C’est normal, il a davantage perdu que tout le monde avec Fred. Non ?

Personne d’autre n’est allé se faire aider.

C’est l’exception de George. Exceptionnel en étant jumeau – moins d’un pourcent des naissances, exceptionnel en étant séparé de son jumeau – il est vraiment le seul de la famille à s’être fait aider.

Ça ne veut pas dire que les autres n’en ont pas besoin, finalement.

Ron déteste ça.

Les araignées sont revenues.

Dans ses rêves, hein. Plutôt ses cauchemars, mais bref, on a compris l’idée.

Hermione est retournée à Poudlard. A Poudlard, il y a Luna, il y a Ginny, il y a Cho, il y a Neville. Il y a plein de monde. Ron n’est pas à Poudlard. Comme Harry, comme Seamus.

C’est un choix, bien sûr.

Mais les cauchemars sont revenus.

Hermione va bien. La famille fait son deuil, doucement. Hermione a retrouvé ses parents. Pour Harry, tout va mieux. Pour Ron aussi, bien sûr ! Mais plus doucement, plus patiemment. Saleté de guerre, saleté de temps qui passe trop doucement et trop patiemment.

Donc, les cauchemars.

Par exemple, celui-ci. Il dort, tout va bien. Il se réveille, il veut sortir du lit, il défait pour cela la couverture. Immonde araignée blanche, presque fondue dans le pli du drap, au niveau de ses pieds.

Ron s’est réveillé, crispé, tremblant, trempé de sueur. Ses pieds sont gelés. Il a plié brusquement ses genoux. Vite, fuir ! Ah, ses pieds sont nus ! Vite, lumière !

Faire trois fois le tour de la chambre. Sous l’oreiller : niet. Dans l’armoire : niet. Cloisons, murs, plafonds : nada. Là, sous les chaussures : non plus. Mais quand même, ça bouge, ces chose-là. Si ça part d’un côté pendant qu’il en passe un autre ?

Et l’œil ouvert.

Ou celui-là. Il est chez Zonko, il achète des, euh, choses. Le rêve n’est pas très clair sur ce point, mais le Ron du rêve a l’air satisfait. Le Zonko du rêve est un apothicaire qui vend des potions, ça ne choque pas tellement le Ron du rêve d’ailleurs. Ce genre de détails, c’est important. On discerne bien le rêve et la réalité, comme ça.

Bref, il fouille dans son sac en rentrant chez lui.

Oh ! Epouvante ! Elles sont là !

Est-ce qu’il en a touché une ? Elle s’agrippe à son bras ! Elle monte ! Ron hurle.

Le Ron de la réalité aussi, soit dit en passant.

Problème : il ne se réveille pas. Donc il fouille dans le sac, ça grouille dedans, autour de la fiole. Ça vient de là ! Pouah, saleté !

Ron, le vrai Ron, a un petit pincement de cœur lorsqu’il rentre chez Zonko maintenant. Il regarde deux fois la vitrine plutôt qu’une avant d’y aller. Et aussi, il ouvre son sac très vite, en le tenant loin de lui, à bout de bras ; un peu comme Hermione retire très vite un pansement pour avoir moins mal. Il se dit : au moins, elles ne grimperont pas, je les verrai et je jetterai vite le sac !

Ou celui-là. Il y a Tonks dans ce rêve. Bon, c’est peut-être à cause de l’association Tonks – Maugrey, le vrai – Maugrey, Croupton Jr., n’empêche que dans le rêve, elle parle avec une grosse araignée qui ressemble vite fait à Aragog. Il voit tous les détails, les mandibules, la bave, les pattes velues…

Ron se réveille, cette fois, trop apeuré pour faire quelque chose.

Problème : il a trouvé dans sa pile de vêtements une araignée deux jours plus tard.

C’est trop dur de s’expliquer que c’est une coïncidence.

Les araignées le bouffent de l’intérieur et de l’extérieur. Il est épuisé, dort mal, se retourne, vérifie une fois, deux fois, trois fois le sommier. Tout va bien. Mais ce n’est que partie remise ! Jusqu’à la prochaine !

C’est dur de raconter tout ça à ses parents. Parce qu’ils ont à gérer un deuil inhabituel. Normalement, dans l’ordre des choses, les enfants enterrent les parents, pas l’inverse. Et il faut gérer George aussi. Et si ça se trouve, les soins à la clinique de Sainte-Mangouste sont payants. En plus, ni l’un ni l’autre n’a de dégoût prononcé pour ces bestioles. Ca s’écrase, et c’est tellement petit, Ron, elle a plus peur de toi que toi d’elle.

Percy a même osé un « fais connaissance ».

Oui, il faut la regarder avant de la tuer.

Mais pas comme Ron le fait, en se cachant un œil pour ne pas la voir et en gardant l’autre éveillé pour surveiller qu’elle ne bouge pas, en avançant plus à reculons qu’autre chose, en approchant doucement le bras avec un mouchoir au bout, la bouche déformée, le cœur au bord des lèvres, et abattre la main, et sentir une décharge électrique jusque dans l’épaule.

Non, il faut la regarder avec intérêt, apprendre à la connaître pour apprivoiser ses peurs, s’approcher en mode « tigre ». On est des Gryffondors dans la famille, faut le savoir. Percy aussi a confondu lionne, lion, et tigre, chacun ses associations d’idées.

Hermione, à Noël, ne s’est pas moquée.

C’est bizarre. Ce n’est pas comme si c’était la première fois qu’ils dormaient dans la même pièce, mais là, c’est différent. En plus, c’est dans le même lit. Ron en est rouge jusqu’aux oreilles. Au début, Hermione a fait comme d’habitude – lire. Elle commente des choses qu’elle lit, Ron aime bien ça, elle ne parle de ses lectures qu’à lui. A Luna peut-être, pour les trucs plus compliqués sur l’arithmancie et tout, mais pour la littérature, elle l’a choisi lui.

Sauf que Ron ne peut pas écouter entièrement Hermione. Il est tendu par autre chose, il les attend, les coquines. Hermione a senti plutôt vite qu’il a envie de changer d’ambiance, parce que sinon, elle n’aurait pas écourté à quatre pages de lecture seulement sa pause du soir.

Mais Ron ne peut pas, physiquement, éteindre la lumière.

Il faut vérifier les araignées.

Et si Hermione allait aux toilettes avant de dormir ?

Bah non.

Raté.

Elle s’étend.

Il faut vérifier les araignées devant elle.

La honte, Fred, t’entends ça, dis ? La honte intersidérale.

Bref, Ron a vérifié les araignées. Hermione a compris en deux secondes quand il a commencé à soulever les rideaux, plis après plis – quand il avait treize ans, quelque chose comme ça, il y en avait une de coincée derrière le tissu. Il voulait vérifier la fenêtre, et la chose lui est plus ou moins tombée dessus du rideau. Alors depuis, Ron vérifie doctement les rideaux, puis la fenêtre, et dans cet ordre.

(Heureusement qu’il n’a jamais vu une seule araignée dans le dortoir de Poudlard, sinon il aurait été obligé de vérifier là-bas aussi. Un enfer. La honte, sérieux.)

« Il y a beaucoup d’araignées ?

— J’en ai vu une l’autre jour. C’était la seule de l’automne. »

Hermione hoche la tête. Il y a un tout petit pli au creux de son menton. Elle réfléchit.

« Tu fais encore des cauchemars. »

Elle suppose juste. D’ailleurs elle n’a pas posé de question, elle a affirmé qu’il faisait des cauchemars.

« Euh… Attends, murmure Ron. Faut vérifier sous ton oreiller. »

Hermione s’exécute patiemment.

« Non, mais montre-moi, fais pas ça quand je regarde ailleurs… s’il te plaît.

— Fais-moi confiance, dit-elle d’une voix apaisante. »

Chaque soir, Hermione a écourté la vérification des araignées.

D’un tout petit peu.

Son oreiller.

L’armoire.

Les rideaux.

D’abord elle vérifie avec lui, puis elle arrête de vérifier certaines parties.

« Fais-moi confiance, il n’y en a probablement pas. »

Elle a quand même raison de rajouter « probablement ». Une de tout l’automne, ce n’est pas beaucoup, mais ce n’est pas « rien ». Pour gagner la confiance des gens, il ne faut pas mentir. Jamais.

C’est dur, quand même.

Pas sûr que Hermione soit arrivée en quinze jours à l’aider de façon pérenne – quand elle va retourner à Poudlard, il va tenir maximum une semaine, il n’a pas plus confiance en lui que ça. Mais il a quand même rudement mieux dormi.

En plus, s’il vit avec Hermione un jour, elle pourra écraser les araignées dans sa chambre – euh, leur chambre ? – à sa place.

Un peu la honte quand même, mais ça se gère bien quand c’est avec Hermione, finalement.

Putain, Fred, tu fais chier, même mort, tu me fais flipper avec les araignées.

 

End Notes:

Merci pour votre lecture !

Piti

31. Cryptophasie by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit du 18 novembre 2023, thème de 23h, image qui représente un garçon seul sur le chemin d'une forêt

 

Charlie ouvrit la porte du cimetière. A chacun de ses retours à Loutry-Sainte-Chaspoule, après avoir chaleureusement embrassé toute la maisonnée, il aimait à prendre quelques instants pour aller visiter Fred. Il déposait parfois un petit bouquet cueilli en chemin – des fleurs fraîches, de saison et du Terrier – et d’autres fois il disait seulement « salut, Fred ». Il restait un moment immobile, les mains dans les poches, devant la sépulture, puis il s’en revenait, un peu plus lentement.

Ce jour-là, Charlie vit tout de suite la silhouette dégingandée de George. Il était assis sur la tombe, un pied posé dessus et l’autre avachi sur le sable de l’allée. Il bougeait ses mains comme s’il parlait réellement à quelqu’un en face de lui.

Le cœur de Charlie se serra. Avec le temps, il avait de plus en plus tendance à penser que le plus dur, dans toute cette histoire, était de voir George évoluer sans Fred – et avec lui en même temps. Charlie n’osa pas s’approcher davantage, mais il n’osa pas non plus quitter les lieux. Il eut en effet la pudeur de se demander si George avait vraiment envie d’être découvert avec une attitude si familière dans un cimetière, et craignit de faire un bruit supplémentaire qui aurait trahi sa présence.

Il en profita pour observer George. Un peu plus de cinq ans déjà… George n’avait pas beaucoup changé physiquement, comme si le temps s’était figé à l’instant où sa vie s’était suspendue une fois. Il avait seulement pris quelques plis autour des yeux. Ses cheveux voletaient autour de son bandeau rouge à liseré or – il mettait toujours quelque chose sur le trou qui lui servait d’oreille. Et enfin, dernière évolution, les yeux. Tristes, toujours tristes. Même lorsqu’il riait, George avait un voile dans les yeux qui séparait ce qu’il voyait de ce que les autres voyaient.

La conversation avec Fred semblait donc aller bon train. George semblait apprécier qu’on le laisse en paix avec ses visites, fréquentes et longues, au cimetière. C’était acquis, il allait « taper la causette avec Fred », et ça ne choquait plus. Charlie, grand amateur de silence, se demandait toujours comment on pouvait trouver autant de choses à dire, mais bon ; Fred et George avaient toujours été de grands bavards, et puis ils s’étaient toujours tout raconté.

Comme le vent changeait de direction, des bribes parvinrent jusqu’aux oreilles de Charlie. Il se trouva un peu honteux, espérant que George ne parlait pas de choses trop personnelles. Puis, il se corrigea. En soit, le simple fait qu’il mette un point d’honneur à aller seul au cimetière signifiait déjà que ce qu’il avait à dire était personnel, même si les nouvelles étaient connues de tous.

Il fut bien vite rassuré. Il crut au départ que c’était parce qu’il n’entendait pas bien, mais au fur et à mesure qu’il s’habitua aux sons, il se convainquit que George parlait encore sa « langue top secrète » avec Fred. Cette langue était un exemple de cryptophasie, chose que Charlie avait conçu assez vite à force d’étudier les mammifères sociaux – et l’humain est un mammifère sociable comme les autres.

Il se peut, en cours d’apprentissage des codes du groupe et en particulier de son langage, que les jeunes déforment les sons et se comprennent eux-mêmes dans des modalités qui sont différentes de la grammaire, de la syntaxe et du vocabulaire du groupe. C’est un phénomène plus répandu chez les individus jumeaux, parce que vivants ensemble et à la même vitesse s’ils ne sont pas séparés, ils sont plus à même de se synchroniser là-dessus. Souvent, l’acquisition complète du langage aboutit à une perte de la cryptophasie, mais certains parviennent à conserver cette langue jusqu’à l’âge adulte et à communiquer avec.

Fred et George avaient fait partie des jumeaux qui babillent avec bonheur dans l’incompréhension la plus totale de leur entourage. Avoir eu des cours à la maison plus ou moins fréquents et de qualité moyenne, l’absence d’interactions avec d’autres personnes que les Weasley, et le nombre d’enfants dans la famille avaient favorisé un certain traitement peut-être un peu hâtif de la part de leurs parents. Molly et Arthur avaient eu tendance à penser que les jumeaux – indifférenciés – ne pouvaient pas s’ennuyer ensemble, et c’était réellement le cas, donc, de façon inconsciente, les avaient un peu moins stimulé que leurs autres enfants. Ils avaient donc conservé ce mode d’interaction en grandissant.

George ne pouvait plus parler sa « langue top secrète » avec quiconque depuis un peu plus de cinq ans, sauf avec le vent – ou plutôt avec ses souvenirs de Fred. Charlie se rappela les moments difficiles juste après son décès. George, en plus des idées noires, de l’absence totale de motivation, de ses insomnies, de ses crises de colère, avait fini par ne plus s’exprimer que dans ce langage.

Personne n’avait rien compris à ce qu’il disait, évidemment, mais il avait semblé évident pour tous que ceci avait été un appel à l’aide. Cette « langue top secrète » avait été bizarrement le moins dangereux symptôme de ce qu’avait traversé George et pourtant celui qui avait enjoint la famille à oser lui dire qu’il avait le droit d’appeler à l’aide. Et le simple fait de le dire, justement, avait ouvert les prémices d’une nouvelle vie – un long parcours de thérapies qui ne finirait probablement jamais complètement, mais en tout cas quelque chose qui avait eu tendance à éloigner de plus en plus George de la mort.

Quelque part, c’était comme si Fred était revenu d’entre les morts pour le sauver en retour.

George se pencha vers l’avant, caressa brièvement la pierre tombale, et se releva en lançant un sonore « bon après-midi frérot ! ». Charlie se sentit encore plus stupide qu’il ne l’était déjà, statique depuis un bon quart d’heure.

« Bah alors, Charlie, viens, c’est chez toi aussi ici !

— Pourquoi tu dis ça ?

— Tu ne penses pas que Fred, s’il avait eu sa maison, aurait permis à tout le monde de rentrer chez lui sans sonner ou attendre devant la porte ? »

Il lui passa son bras autour de l’épaule ; il était bien plus grand que Charlie.

« Il ne vivrait pas avec toi ? demanda Charlie avant de regretter aussitôt sa question.

— Si, c’est pour ça que je connais les règles de la maison, fit George en souriant sincèrement. Je te laisse ?

— Non, c’est bon, tu me connais… Je ne suis pas un grand bavard. »

George sourit à nouveau.

« Je lui racontais par le menu le mariage de Lee. C’est important de ne pas rater ça.

— Oui, acquiesça Charlie. »

Il lui passa en retour son bras autour de la taille. Après quelques instants de recueillement, ils s’en retournèrent ainsi du cimetière.

« Tu sais, ajouta George, je ne suis pas toujours aussi seul sur mon chemin que les gens ne semblent le croire au premier abord. Même au cimetière, c’est la maison.

— Je ne suis pas forcément à l’aise avec les gens, concéda Charlie. C’est vrai que ça doit être apaisant d’avoir une maison aussi calme. »

Ils passèrent la porte.

George la ferma en disant encore quelque chose dans la « langue top secrète ».

« Ca veut dire ‘au revoir’ ? demanda Charlie.

— Ah non, ça veut juste dire que la porte grince et qu’il faudra que je ramène de la graisse la prochaine fois. Dis, Charlie, tu as quand même bien entendu que c’était un peu plus long que ‘au revoir’, non ? »

Ils se sourirent avant d’entamer le chemin vers le Terrier, tous les deux, George racontant cette fois-ci en anglais le mariage de son meilleur ami à son frère.

End Notes:

Pour toustes les gémellaires du monde hihi ♥

Piti

32. Douche froide by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit du 18 novembre 2023, thème écrit de minuit : "massage".

Que j'ai immédiatement associé à la sensation que procure un bon câlin lorsqu'on est fatigué et qu'on se retient de pleurer.

Mary rentra dans le dortoir en espérant que ni Marlene ni Lily ne verraient qu’elle avait pleuré. Elle pensait qu’elles ne pourraient jamais comprendre pourquoi il valait la peine de souffrir pour danser. Mais à peine deux minutes plus tard, elle ne put contenir un reniflement.

« Ça va, Mary ? demandèrent-elles immédiatement.

— Oui, je vais me doucher. »

Elle posa son sac de danse sur sa chaise, sortit son pyjama et une culotte propres et se dirigea vers la salle de bains. Le temps qu’elle s’y déshabille, elle put entendre ses deux amies discuter, de l’autre côté de la cloison.

« Elle n’a même pas enlevé ses pointes, remarqua Marlene.

— J’ai tenté un jour de calculer la pression exercée sur le bout du chausson et donc sur la pointe des pieds et euh…

— Ca confirme l’impression générale qu’a la néophyte qui se dit simplement « ouah c’est vachement petit comme surface ! », compléta Marlene.

— Oui, admit Lily en riant.

— Je serais tellement épuisée, si je devais faire un sport-études.

— C’est peut-être parce qu’on n’a pas vraiment de sport favori, suggéra Lily.

— Même… Le corps prend tellement cher ! »

A ce moment précis, Mary dut enlever ses pointes.

Elle avait beaucoup, beaucoup forcé dans l’après-midi. On était en période de révisions pour l’examen de fin d’année, autant dire qu’on chaussait les pointes bien vite et qu’on répétait inlassablement des combinaisons périlleuses. La professeure les avait fait passer une par une, seule à seule. Les autres avaient quartier libre dans une autre salle, ce qui signifiait en l’espèce qu’elles n’avaient pas pris une seule pause de toute la séance.

Mary avait été appelée vers seize heures, épuisée, les jambes lourdes. Elle avait fait deux fautes techniques importantes, conduisant chacune à recommencer. Puis elle n’avait pas eu la force mentale de se donner pour passer un pas qu’elle avait abandonné, conduisant à recommencer. Ensuite, elle avait été arrêtée parce que l’artistique n’y était plus, conduisant à recommencer. Et ainsi de suite pendant vingt minutes environ, jusqu’à ce qu’elle soit capable de conduire sa variation de façon satisfaisante du début jusqu’à la fin.

Le pire était que Mary n’avait pas pour autant cessé de travailler une fois sortie du champs de vision de sa professeure. Elle s’y était remise dans la salle attenante, avec toutes les autres, jusqu’à une heure plus tardive que d’habitude. Elle avait voulu peaufiner toutes les corrections.

Lorsqu’elle était revenue de son voyage en Portoloin dans le bureau de MacGonagall, cette dernière avait eu pour réflexe de lui proposer un gâteau. Elle avait décliné la proposition, elle n’avait pas faim. Elle n’avait jamais faim en période de révisions intenses ; elle pensait sincèrement que son corps passait dans un autre mode à ces moments-là.

Marlene et Lily, malgré leur bienveillance, montraient des avis plus nuancés, voire opposés.

Mary ôta donc ses pointes, ce qui lui causa d’abord une vive douleur lorsque le sang afflua là où il avait déserté. Elle passa sa main sur toutes les marques laissées par les coutures et les élastiques, le peau y était toutes fripée. Elle enleva ses embouts, quelques pansements sur ses ampoules. C’était comme si ses pieds gonflaient à goûter de l’air. Elle avait la sensation de voir une fleur déplier ses pétales.

La douche – froide – éteignit les conversations de ses amies et arrêta le saignement des coupures entre ses orteils.

Lorsqu’elle sortit enfin de la salle de bains, elle fut touchée de remarquer qu’elles lui avaient déjà préparé le seau d’eau glacée salvateur. Que Lily ait trouvé avec Remus le moyen de confiner de l’air froid dans des tiroirs donnait un charme sans commune mesure à ce dortoir, où l’on avait donc un réfrigérateur et un congélateur à portée de mains. Les trois amies les avaient rempli de nourriture exclusivement moldue, douce nostalgie, et Marlene et Lily avaient accepté sans difficultés les sachets de glace pilée de Mary. Pour une fois qu’elle faisait quelque chose qui n’avait pas l’air d’abîmer son corps…

Mary releva donc son pyjama au-dessus du genou et fit pénétrer ses pieds et ses mollets dans le seau. Elle perdit d’abord le souffle, comme chaque fois qu’elle se donnait ce moment pour ses jambes, et ensuite, malgré la brûlure, y trouva bientôt un réconfort ultime. C’était comme si la glace allégeait ses chevilles et ses muscles de tous les efforts consentis.

Elle resta là à barboter presque deux heures, révisant en même temps son cours de botanique. Elle retirait parfois ses jambes pour les réchauffer un peu. Ce n’est que vers l’heure du coucher qu’elle s’en extirpa définitivement.

Marlene et Lily lui proposèrent un petit soin des pieds supplémentaires.

« De quoi parlez-vous ?

— Allonge-toi, tu verras. »

Mary s’allongea donc, tandis que ses amies se plaçaient chacune sur une chaise au bout du lit.

« Tends les patounes ! lança Lily.

— Chacune sa patoune ! enchérit Marlene. »

Mary se prit à sourire. Elle les trouvait adorables. Et alors qu’elle se faisait cette réflexion, elle sentit très nettement des petits doigts qui faisaient des ronds sous la plante de ses pieds, là où les muscles étaient tendus par l’effort – inflammés, presque. Les petits doigts explorèrent ensuite toute la plante des pieds, les coussinets des orteils, et revenaient ensuite énormément sur l’articulation.

Au début, cela faisait bien mal, mais au fur et à mesure, les meurtrissures s’assourdirent. Quatre jours encore de ce traitement devraient l’aider considérablement à réussir à rentrer dans ses pointes le jour de l’examen. C’était tout de même une condition importante pour pouvoir envisager de le valider.

Mary, regardant alternativement à gauche et à droite ses amies si concentrées, si attentives, fut saisie d’émotions. La fatigue joua aussi, sans nul doute. Il n’empêche qu’elle ferma les yeux et sentit franchement un filet continu de larmes couler sur ses joues.

 

End Notes:

J'ai tout de même conscience que le milieu de la danse n'est pas forcément très sain, et, au-delà de ça, tous les milieux qui imposent des charges physiques aux enfants et adolescents ne le sont pas non plus. J'y ai repensé pendant les JO (ça cassait un peu l'ambiance, mais j'ai bien aimé apprendre certaines choses avec les documentaires qu'Arte avait remis en ligne à l'occasion), à tous ces enfants déjà tristes, et au fait que la plupart des sportifs que nous voyons à la télévision sont finalement des personnes... en mauvaise santé.

Bref, je laisse mes réflexions au vestiaire XD

J'adore la danse, le fait de danse, ce que la danse peut créer comme images ou émotions, et je reste sur cette note positive.

Merci pour votre lecture,

Piti

 

33. Verre brisée, vie biaisée by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit du 21 janvier 2024, minuit, scénaristique : "une glace brisée dans le récit"

 

Quelqu’un au fond de la salle de classe avait dû faire tomber un bécher. Tout le monde se retourna à l’unisson, on entendit un juron, puis plus rien. Slughorn se fâcha un peu pour la forme, puisque les réparations magiques fatiguent tout de même le matériel, donc il faut le garder neuf. Oui, Monsieur, merci, Monsieur.

Remus était en alerte, les narines dilatées et la respiration légèrement sifflante.

« Il n’y a plus rien à voir, lui fit remarquer Peter. Si tu veux, tu peux diluer l’essence d’alihotsy. »

Remus entendit et oublia aussitôt ce que son ami venait de lui dire.

« Remus, tu peux faire la dilution. »

Aucune réaction.

« Remus, tu m’écoutes ? »

Remus sursauta.

« Oui, oui, pardon.

— Qu’est-ce que tu fais ?

— Je prends une poignée de…

— C’est ce que je viens de faire, Remus. Diluer, Remus, diluer, c’est ça qu’il faut faire maintenant. »

Remus rougit.

Il avait les nerfs en pelote à chaque bruit de verre brisé. Cela lui rappelait toujours, avec une force violemment réaliste, la fenêtre qui s’était cassée entre lui et son destin, un soir de son enfance. La peur, la douleur, le traumatisme, les cachettes. Quitter la ville et les copains d’école pour finir dans une maison loin de tout avec une porte de cave épaisse de dix centimètres. La porte de l’enfer.

Qu’est-ce que faisaient les gens d’une porte de cave mieux blindée que leur porte d’entrée, si ce n’était cacher un louveteau-garou ?

Depuis, Remus ne supportait pas deux choses, le sang qui coule et le verre qui se casse. Le premier lui donnait envie de vomir et le deuxième déroulait sous ses yeux le film au ralenti de la nuit qui avait tout changé. Dans les deux cas, il revoyait nettement les éclats hyalins qui traversaient la pièce, ses cris pour alerter ses parents, la masse sombre et cauchemardesque, les pas hâtifs de sa mère, les sortilèges de son père… Mais le loup avait déjà mordu, et Remus n’avait été plus qu’en demi-sommeil, en train de passer de l’autre côté…

Tout avait été bien cicatrisé, sauf la marque la plus profonde. Remus avait sur le biceps un petit disque rose, d’environ un demi-centimètre de diamètre, qui devenait violet lorsqu’il avait froid. Remus n’avait pas beaucoup d’autres traces, parce qu’il avait l’habitude de mettre des manchons sur ses bras et ses jambes avant ses transformations, afin de ne pas se blesser lorsqu’il lui arrivait de se mordre.

Parfois, il voulait que la seule preuve physique de sa condition lui ait été infligée par lui-même. La seule chose qui le retenait était qu’il avait une dentition suffisamment développée pour se faire beaucoup de mal à ce qui redeviendrait ses poignets et ses mains le reste du mois : il était hors de question que ces zones sensibles et visibles soient touchées. Alors, il frottait sa cicatrice avec des crèmes en espérant qu’un jour, elle disparaisse.

Cela faisait plusieurs années déjà : c’était peine perdue. Il avait le signe de son pacte avec Greyback, comme d’autre ont le signe de leur pacte avec Voldemort. Si on lui demandait d’où elle venait, il inventait un cathéter imaginaire lors de son enfance, qui rendait encore plus crédible une constitution génétique fragile et sa mère soi-disant malade. Les sorciers ne se posaient pas trop de questions sur l’emplacement douteux du cathéter.

Tout cela était décuplé par la honte. La honte que son père lui avait transmise lui avait fait croire qu’il était une force de mal bien avant qu’il n’ait lu le moindre article de presse ou le moindre cours sur les loups-garous. La honte, quand Sirius parlait de son petit frère destiné à devenir un Mangemort, le rendait transparent. « Je vais être comme lui dans quelques années ». La honte ne lui faisait pas envisager des amitiés autres que de circonstances pour trouver des binômes en classe, et il se croyait coupable de se sentir à l’aise avec ses camarades de dortoir. « Si j’oublie un jour d’aller dans le Saule Cogneur, je vais les manger ».

« Remus, c’est un facteur dix, pas vingt ! »

Remus soupira.

Slughorn passa près de leur paillasse. Le problème n’était même pas dans le facteur dix ou vingt : Remus avait fait n’importe quoi, tout simplement. Avec de telles pensées, qui n’en aurait pas fait de même ?

« Je comptais un peu sur toi, murmura Peter. J’ai déjà tellement de mal pour suivre… Tu avais compris tout le cours, hier soir ! »

Le cours ? Ah oui. Oui, il s’en souvenait bien. Il ne put constater qu’amèrement les dégâts ; effectivement, rien n’allait dans leur potion. Le liquide commençait à bouillonner dangereusement. Remus devina que ça allait exploser ; il poussa Peter, courut dans le rang et sortit de la salle. Fuir, tant que cela était possible, fuir, ne pas entendre le bruit du verre qui se brise, ne pas se rappeler les fêlures de la vie, fuir.

Il s’assit dans le couloir, contre un mur, se sentant stupide : comment rentrer à nouveau en classe ? Et s’il prétextait une envie pressante aux toilettes ? Il lui faudrait peut-être y aller pour de vrai, afin de se rendre crédible. Il se leva au moment où Evans sortait également de la salle. Il l’aimait bien, c’était une chouette fille qui ne disait jamais de mal de personne.

« Hey !

— Hey.

— Tu as un petit problème avec le bruit, dit-elle.

— …

— Le bruit du verre.

— …

— Ce n’est pas grave, tu sais. Moi, j’ai un peu peur des bruit d’explosion. On a tous des petits trucs, je pense.

— Ca veut dire que tu ne peux pas aller voir de feux d’artifices ?

—… »

Ah, ce n’était pas ça.

« Et toi, tu ne peux écouter des gens trinquer ?

— En fait… Quand j’étais petit, il y a… Euh… Un cambrioleur qui est rentré dans la maison en passant par la fenêtre de ma chambre. Il a donné un grand coup dans la vitre avec un marteau…

—  Oh, qu’est-ce que tu as dû avoir peur ! »

Elle avait l’air sincèrement compatissante. Remus se sentit mal à l’aise de susciter la pitié et la sympathie alors qu’il aurait dû susciter l’effroi et le dégoût.

« Moi, ça vient des coups de grisou. Je n’en ai jamais entendu de très gros, et puis, je suis trop jeune pour descendre dans la mine. C’est juste que je sais que mes parents craignent le coup de grisou, c’est proverbial, si tu préfères. Chaque fois que j’entends un bruit d’explosion, par anticipation je crois que c’est ça et que mes parents sont en danger ou morts… Heureusement, ça n’a jamais été ça, mais je n’arrive pas à m’en défaire ! »

Remus ne sut quoi répondre. Elle évoquait un traumatisme qui ne lui était pas encore arrivé. Remus ne connaissait pas cela : il n’imaginait pas qu’on puisse vivre dans une telle latence et ce, depuis la naissance. Comment est-ce qu’il pouvait lui expliquer que sa vie à lui avait changé en même temps que le bruit fatal avait déchiré ses oreilles ?

« Est-ce que tu en as honte ? demanda Evans. »

Remus se sentit rougir.

« Bon, je pense que oui. Mais il ne faut pas, je te jure. C’est faux de dire que l’on choisit tout ce qu’on vit. Non, on choisit une partie, on choisit parmi les choses – restreintes – que d’autres nous proposent. Et dans ce que d’autres nous proposent, il y a aussi des bruits qui font peur. On vit avec. Viens, il faut rentrer en classe, maintenant. »

Elle parlait tellement que Remus lui en fut secrètement reconnaissant : il n’avait à se justifier de rien.

C’était reposant d’avoir des amis et peut-être aussi un jour des… Amies ?

Non, il ne devait penser ni aux amis, ni aux amies – encore moins aux amies.

Même si parfois, à de certaines inclinations de voix, à certains gestes, il avait envie de croire qu’ils savaient déjà. Non, c’était impossible – ils l’auraient rejeté. Mais elle ne disait jamais de mal de personne ! Et les garçons juraient sur une amitié qui durerait toute la vie !

Mais si, mais non. Toute une vie qui avait volé en éclats sous une vitre brisée. Des bouts éparpillés, ceux qui veulent espérer, ceux qui désespèrent, ceux qui croient et ceux qui craignent.

End Notes:

Je publie très aléatoirement en ce moment, je suis très fatiguée par l'irl, et pas aidée par les canicules, ce qui fait que j'allume moins souvent mon ordinateur le soir. J'essaie de garder la face et il ne me reste plus que deux chapitres pour la partie 2 de ma giga-fic-trop-longue à finir !!

Merci pour votre lecture ♥

PititeCitrouille

34. Drag ! by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit du 12 avril 2024, 21h, thème personnage : mime

« Tu viens au Gai Rossignol, vendredi ?

— Je vais voir si je peux, répondit Peter. J’ai quand même mes Aspics à réviser. »

Il ne devait rien à Mick, et certainement pas qu’il attendrait de savoir s’il se remettrait bien de la fatigue de la pleine Lune du mercredi suivant.

« Je vais te montrer quelque chose d’incroyable, que tu n’as probablement jamais vu. »

Peter se dit que c’était tentant. Il ne répondit pas.

Il jeta un coup d’œil à gauche, à droite.

Personne.

« On peut y aller.

— Ça allait ?

— Quoi ? Oh, oui, bien sûr. Si tu veux, on pourra se retrouver encore ici un de ces quatre.

— Ca marche. On garde le même signe ? Poinçon qui vire au vert foncé dans le revers de la veste ?

— Parfait. »

Peter tâtonna la doublure : il était bien là, pour le moment bleu pâle.

« A plus tard, ou à vendredi. »

Et ils se coulèrent dans le couloir, sans plus mot dire, se séparèrent après un effleurement de mains, et se rendirent dans leurs dortoirs respectifs. Peter se glissa silencieusement dans son lit – ses amis étaient tous endormis. Il garda les yeux ouverts un certain temps encore. Il aimait ce qu’il faisait, c’était indéniable… C’était juste… Voilà, du temps où Peter avait senti qu’il était attiré par Sirius, il avait bien compris que ce dernier était purement hétérosexuel. Maintenant qu’il était attiré par James, il comprenait bien que ce dernier était purement hétérosexuel – voire complètement demisexuel puisqu’en fait de filles, il ne regardait que Lily. En tout cas, ça ne changeait rien au fait qu’il n’avait aucune chance, ontologiquement.

Il était heureux de découvrir ses semblables grâce à ce systèmes de badges par les gays pour les gays du château. Parfois, ils allaient discuter en groupe dans une salle de classe vide, d’autres fois, ils sortaient dans des clubs, des théâtres, des lieux underground, où étaient proposés tout un tas de choses… Mais de façon alternatives. Avec eux, il ne lisait pas les mêmes romans, ne regardait pas les mêmes films, ne s’attardait pas aux mêmes expositions, n’écoutait pas la même musique que la plupart des gens. Et s’il fallait faire de la provocation, évidemment, si deux d’entre eux avaient envie de faire l’amour, et bien ils ne le faisaient pas comme la plupart des gens.

La frontière était juste floue avec les goûts des uns et des autres dans son groupe d’amis. Il fallait dire qu’entre deux lesbiennes, un loup-garou, deux personnes atteintes de troubles de la santé mentale, il était difficile de faire plus a-normé comme groupe (a-normé n’existe pas comme mot, mais Peter était poète, alors Peter inventait les mots qui convenaient aux situations lorsqu’ils n’existaient pas).

Lily restait la soi-disant normée du groupe, mais elle avait l’air tellement différente de tant d’autres filles que Peter se disait qu’elle avait au moins deux ou trois choses à découvrir chez elle. Par exemple, ça se voyait assez bien qu’elle avait des fixations sur des détails assez précis, ou qu’elle gérait inversement son stress et son anxiété. Et Peter aurait dû moins cligner de l’œil, mais il était certain qu’elle avait regardé Mary, un jour. Peut-être même deux ou trois, mais ça s’était estompé et il y avait James.

Bref, Peter avait sous son oreiller les poèmes de Jean Cocteau à Jean Marais en français.

Alors, il alla au Gai Rossignol le vendredi.

Mick sourit en coin.

« Tu es venu. »

Il haussa les épaules, fourra dans sa poche.

« Tu ne lis pas le français, ce n’est pas grave, mais laisse-le traîner là où un autre comme nous pourra le lire. »

Mick siffla.

« De la poésie ! Eh bien, poète, rentrons. »

Dans le bar, il y avait toujours beaucoup de monde, beaucoup de paillettes de nuit et des éclats de voix libres.

Et là, la lumière d’un projecteur illuminait la petite scène au fond… Et il y avait… Un mime ? Une mime ? Un.e mime ? Une créature de blanc et d’argent vêtue.

Les cheveux s’échappent en escarboucles et des perles belles comme des larmes y pendent. Ses mains dessinent le destin dans l’ombre qui surgit de la lumière. Œil onirique. Tout est peint et tout est créateur.

« Peter ? Tu es avec nous ? »

Il sursauta.

« Oui, pardon.

—  Alors, comment est-ce que tu trouves Madame Pingouine ?

— C’est la personne qui fait du mime sur scène ?

— C’est une drag queen. »

Peter assimila ce mot nouveau.

Je ne suis plus le seul. Mon Cocteau et mon Marais passeront de mains en mains et d’autres poètes inventent pour moi des mots poignants.

« Mick, où est-ce que tu t’es acheté tes boucles d’oreille ? »

Tout scintille et ce sont des lueurs d’amours, des émaux d’amitié.

End Notes:

Je suis parfaitement consciente de l'immense différence d'âge entre Cocteau et Marais. Cependant, j'avais envie de citer des artistes qui me parlaient sur le plan artistique strictement, et qui étaient susceptibles de parler à Peter tel qu'il est dans mon headcannon (il a notamment les mêmes goûts de poésie que moi).

Aussi, je pense que les choses doivent être mesurées et critiquées à l'aune de leur contexte. A l'époque, ce que représentait la relation Cocteau-Marais était déjà énorme, car on le rappelle l'homosexualité était encore passible de prison. Alors, oui, jamais rien n'est parfait, et même parfois ce sont des choses (très très) imparfaites qui contribuent aussi à faire avancer le monde (c'est le paradoxe étrange du progressisme).

Merci pour votre lecture !

Piti

35. Modern poetry by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit du 14 juin 2024, 20h, thème musical : les Quatre Saisons de Vivaldi.

 

 

Hievreteauromneprintemmshuvereteairomneprintempshivereyeauromnepronhemmshi

vereteauromnepringemmshivereteaurolneprintemmshivereteauromnepringempshivere

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« Est-ce que je peux dire une insulte psychophobe ? demanda Sirius.

- Non, dit Remus.

- Oui, dirent James et Peter d'une même voix.

- Les personnes concernées sont d'accord, moi incluse, fit Sirius. Peter, c'est donc un poème assez ravagé. Et encore, je dis poème, mais je n'en suis pas sûr.

- Mais c'est plein de sens, dit Peter. C'est juste que tu ne comprends pas la modernité. Oui, malgré tes guitares électriques.

- Vous l'avez compris ? lança Sirius à la cantonade.

- Pas forcément, s'excusa Remus.

- Oui, affirma James avec assurance.

- C'est vrai ? fit Peter, plein d'espoir.

- C'est un achoppement du temps qui passe, une mise en abyme du temps qui abîme ou qui s'abîme. Il écrit fatigué les yeux fermés il perd le fil du temps il déroule sa plume les lettres s'écorchent car le temps n'est ni constant ni linéaire...

- Tu y es presque. Il te manque encore un élément, mais tu manques de culture moldue. Et Marlene a trouvé.

- Et c'est... ?

- Un hommage à John Cage.

- Attends, fit Remus. Pourquoi as-tu inversé l'automne et l'hiver ? C'est un exercice poétique ?

- Ah non, c'est juste que j'étais réellement fatigué. Flûte, ça manque de sens, maintenant.

- Ou pas. Finalement, le poème est aussi l'illustration complète de ton Toi au moment où tu l'as écrit. Sans Toi fatigué, il n'y aurait pas eu de fautes - ordre des mots inclus. Et puis, la modernité c'est aussi, comme dirait Lily, l'entropie qui augmente. C'est le désordre. Le temps court inexorablement vers l'homogénéité, c'est-à-dire le désordre.

- ...

- Et oui, qui a dit que je ne m'intéressais pas à ta poésie, Peter ? Je te taquine, c'est tout.

- Mais tu es génial, Sirius ! »

End Notes:

C'est un texte volontairement satirique qui m'a été inspiré par ce morceau de John Cage, qu'on m'a donné à écouter lors d'une exposition il y a bien longtemps sur le Velvet Underground. Honnêtement, ma première réaction a été "il se fout de notre gueule", mais je vous ai mis le lien wikipédia pour voir qu'on peut réfléchir un peu plus loin que ça (j'ai grandi depuis, aussi, mais j'écoute toujours autant le Velvet).

Merci pour votre lecture,

Piti

36. L'ode aux fleurs by PititeCitrouille
Author's Notes:

Nuit du 23 août 2024, minuit, thème écrit : "odyssée"

 

Heureux qui comme Ulysse a fait un beau voyage....

Athénaïs sourit et ferma le recueil de poèmes Renaissance. Chaque vers était aussi subtil que le parfum des fleurs dont elle s'occupait chaque jour.

Elle aimait les fleurs. Elle aimait les vers. Elle aimait les voyages sensoriels, les effluves végétales, la douceur d'un sonnet, la délicatesse de la patte d'une abeille sur le pourtour dentelé d'une rose bientôt fanée, réciter des haïkus.

Fermer les yeux et voir le monde plus beau qu'elle ne se le construisait déjà. Imaginer que tous les enfants du monde vivraient un jour bercés de pistils odorants et d'alexandrins doux et amoureux.

On disait d'elle qu'elle rêvait.

Pendant ce temps, Grindenwald éteignait les étoiles, coupait les fleurs et censurait la poésie. Et il aurait fallu seulement se contenter de la cantonner à la rêveries ?

Lorsqu'il est interdit de rêver, rêver devient un acte politique.

Alors, Athénaïs suivait doctement la botanique, les potions, l'étude des runes. Elle compléta ses connaissances des propriétés des plantes directement dans les cuisines de Poudlard. Son frère Fleamont était un véritable chenapan, il avait trouvé comment y entrer, et elle profita que c'était à côté de la tour de sa Maison Poufsouffle pour se convaincre qu'elle n'enfreignait qu'à moitié le règlement.

À Grindenwald on opposait déjà les armes, les voix, les manifestations, les sanctions économiques.

Athénaïs essaierait, de toute son âme de poète fleuriste, d'y parvenir aidée de plumes et d'abeilles.

End Notes:

Vers de Joachim de Bellay.

Et bien maintenant je n'ai plus de texte des nuits d'avance sous la main !

Mais j'ai une bonne nouvelle, il ne me reste plus que la moitié d'un chapitre pour clore la partie 2 de ma giga-longue-fic, donc début de la publication tout bientôt !

Merci pour votre lecture,

Piti

Cette histoire est archivée sur http://www.hpfanfiction.org/fr/viewstory.php?sid=38638