Summary: Et si la disparition de Voldemort n’avait pas suffi à écarter tout danger ? Et si, avant sa mort, il avait semé les graines vénéneuses susceptibles de faire resurgir les Ténèbres ?
Categories: Après Poudlard Characters: Albus S. Potter
Genres: Aventure/Action
Langue: Français
Warnings: Suicide
Challenges: Aucun
Series: Aucun
Chapters: 26
Completed: Non
Word count: 44342
Read: 5412
Published: 07/09/2024
Updated: 10/01/2025
Story Notes:
Disclamer : L’univers et les personnages de cette fic appartiennent naturellement à JK Rowling.
Notes de l’auteur : Bienvenue dans cette fic qui constitue le quatrième tome du « Journal de Severus Rogue » (du même auteur). « Le journal de Severus Rogue (1) », « Le journal de Severus Rogue (2) : La malédiction des Black » et « Le journal de Severus Rogue (3) : Les douze perles de minuit » doivent être lus auparavant pour la bonne compréhension de l’histoire !
Merci à celles et ceux qui par leurs encouragements m’ont aidé à écrire cette suite. N’hésitez pas à commenter, ça fait vraiment plaisir !
1. Chapitre 1 : Convaincre (1) by OutThereIsTheTruth
2. Chapitre 2 : Convaincre (2) by OutThereIsTheTruth
3. Chapitre 3 : Préparer by OutThereIsTheTruth
4. Chapitre 4 : Subir ou ne pas subir by OutThereIsTheTruth
5. Chapitre 5 : Rendre compte by OutThereIsTheTruth
6. Chapitre 6 : Plongée dans les Ténèbres by OutThereIsTheTruth
7. Chapitre 7 : Non, mais je rêve ! by OutThereIsTheTruth
8. Chapitre 8 : Un pas après l'autre by OutThereIsTheTruth
9. Chapitre 9 : Lily Molly Potter by OutThereIsTheTruth
10. Chapitre 10 : Retour à Poudlard by OutThereIsTheTruth
11. Chapitre 11 : Je patine, ils s’excitent by OutThereIsTheTruth
12. Chapitre 12 : Mais qui m’a f… un abruti pareil ! by OutThereIsTheTruth
13. Chapitre 13 : Quel abruti ! (et cette fois-ci, je parle de moi) by OutThereIsTheTruth
14. Chapitre 14 : Introspection by OutThereIsTheTruth
15. Chapitre 15 : Deuxième sortie à Pré-au-Lard, et celle-là je ne suis pas près de l’oublier ! (1) by OutThereIsTheTruth
16. Chapitre 16 : Deuxième sortie à Pré-au-Lard, et celle-là je ne suis pas près de l’oublier ! (2) by OutThereIsTheTruth
17. Chapitre 17 : Trêve de Noël, tu parles d’une trêve ! by OutThereIsTheTruth
18. Chapitre 18 : Contes de Noël by OutThereIsTheTruth
19. Chapitre 19 : : Fouilles en règle (1) by OutThereIsTheTruth
20. Chapitre 20 : Fouilles en règle (2) by OutThereIsTheTruth
21. Chapitre 21 : Retour à Nurmengard by OutThereIsTheTruth
22. Chapitre 22 : Sur un arbre perché by OutThereIsTheTruth
23. Chapitre 23 : Amulette et devinette by OutThereIsTheTruth
24. Chapitre 24 : Tour de Serdaigle by OutThereIsTheTruth
25. Chapitre 25 : Explications nocturnes by OutThereIsTheTruth
26. Chapitre 26 : Don Esteban Rojo de Salinas (1) by OutThereIsTheTruth
Chapitre 1 : Convaincre (1) by OutThereIsTheTruth
« Il n’en est pas question ! » avait asséné Narcissa Malefoy d’un ton sans réplique, la première fois que j’avais évoqué l’idée d’emmener sa nièce Delphini Black rendre visite à un potionniste, grand adepte de magie noire, répondant au nom d’Hexaphorus, auquel ses sinistres pratiques valaient d’être enfermé depuis des décennies dans la prison de Nurmengard.
Malgré le regard furieux dont elle me fusillait, j’avais tenté d’argumenter :
« Tu te rends bien compte que la seule façon de protéger durablement ta nièce, c’est de comprendre ce que celui qui a cherché à l’enlever entendait faire d’elle, et … »
« Pourquoi faire ? Puisque le kidnappeur est mort. » m’avait interrompu Narcissa.
« Certes, il est mort. Mais il est plus que probable qu’il ait eu des complices. D’ailleurs, tu le sais aussi bien que moi sinon, tu ne prendrais pas autant de précautions pour la mettre à l’abri ! » avais-je rétorqué.
Depuis qu'elle était rentrée chez les Malefoy à la fin de l’année scolaire, par le réseau des cheminées et non par le Poudlard Express pour lui éviter de s’aventurer à l’extérieur, Delphini Black était en effet cloîtrée à l'intérieur du Manoir comme elle l'avait précédemment été à l’intérieur l'école après la tentative d’enlèvement dont elle avait fait l’objet. Malgré cela, Narcissa avait ignoré mon argument.
« Débrouille-toi comme tu veux pour faire parler cet horrible individu, mais il est HORS-DE-QUES-TION que je te permette de lui amener Delphini. » avait-elle conclu avec des accents qui n’étaient pas sans rappeler ceux du portrait de sa tante Walburga Black les mauvais jours.
Certes, la position de Narcissa pouvait se défendre dans la mesure où le Hexaphorus en question avait admis à demi-mot avoir eu autrefois pour projet de transformer la fille de sa sœur Bellatrix en ingrédient de potion, afin de concocter un filtre de Régénération pour réparer le corps et même l’âme fragilisée par les pratiques de magie noire de celui qui se trouvait malheureusement être le père de l’adolescente, à savoir Voldemort. La mort de celui-ci avait fort heureusement rendu caduque ce projet. Pourtant, quelques semaines auparavant un ancien partisan de Voldemort surnommé Nox, un fanatique absolu que je croyais mort depuis des décennies, avait tenté d’enlever Miss Black dans l’enceinte même de Poudlard en l’emportant de force sur un balai. La tentative avait échoué grâce à l’intervention de l’hippogriffe d’Hagrid, mais ce dernier ayant mis l’agresseur en charpie, je n’avais pas pu l’interroger.
Or, il n’y avait aucune autre solution pour protéger durablement Delphini Black que de comprendre pourquoi ce type avait cherché à l’enlever, et pour avoir une chance de réussir, il fallait au moins que je sache dans quelle direction chercher. Pour cela, je n’avais pas d’autre idée que d’interroger cet Hexaphorus qui était susceptible d’avoir quelques lumières sur le sujet. Avec l’autorisation du Ministère, Harry Potter et moi l’avions rencontré quelques semaines plus tôt dans la forteresse de Nurmengard, pour tenter de comprendre quel usage le kidnappeur aurait pu faire de Delphini Black s’il avait réussi son coup. Mais si Hexaphorus avait accepté d’écouter ma question, il avait été clair sur le fait qu’il n’accepterait d’y répondre que si je lui amenais cette dernière ou plus exactement « son ingrédient de potion ».
J’avais spontanément repoussé cette éventualité, tant il me paraissait dangereux d’emmener une gamine de seize ans, plutôt fragile, rencontrer ce sinistre personnage. Mais, je n’avais pas tardé à reconsidérer ma position en réalisant que je n’avais d’autre solution pour orienter mes recherches que d’arriver à le faire parler et pas d’autre solution pour le faire parler que de lui amener Delphini Black. Depuis j’essayais de convaincre Narcissa de me laisser demander à sa nièce, si elle accepterait d’aller voir Hexaphorus. De son côté, Lucius Malefoy avait été convaincu par mes arguments, mais ce vil lâcheur abandonnait mon parti dès qu'il faisait face à la colère de Narcissa et je me retrouvais tout seul à discuter, ce qui ne m'empêchait pas de revenir régulièrement à la charge depuis trois semaines, avec toujours le même argument :
« Il faudra bien en passer par là. Ta nièce ne pourra pas rester enfermée indéfiniment. »
Pour rendre à leur nièce la situation plus supportable, Lucius et Narcissa avaient fait construire une immense véranda qui s'étendait sur une grande partie de la pelouse. Cela permettait à l'adolescente d'être presque dehors tout en restant parfaitement à l'abri des protections magiques que nous avions installées Lucius et moi avant son retour. Malgré cela, la situation n’était évidemment pas durable, même si Narcissa faisait mine de croire le contraire :
« Elle restera enfermée le temps qu’il faudra pour que ton fils et ses collègues Aurors trouvent et arrêtent tous les gens susceptibles de s’en prendre à elle. »
Narcissa et Lucius faisaient en effet partie des très rares personnes au courant d'un secret que j'avais enfoui tellement profondément plus de trente-cinq années durant que j'étais alors persuadé qu'il ne referait jamais surface. Mais, Albus, le deuxième fils d'Harry Potter, était arrivé à Poudlard dans ma propre Maison et tout avait changé. Au lieu de se tenir prudemment à distance, comme le faisaient les autres élèves, y compris les serpentards, Albus s'était assez intéressé à moi pour finir par percer ce secret. J'y avais aussi ma part de responsabilité. Car au lieu de me montrer suffisamment désagréable pour le faire fuir - un exercice dans lequel j'excellais pourtant – je n’avais pas résisté à l’envie de faire mieux connaissance avec celui dont je n’ignorais pas qu’il était mon petit-fils, quitte à bouleverser la vie de son père Harry et de toute sa famille en plus de la mienne. Albus ayant pour meilleur ami Scorpius Malefoy, les proches de ce dernier avaient été aux premières loges de nos révélations familiales.
En vraie serpentarde, Narcissa cherchait donc à me manipuler. En affichant sa confiance dans la capacité de mon fils à résoudre le problème, elle espérait me faire abandonner l'idée d'impliquer sa nièce dans mes recherches. Mais j'étais un serpentard moi aussi et, à ce titre, vacciné contre ce genre de manœuvre. J’étais d’autant moins disposé à me laisser convaincre que nul n’avait la moindre idée de l'identité des personnes mêlées à la tentative d’enlèvement de Delphini Black, ni même de leur nombre. Je me contentais donc de hausser ostensiblement les épaules face à l’affirmation de Narcissa, pendant que Lucius se muait en statue de sel avec l’espoir de se faire oublier en se fondant dans le décor.
« Tu sais comme moi que ce que tu dis n’a pas de sens, Narcissa. » contre-attaquai-je « Même si les Aurors retrouvent certains des complices de Nox, nous ne pourrons jamais être certains qu’ils les aient tous attrapés. Tant que nous ne saurons pas, ce qu’ils entendent faire de ta nièce, elle restera en danger. Nous ne pourrons jamais la protéger durablement sans savoir de quoi il faut la protéger ! »
Sans laisser à Narcissa le temps de trouver un contre-argument, j’enchaînai :
« Et puis, ce n’est plus une enfant. Dans moins d’un an, elle aura 17 ans et elle sera majeure, il serait peut-être temps de lui demander son avis sur ce qui la concerne. »
Narcissa pinça les lèvres, elle n’était clairement pas ravie que je lui rappelle cette évidence.
« L’âge ne fait pas tout. » lâcha-t-elle. « Tu oublies qu’elle a été complètement traumatisée d’avoir été bringuebalée sans attention et sans affection pendant toute son enfance. »
« Je ne l’oublie pas. Et justement je ne vois pas en quoi le fait de rester enfermée sous le coup d'une menace de nature inconnue pourrait l'aider à guérir des blessures de son enfance ! Je suis persuadé au contraire que ce dont elle a besoin pour s’en sortir, c’est de comprendre les raisons de tout ce qui lui arrive. »
A mon tour, j'avais l’impression de manipuler Narcissa et je n'en étais pas très fier, mais j'étais persuadé que seule la confrontation de Delphini Black avec Hexaphorus permettrait de faire surgir un bout de cette vérité qui m’échappait, je me faisais fort ensuite d’en remonter le fil jusqu’à trouver une solution. A supposer qu’une solution existe …
Après des semaines de résistance, Narcissa céda ce jour-là.
« Eh bien, allons lui parler. » accepta-t-elle de mauvaise grâce. « Mais il n'est pas question de lui imposer quoi que ce soit d'autorité. Elle n'ira voir cet affreux personnage que si elle le veut bien. Et j'espère bien qu'elle te dira non ! »
Chapitre 2 : Convaincre (2) by OutThereIsTheTruth
Narcissa m’entraîna au pas de charge vers la véranda où elle pensait trouver Delphini Black en train de boire un jus de citrouille avec son cousin Scorpius et Albus qui m’avait accompagné chez les Malefoy. Il s’avéra que Rose Granger-Weasley s'était jointe à eux.
Un observateur non averti aurait sans doute fort surpris de rencontrer une gryffondor, par ailleurs fille de notre Ministre de la Magie, au Manoir Malefoy, ce nid de serpents à la réputation sulfureuse. Mais pour moi qui étais aux premières loges pour scruter les relations entre les élèves, il n’y avait nulle surprise à la trouver là. Ou plutôt, j’étais revenu de ma surprise depuis longtemps. Car surpris, je l’avais été au moment où j’avais vu se constituer cette bande assez insolite, puisqu’elle comprenait des élèves de Maisons et d’années différentes, que leurs histoires familiales respectives auraient pu empêcher de se rapprocher. Et pourtant, c’est un groupe solide à l’amitié indéfectible que les quatre qui étaient présents dans la véranda ce jour-là, formaient avec Teddy Lupin et Victoire Weasley.
Le fils du loup-garou et Miss Weasley n’osaient pas trop s’aventurer au Manoir Malefoy craignant de croiser Lucius. Car même si Drago avait réduit son père au silence en le menaçant de déménager avec Scorpius si celui-ci ne pouvait pas recevoir au Manoir ses amis de l’école, l’air peu amène du maître de maison avait de quoi décourager les plus téméraires de s’aventurer chez lui. Pourtant, Miss Granger-Weasley se moquait de la réprobation silencieuse de Lucius comme de la première remontrance de son directeur de Maison. Il faut dire que la fille aînée de notre Ministre de la Magie se révélait un peu plus chaque jour dotée d’un caractère bien trempé, d’un aplomb phénoménal et de la conviction que la fin justifiait absolument tous les moyens. Bref, c’était une serpentarde dans l’âme qui ne devait sa répartition chez les lions qu’à un moment de distraction ou aux préjugés du Choixpeau Magique. Mais si Rose Granger-Weasley m’amusait assez – ce que jamais je n’aurais reconnu à voix haute – je n’étais pas fâché de laisser à Lupin, le directeur de la Maison Gryffondor, le soin de la gérer au quotidien.
Une chose est sûre c’est que je n’étais pas ravi de les voir en force, au moment d’essayer de discuter avec Delphini Black. J’étais conscient que l’influence du groupe sur sa décision serait bien supérieure à la mienne, alors que je devais déjà composer avec l’opposition de Narcissa. Je priai donc Delphini Black de nous suivre sa tante et moi dans le salon. Mais, elle refusa tout net :
« Non, Monsieur, ils peuvent entendre tout ce que vous avez à me dire. »
Je soupirai intérieurement, la partie s’engageait mal. En tout cas, cette affirmation de Miss Black, sans s’inquiéter de savoir ce que j’avais à lui dire, me confirmait que la révélation avait eu lieu. Je savais qu'après la tentative d'enlèvement dont Miss Black avait fait l'objet, Albus avait décidé de lui raconter ce qu'il savait de ses origines, à savoir qu'elle était la fille de Voldemort. Lui-même le tenait du portrait de Salazar Serpentard qui avait immédiatement identifié le lien de la jeune fille avec la Maison des Gaunt, comme il avait immédiatement su qu'Albus appartenait à celle des Prince. Un jour, quand j'aurai du temps, je me promettais de me pencher sur cette magie qui donnait aux portraits de certains sorciers décédés, comme Salazar Serpentard ou Albus Dumbeldore, ces extraordinaires capacités.
Je tenais d’Albus que Delphini Black avait d’emblée décidé d’étendre cette révélation au reste de leur petite bande. C'était à mon sens s'exposer bien inutilement. Miss Black réalisait mal l'ampleur du traumatisme qui était lié au souvenir de son père, un souvenir que le monde sorcier tentait d'effacer en n’évoquant plus jamais de cette triste période. Albus avait beau m’expliquer que Delphini ne voulait pas avoir de secret pour ses meilleurs amis, j’étais loin d’être convaincu de la nécessité de cette transparence.
Après avoir inutilement quêté du regard un soutien du côté de Narcissa pour inciter l'adolescente à accepter de nous parler en privé, je me décidai à entamer la discussion devant les autres :
« Comme vous le savez Miss Black, je cherche à comprendre les raisons pour lesquelles vous avez fait l'objet d'une tentative d’enlèvement il y a quelques semaines, car c’est la seule façon de pouvoir assurer votre sécurité à l’avenir. Sauf à ce que vous restiez définitivement enfermée que ce soit ici ou à l’école. »
Je poursuivis en ignorant l’exclamation agacée par laquelle Narcissa avait ponctué ma phrase :
« Je souhaiterais vous faire rencontrer une personne qui détient peut-être une part de cette vérité que je recherche. Si vous l’acceptez bien entendu. »
« Si cette personne peut vous aider à comprendre pourquoi on a tenté de me kidnapper, pourquoi pensez-vous que je puisse refuser de la rencontrer, Monsieur ? » murmura l'adolescente au lieu de répondre directement à ma question, prouvant ainsi que son appartenance à la Maison Serpentard ne devait rien au hasard.
« Parce ce qu'il s'agit en toute franchise d'un individu peu recommandable, Miss Black. » admis-je.
« Ça c'est le moins qu’on puisse dire ! » enchaîna Narcissa d'un ton furibard. « Un sorcier enfermé depuis plus de trente ans dans la forteresse de Nurmengard pour les crimes qu'il a commis. »
C’est sûr que présenté comme ça ...
« Mais, Monsieur, pourquoi faut-il que Delphini aille voir ce type ? Pardonnez-moi de vous poser la question, mais pourquoi n’allez-vous pas l'interroger vous-même. » intervint Miss Granger-Weasley.
Elle avait réussi à se taire pendant trente secondes, pas une de plus. Vacances obligent, je n’avais pas la possibilité de lui enlever 5 points ou de lui donner une heure de colle avec Monsieur Rusard pour la réduire au silence. Delphini Black ayant murmuré « en effet, pourquoi ? » en appui à la question de son amie de gryffondor, je fus contraint de répondre à la question.
« Je suis déjà allé l'interroger, Miss Granger-Weasley, mais il a refusé de répondre à mes questions en dehors de la présence de Miss Black. » expliquai-je.
« Cependant, Grand-père, vous pourriez ... Enfin, je veux dire qu’il y a d'autres solutions pour obtenir une réponse. » suggéra Albus.
Je devais renoncer à l’espoir d’une conversation directe avec Delphini Black. Comme d’habitude, ils allaient tous s’en mêler.
« Oui, en effet, Albus. Mais l’individu en question est un potionniste de talent et à ce titre capable de se prémunir contre les effets de mes propres potions. » précisai-je.
Il continuait à me fixer sans rien dire. Les autres observaient cet échange silencieux avec curiosité.
« Je n’ai pas non plus une totale confiance dans le résultat de la Legilimencie. » finis-je par répondre à la question qu’il n’avait pas formulée mais que j’avais lue dans son regard. « S’il s’avérait être un aussi bon Occlumens qu’il le prétend, il pourrait m’interdire l’accès à ses souvenirs ou même reconstruire un faux souvenir pour me faire partir sur une piste totalement erronée. »
« Mais comment pouvez-vous être sûr qu’il dise la vérité, si Delphini accepte d'aller le voir ? » demanda à son tour Scorpius Malefoy.
Voilà que c’est moi qui me retrouvais sur le grill avec toutes leurs questions ! Mais la rentrée reviendrait, ils ne perdaient rien pour attendre.
« Je ne peux évidemment pas en être sûr. » admis-je. « Mais s'il obtient la visite qu'il réclame, le dénommé Hexaphorus sera moins sur ses gardes et risque de laisser échapper, même malgré lui, un bout de vérité. Ce sera à moi d'identifier cette vérité et de m’en saisir pour comprendre l’ensemble du projet qui a conduit à l’enlèvement de votre cousine. »
« Ça veut dire que si j'accepte d'aller voir cette personne vous m'accompagnerez ? » releva Delphini Black.
« Bien sûr que je vous accompagnerais, Miss Black. » confirmai-je « Et vous pourrez demander à qui vous voudrez de venir avec nous. »
…
Au grand dam de Narcissa, Delphini Black accepta rapidement le principe d’une rencontre avec Hexaphorus. Restait à en fixer les modalités en accord avec le Ministère et cette dernière phase s’avéra plus complexe que prévu. Harry avait été délégué par Hermione Granger, pour aller discuter chez les Malefoy du nombre et du nom des accompagnants. Il accéda sans mal à la première demande de l'adolescente d'avoir avec elle sa tante et tutrice, Narcissa Malfoy, à ses côtés. Mais la suite de ses demandes s'avéra plus difficile à satisfaire, puisqu'elle réclama d’être accompagné de sa bande d'amis de l'école et le professeur Hagrid. Je n’avais pas anticipé cette dernière demande. Elle était pourtant prévisible. Les Soins aux Créatures Magiques étaient sa matière préférée à Poudlard et Hagrid son professeur préféré. Cependant, il y avait un petit souci pour pouvoir accéder à sa requête…
« Hagrid, c'est impossible ! » répondit immédiatement Harry.
« Mais pourquoi ? » s’exclama Miss Black dépitée. « Le professeur Rogue m'avait assuré que je pourrais y aller accompagnée de qui je voudrais. »
« Je suis navré, Delphini. » assura Harry. « Mais, je vous garantis qu'il n'y a aucune chance pour qu’Hagrid puisse pénétrer dans un endroit aussi étroit que le cachot où est enfermé le dénommé Hexaphorus. »
Delphini Black soupira. L’argument était imparable. Et de fait, il m’arrangeait bien. Etant donné son attachement pour l’adolescente qui partageait avec lui la passion des créatures magiques, je croyais Hagrid capable d’écraser Hexaphorus comme une mouche sur le mur, si celui-ci s’avisait d’être désagréable avec elle. Sur le fond, je ne tenais sûrement pas à protéger ce sinistre individu, mais je tenais à ce qu’il survive au moins le temps nécessaire pour m’aider à comprendre pourquoi on s’en prenait à l’adolescente et comment assurer sa sécurité.
« Quant à vos amis, je suis désolé de vous dire, Delphini, que la prison de Nurmengard n'est pas précisément un endroit où l’on puisse emmener un groupe de jeunes en visite. » poursuivait Harry. « Quand le professeur Rogue vous a dit que vous pourriez vous faire accompagner de qui vous voulez, il pensait à des sorciers adultes. »
Après cette succession de refus, je craignis un moment que Delphini Black ne renonce à la visite à Nurmengard, mais son envie de retrouver une vie normale fut plus forte que ses déconvenues. En vraie serpentarde, elle entreprit de négocier avec Harry en acceptant tous les refus que celui-ci lui avait opposé sauf concernant Albus, en arguant une fois de plus que sous le coup de l’émotion, elle craignait de ne pas comprendre ce qui se dirait autour d’elle. Grâce au Fourchelang qu’ils avaient en commun, Albus pourrait toujours lui faire la traduction. C’était un pur prétexte, car elle comprenait et parlait désormais parfaitement anglais quelles que soient les circonstances, mais Harry céda.
Cependant, les tractations ne s'arrêtèrent pas là, car faute de pouvoir se faire accompagner d'Hagrid, Miss Black réclama la présence de son oncle, Lucius Malefoy. Or, il n’était évidemment pas question pour le Ministère d'accepter que deux ex-mangemorts aillent rendre visite à un potionniste spécialiste de magie noire qui semblait avoir des informations susceptibles d’intéresser les nostalgiques de Voldemort. En réalité, Lucius ne comptait pas plus que moi parmi les nostalgiques de l’époque des Ténèbres, mais je ne m’étonnais pas que le Ministère préfère prendre quelques précautions. Ma présence excluant de fait celle de Lucius, il fallait trouver une autre solution qui à la fois rassure Narcissa et sa nièce et qui soit acceptable par notre Ministre de la magie. Ce fut finalement Narcissa qui émit l'idée de se faire accompagner, à défaut de son mari, par sa sœur Andromeda Tonks et du gendre de celle-ci, Remus Lupin, ainsi selon ses propres termes la question resterait « en famille ». Cette option fut immédiatement approuvée par Harry puisque, contrairement à Lucius Malefoy, Andromeda Tonks et Remus Lupin avaient autrefois été du côté des adversaires de Voldemort.
Chapitre 3 : Préparer by OutThereIsTheTruth
La veille de notre entrevue avec Hexaphorus, je tentai de préparer Albus à ce qu’il pourrait voir et surtout entendre le lendemain. Narcissa devait en faire autant de son côté avec sa nièce. Je lui avais conseillé d'être directe et j’allais m’efforcer d’appliquer le même principe avec Albus.
« Albus, tu pourrais entendre des choses extrêmement dérangeantes et même franchement choquantes de la part du sorcier que nous allons rencontrer demain à la prison de Nurmengard. » attaquai-je à l'heure du thé.
Il laissa tomber la main qu'il tendait pour attraper une part de tarte au sucre et se retourna vers moi.
« Que voulez-vous dire par dérangeant ou choquant, Grand-père ? » demanda-t-il.
Malgré ce que j'avais résolu, j'hésitai. Car au moment de prononcer les mots que j'avais prévu de dire, je les trouvais moi-même difficiles à entendre pour un adolescent de quatorze ans. Cependant, le choc serait forcément pire pour Albus, s’il n’était pas prévenu du tout.
« Vois-tu, Albus, il est probable que Delphini ait été conçue dans un but peu avouable. » me lançai-je. « En d'autres termes, il semble que sa naissance n’était pas liée à l’envie de ses parents d'avoir un enfant, mais à la volonté de son père de … de trouver une solution pour réparer son propre corps. »
Je n’avais pas pu dire « de se procurer un ingrédient de potion pour réparer son propre corps ». Avec un peu de chance, il n’insisterait pas pour que je précise ce que j’entendais par « solution » et, avec encore plus de chance, Hexaphorus se dispenserait de dire des horreurs devant Delphini et lui.
« Pourquoi voulait-il réparer son corps ? C’est vrai que dans le souvenir que vous m’avez montré avec la Legilimencie, il avait une drôle de tête. Est-ce que c’est son apparence qu’il voulait réparer ou pas seulement ? » m’interrogea-t-il.
Ce n’était pas ce que j’avais craint d’entendre, mais je n'étais pas plus ravi de la tournure de la conversation, car je n'avais pas prévu d'entrer dans ce genre de détails avec lui. Le temps que je me demande comment répondre à ses questions, il poursuivit :
« La magie lui avait permis de retrouver un corps. Mais pour qu'il puisse revivre, il fallait que Voldemort ait réussi à ce qu'une part de lui survive quand l'Avada qu'il avait lancé contre Papa a rebondi sur lui. Est-ce que j'ai raison ? »
Je me contentais de hocher la tête en signe d'assentiment. Même si je m’efforçais de ne rien montrer, j’étais tellement perturbé par ses questions que je devais faire un effort pour ne pas oublier de respirer. Il semblait qu’Albus ait malheureusement beaucoup réfléchi depuis la dernière fois que nous avions échangé à propos de Voldemort. Même s’il n'avait pas encore tous les éléments pour arriver au bout de sa réflexion, il avait assez de connaissances en magie pour se poser les bonnes questions. Bien trop serpentard pour aller directement au but, il enchaîna sur une demande prudente :
« Est-ce que vous savez comment il a fait ? »
A nouveau, je me bornai à lui répondre d’un simple signe de tête de plus en plus inquiet de la suite inévitable :
« Est-ce que vous voulez bien me l'expliquer, Grand-père ? »
« Non, Albus, il n’est pas question que je te parle de ça. » prononçai-je d’un ton que j’espérais suffisamment ferme pour le décourager d’insister.
« Le portrait de Salazar Serpentard n’a pas voulu me répondre non plus, quand je lui ai posé la question. » articula-t-il avec mauvaise humeur.
Salazar Serpentard avait bien fait de s’abstenir. Sans quoi, j’aurais emmuré ce fichu portrait dans son cachot avant la rentrée !
« Mais pourquoi ? » poursuivit Albus toujours agacé « Après tout, nous avons déjà parlé de magie noire ensemble. »
« C’est vrai. Nous avons déjà parlé et même travaillé ensemble sur certains aspects de la magie qui sont qualifiés de magie noire. » admis-je sans difficulté. « Mais nous sommes des serpentards, Albus. Et contrairement aux sorciers issus des autres Maisons qui ont tendance à tout mélanger en matière de magie noire pour tout rejeter en bloc, nous nous savons faire le tri entre ce qui est utilisable en cas de nécessité et ce qui est réellement inenvisageable quelles que soient les circonstances. Dans ce cas, je t’assure qu’il s’agit d’une magie très très sombre à proscrire absolument. »
Il resta silencieux un long moment, attrapa et dévora la part de tarte au sucre que notre échange lui avait fait oublier pendant quelques instants. Je commençais à espérer en être quitte avec cette discussion quand il reprit la parole.
« Il y a aussi une différence entre connaître une magie et l’utiliser. » dit-il lentement « Vous savez que je fais très bien la distinction entre la magie utilisable et celle qui ne l'est pas. »
C'était fort heureusement vrai, car une vraie retenue était indispensable au sorcier qu'Albus était déjà et plus encore à celui qu'il allait devenir. Je me contentais de hocher brièvement la tête, bien conscient qu'il ne s'agissait là que d'un préalable à la demande qui n'allait pas manquer de suivre :
« Du coup, je ne vois pas ce que ça change que vous me parliez de ça aujourd'hui ou plus tard. »
Je soupirai intérieurement en constatant qu'il n'avait toujours pas renoncé à l'idée de me faire dire ce que j'étais bien décidé à taire pour le moment. J’étais contraint de trouver de nouveaux arguments. Je commençais par préciser les choses :
« Il s'agit d'une magie non seulement sinistre mais aussi, heureusement, très méconnue. La plupart des sorciers n'en entendent pas parler de toute leur vie. »
Il me jeta un regard inquiet que j'interprétai sans mal.
« Je ne dis pas que je ne t'en parlerai jamais, mais je t'explique juste pourquoi il n'y a aucune urgence à le faire. » complétai-je avant d’enchaîner sur un autre argument. « C’est d’autant moins urgent que cela pourrait constituer un choc pour toi. Or, les chocs peuvent être nocifs à une magie encore en formation comme la tienne. »
Même si ce type de phénomène existait, j’exagérais clairement. La magie d’Albus était déjà trop mature et trop bien en place pour risquer d’être affectée par un choc quelconque. Sinon, je me serais opposé de toutes mes forces au fait qu’il aille voir Hexaphorus. Mon explication le laissa songeur un long moment. Assez longtemps pour que je commence à m'inquiéter du cours de ses pensées et que, par automatisme, j'aille m'en enquérir en essayant d'aller pêcher la réponse dans son esprit. Je me heurtai à ses barrières mentales parfaitement verrouillées, je cessai mes investigations avant de risquer de me faire repérer. Ce n'est donc que lorsqu'il reprit la parole que je réalisai le chemin inattendu qu'avait suivi ses réflexions.
« Alors c’est pour ça que Delphini a des soucis avec sa magie quelques fois. » murmura-t-il avant d’ajouter en croisant mon regard surpris. « D’après ce qu’on dit, les parents de Delphini étaient des grands sorciers. Du coup, je me dis que les difficultés qu’elle a elle, viennent de ce qui lui est arrivé quand elle était petite. Vous ne croyez pas ? »
J’étais sidéré. Pourtant, je m’étais moi-même posé la question peu après l’arrivée de Delphini Black à Poudlard après avoir observé que ses performances en magie étaient nettement en retrait par rapport à celles de sa mère Bellatrix, sans même parler de l’extraordinaire magie de son père … Alors oui, je m’étais interrogé sur le fait de savoir si les maltraitances qu’elle avait subi dans son enfance n’avaient pas nui à sa magie. Mais jamais, je n’avais partagé mes réflexions avec Albus, d’où ma surprise de l’entendre émettre cette hypothèse à son tour.
« Il faut quand même se méfier d’aller trop vite en besogne quand on fait ce genre de parallèle. Je connais toutes les expressions que l’on entend souvent à l’école ou ailleurs sur le fait qu’un tel ou un tel est doué ou pas doué pour tel ou tel aspect de la magie « comme son père ou sa mère », mais tu sais comme moi que ce n’est pas si simple. La preuve, il existe beaucoup de sorciers nés moldus, dont les parents n’avaient pas de pouvoir magique du tout. » relativisai-je avant de conclure. « Mais si tu as raison, ton amie Delphini s’en est plutôt bien sortie. Certains des jeunes sorciers qui ont subi des traumatismes dans l’enfance perdent totalement le contrôle de leur magie. »
Ma propre remarque me rendit songeur à mon tour, ceux à qui la fille de Bellatrix avait été confiée juste après sa naissance prématurée n’avaient jamais eu aucun intérêt pour elle en tant que future sorcière, puisqu’ils avaient pris le risque de détruire sa magie. Pourtant, ils l’avaient gardée en vie, alors même que Voldemort avait péri et qu’elle ne pouvait plus servir à sa Régénération. Il y avait donc toujours eu un autre projet la concernant et je devais impérativement comprendre lequel.
Chapitre 4 : Subir ou ne pas subir by OutThereIsTheTruth
Le lendemain, nous étions six à pénétrer dans le cachot qu'occupait Hexaphorus au sein de la forteresse de Nurmengard. Je restais dans l'ombre près de la porte avec Albus et Lupin, alors que Delphini Black, Narcissa Malefoy et Andromeda Tonks avançaient de deux pas de plus pour pénétrer dans le faible halo de lumière que créaient les flammes dansant dans la cheminée. Privé de sa baguette le vieux sorcier n'avait pas la possibilité d'éclairer davantage son logis.
Sans mot dire, Hexaphorus observa longuement l’adolescente dont le malaise grandissait à mesure que cet examen s’éternisait. Je cherchais un moyen pour mettre un terme à ce pénible moment, lorsque le vieillard se décida à rompre le silence de lui-même.
« Si peu de lui en toi, comme c'est décevant ! » s'exclama-t-il d'un air désappointé avant d'ajouter. « Je ne suis même pas certain que ça marcherait. »
« Que quoi marcherait ? Expliquez-vous clairement au lieu de dévisager ainsi ma nièce ! » s’écria Narcissa sur un ton coléreux.
Le vieux potionniste tourna les yeux vers elle. Ignorant la question de son interlocutrice, il articula lentement :
« Narcissa. Prompte à sortir les griffes pour protéger ta nièce à ce que je vois. Je comprends pourquoi ta tante Walburga Black louait ton sens de la famille. Mais, en même temps, elle regrettait ton étroitesse d’esprit et ton absence d’ambition. « Aucun sens de la grandeur des Black » disait-elle à ton propos, elle ajoutait même … »
« Il me semble que vous n’avez pas répondu à la question de ma sœur. » l’interrompit fermement Andromeda Tonks.
« Andromeda. » observa le vieux potionniste avec un rictus mauvais. « Je suis nettement plus surpris de te voir ici, alors que, d’après ce que je me suis laissé dire, tu n’as jamais brillé par ton dévouement pour ta famille. Sans compter que c’est la mère de cette jeune fille qui a tué ta propre fille … »
« Delphini n’est en rien responsable de ce que Bellatrix a pu faire ! » le coupa à nouveau Andromeda.
« Ah, le grand retour des filles Black unies pour défendre ensemble leur petite vie insignifiante ! » railla Hexaphorus avant de se retourner vers Delphini pour l’interpeler. « Est-ce vraiment ce que tu veux faire de ton existence ? Te complaire dans la banalité, alors que tu pourrais devenir le plus grand sorcier du monde ! »
Je retins mon souffle. Pour la première fois, j’avais le sentiment qu’un bout de la vérité que j’étais venue chercher en ces lieux était sur le point d’émerger.
« Je ne pourrais sûrement pas devenir la plus grande sorcière du monde, je n’en ai pas les qualités. » répondit Delphini Black sur un ton qu’elle s’efforçait de rendre ferme.
« Mais qui te parles de ça ? Qui te parle de toi ? » répliqua le vieux potionniste d’un ton méprisant. « Ce que je t’explique, c’est qu’au lieu de rester toi, tu pourrais te transformer en LUI et ainsi lui permettre de revenir à vie. »
« En lui ? » s’exclama Miss Black d’un ton perdu, alors que Narcissa et Andromeda semblaient trop tétanisées pour voler à son secours.
« Oui, LUI. Le Seigneur des Ténèbres. Le plus grand sorcier de tous les temps. Parce qu’il est ton père, je pourrais te métamorphoser en lui. Ne serait-ce pas un destin exaltant ? »
« Me métamorphoser en lui ? Mais c’est impossible ! » s’écria l’adolescente sur un ton où perçait la panique.
« Si tu penses que c’est impossible, c’est que tu n’as jamais rencontré que de fort médiocres potionnistes. » lâcha-t-il d’un ton condescendant.
Cette remarque m’était adressée, mais c’était bien là le cadet de mes soucis par rapport au danger que je voyais se profiler.
« Mais, moi ? Moi, je deviendrais quoi alors ? » demanda l’adolescente les yeux exorbités, comme prise au piège du regard perçant de son interlocuteur.
« Toi ? Tu retournerais au néant auquel tu étais destinée. » asséna celui.
Elle trouva encore la force de faire front, même si sa posture défensive me laissait penser qu’elle était au bout de ses forces :
« Eh bien, vous m’excuserez de vous dire que je ne suis pas tentée par votre projet. »
Ostensiblement, Hexaphorus secoua la tête d’un air dépité.
« Je les avais pourtant prévenus du danger qu’il y avait à te laisser entrevoir la possibilité d’une vie autonome. » dit-il. « C’est ainsi que les enfants deviennent une engeance inutile et nuisible. »
Je surveillais Narcissa du coin de l’œil craignant de la voir sauter à la gorge de ce vieux cinglé et qu’elle n’interrompe ainsi les bribes de révélations qu’il était en train de nous faire indirectement. J’étais tellement concentré sur elle, que je ne vis pas venir un autre mouvement. Delphini Black qui probablement n’en pouvait plus de supporter l’agressivité des propos d’Hexaphorus, fit deux pas en arrière et se retrouva dans l’ombre. En même temps que, comme dans un ballet bien huilé, Albus faisait deux pas en avant, comme pour s’interposer entre elle et le vieux potionniste, et se retrouvait dans la lumière.
« Vous dites ça, et pourtant vous-même, vous vous demandez si vous n’auriez pas quelque part un « autre » enfant et vous aimeriez le connaître. » lança-t-il d’un ton incisif en fixant Hexaphorus, et il me sembla que mon sang se figeait dans mes veines.
Je gardais juste assez de lucidité pour décrypter sur le visage du vieux sorcier les émotions qui se succédaient pendant qu’il observait Albus. Etonnement. Agacement. Colère. Incrédulité.
« Fascinant ! » murmura-t-il finalement.
Tout en continuant de détailler Albus qui restait impassible sous son regard perçant, Hexaphorus m’interpela d’un ton incisif :
« Je comprends mieux que tu aies réussi à duper le Seigneur des Ténèbres, Severus Rogue, puisque tu as réussi à me tromper moi Hexaphorus ! »
Ce que je savais moi, c’est qu’à afficher un tel niveau d’autosatisfaction, il n’aurait pas survécu longtemps dans l’entourage de Voldemort qui détestait qu’on ose se comparer à lui sur aucun plan.
« Finalement, et contrairement à ce que tu m’as laissé croire lors de ta dernière visite, ta vie n’a pas été si gâchée que ça. » poursuivit-il en continuant à fixer Albus. « Puisque celui-là est ton fils indéniablement. »
Jamais personne n’avait jamais identifié ainsi au premier coup d’œil le lien entre Albus et moi. De quoi me rappeler de me méfier de la sagacité du vieillard, malgré l’erreur qu’il faisait.
Le vieux potionniste poursuivait son examen du jeune sorcier qui s’était permis de pénétrer dans son esprit, et Albus, au lieu d’en paraître déstabilisé, le dévisageait avec la même intensité.
« Pourtant ces yeux, je les ai déjà vu … deux fois. » Hexaphorus continuait son monologue indifférent à la présence des autres spectateurs. « A moins que ce vieux fou de Dumbeldore ait osé le transformer … Un intérêt théorique pour la potion d’adoption de sang, tu parles ! Oui, ça ne peut être que ça. »
Il s’adressa à nouveau à moi toujours sans me regarder :
« C’est donc la fois précédente que tu es venu accompagné de ton fils, Severus. Le traitre accompagné de la raison de sa traitrise ! Je regrette de n’avoir pas saisi à ce moment-là tout le sel de la situation. »
Je m’abstins du moindre commentaire. Peu m’importait ce qu’il disait de moi comme ce qu’il pensait de moi, mais l’extraordinaire perspicacité dont il faisait preuve en faisait un adversaire redoutable même du fond de son cachot, et je ne pouvais pas m’empêcher de m’inquiéter de sa confrontation avec Albus.
« Ainsi donc, jeune homme, tu es le petit-fils de Severus Rogue et le fils d’Harry Potter. L’ombre et la lumière. Comment te nommes-tu ? » demanda-t-il.
« Albus. » répondit sobrement celui-ci qui n’avait toujours pas détourné le regard.
« Albus, vraiment ? Ton père a plus de sens de l’humour que je ne l’aurais imaginé en le rencontrant. A moins qu’il n’ait pas soupçonné la vérité sur sa propre naissance à l’époque de ta naissance et c’est encore plus amusant. » railla Hexaphorus. « Et à part ton prénom, qu'y a-t-il d'intéressant à savoir sur toi, jeune Albus ? »
« Rien de particulier. » lâcha prudemment ce dernier toujours aussi économe de mots, lui aussi avait probablement compris combien il convenait de se méfier de ce vieillard.
« Rien de particulier ! » releva le vieux potionniste d’un ton sarcastique. « Je n’y crois pas un instant, mais j’hésite encore à savoir si tu es très modeste ou très secret. Car, le sorcier qui a su rentrer dans mon esprit pour y saisir une pensée aussi éphémère que stupide, n’a forcément rien d’un sorcier banal, surtout quand il a … je dirais quatorze ans, quinze tout au plus. »
« Il serait peut-être temps d’en revenir à l’objet de notre visite. » intervint Lupin qui trouvait que la conversation s’égarait.
« Cette question me semblait pourtant réglée. » répliqua Hexaphorus manifestement agacé d’avoir été interrompu dans son échange avec Albus. « J’avais une proposition à faire à cette jeune fille et elle ne semble pas intéressée. N’étant pas en mesure de la contraindre à adhérer à mon projet, je ne vois pas quoi vous dire de plus. »
« Eh bien, par exemple nous pourriez nous indiquer comment faire pour empêcher définitivement que ce projet puisse se réaliser. » dis-je.
« Le professeur Rogue qui enseigne les potions à Poudlard, qui est l’auteur d’une douzaine d’articles au moins dans la Revue du Potionniste, serait-il en réalité un si piètre potionniste qu’il ait besoin de moi pour résoudre ce petit problème. » ironisa-t-il en m’adressant un sourire mauvais. « Mais si ta réputation en tant que potionniste semble largement usurpée, peut-elle ne l’est-elle pas sur tous les plans. Si comme on le disait de toi, tu n’as pas peur de te salir les mains, tu as une manière très simple de résoudre le problème et d’empêcher à tout jamais le retour du Seigneur des Ténèbres. »
Cet ignoble salopard était en train de me suggérer rien de moins que d’assassiner Delphini Black. Alors que Narcissa, Andromeda et Lupin me fixaient avec effarement en se demandant s’ils avaient bien compris l’allusion, je me gardai de paraître choqué, ce qui aurait fait beaucoup trop plaisir à Hexaphorus. Convaincu qu’il n’y avait plus rien à gagner à subir en silence, je contre-attaquai donc sur un ton incisif :
« Je pourrais aussi vous prouver de façon beaucoup plus directe et définitive en ce qui vous concerne ma capacité à me salir les mains. Et ce serait de mon point de vue une façon beaucoup plus satisfaisante de résoudre le problème. »
Le vieux potionniste me considéra un instant en silence. Le temps de se demander s’il devait prendre au sérieux la menace de mort que je venais de proférer à son encontre. Il décida manifestement que oui, et tenta d’essayer de me faire douter :
« Cela suffirait en effet à résoudre ton problème, Severus, si j’étais le seul potionniste au monde à être capable de métamorphoser cette jeune fille pour ramener le Seigneur des Ténèbres parmi les vivants. Mais de cela, tu ne peux pas être certain. »
Maintenant que j’avais réussi à l’inquiéter, je décidai de pousser mon avantage en jouant l’indifférence, comme si le tuer ou pas n’était jamais pour moi qu’un point de détail :
« Quand bien même cela ne se résoudrait pas la totalité du problème, je n’ai pas de raison de m’en abstenir à partir du moment où vous ne m’êtes plus d’aucune utilité. »
Malgré l’impassibilité que j’affichais, j’étais furieux de devoir me livrer à ce petit jeu devant Albus que j’évitais de regarder bien qu’il se soit tourné vers moi. Rien que pour cela, j’avais réellement envie de tuer ce sale type. Je ne sais s’il le sentit, mais il se crut obligé de me prouver que je pourrais avoir encore besoin de lui :
« C’est ce qui te trompes, car lorsque tu auras trouvé des pistes de solution pour empêcher la transformation de Delphini Black, il te sera utile, voire nécessaire, de venir en discuter avec moi. »
Après que j’aie consenti à dire du bout des lèvres que j’allais y réfléchir, Narcissa s’empressa de donner le signal du départ, pressée qu’elle était de quitter cet endroit sinistre et probablement plus encore d’arracher Delphini de là. J’aurais dû protester, dire que je n’avais pas fini ma conversation avec Hexaphorus, que je ne sortirais pas de là sans qu’il m’ait donné la solution permettant d’empêcher qu’on puisse utiliser Delphini Black pour faire revivre son père en sacrifiant la gamine au passage. Mais j’avais besoin de réfléchir à tout ce que j’avais appris, et puis surtout j’étais habité par un doute horrible. En dépit de ses provocations à mon égard, de sa remise en cause de mes qualités de potionniste, je commençais à craindre qu’Hexaphorus ne sache pas exactement comment faire pour empêcher définitivement cette transformation. Car, même quand il avait commencé à avoir vraiment peur de moi, il avait proposé de m’aider mais pas de me donner la solution.
Si j’avais raison, j’allais devoir résoudre moi-même un problème dont dépendaient rien de moins que la sécurité du monde sorcier, la vie d’une adolescente qui n’avait jamais fait de mal à personne mais dont l’existence même remettait en cause cette sécurité, et accessoirement le bonheur de mon petit-fils, Albus, qui, à mon grand dam, était fou amoureux de la fille de Voldemort.
Chapitre 5 : Rendre compte by OutThereIsTheTruth
Au soir de cette pénible entrevue, Hermione Granger nous avait conviés, pour ne pas dire convoqués, au Ministère Lupin et moi pour un rendez-vous discret après le départ de ses collaborateurs. Je dois avouer que j’arrivais passablement énervé par la tension de l’entrevue elle-même et les remontrances sonores dont m’avaient gratifié Narcissa de retour au Manoir Malefoy. J’avais fini par m’enfuir en abandonnant Albus sur place en arguant du besoin d’aller revisionner mon souvenir de cette entrevue dans la Pensine du bureau directorial de Poudlard, poursuivi par la colère de Narcissa :
« Je te garantis bien que tu n’as pas besoin de Pensine, car si tu venais à oublier quelque chose dans ce qui s’est passé aujourd’hui, je serai là pour te le rappeler ! »
Je passai par le réseau des cheminées pour accéder directement à mon propre bureau et rejoindre celui vide de McGonagall, sans même prendre la peine de répondre à la question suspicieuse de notre concierge :
« Etes-vous certain, Professeur Rogue, que Madame la Directrice vous a bien donné la permission d’aller dans son bureau en son absence. »
Quelle que soit ma réponse, il allait de toutes façons contacter Minerva pour obtenir une confirmation. Il était donc inutile que je perde mon temps à lui assurer que c’était bien le cas.
Après avoir extrait le filament argenté de mon souvenir pour le déposer dans un flacon, je versai le contenu du flacon dans la Pensine. Puis je pris le temps de m’y replonger pour être certain d’avoir en tête tous les détails, mais avec l’inconvénient d’achever de me mettre de mauvaise humeur. J’étais donc particulièrement remonté, lorsque Lupin me rejoignit à l’heure de partir pour notre rendez-vous au Ministère.
A notre entrée dans son bureau, par sa cheminée pour éviter qu'un retardataire ne nous voie passer par la porte, Hermione Granger discutait avec Harry en agitant un parchemin qu'elle tenait à la main. A ma vue, elle s'empressa de le faire disparaître dans un tiroir. Qu'elle garde ses secrets, j'avais assez à faire avec les miens.
Après deux mots de salutations, Madame la Ministre ne put retenir ce cri du cœur :
« La fille de Voldemort, franchement nous n'avions pas besoin de ça ! »
« Elle non plus. » lui fis-je remarquer d'un ton sarcastique qui me valut un regard plein de reproches de la part d'Harry, mais j’étais bien trop agacé par ce qui s’était passé au cours des dernières heures pour pouvoir me retenir. D’autant plus que depuis toujours, cette lionne suffisante avait le don de m'exaspérer.
« Évidemment, je ne lui en fais pas grief. » se défendit Hermione Granger. « Il est clair qu'elle n'est pas responsable de l'identité de ses parents. Je dis juste que cette situation n'est facile pour personne. »
« Cette situation n'a pourtant pas l'air de déranger votre fille. » ironisai-je. Je n'avais pas pu m'empêcher cette nouvelle pique et Harry leva les yeux au plafond comme pour signifier que j'étais décidément incorrigible.
En revanche, Hermione Granger prit ma remarque au premier degré avec ce commentaire irrité :
« En effet, cela ne semble pas préoccuper Rose. Au point qu'elle n'a même pas jugé utile de m'en parler quand elle a appris l’identité des parents de son amie. C'est au moment où j'ai voulu l'inciter à une certaine prudence qu'elle m'a répondu « Pourquoi ? Parce qu'elle est la fille de Voldemort ? » »
« Sans doute, craignait-elle votre réaction. » suggérai-je d'un ton badin.
Je n'aurais pas dû en rajouter, mais j'avais envie de me défouler après les tensions que j'avais supportées lors de l'entrevue avec le vieux fêlé enfermé à Nurmengard et après. Aussi avais-je du mal à résister à l'occasion de m'en prendre à cette cible de choix.
« Dites tout de suite que je suis intolérante, professeur Rogue ! » se cabra mon interlocutrice qui d'habitude me donnait quand même du Severus du bout des lèvres en privé.
« Je ne me le permettrais sûrement pas, Madame la Ministre. » persiflai-je en réponse.
De vert, le regard qu'Harry étaient devenu étrangement noir, mais ce fut Lupin qui intervint pour siffler la fin de la partie.
« Bon, on arrête de jouer et on en vient au fait. » grogna-t-il.
Je pris un air offusqué, mais l'altercation m'avait détendu et j'étais prêt à attaquer la discussion.
« Le dénommé Hexaphorus vous a-t-il appris quelque chose d’intéressant ? » enchaîna Harry pour s'assurer de changer de sujet.
Lupin se tourna vers moi, attendant clairement que je me charge de raconter les résultats de notre entrevue.
« Sauf à ce qu’il nous ait trompé, ce que je ne crois malheureusement pas, Hexaphorus nous a laissé entendre qu’il existe une solution magique pour ramener Voldemort à la vie à partir du corps de sa fille. Pour le dire plus simplement, il existerait une solution pour la transformer en lui, et c’est probablement dans ce but que ce qu’il reste des partisans de Voldemort essaient de l’enlever. » résumai-je en allant à l’essentiel.
En dépit de son empire sur elle-même, Madame la Ministre ne put retenir une exclamation atterrée qui se perdit dans le juron que poussa Harry au même moment.
« Et vous dites qu’il est crédible. » murmura Hermione Granger consternée. « Mais vous a-t-il indiqué une solution pour éviter une telle catastrophe ? »
« Oui, il m’a suggéré de tuer Delphini Black pour me débarrasser du problème. » balançai-je sans emballer mon propos.
« Vous plaisantez ? » s’exclama-t-elle choquée.
« Est-ce que j’en ai l’air ? » répliquai-je froidement.
Sous le coup de l’émotion, Madame la Ministre tomba assise sur son bureau.
« Par la barbe de Merlin ! » murmura-t-elle d’une voix altérée. « Nous devons tout faire, absolument tout, pour éviter la catastrophe que constituerait un retour de Voldemort. Cependant … »
« J’aime autant vous prévenir qu’il ne faut pas compter sur moi pour « m’occuper » de Miss Black ! » l’interrompis-je « Et que ceux que vous en chargeriez pourraient bien me retrouver sur leur chemin, ce qui sans me vanter pourrait leur compliquer sérieusement la tâche et … »
« Ne soyez pas ridicule, Severus. » m’interrompit-elle à son tour. « Il n’est pas question de s’en prendre à une gamine de seize ans qui n’a jamais fait de mal à personne. Si elle a besoin de vous, ce n’est pas comme garde du corps, c’est pour trouver une solution pour empêcher que sa transformation soit possible. Ou plus simplement pour que le dénommé Hexaphorus vous révèle cette solution qu’il connait forcément. »
« Eh bien, je crains que non. Au début, il a suggéré que la solution était simple par animosité à mon égard, histoire remettre en cause mes qualités de potionniste. Mais quand il a commencé à avoir peur, il a juste proposé de m’aider en confrontant mes idées avec les siennes et non de me donner une vraie solution. » expliquai-je.
« Peur ? » releva Hermione Granger. « Mais, peur de quoi ? »
« Peur de moi. » admis-je. « Quand il m’a suggéré de me débarrasser de Miss Black, il est possible que j’aie évoqué l’idée que je pourrais plutôt le tuer lui. »
Madame la Ministre leva les yeux vers le plafond avec un air d’effarement tout à fait surjoué. Mais, c’est une autre chose qui avait arrêté Harry dans ce que j’avais dit :
« Pourquoi dis-tu qu’Hexaphorus a de l’animosité à ton égard, je croyais que tu ne le connaissais pas personnellement ? » demanda-t-il.
« En effet, je ne le connaissais pas. » confirmai-je. « Mais d’après ce que je crois comprendre. Il attendait que Voldemort vienne le libérer de sa prison de Nurmengard contre l’engagement de préparer pour lui une potion de Régénération en se servant de la petite comme ingrédient de potion. Cela aurait sans doute eu lieu juste après la bataille de Poudlard, si Voldemort l’avait emporté. Je pense que ça fait quinze ans qu’il rumine le fait qu’il est passé tout près de la liberté, au point d’avoir fini par se dire que, si je n’avais pas été présent dans l’entourage de Voldemort, celui-ci aurait eu besoin d’un potionniste bien plus tôt et serait venu le délivrer. Sauf erreur de ma part, c’est pour cette raison qu’il nourrit un tel ressentiment à mon égard. »
« Mais si tu as raison, c’est une catastrophe. » s’inquiéta Harry « Quoi qu’il en dise, jamais il ne t’apportera son aide. »
« Ce n’est pas certain. » relativisai-je. « J’imagine que ce dont sa vie manque le plus c’est de distractions et de défis. Or, le fait de démontrer qu’il est un meilleur potionniste que moi pourrait constituer un défi de choix. »
« Tu fais dans la psychologie toi maintenant. » plaisanta Lupin.
« C’est à force d’avoir de mauvaises fréquentations à Poudlard. » répliquai-je, ce qui le fit rire.
Le regard d’Harry allait de l’un à l’autre. Manifestement, il s’interrogeait sur l’évolution de notre relation. Il faut dire qu’après l’avoir détesté toute ma vie et pour une raison qui m’échappait, je trouvais désormais le loup-garou nettement plus supportable.
Madame la Ministre avait pour sa part des préoccupations moins futiles.
« Etes-vous certain que Delphini Black soit réellement en sécurité au Manoir Malefoy ? » me demanda-t-elle soudain.
Je dus avoir l’air suffisamment surpris pour qu’elle se sente obligée de préciser le sens de sa question d’un air agacé :
« Mais enfin, Severus, vous voyez bien ce que je veux dire. Lucius Malefoy était un partisan convaincu de Voldemort, ne pourrait-il pas être tenté de livrer la petite Black à ceux de ses anciens complices qui veulent l’utiliser pour tenter de faire revenir son père. »
Ce fut à mon tour de rigoler.
« Je ne vois pas ce que j’ai dit de drôle. » observa-t-elle d’un ton pincé.
« Désolé, Madame la Ministre, si je vous ai semblé irrévérencieux. » répondis-je sur un ton à peine ironique. « Mais c’était l’idée que Lucius puisse avoir envie du retour de Voldemort qui m’amusait. »
« Et en quoi je vous prie, est-ce amusant ? » reprit-elle visiblement vexée par ma réaction. « Monsieur Malefoy se serait-il reconverti en ami des moldus et des nés-moldus ? »
« Probablement pas. » admis-je. « Lucius a tout juste appris à se taire. »
« Et alors, qu’est-ce qu’il vous fait dire qu’il ne souhaite pas Son retour ? » insista-t-elle.
« A l’époque où Voldemort avait établi ses quartiers au Manoir Malefoy, Lucius était devenu son principal souffre-douleur, il l’a systématiquement moqué, torturé moralement jour après jour en menaçant de s’en prendre à Narcissa et Drago, et parfois même physiquement. Alors, je peux vous assurer que Lucius n’a pas plus envie que vous de voir Voldemort revenir à la vie. »
Tous les trois me regardaient d’un air étrange.
« Pourquoi est-ce que tu n’as jamais parlé de ça ? » me demanda finalement Harry.
Je haussai les épaules :
« Parce ce que ça n’excuse rien. »
Pour éviter de voir Harry m’interroger à propos de ce qui avait pu m’arriver à moi pendant les années Voldemort, dont je n’avais guère envie de lui parler et particulièrement pas devant Lupin et Hermione Granger, j’enchainai :
« Au-delà de ça et quels que soient ses défauts, Lucius a le sens de la famille. De sa famille. A partir du moment où Narcissa considère sa nièce comme sa propre fille, il sera prêt à la défendre au péril de sa vie. Delphini Black est donc parfaitement en sécurité au Manoir Malefoy, mais uniquement tant qu’elle n’en sort pas. »
« Ce qui nous ramène à notre problème de fond. » soupira Madame la Ministre. « Comment faire pour bloquer le processus, pour empêcher que Delphini Black puisse être transformée en Voldemort ? Puisqu’il me semble que c’est la seule façon pour assurer durablement sa sécurité et la nôtre en même temps. »
« Je suis d’accord. » approuvai-je
« J’imagine que ceux qui cherchent actuellement à enlever Delphini Black, sont aussi ceux l’avaient sous leur garde quand elle était petite. Du coup, je me demande pourquoi ils ne l’ont pas transformée beaucoup plus tôt. » intervint Lupin.
« D’après l’intuition que j’ai à ce stade du processus de transformation, il fallait que Miss Black ait atteint une taille adulte pour que cette transformation puisse être mise en œuvre. Ils se sont donc contenter d’attendre qu’elle ait suffisamment grandi en la gardant sous contrôle. Mais c’était sans compter avec l’autre abruti de Dreamteam. C’est forcément lui qui a monté pour son propre compte le stratagème qui a conduit au retour de la fille de Bellatrix en Angleterre et à Poudlard (*). C’est ainsi qu’elle a dû échapper par le plus grand des hasards aux nostalgiques de Voldemort qui essayent de remettre la main sur elle aujourd’hui. » expliquai-je.
« Je vois que tu as quand même bien avancé dans ta réflexion. » voulut se réjouir Harry.
« Très insuffisamment malheureusement. » relativisai-je. « La plupart des aspects pratiques de cette magie me paraissent encore obscurs. Or, je dois impérativement tout comprendre pour imaginer un moyen de bloquer définitivement ce processus. »
« Comment pouvons-nous faire, Severus, pour vous aider dans votre réflexion ? » réagit Hermione Granger.
J’avais déjà réfléchi à cette question :
« Il faut que vous fassiez collecter pour moi toutes les informations disponibles sur les potions destinés à permettre la transformation humaine. Régénération. Métamorphose. Adoption de sang. En résumé, tout. Elles seront d’autant plus difficiles à trouver qu’une telle magie est strictement interdite et donc que de telles potions sont censées ne pas exister. D’ailleurs, il n’y a rien à Poudlard sur ces sujets, même dans la Réserve. Mais j’imagine que quelque part dans les sous-sols de ce Ministère, il existe des documents qui ont été saisis sur ces questions, et je suis certain qu’en menant quelques investigations supplémentaires bien ciblées vos services seront capables d’en faire resurgir d’autres. Voilà comment vous pourriez m’aider, car je vais devoir lire le plus de chose possible pour trouver une solution. »
Harry m’adressa un regard empreint d’une gravité inhabituelle :
« Es-tu certain d’avoir envie de faire ça ? »
« A la vérité, je suis même certain d’avoir envie de ne pas le faire. Mais, dans la mesure où tout cela ne peut être fait que par quelqu’un qui à la fois possède suffisamment de connaissances en matière de magie noire et qui jouisse de suffisamment de crédit auprès du Ministère comme auprès des Malefoy pour trouver une solution acceptable par tous. Je vois mal qui d’autre que moi pourrait s’en charger. » observai-je.
(*) Voir « Le journal de Severus Rogue (2) : la malédiction des Black ».
Chapitre 6 : Plongée dans les Ténèbres by OutThereIsTheTruth
En quittant le Ministère toujours par la cheminée du bureau d'Hermione Granger, je n’avais plus envie que de rentrer chez moi, avaler quelque chose, car j'avais négligé de me nourrir pendant toute la journée, et m'écrouler sur mon lit. Je réservais pour le lendemain l'analyse des événements de la journée. Mais je n'avais pas fait un pas hors de la cheminée du hall que mon projet me paraissait déjà compromis, car de la lumière filtrait par la porte entrouverte du salon.
Je poussais le battant avec un brin d'agacement tant je ressentais de besoin d'être tranquille après cette journée harassante, mais ce sentiment s'évanouit immédiatement pour faire place à l’inquiétude. Albus était roulé en boule dans un coin du canapé. Il avait retiré ses chaussures pour mettre les pieds dessus. Une posture qui expliquait les grognements désapprobateurs du portrait de mon grand-père, grognements auxquels le garçon ne prêtait aucune attention.
Albus affichait une moue préoccupée que je connaissais infiniment bien. Lily, ma Lily, sa grand-mère avait exactement la même quand quelque chose n’allait pas. Avec cette expression et ses deux grands yeux vert émeraude, il lui ressemblait tant que j'en ressentis un choc de cœur qui me laissa muet suffisamment longtemps pour l'inquiéter.
« Grand-père. » murmura-t-il. « Ça ne va pas ? »
Je remisais alors le passé pour m'occuper du présent.
« Je suis seulement surpris de te voir, Albus. Je croyais que tu allais rester dormir chez les Malefoy. » répondis-je.
« C'est ce qui était prévu. » confirma-t-il. « Mais j'avais envie de vous parler. »
Renonçant à l’espoir de me coucher rapidement, je m'assis à l'autre bout du canapé devant un plateau couvert de différentes choses à manger que Tinny avait manifestement prévues pour Albus et auquel il n'avait pas touché.
« Je vous attendais pour manger. » se justifia-t-il en voyant mon regard se poser sur la nourriture disposée sur la table basse.
Ce n'était qu'un prétexte. D'habitude, il aurait mangé avant moi et remangé avec moi sans se faire prier. Pour se donner une contenance, il attrapa sa tasse et entreprit de faire réchauffer d'un coup de baguette distrait le thé qu'il avait négligé de boire.
« Tu devrais plutôt la vider, je vais en refaire. » proposai-je.
Albus s'exécuta tout aussi distraitement. Il n'avait formulé aucun des deux sorts.
Après avoir conjuré un nouveau thé, j'attrapai sa tasse pour le servir, puis je poussai devant lui le plateau de victuailles. Il mangea un peu en silence avant de lâcher abruptement :
« Vous savez qu'il l'a fait. Hexaphorus. Autrefois, il y a longtemps, il a utilisé son propre enfant comme ingrédient de potion, il s’en est servi pour se rajeunir. Je l’ai lu dans ses souvenirs. C'est pour ça qu'il est toujours vivant même s'il est très très vieux. »
Une riche idée que j'avais eu de lui enseigner la Legilimencie ! Tout ça pour qu'il aille exercer ses talents sur ce vieillard monstrueux et qu'il en profite pour apprendre des horreurs. Je cherchais désespérément une idée pour réagir intelligemment à ces révélations, mais il n'avait pas fini :
« Et vous savez, il n'est même pas heureux d'avoir fait ça. Il se demande si, quelque part, il n'aurait pas un autre enfant. Pas pour en faire la même chose, mais parce qu’il aimerait le connaître. »
Des réflexions bien loin du discours qu'Hexaphorus nous avait tenu. D’où sa réaction quand il s’est rendu compte qu’Albus avait percé ses pensées.
« Vous n’aviez vraiment pas « entendu » ces pensées d’Hexaphorus, Grand-père ? » me demanda-t-il mi-étonné mi incrédule, alors que je n’avais toujours pas réagi à ses propos.
Cette question-là au moins était facile.
« Non, car je n’ai pas utilisé de Legilimencie pendant notre visite à Nurmengard. » expliquai-je. « J’avais décidé de me concentrer sur ses paroles plutôt que sur ses pensées, car je supposais ce vieux sorcier assez bon Occlumens pour réussir à me duper. »
« Vous croyez que ce souvenir que j’ai attrapé dans sa tête était un faux souvenir ? » s’enquit Albus.
J’avais perçu une once d’espoir dans son ton et, un instant, j’hésitai à m’engouffrer par cette porte qu’il venait d’entrouvrir. Histoire de le rassurer, de le préserver un peu plus longtemps des Ténèbres, j’étais tenté d’aller dans son sens. Mais depuis qu’Albus était entré dans ma vie, j’avais résolu de ne jamais lui mentir. De ne pas lui mentir sur moi, mais aussi de ne pas lui mentir sur la réalité du monde. Je renonçai donc à la facilité :
« Je crois malheureusement que non, Albus, que tu as saisi une pensée qui lui a juste échappé. ».
Il vida sa tasse de thé, le temps d’encaisser ma réponse. J’avais l’impression de le voir se pencher au-dessus d’un gouffre et d’en regarder le fond.
« Je me demande pourquoi il a fait ce qu'il a fait, alors que maintenant il le regrette. » reprit-il lentement.
Une fort intéressante question à laquelle je n'avais pas vraiment de réponse, j’en tentai néanmoins une :
« Je n'en sais rien, Albus. Il l’a peut-être juste fait pour prouver ou pour se prouver qu'il en était capable. »
« Alors c’est qu’il est fou. » décréta-t-il avant de se resservir du thé.
Peut-être, en effet. Mais un fou avec lequel j’allais, bien malgré moi, devoir composer.
« Quand vous m’avez dit hier que la naissance de Delphini ne correspondait pas à la volonté de ses parents d’avoir un enfant. » reprit-il en observant avec une attention inutile la surface de son thé. « C’est parce que ses parents voulaient la transformer elle aussi en ingrédient de potion. Hexaphorus a pensé à ça plusieurs fois en regardant Delphini « ingrédient de potion ». »
« Disons que c’était très probablement l’objectif de son père. Quant à sa mère, je ne sais pas si elle était au courant ou non de ce projet. » me forçai-je à répondre d’un ton égal comme si nous parlions de choses banales.
Je ne sais pas vraiment pourquoi je faisais ce crédit à Bellatrix pour la mémoire de laquelle je n’avais pas la moindre considération. Peut-être par amitié pour Narcissa. Peut-être pour alléger un peu le poids que cette horrible histoire faisait peser sur les épaules d’Albus. Un peu des deux sans doute.
« Ce projet a heureusement perdu tout son sens après la mort de Voldemort. » ajoutai-je.
Albus détacha les yeux de son thé pour les relever vers moi.
« Oui, mais ce vieux type, Hexaphorus, il a parlé d’autre chose. » dit-il. « Si j’ai bien compris, il a proposé à Delphini de la transformer en Voldemort. Vous croyez que c’est possible ? »
« Franchement, j’aimerais te répondre non. Mais, je me garderais bien d’être aussi définitif. Tout ce que je peux dire, c’est que jamais je n’avais entendu parler d’une telle magie. Mais je suis loin d’avoir exploré tous les méandres de la magie noire. » répondis-je franchement.
« Mais comment ce type peut-il imaginer que Delphini pourrait renoncer à sa propre vie pour permettre à Voldemort de réapparaître ? » s’écria Albus.
« Je crois, Albus, que ceux qui ont pour projet de la transformer en Voldemort, n’ont jamais envisagé de lui demander son avis. » expliquai-je de la voix la plus neutre possible.
Albus prit le temps de bien soupeser chacune de mes paroles.
« Il faut trouver une solution pour empêcher ça. » lança-t-il. « Avec mes amis, je suis sûr que nous pouvons aider à trouver cette solution. »
Malheur, il ne manquait plus que ça !
« Albus, ce qui m’aidera le plus, c’est que tes petits camarades et toi vous ne veniez pas interférez au milieu de mon enquête. Je vais avoir besoin de tranquillité d’esprit pour mener mes recherches, pas de me demander ce que vous fabriquez de votre côté ! D’autant plus qu’il va principalement s’agir de lire des vieilles recettes de magie noire que vous n’avez absolument pas la capacité de comprendre. » répliquai-je fermement.
« Alors, c’est vous qui allez chercher une solution pour empêcher que quelqu’un puisse essayer de transformer Delphini en Voldemort. Promettez-moi que vous allez trouver ! » me pressa-t-il.
« Tout ce que je peux te promettre, c’est de faire tout ce qui est en mon pouvoir pour trouver. » assurai-je
« Alors je sais que vous allez trouver, car vous êtes le plus grand potionniste du monde ! » s’écria-t-il avec une forme de confiance naïve dont je fus bêtement ému.
Chapitre 7 : Non, mais je rêve ! by OutThereIsTheTruth
Le lendemain matin, je me levai fourbu d’une nuit ponctuée de brusques réveils. En dépit de l’empire que j’avais sur moi-même, je m’inquiétai de l’ampleur de la tâche à laquelle je m’étais engagé auprès de notre Ministre de la Magie, et plus encore de ne pas être à la hauteur de la confiance d’Albus. C’est dire mon agacement de m’entendre interpelé par la voix de mon grand-père à peine avais-je mis un pied sur l’escalier pour descendre au rez-de-chaussée. Pour être certain de ne pas me manquer, le portrait du regrettable Ferrucius Prince s’était positionné de façon stratégique dans un tableau représentant un sous-bois qui ornait l’escalier.
« Vous voilà enfin ! » s’écria-t-il sans préambule en m’apercevant. « Je ne sais à quoi vous occupez votre temps, mais il est de votre devoir de mettre un terme au désordre qui règne dans cette Maison ! »
Je n’avais évidemment pas la moindre intention de déférer à son injonction. Mais après avoir essayé à de multiples reprises de lui expliquer sérieusement que j’avais autre chose à faire que de m’occuper de ses histoires, je tentai pour une fois le second degré. Je le gratifiai donc d’un dialogue imaginaire entre lui et moi sans cesser de descendre l’escalier :
« « Bonjour, Severus, j’espère que vous allez bien ce matin. » « Bonjour, Ferrucius. Pas trop mal, si l’on considère l’importance de la mission que la Ministre de la Magie m’a confiée. Une mission de la réussite de laquelle dépend la sécurité du monde sorcier et l’avenir de notre Maison. » « Comptez sur moi, Severus, pour veiller à ce que rien ni personne ne vienne vous déranger dans ces circonstances difficiles et surtout pas des problèmes très secondaires. » »
Mais évidemment et comme à son habitude, Ferrucius Prince ne comprit rien au message que j’essayais de lui faire passer. M’ayant suivi de tableau en tableau jusqu’à mon bureau, il interrompit mon monologue d’une voix courroucée :
« Je ne comprends rien à toutes ces balivernes ! Auriez-vous abusé du Whisky Pur Feu hier soir ? Le problème dont je viens vous entretenir n’a rien de secondaire, il est même d’une importance vitale ! »
Pour me débarrasser de ses jérémiades, j’eus la faiblesse de consentir à l’écouter.
« Il se trouve que la nuit dernière, profitant que je m'étais légèrement assoupi, un malfaisant m'a dérobé mon Ordre de Merlin. » m'annonça-t-il d'un ton tragique.
« Votre ordre de Merlin, mais c'est impossible. » affirmai-je.
« Pourquoi serait-ce impossible ? » s'étonna-t-il.
« Eh bien, parce que pour qu'on vous dérobe votre Ordre de Merlin encore faudrait-il que quelqu'un ait eu l'idée absurde de vous le remettre. » assurai-je.
« Absurde vous-même, espèce de malotru ! » s'insurgea-t-il. « Je l'ai reçu des mains du Ministre de la Magie en personne. »
« Je me demande bien pour quelle raison bizarre, un Ministre de la Magie quel qu'il soit vous aurait donné l'Ordre de Merlin. » ironisai-je.
« Mais pour tous les services que j'ai rendus. » osa-t-il affirmer. « Pourquoi riez-vous ? Je ne vois pas ce qu'il y a de drôle ! »
« Parce que jamais vous n'avez rendu le moindre service à qui que ce soit. » m'esclaffai-je bruyamment pour le faire enrager.
« Vous n'en savez rien. » s'étrangla-t-il alors que son teint peint virait au rouge brique.
« Alors surprenez-moi. Racontez-moi ne serait-ce qu'une situation dans laquelle vous auriez rendu un service susceptible de vous valoir l'Ordre de Merlin. » réclamai-je.
« Ce serait contraire à ma discrétion. » protesta-t-il.
« C'est facile d'être discret quand on n’a rien à dire ! » se moqua depuis le mur d'en face une voix que je reconnus comme celle de mon grand-oncle Fraxinus Prince, frère cadet de Ferrucius.
« Taisez-vous, Fraxinus. » ordonna ce dernier d'un ton ulcéré. « Vous ne savez rien du tout. »
« Au contraire, je sais tout. » répliqua Fraxinus en adressant une grimace à son aîné avant de se tourner vers moi pour ajouter. « Et si vous voulez, je vous le raconte. »
« Si j'avais du temps à perdre, je vous aurais bien dit oui. » répondis-je.
« Alors, je vous raconte. » en conclut-il me laissant une fois de plus l'impression étrange que ces fichus portraits et moi nous ne parlions vraiment pas la même langue. « Dans la même année que Ferrucius à Poudlard, il y avait un type complètement maniaque, un vrai bêcheur, qui ne voulait avoir que la note « Optimal » à tous ses devoirs. Du coup, il envoyait en douce ses devoirs par hibou à son père pour que celui-ci les corrige avant qu’il les rende. Eh bien, Ferrucius a réussi à subtiliser quelques-uns de ces devoirs annotés par son père et les a conservés. »
« Ce sont d’ignobles calomnies ! C’est une honte d’oser dire des choses pareilles. » vitupéra Ferrucius Prince écarlate.
« C’est l’exacte vérité ! » affirma Fraxinus « Alors, quand le type en question est devenu Ministre de la Magie, Ferrucius a décidé de négocier les preuves qu’il détenait contre son Ordre de Merlin. Il est allé le voir au Ministère et … »
Un hibou ou plus exactement un grand-duc majestueux qui tapait à la fenêtre de mon bureau, détourna mon attention de ces révélations croustillantes. Il était porteur d’un message de Lucius Malefoy rédigé en ces termes :
« Narcissa ne va pas bien. Elle est morte d’angoisse depuis votre visite d’hier à Nurmengard. Je ne sais plus quoi dire pour la rassurer. Je veux que tu viennes lui parler IMMEDIATEMENT ! »
Le hibou de Lucius venant s’ajouter au petit mot d’Albus que j’avais trouvé posé sur mon bureau m’indiquant qu’il était déjà retourné au Manoir Malefoy à la demande de Delphini Black, je décidai donc de m’y rendre à mon tour sur le champ. Je n’avais plus qu’à espérer que Narcissa serait d’humeur à m’offrir le petit déjeuner.
Le portrait de Fraxinus Prince m’interpela alors que je me dirigeai vers la porte de mon bureau pour aller transplaner dans le jardin :
« Vous nous quittez déjà ? »
« Vous avez tort, ça allait devenir drôle ! » ajouta depuis un autre tableau la voix de Spiritus Prince.
En me tournant vers ce dernier, je remarquai que son serpent qui comme toujours l’accompagnait, portait cette fois un Ordre de Merlin autour du cou. Je ne fus pas le seul à le remarquer.
« Mon Ordre de Merlin ! Rendez-le moi tout de suite ! » hurla Ferrucius dont la figure peinte menaçait de se fissurer sous l’intensité de sa colère.
« Viens le chercher ! Viens le chercher ! » chantonnait Spiritus couché dans l’herbe, alors qu’à ses côtés, son serpent, la gueule ouverte, semblait se moquer de Ferrucius.
« Je suis certain, Messieurs, que vous trouverez sans moi de quoi vous distraire. Pour ma part, j’ai des choses bien plus importantes à faire que d’arbitrer vos problèmes domestiques. » leur lançai-je en refermant la porte de mon bureau.
Chapitre 8 : Un pas après l'autre by OutThereIsTheTruth
Je trouvais le Manoir Malefoy dans un état d’agitation bien inhabituel. De loin, j’aperçus les jeunes dans la véranda. Ils n’étaient plus quatre mais six. Toute la bande était donc réunie. Victoire Weasley et Teddy Lupin avaient bravé la crainte que leur inspirait Lucius Malefoy pour venir rejoindre leurs petits camarades et, d’après ce que je connaissais d’eux, faire bloc autour de Delphini Black.
Cela dit, ils avaient raisons de ne pas s’en préoccuper, car leur présence semblait bien le cadet des soucis de Lucius. Quand je le rejoignis dans le salon, il était assis dans le canapé auprès de Narcissa. Par-dessus la tête de sa femme, il m’adressa un regard furieux en me voyant arriver.
« Eh bien, bravo ! » me lança-t-il en guise de salut.
Je n’étais sûrement pas d’humeur à battre ma coulpe.
« J’accepte tes félicitations. » rétorquai-je. « Les choses ont bien avancé, puisque nous avons identifié la nature du problème. »
Narcissa se retourna d’un bloc. Ses yeux bleus lançaient des éclairs. Manifestement, sa colère de la veille était toujours intacte.
« Je vais te dire moi quelle est la nature du problème. » gronda-t-elle. « C’est qu’hier soir, au retour de Nurmengard, Delphini m’a affirmé que ce serait peut-être plus simple pour tout le monde si elle n’existait plus, autrement dit si elle était morte ! »
Je comprenais mieux la colère de Narcissa si la petite tenait des propos pareils ! S’étant levée, elle se redressa de toute sa taille pour mieux me fusiller du regard.
« Je te garantis que tu as intérêt à trouver une solution, sinon je te jure que tu auras affaire à moi. » menaça-t-elle. « En attendant, les amis de Delphini, eux au moins, sont là pour la soutenir. Je vais voir s'ils ont besoin de quelque chose, car ils sont tous les bienvenus dans cette maison, n’est-ce pas ? »
Cette dernière remarque s'adressait clairement à Lucius vers qui elle avait tourné un regard impérieux face auquel il s'écrasa prudemment.
« Bien entendu, ma chérie. » gazouilla-t-il avec un sourire stupide.
« Des descendants de vélane, de loup-garou, de né-moldu sous ton toit, tu es gâté, dis donc ! » plaisantai-je à mi-voix dès que Narcissa se fut éloignée.
« Mais ça ne me pose aucun problème. » prétendit-il avec un aplomb qui me laissa sans voix.
Voilà donc quarante ans que j'avais des hallucinations, puisqu'à l'en croire j'avais rêvé toutes ses diatribes contre tous ceux qui ne pouvaient pas revendiquer un sang-pur. Il profita de ma sidération pour reprendre la main :
« Bon dis donc, tu vas te dépêcher de résoudre le problème de Delphini, Narcissa est dans tous ses états. Elle va finir par se rendre malade à force de se faire du souci. »
« Me dépêcher ! Me dépêcher ! » râlai-je. « Si tu veux, je peux me dépêcher de te transformer et gargouille pour t’installer au milieu de la fontaine. Comme ça tu pourras cracher utilement de l’eau au lieu de débiter des stupidités. »
« Tu penses que ce n’est pas possible de te dépêcher. » en conclut-il indifférent à mes menaces.
« Evidemment que ce n’est pas possible ! j’en suis encore à essayer de comprendre le processus magique par lequel ce salopard d’Hexaphorus envisageait de transformer la petite pour faire réapparaître Voldemort, comment veux-tu que j’aie déjà trouvé une solution pour l’en empêcher ? » répondis-je irrité.
« C’est étrange, mais maintenant que tu le dis comme ça, ça me fait songer à une autre recette qu’il y avait dans le livre où j’ai trouvé la potion de Régénération, une potion dite de « Changement d’identité ». » remarqua-t-il.
« Pourquoi est-ce que tu ne me l’as pas montrée plus tôt ? » m’étonnai-je.
« D’abord, parce que ça ne correspondait pas vraiment à ce que tu cherchais à ce moment-là. Ensuite, parce qu’il y a une petite note dans la marge disant que la recette ne fonctionne pas. » expliqua Lucius.
Mon intérêt retomba d’un coup. Mais je n’avais rien de plus prometteur à me mettre sous la dent pour le moment, puisque Madame la Ministre ne m’avait encore fait envoyer aucun document à éplucher.
« Montre quand même. » soupirai-je en le suivant dans son bureau.
C’était une version du Polynectar revue et corrigée dans l’objectif de rendre son effet définitif, mais tellement revue et tellement corrigée qu’elle en devenait à coup sûr très dangereuse.
« Alors qu’est-ce que tu en penses ? Tu crois qu’elle ne marche pas cette recette de changement d’identité, comme le dit la petite note manuscrite. » demanda Lucius.
« Oui et non. » répondis-je sans plus de précision.
« Oui et non, quoi ? » insista-t-il.
« Oui, ça permet bien de changer l’apparence de la personne qui avale la potion. » expliquai-je sur un ton technique. « Et non, car la potion entraîne à mon sens sa mort dans les plus brefs délais. »
« Tu crois ? » s’inquiéta-t-il.
« Comme tu le sais, j’ai quand même une petite expérience en matière de potions. » ironisai-je. « Et donc oui, j’en suis sûr. Il n’empêche que ça me donne quand même une idée pour le cas qui nous occupe. »
« Tu n’envisages quand même pas de donner cette potion mortelle à Delphini ? » s’inquiéta Lucius.
« Bien sûr que non ! » répliquai-je en haussant les épaules. « J’ai juste dit que ça me donnait un début d’idée, pas que j’allais l’empoisonner avec cette potion. Mais pour le moment, j’ai besoin de réfléchir. »
Comprenant que je n’en dirai pas plus dans l’immédiat, Lucius me proposa d’aller prendre une tasse de thé ou de café dans le salon. J’optai pour le café qui eut la bonne idée d’apparaître accompagné de différentes choses à manger.
Par la porte ouverte, nous apercevions la petite bande qui discutait toujours dans la véranda où Narcissa leur avait manifestement servi à eux aussi un encas. Lucius qui contemplait le petit groupe d’un regard circonspect, finit par lâcher :
« Quand même, je me demande bien ce qu’il peut lui trouver ! »
Je suivis son regard pour m’apercevoir qu’il fixait son petit-fils, Scorpius, qui comme souvent béait d’admiration devant Rose Granger-Weasley, dont il buvait des paroles que nous étions trop loin pour entendre.
« Une sang-mêlée, la fille d’une née-moldue, je comprends que ça ne te plaise pas trop. » ironisai-je à mi-voix.
« Non, ce n'est pas ça. » osa-t-il prétendre. « C'est juste qu'elle n'a vraiment rien d'une beauté fracassante. Du coup, je n'arrive pas à comprendre que Scorpius la regarde comme ça, d’un air émerveillé. »
« C'est le côté serpentard qu'il admire chez elle. » lui assurai-je.
« Tu te moques de moi. » grogna-t-il vexé.
« Absolument pas. » affirmai-je péremptoire. « Moi qui la connais bien je peux te garantir que les plus entreprenants de mes serpents ont l’air d’une gentille bande de boursouflets à côté d’elle. Miss Granger-Weasley est absolument persuadée qu’elle peut employer n’importe quel moyen pour atteindre ses objectifs et elle entretient un rapport assez lointain avec la vérité lorsque la vérité ne l’arrange pas, sans compter que je ne serais pas surpris qu’elle fasse montre à terme d’une ambition hors norme. »
« Ah bon ! » s’étonna Lucius.
Son ton était déjà moins critique. Sans s’en rendre compte lui-même, il considérait déjà Rose Granger-Weasley d’un œil plus favorable. Car ma description du caractère de la donzelle qui aurait inquiété n’importe qui d’autre, avait tout pour intéresser Lucius.
« Mais si elle est telle que tu le prétends, qu’est-ce qu’elle fabrique chez les gryffondors ? » reprit-il.
« Bonne question ! » admis-je. « Soit le Choixpeau magique est rempli de préjugés, soit ce vieux machin est bon à mettre aux chiffons. »
« Ça ne doit pas être facile pour elle tous les jours d’être chez les lions. » compatit-il.
« Permets-moi de te contredire. » plaisantai-je « C’est surtout pour les lions que ce n’est pas facile de la gérer au quotidien. Son directeur de Maison a bien du mal à savoir comment réagir face à ses agissements. »
« J’imagine ! » rigola Lucius avant de murmurer pour lui-même « Après tout, c’est quand même la fille de la Ministre de la Magie … »
Je sentais que ce vieux crétin vaniteux commençait à être quelque peu séduit par l’option Rose Granger-Weasley. Scorpius Malefoy ne saurait jamais ce que sa tranquillité devait à mon initiative.
En parlant d’initiative, j’espérais qu’Albus avait bien transmis mon message au reste de sa petite bande et qu’ils n’allaient pas venir interférer dans mes recherches. D’ailleurs, ce n’était pas beaucoup demander, je voulais juste qu’ils s’occupent de n’importe quoi d’autre. « Ils feront toujours moins de dégâts », songeai-je. Manque d’imagination de ma part comme les faits finiraient par me le prouver …
Chapitre 9 : Lily Molly Potter by OutThereIsTheTruth
Cinq jours plus tard, Harry débarquait à la maison pour m'amener les premiers documents sélectionnés par le Ministère pour m'aider à comprendre et à contrer la magie susceptible de transformer Delphini Black en Voldemort. En le voyant transplaner dans le jardin, je ne manquais pas de m'interroger sur le nombre de volumes qu'un Reducto avaient pu lui permettre de dissimuler dans la poche de sa robe. Alors que je craignais de devoir éplucher une bibliothèque entière, son Amplificatum ne révéla que quelques dizaines de rouleaux de parchemins.
« C'est tout ce que nous avons pu retrouver en lien avec notre affaire dans tous les documents qui ont pu être saisi par le passé par le Ministère. Et encore mes collègues ont ratissé large, je suis certain qu'au moins la moitié de tout ça est sans intérêt pour toi. » dit-il.
Devant mon air désappointé, il ajouta :
« Mais je ne perds pas espoir de t’apporter bientôt autre chose de plus intéressant. Les Langues-de-Plomb fouillent de leur côté différents endroits où ils espèrent trouver des documents utiles à tes recherches. »
Je relativisai ma propre déception :
« Après tout, ce n'est pas très étonnant. La métamorphose humaine est vraiment un tabou absolu en matière de magie. »
« C’est toute la magie noire qui est proscrite. » rappela-t-il.
« Ce qui revient, si tu veux mon avis, à mélanger des choses assez anodines avec des choses très graves. » remarquai-je « Mais je doute que tu sois d'accord avec moi sur cette question. »
« En effet, mais je sais bien que les serpentards ont une vision assez permissive de la magie noire. » soupira-t-il.
« J'aurais dit assez pragmatique, mais nous n'allons pas nous disputer pour un mot. » plaisantai-je.
« Sûrement pas ! D'autant moins que je suis aussi venu te parler d'autre chose. » assura-t-il. « Albus est passé me voir plusieurs reprises ces derniers jours. J'ai eu l'impression qu'il ne va pas très bien depuis votre visite à Nurmengard. »
Plutôt que de réagir directement à sa phrase, je lui proposai de profiter du beau temps pour aller prendre le thé sur la terrasse pour en discuter. J’avais envie de l’entendre sans forcément lui donner mon ressenti, car à mon sens Albus se remettait plutôt bien de notre entrevue avec Hexaphorus. Deux jours plus tôt, il m’avait même dit ce qu’il voulait comme cadeau d’anniversaire, alors que ma question à ce sujet était restée sans réponse depuis la tentative d’enlèvement de Delphini Black. Evidemment, sa demande était d’abord venue très indirectement. Un serpentard reste un serpentard.
« Pourquoi n’avons-nous pas de Pensine au Manoir ? » avait-il commencé.
J’eus la pudeur de ne pas lui donner clairement la raison que j’avais en tête, à savoir qu’à eux tous nos crétins d’ancêtres qui s’encadraient sur les murs avec des airs suffisants, n’avaient pas eu une seule idée suffisamment profonde, un seul souvenir suffisamment intéressant, pour justifier l’acquisition d’une Pensine.
« Je n’en sais pas rien, Albus. Pour ma part, je ne me suis jamais posé la question, car j’ai toujours eu accès à celle du bureau directorial de Poudlard quand j’en avais besoin. » expliquai-je.
« Je voudrais bien que vous m’appreniez le sortilège qui permet de d’extraire ses souvenirs. Et puis je voudrais faire l’expérience de la visualisation des souvenirs dans la Pensine. En fait, j’aimerais que nous ayons une Pensine, c’est ce que je voudrais pour mon anniversaire. » avait-il expliqué en en venant au fait.
En disant cela, il n’avait absolument pas réalisé qu’il me demandait un cadeau extrêmement onéreux. Plus cher que le plus cher de tous les balais du magasin d’accessoires de Quidditch ! Mais Albus n’avait pas le moindre intérêt pour les balais ou pour le Quidditch et après tout la Maison des Prince pouvait bien s’offrir une Pensine, j’en avais donc commandé une à l’un des rares fabricants capables de réaliser un objet magique aussi complexe. En attendant, je lui apprenais à extraire ses souvenirs. Il voulait aussi que je lui explique comment modifier les souvenirs d’autrui sans laisser de traces. Je lui avais promis de travailler avec lui sur la théorie, mais pas question de lui permettre de trafiquer mes souvenirs, ni de le laisser s’exercer sur autrui.
En tout cas, Albus ne me semblait pas réellement traumatisé par sa virée à Nurmengard, et je n’en étais que plus intéressé de savoir ce qu’il avait pu dire sur ce sujet à son père. Une fois installé sur la terrasse, je m’occupai donc de servir le thé en encourageant Harry à me raconter ce que lui avait dit Albus, tout en me gardant bien de lui donner ma propre opinion. J’étais suffisamment curieux pour faire taire les scrupules que j’avais vis-à-vis de lui en songeant combien il devait difficile pour un gryffondor d’être pris en tenaille entre son serpentard de père et son serpentard de fils.
« Quand il est venu me voir, Albus m’a raconté par le menu votre entrevue avec Hexaphorus. Je l’ai senti vraiment troublé. Ensuite, il est revenu à la charge sur son souhait que Ginny et moi nous venions ici avec sa petite sœur. Je l’ai trouvé tellement affecté que j’ai accepté, à condition que tu sois d’accord. » dit-il.
Tout de suite, je comprenais mieux pourquoi Albus était allé parler à son père de son « malaise ». Il y a longtemps qu’il souhaitait rendre public notre lien familial, une aspiration qui contrariait beaucoup son frère James d’un an son aîné à qui au contraire il convenait très bien d’être un Potter, en tout cas beaucoup mieux que d’être le petit-fils de son affreux professeur de Potions. Faute de pouvoir imposer une vérité officielle immédiate, Albus avait procédé donc par petite touche en révélant la vérité à ses plus proches amis. Et il considérait clairement comme une étape majeure le fait de pouvoir faire venir sa petite sœur, Lily, au Manoir des Prince. Une fois Lily informée de mon existence, le secret aurait encore plus de mal à tenir, puisqu’elle était trop petite pour qu’on lui impose de se taire.
« Bien sûr que je suis d’accord. » assurai-je avant de demander. « Mais, James l’est-il ? »
Harry prit le temps de vider sa tasse de thé et de s’en servir une autre avant de me répondre :
« J’ai eu une grande discussion avec James. Et pour tout dire, une discussion houleuse. »
« Houleuse. » répétai-je. « A propos de moi, j’imagine. »
« En fait, non. » répondit Harry en secouant la tête. « A propos de ses études et de ce qu’il fait de son temps. Ça a commencé quand James est venu me demander de l’inscrire à un stage de Quidditch organisé cet été sur le continent par quelques anciens joueurs de différentes équipes nationales, notamment Viktor Krum dont tu dois te souvenir. J’ai commencé par refuser en lui reprochant de passer tout son temps à jouer au Quidditch. Depuis le début de l’été, il ne fait que ça, que ce soit chez ses grands-parents Weasley ou chez ses amis. Pourtant, je lui avais demandé de faire quelques révisions cet été, car je n’étais pas absolument ravi de ses résultats plutôt moyens aux examens cette année. Je voulais donc qu’il travaille au moins un peu, car je m’inquiète des résultats qu’il va avoir aux Buses à la fin de l’année prochaine. »
Je m’abstiens de tout commentaire.
« J’ai dû dire quelque chose comme : « C’est bien beau de jouer au Quidditch, mais il est temps que tu songes à préparer ton avenir. » » poursuivit-il. « Et pour le coup, James s’est énervé pour de bon. Il m’a dit qu’il avait déjà essayé de me parler de ses projets d’avenir et que c’est moi qui refusais de l’écouter. Qu’il voulait faire du Quidditch son métier, intégrer une équipe professionnelle et peut-être rentrer un jour dans l’équipe nationale. Qu’il s’entraînait à fond cet été pour devenir capitaine de l’équipe de Gryffondor, puisque la place serait vacante à la rentrée. Bref, qu’il voulait aller faire ce stage pour préparer son avenir justement. »
Il resta un moment silencieux, les yeux rivés sur la surface de sa tasse de thé. Je m’amusais de retrouver chez lui ce tic qu’Albus avait parfois lui aussi quand il venait me parler de quelque chose d’important.
« C’est vrai qu’il avait fait des allusions à ce projet et c’est vrai aussi que je n’avais pas voulu l’entendre. » reprit-il après un moment. « Sans doute parce que même si j’ai moi aussi adoré le Quidditch et que, sans me vanter, j’ai été un bon joueur, je n’ai jamais envisagé d’en faire mon métier. Du coup, à chaque fois que James m’a parlé de son projet, j’ai traité ça comme une lubie d’enfant qui allait finir par lui passer. »
Il se tut à nouveau.
« Ce n’est pas si simple d’élever des enfants, n’est-ce pas ? » observai-je sur un ton dénué d’ironie.
« Comme tu dis, ce n’est pas si simple. » répéta-t-il en soupirant. « D’autant plus que ça ne se passe pas toujours comme on l’avait imaginé. Quand James et Albus sont nés à un an d’intervalle, j’ai cru qu’en plus d’être des frères, ils seraient des amis, qu’ils seraient inséparables, qu’ils feraient tout ensemble … Et rien ne s’est passé comme je l’avais pensé. James s’est immédiatement passionné pour son premier balai, alors qu’Albus n’a pas accordé la moindre attention au sien. Ce qui passionnait Albus quand il était petit s’était d’empiler les objets. A peine a-t-il était capable de s’assoir qu’il a commencé à faire des piles qui s’effondraient dès qu’il s’en détournait, car, sans s’en rendre compte, il utilisait déjà la magie pour les faire tenir. Il avait à peine deux ou trois ans quand les objets ont commencé à changer de couleur autour de lui. Et au lieu de le féliciter pour ce qu’il était capable de faire, j’avais tendance à le renvoyer toujours jouer avec son frère qui lui ne s’intéressait déjà qu’à la version pour enfant du Quidditch. C’est comme ça qu’Albus a passé des années à me reprocher de vouloir qu’il soit comme James. Et le plus paradoxal, c’est qu’aujourd’hui c’est James qui me reproche de vouloir qu’il soit comme Albus, quand je lui demande de faire des révisions ! »
A nouveau, il s’arrêta de parler.
« C’est exagéré de dire qu’Albus passe son été à lire ses livres de classes. A part pour faire ses devoirs de vacances, je crois bien qu’il ne les ouvre jamais. » remarquai-je.
« Certes, mais c’est tout à fait exact de dire qu’il a souvent un livre à la main quand il est à la maison. Même s’il s’agit plutôt de « la Legilimencie sans laisser de trace » ou de « Occlumencie : comment construire un faux souvenir plus vrai que vrai » que de ses livres de classe. » admit Harry. « James a fait volontairement la confusion pour me reprocher de vouloir le renvoyer à ses bouquins plutôt que de le laisser jouer au Quidditch. »
« Et comment s’est conclue cette intéressante conversation ? » m’informai-je.
« Eh bien, j’ai accepté que James aille faire son stage de Quidditch sur le continent et, en même temps, je lui ai dit que Ginny et moi avions décidé d’aller chez toi avec Lily » répondit-il.
Je ne sais pas comment on appelait ça en langage gryffondor, mais si Harry avait été un serpentard, j’aurais dit qu’il avait négocié avec James en échangeant le stage de Quidditch contre le fait que son fils aîné cesse de s’opposer à ce que ses parents viennent me rendre visite avec sa petite sœur.
Il restait encore une question cruciale.
« Mais qu’est-ce que tu vas dire à Lily ? A propos de moi, je veux dire. » demandai-je doucement.
« La vérité. Que tu es son grand-père. » répondit-il simplement.
La réponse me parut un peu courte.
« Et comment vas-tu lui expliquer le fait qu’elle ne me connait pas encore ? » insistai-je.
« Je vais lui dire que tu étais « absent ». C’est la chose la plus proche de la réalité que je puisse lui dire, il me semble. » répliqua-t-il avant d’ajouter sur un ton plus incisif. « Et le jour où elle sera assez grande pour se rendre compte que cette explication est franchement bancale et où elle demandera plus de détails, je compte que tu lui apprennes toi-même la raison pour laquelle elle ne t’a rencontré qu’à l’âge de sept ans ! »
L’allusion était transparente. En dépit de mes tentatives d’explications et des regrets que j’avais exprimés, Harry restait blessé du fait que je ne lui ai jamais dit que j’étais son père, avant que les découvertes d’Albus ne le mettent brusquement face de cette réalité. Malgré toutes les assurances que j’avais pu lui donner depuis, je savais qu’Harry continuait de se demander si je n’avais pas gardé mes distances parce que je trouvais qu’il n’était pas assez bien pour être mon fils, alors qu’en réalité j’avais considéré que c’était moi qui faisais un père bien encombrant.
Etant bien décidé à ne pas rouvrir ce chapitre ardu de nos relations, je me bornai à répondre à la question en ignorant le sous-entendu.
« J’essayerai. » promis-je.
Même si j’affichais un visage serein, je m’inquiétais un peu de ce que je pourrais le jour venu raconter à la petite Lily pour la convaincre que mon absence n’était en rien de l’indifférence et encore moins du rejet.
…
Quatre jours plus tard, j’étais encore plus inquiet en voyant Lily Molly Potter débarquer avec ses parents sur la pelouse devant le Manoir. Depuis la visite d’Harry, j’avais pris conscience que je ne connaissais strictement rien aux enfants de cet âge-là. Et, faute de savoir comment me comporter, j’étais totalement tétanisé à l’idée de faire un impair, de lui faire peur, de la faire fuir … Mais, c’était sans compter qu’avec son expérience en matière de grands-parents, elle serait capable de combler mes propres lacunes en matière de petits-enfants.
Elle vint directement vers moi sans paraître s’inquiéter de ma robe noire et de mon allure austère.
« C’est toi, le papa de mon papa ? » dit-elle tranquillement.
Après que j’ai confirmé l’information, elle enchaîna en me prenant par la main :
« Tu me montres ta maison ? »
Chapitre 10 : Retour à Poudlard by OutThereIsTheTruth
Pour une fois, j’étais plutôt soulagé de voir arriver la rentrée. Mon enquête tournait en rond. L’exploitation de tous les documents que m’avait fait parvenir le Ministère par l’intermédiaire d’Harry, ne m’avait pas permis d’entrevoir la moindre solution pour résoudre le problème de Delphini Black. C’est ce que j’expliquai à Harry quand il vint me rendre visite la veille de mon retour à Poudlard.
« Tu n’as vraiment rien trouvé d’intéressant ? » s’étonna-t-il en écoutant mon rapport.
« Rien qui dépasse la transformation humaine ordinaire. » confirmai-je.
« La transformation humaine n’a rien d’ordinaire. » s’émeut-il.
« Je disais ordinaire au sens où ce sont toujours les mêmes recettes de potions qui reviennent d’un document à l’autre. » précisai-je avant d’ajouter en levant tour à tour trois doigts. « Il y a un, la potion de Régénération dont j’ai trouvé plusieurs recettes. Deux, les potions d’adoption de sang, comme celle que Dumbeldore t’a donné juste après ta naissance pour te transformer en fils de James Potter. Trois, des variantes du Polynectar pour une transformation définitive de l’apparence d’une personne. A condition que le sujet y survive, ce qui dans ce cas me parait douteux. Mais, faute de pouvoir faire des tests, j’en suis réduit aux hypothèses. »
Harry avait tiqué quand j’avais parlé de la potion d’adoption de sang, celle qui le concernait très directement, mais c’est sur les variantes du Polynectar qu’il réagit :
« Tu as l’air d’exclure totalement qu’une variante du Polynectar ait pu être envisagée pour transformer Delphini Black en Voldemort. »
« En effet, car ça n'aurait aucun sens. » confirmai-je. « Même en supposant que quelque chose ait été conservé du corps de Voldemort, ce qui est nécessaire pour finaliser les variantes du Polynectar comme le Polynectar lui-même, cette potion ne permettrait de transformer que l’apparence de la personne qui l’ingérerait. Il ne s’agirait donc que de la transformation de l’aspect extérieur de la personne concernée et pas du retour de Voldemort et de ses pouvoirs. Sans compter que, pour ce type de potion, Delphini Black ne serait pas la candidate idéale, comme tu dois le savoir si tu as autrefois écouté ce que je racontais en cours. »
« N’importe quel homme prendrait plus facilement qu’elle l’apparence de Voldemort. » murmura-t-il d’un ton songeur.
« Exactement. » approuvai-je.
« Et donc, ça ne colle pas. Ça ne colle pas avec le fait de prendre autant de risques pour essayer d’enlever la petite Black. » conclut-il de lui-même.
« Comme tu dis, ça ne colle pas. » confirmai-je.
« Mais quoi, alors ? Allez dis-moi ce que tu as en tête. Je n’arrive pas à croire que tu n’aies pas un début d’idée de la potion qui aurait pu être utilisée pour la métamorphoser en Voldemort. » insista-t-il.
Je secouai la tête :
« J’ai beaucoup de débuts d’idée. Mais toutes les potions que j’ai en tête n’aboutiraient qu’au décès immédiat de Delphini Black si on la lui administrait, bien avant que la métamorphose puisse intervenir … »
…..
Avec les préoccupations liées à cette enquête qui n’avançait pas, une fois de retour à Poudlard, je peinais à me montrer aussi cordial que d’habitude avec mes crétins de collègues. Et je ne parle pas des trésors de patience dont je devais faire preuve pour garder un semblant de calme face à la stupidité des élèves qui encombraient le cachot où je dispensais mes cours en pure perte. J'avais d'autant plus de mérite à conserver une apparente sérénité que les uns et les autres faisaient tout pour m'exaspérer.
« Non, Miss Volcano deux tours dans un sens et deux tours dans l'autre et dix minutes après encore deux tours dans chaque sens, ce n'est pas la même chose que quatre tours dans un sens et dix minutes après quatre tours dans l'autre. Quand Mme Pomefresh aura terminé de vous raccommoder vous profiterez de vos deux heures de retenue avec M. Rusard pour réfléchir à la question. »
« Mais si, Monsieur Londubat, l'ordre des ingrédients change quelque chose. Vous en avez d’ailleurs la preuve sous les yeux. J’enlève 5 points à Gryffondor. Et vous resterez ici après le cours pour récurer ce chaudron jusqu’à ce qu’il brille. Sans baguette évidemment. Qu’est-ce que vous baragouinez ? C’est tout collé au fond. Eh bien ça vous laissera le temps de bien intégrer les règles concernant l’ordre des ingrédients en dépit de votre cervelle de Veracrasse. »
« Non, cher collègue, je vous assure que je n’ai pas mal aux dents, ni aux oreilles. En tout cas pas avant que vous veniez me les cassez. J’aimerais juste pouvoir dîner en paix, si ce n’est trop vous demander. »
A la fin de la semaine, je n’avais encore transformé aucun de mes collègues en salière, ni mis aucun de mes élèves aux fers dans les cachots. J’étais presque surpris moi-même de la retenue dont j’avais réussi à faire preuve, et c’est le moment que choisis le loup-garou pour venir me déranger dans mon bureau.
« Albus est venu me voir pour que je lui explique comment renforcer l'efficacité de son Bouclier afin qu’il soit capable de protéger ses camarades en plus de lui et que je lui-même enseigne d'autres sorts de protection. J'ai accepté, mais je tenais à t'en informer, car tu aurais pu faire ça aussi bien que moi. Du coup, je ne sais pas bien pourquoi il s'adresse à moi. » lança-t-il sans préambule.
« Parce que je n'ai pas accepté de répondre immédiatement à ses questions, car j'aimerais bien qu'il utilise son talent magique pour autre chose que pour apprendre à se battre. » répondis-je d'un ton bref.
« Tu sais très bien que je n'aurais pas accepté, s'il s'agissait de lui apprendre à se battre, mais là il veut tout simplement apprendre à protéger et à se protéger. C’est tout ce qui l’intéresse et c’est une demande tout à fait raisonnable. » répliqua-t-il avec un sourire béat.
« Tu n'es quand même pas idiot à ce point-là ! » m’écriai-je, avant de conclure à voir sa tête. « Manifestement, si. Décidément, tu es bien comme tous ceux de ton espèce ! »
« Attends un peu la prochaine pleine lune et je te montrerai que l’idiotie n’est pas la principale caractéristique de ceux de mon espèce comme tu dis ! » rétorqua-t-il vexé.
« Je te remercie, j’ai déjà vu la représentation et je ne tiens pas spécialement à recommencer. » grinçai-je. « En l’occurrence, en disant « ceux de ton espèce », je ne parlais pas des loups-garous mais des gryffondors et de leur indécrottable naïveté ! »
« Mais de quoi parles-tu ? » s’étonna-t-il.
« Du fait que tu le crois quand il te dit qu’il ne cherche vraiment qu’à apprendre à se défendre. Alors qu’en fait il se contente de cloisonner ses demandes en utilisant chacun pour ce qu’il peut lui apprendre d’utile. » rétorquai-je.
Je vis passer un début de compréhension dans son regard, mais le doute lui succéda très vite :
« Mais je ne vois pas qui pourrait lui apprendre à se battre à part toi. »
« Ce qui prouve ton manque d’imagination ! » répliquai-je du tac au tac. « Je te rappelle que toute la bande a passé une grande partie de l’été à traîner au Manoir Malefoy, puisque Narcissa ne voulait plus laisser sa nièce aller où que ce soit, de peur qu’elle ne soit enlevée. Des heures et des jours pendant lesquels Albus a traîné à proximité de Lucius Malefoy, le grand spécialiste des coups fourrés en duel. J’imagine qu’Albus n’a pas perdu l’occasion d’aller lui demander des conseils et que Lucius n’a été que trop content de lui en donner dans mon dos. Sans compter le portrait de Salazar Serpentard au fin fond des cachots qui n’a rien de mieux à faire que de lui enseigner tout ce qu’il veut, y compris dans une magie dont ni toi ni moi n’avons pas la moindre idée, car nous ne sommes pas Fourchelang contrairement à lui ! »
Il avait enfin compris. Il me fixa un bon moment d’un air songeur avant de m’interroger :
« Pourquoi es-tu aussi inquiet de ce que fait Albus ? Pour autant que je m’en souvienne, tu n’as pas été le dernier à te former toi-même au duel à l’époque où nous étions élèves à Poudlard. »
« Je ne m’inquiète pas de ce qu’il fait, mais de la raison pour laquelle il le fait. » expliquai-je.
« Précise. » insista-t-il.
« Il le fait parce qu’il a peur. Peur pour la vie Delphini Black. Je suis persuadé qu’il est prêt à tout, absolument tout, pour la sauver. » murmurai-je.
« Absolument tout ? Tout quoi ? » reprit-il sur le même ton.
« De quoi aurais-tu été capable pour sauver Nymphadora ? Ou pour la faire revenir ? » interrogeai-je à mon tour.
« La faire revenir ! » releva-t-il d’un ton effaré. « Mais tu sais que tu parles là d’une magie totalement interdite ! »
« Réponds honnêtement à ma question. » réclamai-je.
Il resta un bon moment silencieux en me regardant d’un air circonspect comme s’il se demandait s’il allait me faire confiance.
« De n’importe quoi qui ne risque pas de mettre Teddy en danger. » répondit-il finalement à voix basse.
« Je te remercie de ta franchise ! Et j’admets sans peine que j’aurais pu te faire exactement la même réponse. S’il n’y avait pas eu Harry à protéger, j’aurais tout tenté pour retrouver Lily, quitte à faire des choses totalement illégales. » réagis-je avant d’ajouter. « Eh bien, Albus n’a pas les mêmes contraintes que nous pour limiter ce qu’il est capable de faire. Sans compter qu’un jour, très bientôt, il sera un sorcier bien plus puissant que toi ou moi. Ce jour-là, mieux vaudrait qu’il n’ait pas la tentation d’essayer quelque chose de désespéré pour ramener Delphini Black parmi les vivants. »
« Si tu as raison, alors tu es condamné à réussir. A trouver maintenant une solution qui permette de protéger la petite Black. » répondit-il gravement.
« Parce que tu crois que je t’ai attendu pour le savoir ! » rageai-je d’un ton furieux, en laissant éclater ma mauvaise humeur pour masquer mon inquiétude.
Chapitre 11 : Je patine, ils s’excitent by OutThereIsTheTruth
Les semaines suivantes, je continuai de piétiner dans mon enquête à propos de la métamorphose de Delphini Black et des moyens de l'empêcher. J'en conçus un tel agacement que je finis par prendre la plupart de mes repas dans mes quartiers ou dans mon bureau, de peur que des menaces qu'il m'arrivait de proférer à l'encontre de mes collègues, quand ils étaient particulièrement pénibles, je ne finisse par passer aux actes.
Un matin où j'avais néanmoins décidé de venir prendre le petit déjeuner dans la Grande Salle suite aux demandes insistantes de McGonagall qui considérait que c'était là ma place en tant que directeur de Maison, j'aperçus une scène qui me laissa pour le moins perplexe. Rose Granger-Weasley avait à peine ouvert l'exemplaire de la Gazette du Sorcier qu'un hibou venait de déposer devant elle qu'elle poussa une exclamation sonore.
Abandonnant son porridge, elle se précipita vers Teddy Lupin assis quelques places plus loin pour lui montrer quelque chose sur le journal. Le fils du loup-garou sembla partager son excitation, car ils se précipitèrent tous les deux vers l'endroit où était assise Victoire Weasley à la table des serdaigles.
En même temps, la fille de Madame la Ministre cherchait à attirer l'attention de ses complices de Serpentard, ce qui ne fut guère compliqué, car Scorpius Malefoy la quittait rarement des yeux. Du geste, elle l'invita à la rejoindre auprès de Miss Weasley avec Albus et Delphini Black.
Cinq minutes plus tard, ils discutaient tous les six penchés vers un article de la Gazette qui manifestement leur inspiraient les nombreux commentaires qu'ils échangeaient à voix basse, indifférents aux regards suspicieux des serdaigles peu ravis de se voir envahis par des élèves d’autres Maisons, surtout par des serpentards. Il n'en fallut pas plus pour piquer ma curiosité et que j'attrape sur la table un exemplaire du même journal pour essayer de repérer ce qui les intéressait autant, sans me préoccuper du fait que cet exemplaire était celui de Zephyrus Eole, le professeur de Métamorphose, ni que celui-ci était en train de le lire. De toutes façons, j’étais certain que mon collègue n’oserait pas se permettre d’émettre le moindre couinement de protestation. Il avait bien trop peur de moi !
Grâce à la photo illustrant un autre article de la même page, je repérais sans trop de mal malgré la distance la nouvelle qui les mettait dans un tel état d'excitation. C'était un petit encart qui indiquait qu'une inscription étrange avait été découverte dans une ancienne librairie située à Pré-au-Lard. C'était à la suite de fouilles réalisées par le Ministère dans cette boutique abandonnée depuis des décennies que cette inscription aurait été découverte.
Même l'inventivité du journaliste de la Gazette comme toujours prompt à faire mousser le moindre incident ne lui avait pas permis d'écrire plus de quelques lignes. Et pourtant, toute la bande restait là penchée sur les quelques lignes en question, tellement concentrés qu'ils en oubliaient de manger tout comme je l'oubliais moi-même à les observer.
…..
Mes préoccupations du moment chassèrent rapidement le souvenir de cet épisode de mon esprit. Je l’avais totalement oublié, lorsqu’un dimanche Delphini Black vint me demander l'autorisation de passer par la cheminée de mon bureau pour « aller rendre visite au professeur Hagrid », puisqu'on ne lui permettait pas de faire le moindre pas dehors, « pendant que mes amis iront à Pré-au-Lard ». J’appris ainsi que tout le reste de la bande s’apprêtait à profiter sans elle du premier dimanche de sortie à Pré-au-Lard.
Comme elle ne semblait nullement émue d'être ainsi abandonnée, j'en conclus que la raison de cette sortie des autres en groupe ne lui était pas inconnue. Avec un peu de chance, elle attendait simplement qu'ils lui ramènent des chocogrenouilles et autres saletés de chez Honeyduckes, mais j'avais du mal à en être convaincu. Bien décidé à en avoir le cœur net, je m’empressai d'accompagner Delphini Black chez Hagrid pour renforcer les protections magiques de sa cabane et lui rappeler qu'il ne devait en aucun cas la laisser sortir. Même pas deux minutes pour aller saluer l'hipogriffe ou jeter un coup d'œil aux nouveaux strangulots dans leur aquarium.
Croisant Lupin dans le hall, j'en profitai pour lui confier la tâche que je ne pouvais pas accomplir moi-même.
« Delphini Black est chez Hagrid. » indiquai-je d'un ton bref. « Tu surveilles qu'il ne la laisse pas sortir. Moi, j'ai à faire. »
« Tu n'as jamais songé devenir un animagus ». me demanda-t-il bêtement.
Comme si la question avait quoi que ce soit à voir avec ce que je venais de lui dire !
« De quoi tu me parles ? » grognai-je. « Tu manques de compagnie les soirs de pleine lune ? »
« Non, c'est juste que j'hésite à savoir si tu te transformerais en ours ou en sanglier. »
Automatiquement, je sortis ma baguette pour la lui brandir sous le nez, car je n'étais pas vraiment d'humeur à goûter ses niaiseries.
« Ça va, je plaisante. » ironisa-t-il mais non sans reculer d'un pas face au regard furieux que je lui lançais. « Je soulignais juste que tu réussis ces temps-ci à être encore plus insupportable que d'habitude. A ce niveau-là, c'est une performance ! »
Je m'éloignais en haussant les épaules. Je n'allais quand même pas perdre mon temps à répondre à ses bêtises. De toutes façons, j'avais mieux à faire, car je venais de voir le petit groupe dont la destination m'interrogeait sortir par la grande porte.
Je commençais à les suivre à bonne distance. Dans le flot des élèves qui se dirigeaient vers le centre de Pré-au-Lard, il y avait peu de chance qu'ils me repèrent. Ma filature se compliqua quand ils quittèrent la rue principale pour enfiler une ruelle étroite. Je ne dus qu'à un instinct hérité de mes années d'espionnage de ne pas me faire surprendre au bout de quelques mètres. Je me dissimulai juste à temps derrière un pan de mur quand Rose Granger-Weasley se retourna pour vérifier que personne ne les suivait.
Bien que j'aie toujours trouvé ça très inconfortable, je me décidai à me désillusionner. Ce sort ne donnait pas un résultat parfait, rien à voir avec une véritable cape d'invisibilité comme celle d'Harry, mais il devrait brouiller suffisamment ma silhouette pour qu'ils ne fassent pas attention à moi. De fait, je les suivis sans encombre. Teddy Lupin qui habitait Pré-au-Lard avec son père et sa grand-mère, les conduisait sans hésitation dans le dédale de ruelles, mais je ne comprenais pas où ils se rendaient avec ces allures de conspirateurs.
Ce n'est qu'en débouchant sur une petite place déserte à la limite du village que je pris conscience de leur objectif. Ils se rendaient à la librairie abandonnée, dont il était question dans l'entrefilet de la Gazette du sorcier qui les avait tant passionnés.
Le Ministère avait placardé partout autour des interdictions d'entrée. Rose Granger-Weasley s'approcha néanmoins d'un pas décidé jusqu'au seuil, avant de sortir de sa poche un objet que, malgré la distance, j'identifiais comme un Scrutoscope. Elle cherchait clairement à identifier un éventuel danger au cas où un sort quelconque aurait protéger les lieux. Le Scrutoscope n'ayant manifestement rien indiqué d'inquiétant, elle franchit délibérément le seuil sans un regard pour les panneaux d'interdiction du Ministère.
Son absolu sans-gêne arrivait encore à me surprendre. En revanche, j'avais déjà parfaitement pris conscience de l’ampleur de son influence sur les autres, c'est donc sans étonnement que je les vis lui emboîter le pas sans hésitation. J'étais sur le point d'intervenir pour les sortir de là à grands cris, quand mes sens en alerte m'avertirent d'un autre danger, nous n'étions pas seuls dans cet endroit apparemment désert.
Je tournai lentement sur moi-même. Du coin de l'œil, j'aperçus une vague forme. Je n'étais pas le seul à être désillusionné. Quelqu'un d’autre les surveillait ou surveillait la librairie abandonnée. Je me dirigeai vers l’endroit où se tenait le sorcier ou la sorcière désillusionné. J'entendis un pop de transplanage. Transplaner désillusionné, il ou elle avait dû drôlement morfler, ce qui en disait long sur sa motivation à ne pas être surpris en train d'espionner cet endroit. En tout cas, ce n'était pas n'importe quel sorcier, tout le monde n'était pas capable de se désillusionner convenablement, cela supposait à la fois des capacités et de la pratique. Un membre du Ministère peut-être. Mais dans ce cas, pourquoi se contenter d’espionner au lieu d’être intervenu pour les empêcher d’entrer ?
Pendant que je gambergeais ainsi, je vis la petite bande se faufiler discrètement à l’extérieur et retourner vers la rue principale. Je renonçai à les intercepter. Après tout, je ne doutais guère du motif de leur visite, voir de leurs propres yeux la fameuse inscription, dont avait parlé le petit article de la Gazette du sorcier. Si la raison de leur curiosité pour ces signes m’échappait pour le moment, il ne me paraissait pas suffisamment urgent de le savoir pour renoncer à quelques heures de tranquillité. Les ayant vus rentrer au Trois Balais, probablement pour avaler une Biereaubeurre, je me dirigeais moi-même vers la Tête de Sanglier. Pour cette fois, un verre de Whisky Pur Feu dans un endroit tranquille me tentait bien davantage qu’une tasse de thé dans un endroit probablement bondé d’élèves et, pire encore, de collègues.
Chapitre 12 : Mais qui m’a f… un abruti pareil ! by OutThereIsTheTruth
Quelques jours plus tard, je me tournais et me retournais dans mon lit incapable de trouver le sommeil. Je n'avais pas encore eu le temps de convoquer Albus pour l’interroger à propos de leur petite virée dans la librairie abandonnée et au demeurant interdite d’accès, mais ce n'est sûrement pas cet incident qui m'empêchait de m'endormir. Encore et toujours, je coinçais sur cette potion destinée à transformer Delphini Black en Voldemort et cela m'obsédait au point que j'étais devenu incapable de me reposer la nuit.
Cette insomnie me dispensa d’un réveil en sursaut quand le Baron Sanglant entra dans ma chambre en passant à travers la porte sans s’être fait annoncer et se mit à hurler :
« Une attaque ! Vite, Professeur Rogue ! Une attaque dans notre Maison ! »
Je sautai sur mes pieds aussi vite que si quelqu’un avait lancé un Bombarda dans ma chambre et je partis en courant vers la salle commune des serpentards, en pyjama, ma baguette à la main, sans prendre le temps de passer une robe de sorcier, ni de me chausser. J’entendis des cris avant de voir, par la porte entre-ouverte, les lueurs inquiétantes des sorts qui s’échangeaient à l’intérieur. Je cherchais une solution pour rentrer là-dedans sans me faire inutilement tuer, car à l’instant où j’allais m’encadrer dans la porte j’allais constituer une cible immanquable.
« Vas-y, je te couvre. » souffla dans mon dos la voix du loup-garou que je n’avais pas entendu arriver.
Je n’hésitai pas, je fonçai. Le Bouclier de Lupin détourna de moi les sorts des assaillants, le temps pour moi de m’abriter derrière un canapé renversé. Grâce à mon propre Bouclier, le loup-garou eut vite fait de me rejoindre. Il se mit à distribuer des sorts à tout va, j’en profitai pour apprécier la situation. Ils étaient quatre. Trois sorciers et une sorcière. Parmi eux aucun visage connu. L’un des trois sorciers, visiblement blessé au bras, s’adossait au mur, il était déjà hors de combat. En revanche, les deux autres nous balançaient une pluie de sorts. Pas de qualité particulière, mais des combattants très entrainés. La sorcière qui nous tournait le dos, se battait dans l’escalier avec Albus. L’étroitesse de l’escalier n’avait heureusement pas permis aux autres assaillants de lui venir en aide au risque de la toucher elle en attaquant Albus. Quelques têtes effrayées apparaissaient ça et là au seuil des dortoirs. Les petits crétins inconscients, c’était un coup à ramasser un sort perdu ! Je me lançai un Sonorus pour leur ordonner :
« Rentrez dans vos dortoirs et enfermez-vous. Immédiatement ! »
Toutes les têtes disparurent instantanément. Parmi les élèves, il ne restait plus qu’Albus sur le champ de bataille. J’observais le dos de la sorcière qu’il affrontait en me demandant comment lui venir en aide, quand, ayant échappé de peu à un Doloris, Lupin tourna vers moi une mine fumasse.
« Surtout prends ton temps ! C’est pas comme si j’avais besoin d’aide ! » grogna-t-il.
J’ensorcelai alors deux des fauteuils renversés au sol qui se précipitèrent sur les assaillants comme des mouches sur une tarte au sucre. Comme espéré cela détourna de nous l’attention de nos adversaires obligés de se concentrer sur les fauteuils volants pour éviter de se faire assommer.
J’allais me précipiter pour aider Albus, quand il désarma son adversaire. Il récupéra la baguette tombée au sol en la faisant venir à lui d’un Accio. Puis, je le vis pointer sa propre baguette sur la sorcière qui était tombée assise sur les marches de l’escalier. Cette dernière plaqua sa main sur sa bouche avant de s’écrouler dans un spasme. J’avais vu mourir assez de gens dans ma vie pour comprendre qu’elle venait de succomber. Un frisson d’angoisse me traversa. « Albus ne l’a quand même pas tuée après l’avoir désarmée ! » espérai-je.
Au même instant, la confusion la plus totale se mit à régner dans notre salle commune. McGonagall prévenue sans doute elle aussi par les fantômes arrivait avec les secours, à savoir une douzaine d’Aurors, Harry en tête. Ils eurent tôt fait de s’emparer des trois assaillants, pendant que je me précipitais vers Albus, Harry et Lupin sur les talons. Mon petit-fils quitta son adversaire du regard pour lever les yeux vers nous.
« Qu’est-ce qu’elle a fait ? » demanda-t-il d’une voix blanche.
Il ne l’avait donc pas tuée, j’en ressentis un immense soulagement, vite tempéré par l’idée qu’il l’avait vu mourir sous ses yeux. J’écartai la main que la sorcière avait plaquée sur sa bouche, les débris d’un flacon de verre et une odeur caractéristique.
« Elle a avalé un poison très puissant, elle devait le garder dans un petit flacon. Elle l’a … utilisé après que tu l’ais désarmée. » murmurai-je en réponse.
« Mais pourquoi a-t-elle fait ça ? » s’écria Lupin.
« Elle ne voulait surtout pas se faire prendre. » expliqua Albus. « Elle n’arrêtait pas de penser à ça. J’aurais dû comprendre ce qu’elle allait faire, mais je n’y ai pas pensé. »
J’étais plus que soulagé qu’il ne l’ait pas tuée, mais il n’était pas question qu’il se reproche sa mort.
« Tu ne pouvais pas le prévoir et … » assurai-je avant d’être interrompu par l’arrivée de mes collègues Flitwick et Eole et surtout par les hauts cris que se mit à pousser ce dernier.
« Mais vous faites erreur ! Ce sont des amis à moi. » s’écria-t-il bêtement en essayant de retenir les collègues d’Harry qui emmenaient nos trois agresseurs.
« Des amis à vous ! » braillai-je « Mais qu’est-ce que c’est que cette histoire ? »
« Oui, des amis que j’ai rencontrés l’été dernier. J’étais en vacances en Italie, nous … » commença-t-il.
« Je me fiche de vos souvenirs de vacances ! » criai-je. « Vous avez dix secondes pour m’expliquer comment vos chers amis ont pu se retrouver dans ma salle commune en plein milieu de la nuit ! »
« Mais, je ne sais pas du tout. C’est vrai que la semaine dernière ils ont insisté pour venir prendre le thé à l’école dans mon bureau en passant par le réseau des cheminées, et … » dit-il vaguement gêné.
« Et vous, vous avez accepté de les faire rentrer dans l’école alors que vous saviez parfaitement que qu’il y a chez les serpentards une élève nécessitant une protection particulière. Ensuite, vous avez oublié de rebloquer l’accès à votre cheminée, et puisque les protections magiques ordinaires ne s’appliquent pas aux sorciers que vous avez-vous-même autorisé à entrer, cela leur a permis de revenir tranquillement cette nuit pour s’en prendre aux élèves de ma Maison. Mais quelle espèce d’abruti, êtes-vous ? » beuglai-je sans me préoccuper de savoir si quelqu’un avait pris la peine de lancer un Assurdio pour empêcher mes serpentards d’entendre les cris que je poussais.
« Mais je ne vous permets pas … » tenta-t-il.
« Vous ne me permettez pas, vous ne me permettez pas !!!! » hurlai-je « Vous allez voir ce que je vais me permettre moi ! »
En même temps, j’avais brandi ma baguette sans même y réfléchir. Avec les réflexes affûtés par son métier d’Auror, Harry me subtilisa celle-ci. Cependant, j’étais tellement en rage que je me ruai sur Eole, prêt à l’étriper à mains nus. Mais Lupin me ceintura, histoire de laisser à ce demeuré de Zephyrus Eole le temps de s’enfuir.
Sur le seuil de la porte, il bouscula Madame Pomefresh venue s’enquérir de notre état. Celle-ci se mit à pousser des hauts cris en apercevant Albus, dont le visage présentait plusieurs contusions et le bras gauche portait une large brûlure. Notre infirmière nous regarda avec sévérité en grommelant des mots parmi lesquels j’entendis « totalement inconscients ». Elle nous reprochait manifestement de ne pas lui avoir amené Albus plus tôt, mais je dois dire que son état physique n’était pas ma principale préoccupation. J’étais bien plus inquiet de ce qu’il n’avait pas bougé d’un pouce, qu’il regardait toujours fixement l’endroit où la sorcière qu’il avait combattue, s’était écroulée, alors même que les Aurors avaient emmené le corps depuis de longues minutes. Je me demandais, s’il avait seulement entendu mon altercation avec Eole.
« Vous allez venir avec moi Monsieur Potter. Je dois vous conduire tout de suite à l’infirmerie pour vous soigner. » dit Madame Pomefresh d’une voix apaisante en lui posant une main sur l’épaule.
Albus sembla sortir de sa torpeur.
« Non, pas tout de suite. » répondit celui-ci en échappant à Madame Pomefresh pour remonter l’escalier en courant.
Une porte s’ouvrit un peu plus haut. Des exclamations se firent entendre. D’autres portes s’ouvrirent.
« Je vais vérifier que personne d’autre n’est blessé et je vous ramène Albus. » assurai-je en m’engageant à mon tour dans l’escalier.
Comme attendu, je trouvai Albus dans le dortoir des filles de cinquième année. Il n’était pas tout seul. La plupart des élèves de quatrième année et plus s’y trouvaient aussi. Et nos préfète et préfet avaient bien du mal à empêcher les plus jeunes des élèves de sortir de leur dortoir pour se joindre à eux. Tout le monde parlait en même temps dans un brouhaha invraisemblable, mais mon entrée suffit à ce que le silence s’installe instantanément. Vérification faite, l’agresseur n’était rentré que dans le dortoir des filles de cinquième année. Le dortoir de Delphini Black, évidemment.
Sur mon ordre, tous les autres regagnèrent leurs dortoirs respectifs, pendant qu’Albus allait m’attendre dans le couloir. Les filles de cinquième année étaient aussi blanches que les draps de leurs lits. Pour elles, tout s’était passé très vite. Quand les cris de l’agresseur les avaient réveillées, il luttait avec quelque chose ou quelqu’un qu’elles n’avaient pas vu dans le noir. Les filles s’étaient mises à hurler et l’agresseur s’était enfui. Ensuite, elles avaient entendu des bruits de bagarre. Elles étaient choquées mais indemnes. Je les encourageais donc à se recoucher, en leur garantissant que la Maison était désormais en sécurité, avant de rejoindre Albus dans le couloir. Je redescendis avec lui dans la salle commune.
« Maintenant Albus Potter, vous me suivez immédiatement à l’infirmerie pour que je vous soigne. » ordonna Madame Pomefresh.
« Mais, j’ai des choses importantes à leur raconter. » se défendit-il en nous désignant d’un geste vague son père et moi.
« Eh bien, ce sont eux qui devront vous suivre. » répliqua notre infirmière d’un ton ferme.
Je jetai un regard circulaire à la salle commune dévastée par le combat.
« C’est que je dois rester pour protéger les élèves de ma Maison au cas où tout danger ne serait pas écarté. » m’inquiétai-je en considérant la porte qui pendouillait sur ses gonds.
« Vas-y, je reste. » m’enjoignit le loup-garou d’un ton bref.
Tout exaspérant qu’il soit, Lupin était digne de confiance. Je laissai donc ma Maison sous sa surveillance. McGonagall qui ne semblait pas moins pressée que moi d’interroger Albus sur ce qui s’était passé, nous emboîta le pas.
Chapitre 13 : Quel abruti ! (et cette fois-ci, je parle de moi) by OutThereIsTheTruth
McGonagall qui ne semblait pas moins pressée que moi d’interroger Albus sur ce qui s’était passé, nous emboîta le pas.
Notre Directrice commença à questionner Albus, alors que Madame Pomefresh était encore en train d’appliquer un onguent sur la brûlure de son bras.
« Ces gens, ils étaient venus s’en prendre à Delphini. » expliqua-t-il d’une voix un peu éraillée. « Si je ne me trompe pas, il y a deux sorciers qui étaient restés faire le guet dans la salle commune. La sorcière, celle qui est … enfin morte, elle était restée dans le couloir, pendant que le troisième sorcier est rentré dans le dortoir des filles de cinquième année pour l’enlever. »
« Mais comment Miss Black a-t-elle pu échapper à cet enlèvement ? » s’étonna notre Directrice.
« Eh bien, j'avais conjuré pour Delphini un serpent de glace pour qu'elle le garde avec elle la nuit dans son baldaquin. » expliqua Albus. « Quand l'agresseur s'est présenté, le serpent de glace a dû le mordre. J'imagine que c'est pour ça qu'il saignait. Il s'est mis à hurler, les filles aussi. Ça a réveillé tout le monde. Le type s'est enfui, je l’ai vu redescendre vers la salle commune, mais la sorcière était toujours dans le couloir et elle m'a attaqué quand je suis venu à la rescousse. J’ai réussi à la repousser jusqu’à l’escalier … et c’est là que la bataille entre elle et moi s’est finie. »
McGonagall était sous le choc :
« Un serpent de glace ! Un produit de votre magie en Fourchelang. Vous croyez que c'est bien prudent ? »
Albus se méprit sur le sens de la remarque.
« Non, j'aurais dû lui en fabriquer au moins deux. » regretta-t-il. « Mais je n'ai pas imaginé que plus d'une personne puisse venir s'en prendre à elle. C'est stupide de ma part. »
Je vis McGonagall hésiter puis renoncer à lui dire le fond de sa pensée.
« Je vous promets Monsieur Potter que je pourrais imaginer beaucoup de termes pour qualifier votre initiative, mais « stupide » n'en fait pas partie. » assura-t-elle en soupirant. « Quoi qu’il en soit, je serais malvenue de vous reprocher une intervention qui a probablement permis de sauver la vie de Miss Black et, si j’en crois ce qu’on a raconté, beaucoup d’autres. »
Je me permis d’interrompre cette discussion, peut-être intéressante, mais sûrement pas urgente sur l’utilité des serpents de glace la nuit dans les dortoirs.
« Tu voulais nous raconter quelque chose, Albus. » rappelai-je.
« Oui, c’est à propos de la sorcière avec laquelle je me suis battue. » murmura-t-il.
Sa voix s’éteignit un instant. Il l’avait vu mourir sous ses yeux. Une fois de plus, je me sentais impuissant à le protéger de la violence.
« Elle n’arrêtait pas de penser qu’elle ne devait pas se faire prendre à cause des secrets qu’elle ne devait pas risquer de trahir. Elle était tellement obsédée par cette idée, elle y pensait tellement fort, que je l’ai perçue sans le vouloir. » reprit-il. « Alors, quand j’ai réussi à la désarmer … »
« Tu as lancé un Legilimens pour essayer de savoir quels secrets elle voulait cacher ! » l’interrompis-je, je venais enfin de comprendre pourquoi il avait pointé sa baguette sur elle.
« C’est ça. A force d’y penser et de peur de les trahir, les secrets étaient juste à la surface de son esprit. Alors, j’ai commencé à regarder. Et du coup, je n’ai pas compris ce qu’elle allait faire. J’aurais plutôt dû lancer un Locomotor Mortis pour essayer de l’empêcher d’avaler ce poison … » dit-il avant de s’interrompre à nouveau.
Il continuait à se reprocher sa mort, et je devrai à nouveau revenir sur cette question pour lui faire comprendre qu’il n’y était pour rien, mais j’avais un enjeu beaucoup plus immédiat :
« Qu’est-ce que tu as vu ? » demandai-je en contrôlant ma voix pour ne pas trahir mon excitation.
Il pointa sa baguette vers sa tempe et fit naître un filament argenté qui s’étira une bonne minute durant. McGonagall et Harry tournèrent vers lui puis vers moi des regards surpris, mais de mon côté je n’avais d’yeux que pour le souvenir qui se formait. Je conjurai un flacon pour le recueillir. Cela fait Albus retomba sur les oreillers et Madame Pomefresh nous fixa notre Directrice, Harry et moi d’un air sévère.
« Maintenant, il faut laisser mon patient se reposer. » gronda-t-elle en nous désignant la porte d’un geste impératif.
………
« Voulez-vous visualiser le souvenir d'Albus maintenant, Severus. » me proposa McGonagall après que la porte de l'infirmerie se soit refermée derrière nous.
« Oui, si ça ne vous dérange pas malgré l'heure tardive, Minerva. » acceptai-je.
« Tellement tardive, qu'il est plutôt tôt le matin que tard le soir. » soupira notre Directrice. « De toutes façons, nous aurons quelques heures supplémentaires pour nous reposer, car je vais suspendre le cours pour la journée. Le temps que vous vous occupiez des élèves de votre Maison, et que les autres directeurs s’occupent de la leur, car je ne doute que l’information se répande comme une traînée de poudre et que toute l’école ne soit en émoi dès le petit matin. »
Nous continuions à nous diriger vers le bureau directorial quand elle ajouta :
« Sans compter que je ne suis pas sûre d'avoir encore quelqu'un pour enseigner les cours de Métamorphose. »
« Ne me dites pas que vous regretteriez cet imbécile d'Eole au cas où il prendrait de lui-même la décision de nous quitter. » protestai-je.
« Bien sûr que si ! s'écria-t-elle. Quoi que vous pensiez de lui, il enseigne fort bien la Métamorphose. Il est pédagogue, les élèves l’apprécient … »
« Il est surtout stupide au point d’en être dangereux ! » m’écriai-je.
L’arrivée devant le sphinx de pierre qui défendait l’accès au bureau directorial depuis que c’était McGonagall qui l’occupait, mit un terme à notre discussion. Constatant qu’elle avait laissé la Pensine dans ses appartements. McGonagall nous pria Harry et moi de l’attendre dans son bureau, pendant qu’elle remontait chez elle par un escalier dérobé.
Tout en regardant avec une nostalgie évidente les fragiles objets de Dumbeldore que McGonagall avait conservés sur son bureau, Harry m’interpela à voix basse :
« Ainsi, Albus l’a désarmée lui-même. Une sorcière adulte. Je croyais que c’était toi ou Remus. »
« Je te garantis que Lupin et moi avions assez à faire avec les deux autres. Ils étaient surentraînés ces types. » répondis-je sur le même ton avant de remarquer. « Ce qui m’étonne, c’est que ça t’étonne. Que ça t’étonne encore. »
« Je ne devrais plus m’étonner que mon fils de quatorze ans, soit capable de vaincre en duel une sorcière adulte, de faire de la Legilimencie et d’extraire ses propres souvenirs. Eh bien, pardon de te dire que si. » s’écria-t-il avant d’ajouter en soupirant. « Désolé de le dire abruptement, mais, de toi à moi, je me serais bien contenté qu’Albus soit qu’un sorcier « normal ». »
« Au risque de te surprendre, moi aussi. » répliquai-je.
J’étais parfaitement honnête en disant cela. Bien sûr, une partie de moi était flattée par les pouvoirs hors normes qui s’affirmaient de plus en plus chez Albus. Mais, pour avoir côtoyé Dumbeldore et Voldemort, je savais aussi quelles difficultés de tels pouvoirs pouvaient engendrer pour les sorciers qui les possédaient, et pour tous les autres …
McGonagall redescendit en conduisant devant elle le bassin en pierre de la Pensine d’une baguette précautionneuse. Dès qu’elle l’eut déposée sur une petite table, j’y versais le contenu du flacon contenant le souvenir d’Albus et j’y plongeai le visage sans hésiter. Comme toujours, je me sentis happé par la Pensine.
J’atterris dans une pièce anonyme avec une fenêtre à barreaux par laquelle on apercevait le soleil couchant. L’unique porte s’ouvrit sur la sorcière à laquelle Albus avait arraché cette pensée. Je réalisai qu’il ne s’agissait pas d’un souvenir, mais d’un scénario qu’elle avait dû répéter tant de fois qu’il s’était ancré en elle comme un véritable souvenir. Je la vis se diriger vers une table sur laquelle s’alignaient douze flacons numérotés. Elle s’empara du flacon numéro 1 et se dirigea vers un coin sombre de la pièce où un corps probablement retenu par des liens magiques reposait sur une couchette étroite. Même si, l’image ne lui ressemblait pas vraiment, les cheveux bleus ne laissaient pas de doute sur le fait qu’il s’agissait de Delphini Black. La sorcière se dirigea vers elle, l’obligea à avaler le contenu de la fiole et ressortit. Le souvenir s’accéléra. Un instant après, c’était déjà le matin, le lever du soleil et elle revenait pour l’obliger à boire la deuxième fiole. J’avais compris, mais j’attendis jusqu’à la fiole numéro 6 pour vérifier le rythme soir et matin de l’absorption avant de ressortir de la Pensine.
Comment est-ce que je n’avais pas pu y penser moi-même ? Voilà pourquoi je butais depuis si longtemps. Je cherchais depuis des semaines à imaginer une unique potion capable de transformer Delphini Black en Voldemort, mais la puissance de toutes les potions que j’envisageais la tuait bien avant qu’une quelconque transformation ait eu lieu, et c’est pour ça qu’il n’y en avait non pas une potion mais plusieurs …
Je me retournai vers Harry qui, ainsi que McGonagall, m’observait en silence :
« Au cas où tu aurais nourri quelques illusions, Harry, je suis navré de devoir te dire que ton père est un crétin. »
Chapitre 14 : Introspection by OutThereIsTheTruth
Au regard de la gravité des faits, l'émoi retomba assez vite dans l'école, en tout cas, pour la majorité des élèves. S'ils étaient conscients que des individus s'étaient introduits frauduleusement la nuit dans l'école, ils ne mesuraient pas l’importance des enjeux liés à cet événement ... et c'était heureux. Le bruit couru que c'était une farce stupide organisée par des connaissances de Zephyrus Eole, car le professeur de Métamorphose n'était jamais réapparu à Poudlard après cet épisode. Même les serpentards finirent pas se convaincre collectivement qu'il ne s'était rien passé de vraiment dramatique, alors qu'ils avaient été aux premières loges pour observer la réalité des faits. Les quelques élèves qui savaient exactement ce qui s'était passé, à savoir Albus et sa bande, n'en parlèrent manifestement qu'entre eux, puisque personne d’autre ne prit conscience que Delphini Black était la cible des intrus.
La vie reprit donc son cours normal, à ceci près que McGonagall assurait à nouveau les cours de Métamorphose et, qu'à voir la tête qu'elle me faisait, il ne me paraissait pas impossible qu'elle m'en veuille d'avoir provoqué la fuite d'Eole. Une autre personne me tenait rigueur de ce qui s'était passé, Narcissa Malefoy qui m'inondait d'hiboux incendiaires. Je dois dire que je prenais à peine le temps de les lire tant j’étais concentré sur ma tâche. Maintenant que j’avais réalisé que non pas une potion, mais une série de douze potions devait permettre de transformer Delphini Black en Voldemort, je commençai à en reconstituer les recettes et à en comprendre précisément les effets.
J'étais tellement obnubilé par mes recherches que je faillis passer à côté d'un problème qui pourtant me préoccupait bien plus que la mauvaise humeur de Minerva McGonagall ou de Narcissa Malefoy. Albus n'allait pas bien et, cette fois-ci, ça n’avait rien d’une posture destinée à obtenir quelque chose. D’ailleurs, il se taisait quand il lui arrivait de passer dans mon bureau sans raison apparente, il s’asseyait dans un coin et finalement repartait sans avoir prononcé plus que quelques syllabes. Ce manège dut se reproduire à quatre ou cinq reprises avant de m’alerter.
Je me rappelai alors l'avoir aperçu quelques jours plus tôt en allant installer, comme tous les soirs depuis l’attaque, des protections magiques pour défendre la Maison de toute intrusion pendant la nuit. J’avais poussé la porte un peu par hasard pour jeter un coup d’œil dans la salle commune et je l’avais trouvé là bien après l’heure du couvre-feu, il m’avait dit un truc du genre « je suis redescendu parce que j’avais soif » pour justifier sa présence. Comment avais-je pu gober une bêtise pareille ? S’il avait réellement eu soif, il aurait été parfaitement capable conjurer un verre d’eau dans son dortoir.
Désireux d’en avoir le cœur net, à l’heure d’aller mettre en place les protections magiques, j’ouvris la salle commune. J’y trouvai Albus seul vautré dans un fauteuil face à la cheminée. L'espace d'un instant, j'en conçus un certain agacement envers les préfet et préfète de la Maison qui ne remplissaient pas leurs obligations en lui permettant de rester là bien après le couvre-feu. Mais au fond, je comprenais la raison pour laquelle ils s'étaient contentés d'ignorer son manquement au règlement. Au-delà de l’apprentissage, l'école étaient aussi l’endroit où tous les sorciers d’une même génération se rencontraient et se testaient. Au fil du temps, une sorte de hiérarchie implicite se mettait en place entre eux. Dans cette hiérarchisation des forces, Albus s'était très vite imposé comme un sorcier que l'on n'embêtait pas. Aujourd'hui, sauf à ce qu'il crée un désordre particulier aucun préfet ne s'aventurerait probablement à essayer de lui imposer quoi que ce soit.
Pour d'autres raisons, je renonçai moi aussi à lui ordonner d'aller au lit. Au contraire, je rentrai dans la salle commune pour aller m'écrouler dans le fauteuil voisin du sien. Me voir m’installer dans une position aussi décontractée me valut de sa part un regard surpris puis un petit sourire complice. Je lançais un discret Assurdio avant d’entamer la discussion. Si j’étais direct, il risquait de se refermer comme une huitre et je n’apprendrais rien. Mais un serpentard digne de ce nom a plus d’un tour dans son sac. En tendant les mains en direction des flammes qui dansaient dans la cheminée, j’affirmai :
« La cheminée de la salle commune est plus importante chez nous que dans n’importe quelle autre Maison. »
J’avais réussi à l’intriguer, il se tourna plus franchement vers moi l’air interrogatif.
« Parce que nous sommes installés dans les cachots avec toute l’humidité que cela implique. » précisai-je. « Du coup, nous vivons réellement autour du feu de cette cheminée depuis la rentrée jusqu’à la fin de l’année scolaire. Avec tous les excès que cela entraîne … »
Il ne me quittait pas du regard. Je commençais à égrener quelques souvenirs :
« Je me souviens, c’était peu après mon entrée à Poudlard, d’un élève de deuxième année qui avait entrepris de nous faire une démonstration de jonglage en se servant de bâtons enflammés qu’il avait pêché dans la cheminée. Il était plutôt pas mauvais dans l’exercice, mais évidemment ce qui devait arriver arriva, il a fini par rattraper l’un des bâtons par le côté enflammé. Du coup, il l’a jeté par terre en hurlant. Le temps que notre préfet qui n’était pas une lumière, arrive à lancer un Aguamenti correct pour arroser les tapis et les fauteuils pour arrêter le feu, la moitié de la salle commune avait cramé. Tu aurais vu la tête d’Horace Slughorn, le directeur de la Maison Serpentard à cette époque, il était furieux. »
Albus se mit à rire.
« Et je ne te parle pas de tous ceux qui avaient régulièrement la prétention de faire des expériences en se servant dans la cheminée. Je me souviens d’une autre de mes condisciples qui avait essayé de fabriquer de la Poudre de cheminette. Mais quand elle a jeté sa poudre dans la cheminée, il en a résulté une telle fumée qu’on n’y voyait plus à dix centimètres dans la salle commune. Il a fallu se jeter à quatre pattes pour rester sous la fumée pour pouvoir respirer. Le premier qui a réussi à atteindre la porte, est allé chercher Slughorn encore une fois pour qu’il débarrasse la salle commune de cette fumée. Cette fois-là, presque tous les élèves de la Maison, dont moi, ont fini à l’Infirmerie tant nous toussions. »
Albus riait de plus belle. Pourtant, je m’arrêtai d’un coup dans mon récit. En racontant, ces histoires à Albus, je venais de repensais pour la première fois depuis bien longtemps à ces deux serpentards de ma génération … et à leur fin. L’un avait pris la Marque des Ténèbres, non pas par conviction personnelle mais par incapacité à résister aux pressions qui existaient au sein de la Maison Serpentard, il avait été tué dans un accrochage avec des membres de l’Ordre du Phénix au cours de la première Guerre des Sorciers. L’autre au contraire avait résisté à cette même pression et avait disparu sans qu’on n’ait jamais retrouvé son corps. Il se murmurait que certains mangemorts avaient voulu faire un exemple avec elle pour que les autres serpentards se rappellent des risques encourus par ceux qui auraient la mauvaise idée de suivre son exemple. De quoi me souvenir, pour le cas bien improbable où j’aurais risqué de l’oublier, qu’il fallait empêcher à toute force le retour de Voldemort et de toute la violence de cette sinistre période.
Je conjurai du thé et je commençai à le servir sans avoir demandé à Albus s’il en voulait. Espérant qu’il soit mûr pour parler, je passai aux choses sérieuses en lui tendant une tasse :
« Allez vas-y, raconte-moi ce qui ne va pas. »
Je craignais un peu qu’il se récrie que je me trompais, que tout allait bien, mais ce ne fut pas le cas. Sans rien dire, il tourna la tête pour désigner du menton l’escalier dans lequel il avait affronté la sorcière lors de l’attaque de la Maison par les partisans de Voldemort.
« Tu n’es pas responsable de sa mort. » rappelai-je en pensant qu’il faisait allusion à la mort de son adversaire.
« Je l’ai laissée mourir. » murmura-t-il.
« Tu n’avais pas compris ce qu’elle allait faire, tu me l’as dit toi-même. » soulignai-je
« C’est vrai, mais je crois que si j’avais compris, j’aurais quand même choisi d’aller chercher son souvenir plutôt que d’essayer de la sauver. » déclara Albus à voix basse.
J’hésitai sur la manière de réagir à ce qu’il venait de me confier, mais il enchaîna de lui-même sans me laisser le temps de dire quoi que ce soit :
« Est-ce qu’au moins ce souvenir est utile à vos recherches ? Est-ce qu’il va vous permettre de trouver une solution pour les empêcher de se servir de Delphini pour ramener Voldemort à la vie ? »
« Très utile. » assurai-je. « Je commence à comprendre la magie qu’ils voulaient utiliser et c’est grâce à toi. Ensuite, il faudra encore que je comprenne comment empêcher cette magie d’opérer, mais je n’ai jamais été aussi près d’y arriver. »
Albus resta un instant songeur à observer les flammes qui dansaient dans la cheminée.
« Est-ce que vous croyez qu’ils sont encore nombreux ? » demanda-t-il soudain avant d’ajouter devant mon air d’incompréhension. « Je veux parler des partisans de Voldemort. »
De ce côté-là, les nouvelles n’étaient pas très bonnes. Après avoir longuement interrogés avec ses collègues Aurors les trois sorciers arrêtés, Harry m’avait fait part d’informations plutôt inquiétantes. Il semblait que sur le continent, bien loin de l’Angleterre où il avait réellement sévi, les anciens partisans de Voldemort, ceux qui avaient été chargés d’emmener Delphini Black après sa naissance, aient réussi à créer un groupe de fanatiques prêts à tout pour faire revenir le Seigneur des Ténèbres qu’ils idolâtraient sans l’avoir connu.
« Apparemment, ils seraient encore un certain nombre. » répondis-je sans donner à Albus plus de détails.
Albus secoua la tête d’un air inquiet avant de lâcher :
« Même si vous trouvez une solution pour empêcher que Delphini puisse être métamorphosée en Voldemort, ils ne le sauront pas. Du coup, ils vont continuer à s’en prendre à elle, à essayer de l’enlever et jamais elle ne pourra vivre normalement. Même si le monde sorcier ne risque plus rien, elle continuera elle à être en danger. »
J’ouvris la bouche pour répondre, mais je la refermais sans avoir rien dit. Au fur et à mesure que les mots prononcés par Albus infusaient dans mon esprit, je comprenais la portée du problème qu’il venait de soulever et auquel personne avant lui n’avait réellement songé.
Chapitre 15 : Deuxième sortie à Pré-au-Lard, et celle-là je ne suis pas près de l’oublier ! (1) by OutThereIsTheTruth
Le dimanche de la deuxième sortie à Pré-au-Lard, j'étais bien trop occupé pour songer à suivre qui que ce soit. J'escortai Delphini Black chez Hagrid en écoutant d'une oreille peu attentive son projet d'aider son professeur de Soins aux créatures magiques à concocter un emplâtre pour soigner sa licorne qui avait attrapé un mauvais rhume. Je me contentai de vérifier que la licorne malade était bien couchée dans un grand panier près de la cheminée. Cette situation me convenait parfaitement, car l'adolescente n'aurait pas le moindre prétexte pour s'aventurer dehors. Je retournai à pied vers l'école juste à temps pour croiser le reste de la bande se dirigeant vers le village, emmitouflés dans des capes d'hiver et des écharpes, car le froid s'était installé.
Je redescendis dans mon bureau où m'attendaient des piles de parchemins remplis d'inepties que les élèves osaient appeler leurs devoirs. Au bout d'une heure et demi de corrections et pour résister à l'envie de mettre le feu au restant de tous ces torchons, je décidai d'aller voir si McGonagall serait d'humeur à m'offrir le thé. En remontant des cachots, j'eus la grande surprise de voir Albus et ses complices revenir en courant bien avant l'heure limite, s'engouffrer par la grande porte, puis se séparer dans le hall. Albus et Rose Granger-Weasley se précipitèrent vers la Tour de Gryffondor, pendant que les autres faisaient demi-tour pour repartir en direction de la cabane d'Hagrid sous le regard d'un Rusard manifestement choqué par un tel comportement, surtout de la part des deux préfets.
J'hésitai un bref instant à suivre Albus pour obtenir une explication. Mais j'y renonçai, bien trop tenté par un thé tranquille pour que cette explication me semble urgente. Quand j'arrivai dans le bureau directorial, McGonagall et Lupin discutaient des affaires de l'école, je me serais bien dispensé de la présence du loup garou, mais pas au point de renoncer aux délicieux biscuits au gingembre qui accompagnaient toujours le thé chez notre Directrice.
« Un problème, Severus ? » s'enquit McGonagall « Ou seriez-vous venu partager une tasse de thé avec nous ? »
« Aucun problème, Minerva. Mais, j’accepte bien volontiers votre proposition d’une tasse de thé. » répondis-je.
Aucun problème, c’était à voir. A peine étions nous assis une tasse de thé à la main que la cheminée du bureau directorial s’anima.
« Vous attendez quelqu’un, Minerva ? » demanda le loup-garou.
McGonagall n’avait pas encore eu le temps de lui assurer que non que le Directeur du département des Mystères, Wolfgang Boswell, était sorti de la cheminée d’un pas déterminé suivi d’une dizaine de ses Langues-de-plomb.
Nous nous étions levés d’un bon, Lupin et moi, dans un fracas que porcelaine, pendant que McGonagall interpelait les intrus sur un ton sévère :
« Mais qu’est-ce qui vous autorise à pénétrer dans mon bureau de cette façon ? »
« Les nécessités de ma fonction, Madame la Directrice ! » répliqua avec hauteur le chef des Langues-de-Plomb.
« Je ne vois pas quelles nécessités pourraient justifier que vous veniez envahir mon bureau avec une telle armada ! C’est une école ici, pas un repaire de malfaiteurs. » s’insurgea notre Directrice.
« Ça, c’est vite dit ! » rétorqua Boswell. « Sachez, Madame la Directrice, que certains de vos élèves se sont livrés à de graves dégradations à Pré-au-Lard. »
« Des dégradations ! Je ne saurais le croire. » s’exclama McGonagall.
« Eh bien, je vous l’affirme. » répondit fermement le chef des Langues-de-Plomb. « Il ont été vus sur les lieux. »
« Par qui ? » demanda Lupin.
« Par deux de mes hommes. Et pour être tout à fait précis, un qui les a surpris sur place et un qui les a vus quitter les lieux en courant pour venir se réfugier dans l’école. » asséna Boswell sur un ton définitif.
« Et de qui s’agirait-il selon vous ? » interrogea McGonagall sur un ton où perçait le doute.
« Mes hommes n’ont pas pu recueillir leurs noms, puisqu’ils se sont enfuis comme je vous l’ai dit. Mais ce que je peux vous affirmer, c’est qu’ils étaient cinq et que, parmi eux, mes hommes ont parfaitement reconnu la fille de Madame la Ministre. »
J’échangeai un regard inquiet avec le loup-garou qui ne doutait pas plus que moi de l’identité des quatre élèves qui accompagnait la « fille de Madame la Ministre ». De son côté, McGonagall avait décidé de repasser à l’offensive en lançant sur un ton dubitatif :
« Même si votre histoire était vraie, j’ai du mal à comprendre qu’une bêtise faite par quelques élèves mérite la mobilisation d’une dizaine de membres du département des Mystères. »
Cette petite pique eut un effet pour le moins inattendu, quand Wolfgang Boswell commença à s’énerver au-delà du raisonnable.
« C’est à moi de juger si les moyens sont proportionnés au problème. » s’emporta-t-il sur un ton à la limite de la politesse. « Maintenant, j’exige de voir les élèves en question. »
« Avant cela, j’aimerais bien pouvoir juger de la nature du « problème » qui vos amène. » répliqua fermement McGonagall. « Donc, vous nous expliquez tout de suite de quoi il s’agit, sinon il est hors de question que vous voyiez le moindre élève. »
« Si vous insistez. J’accuse ces élèves et en particulier l’un d’entre eux d’avoir endommagé une inscription sur un mur à Pré-au-Lard. » consentit à révéler Boswell de mauvaise grâce
« Une inscription sur un mur, mais de quel endroit parlez-vous ? » demanda McGonagall sur un ton suspicieux.
Boswell cita le nom d’une ruelle et notre Directrice fronça les sourcils d’un air sévère. Bien qu’habitués à de rudes affrontements dans le cadre de leurs fonctions, plusieurs des Langues-de-Plomb reculèrent d’un pas devant cette manifestation de la colère de leur ancienne Directrice.
« Mais que venez-vous me chanter là, Boswell ? Je connais bien cette rue, une de mes amies y habite. Je n’y ai jamais vu la moindre inscription sur aucun mur. » gronda McGonagall.
« Eh bien, il est possible que ce soit le même groupe d’élèves qui aient fait apparaître cette inscription. » expliqua le chef des Langues-de-Plomb sur un ton embarrassé.
McGonagall poussa son avantage :
« Il faudrait savoir si vous les accusez d’avoir détruit une inscription ou de l’avoir fait apparaître. Une faute certes, si c’est bien le cas, mais pas de quoi débarquer dans mon bureau, sans vous être fait annoncer, avec la moitié des membres du département des Mystères. »
« Cette inscription est extrêmement importante pour des raisons que je ne peux pas vous révéler, mais qui sont suffisamment importantes pour justifier notre intervention. » assura Boswell. « Et maintenant, je veux voir les élèves en question, seul à seul. »
« Seul à seul, il n’en est pas question ! » rétorqua McGonagall « Ce sont des esprits jeunes et impressionnables et ils sont sous ma protection. »
Impressionnable, parlait-elle vraiment de Rose Granger-Weasley ?
« C’est vous qui allait venir les voir tout seul, car je ne vois pas à quoi sert la présence de vos sbires, si ce n’est à les mettre sous pression, ce qui n’est pas correct de la part de sorciers adultes vis-à-vis d’adolescents. » ajouta-t-elle d’un ton ferme.
J’avais sorti ma baguette, imité par Lupin.
« Ne soyez pas ridicules, nous ne sommes pas venus nous battre. » s’agaça le chef des Langues-de-Plomb.
« Alors renvoyez toutes les personnes qui n’ont rien à faire ici pour traiter ce petit incident ! » réclama Lupin.
« Deux de mes hommes sont témoins. Ils les ont surpris sur les lieux. » avança Boswell.
« Alors qu’ils restent et que les autres repartent. » imposa McGonagall
Boswell s’inclina, renvoyant tous ses acolytes à part les deux témoins. Et McGonagall boucla ostensiblement sa cheminée derrière eux d’un sort pour empêcher toute nouvelle incursion dans son domaine. Boswell eut un mouvement d’énervement devant ce geste de défiance, mais il s’abstient du moindre commentaire. Il suivit McGonagall dans l’escalier, ces deux Langues-de-plomb derrière lui, je fermais la marche avec le loup-garou.
Chapitre 16 : Deuxième sortie à Pré-au-Lard, et celle-là je ne suis pas près de l’oublier ! (2) by OutThereIsTheTruth
Il fut inutile de les chercher bien longtemps. La petite bande discutait dans le hall au moment même où nous descendions du bureau directorial. Enfin une partie de la petite bande, puisque Delphini Blake n'était pas là, faute que je sois allé la chercher chez Hagrid, et Albus était absent lui aussi. Il y eut une telle appréhension dans leur regard en nous voyant nous diriger vers eux McGonagall, Lupin et moi accompagnés des trois Langues-de-Plomb que je commençai à craindre qu'ils ne soient pas totalement innocents des accusations portées contre eux.
« C'est bien eux ! Mais celui qui avait sa baguette à la main n'est pas là. » s’exclama l'un des témoins de Boswell.
J'avais peu de doute sur l'identité de qui avait pu avoir sa baguette à la main et McGonagall non plus.
« Ils me semblent que ces jeunes gens sont en effet sortis à cinq. » dit-elle avant d’ajouter en s'approchant du petit groupe. « Monsieur Malefoy, pouvez-vous me dire où est Monsieur Potter ? »
Ce fut Rose Granger-Weasley qui intervint pour lui répondre :
« Albus est descendu dans sa salle commune, Professeur McGonagall. »
Sa réponse lui valut une remarque acerbe du Directeur du département des Mystères, gryffonfor de son état :
« De mon temps, les élèves de Gryffondor ne frayaient pas avec les serpentards. »
« Et on ne peut que se féliciter que les jeunes générations soient plus intelligentes que celles qui les ont précédées. » rebondis-je.
Il me lança un regard meurtrier, mais je n’en avais cure. Je n’allais pas m’émouvoir d’un regard qui était à peine une pâle copie de celui que j’étais capable de produire moi-même le cas échéant.
« Suivez-nous. » lançai-je aux adolescents présents dans le Grand Hall avant de prendre la direction de la salle commune des serpentards.
À notre arrivée dans les cachots, Albus ressortait tout juste de la salle commune, la discussion s'engagea donc dans le couloir. Je résumai aux cinq adolescents les accusations portées contre eux par les représentants du ministère. Au grand déplaisir de Boswell qui aurait manifestement souhaité pouvoir les cuisiner à sa façon, mais que je n'avais pas la moindre intention de laisser faire.
Albus nia en bloc en expliquant :
« Nous nous sommes juste arrêtés pour voir ce que c'était que cette inscription à moitié effacée sur le mur. Mais nous ne sommes responsables ni de son apparition, ni de sa disparition. »
L'incrédulité de Boswell était manifeste :
« Pourquoi vous seriez-vous arrêté dans cette ruelle pour observer des lettres à moitié effacées sur un mur. »
« Parce qu'elles n'y étaient pas auparavant. » intervint le fils du loup-garou. « Du coup, ça m'a intrigué et je les ai montrées à mes amis. »
« Comment saviez-vous qu'elles n'y étaient pas auparavant ? » reprit le chef des Langues-de-Plomb.
« Parce que j'habite Pré-au-Lard avec mon père et ma grand-mère. Du coup, je connais tout le village comme ma poche ». affirma Teddy Lupin. « Et Albus dit vrai, nous n'avons touché à rien. »
« Alors comment expliquez-vous que l'un de mes hommes ait vu votre camarade détruire cette inscription ! » s'emporta son interlocuteur.
« Peut-être qu'il croit l'avoir vu, mais qu'il se trompe. » osa suggérer Teddy Lupin avec une audace qui me fit penser que Rose Granger-Weasley faisait des émules.
Je décidais d'intervenir en interpellant moi-même le soi-disant témoin de Boswell que je fixai délibérément dans les yeux, les bras croisés d’un air sévère. Car même si son nom m’échappait, je me souvenais de lui pour l’avoir eu en cours quelques années auparavant. C’était un serdaigle qui avait particulièrement peur de moi, suffisamment peur espérai-je pour qu’il dise la vérité même si elle contrariait son chef.
« Qu’avez-vous vu exactement ? » lui demandai-je sèchement.
Il hésita un assez long moment avant de lâcher :
« J’ai vu les lettres à moitié effacées par-dessus leurs épaules. J’ai pensé que c’était eux qui les effaçaient, alors je leur ai crié d’arrêter. Quand ils se sont retournés, ce garçon avait sa baguette à la main. »
Je me tournai vers Albus.
« Il s’est mis à nous hurler dessus sans qu’on l’ait entendu arriver. J’ai sorti ma baguette parce que j’ai eu peur. C’était un réflexe stupide, je suis désolé. Mais de toutes façons, je ne m’en suis pas servi. » dit-il en réponse à ma question muette.
« C’est faux, il ment ! Ils mentent tous ! » se mit à crier Boswell.
J’étais sidéré. Même si je ne l’appréciais pas beaucoup, je lui faisais au moins le crédit de n’être pas du genre à perdre ses nerfs. D’ailleurs, je n’étais pas le seul à être étonné, Rose Granger-Weasley qui devait bien le connaître, puisque Boswell était l’un des principaux collaborateurs de sa mère, le regardait avec un mélange de surprise et d’inquiétude.
« Et qu’est-ce qui vous permet d’affirmer qu’ils mentent, puisque votre collaborateur et témoin ne les a vus lancer aucun sort ? » rétorquai-je en faisant un pas pour m’interposer entre Albus et Boswell.
« Je sais qu’ils mentent et je vais vous le prouver. » répliqua-t-il d’une voix éraillée par la colère avant d’ordonner en s’adressant à Albus. « Donnez-moi votre baguette tout de suite. »
Albus leva les yeux vers moi pour savoir ce qu’il devait faire. Je n’aimais pas du tout la tournure que prenait les évènements, mais je ne pouvais pas inciter Albus à refuser. Je hochais donc la tête en signe d’assentiment et même temps que je sortais ostensiblement ma baguette pour décourager Boswell de faire quoi que ce soit de stupide. Albus tendit donc sa baguette avec un froncement de sourcils mécontent qui ressemblait assez au mien.
« Qu’est-ce que c’est que cette baguette ? » grommela Boswell après s’être saisi de la baguette d’Albus
Manifestement le contact de cette baguette de « serpent » lui semblait désagréable.
« Priori Incantatum ! » lança-t-il néanmoins.
Avec un résultat qui ne manqua pas de me soulager même si je restais de marbre.
« Il s’agit du dernier sort que Monsieur Potter a lancé pendant mon cours de Métamorphose de vendredi après-midi. » observa McGonagall d’un ton sec. « Ce qui signifie que ce jeune homme ne s’est effectivement pas servi de sa baguette à Pré-au-Lard aujourd’hui et que les accusations que vous avez formulées contre lui sont sans fondement. »
« Je n’en crois rien ! » beugla Boswell. « Il se sera servi de la baguette de l’un des autres. »
« C’est ridicule. » assénai-je d’un ton méprisant.
Mais Lupin avait déjà lancé un coup d’œil significatif à son fils qui sortit sa baguette de mauvaise grâce pour la tendre au chef des Langues-de-Plomb. Les autres l’imitèrent. Les quatre autres Priori Incantatum n’aboutirent à rien d’autres qu’à faire ressortir différents sorts étudiés en cours.
Notre Directrice toisa Boswell d’un regard glacial :
« Il ne vous reste plus qu’à présenter vos excuses. Non ? Eh bien, Remus, je vous remercie de raccompagner ces messieurs jusqu’à la Grande Porte. »
Le Directeur de département des Mystères lui adressa un regard mauvais, mais il emboîta le pas du loup-garou sans dire un mot avec ses sbires sur les talons. Je les suivis de loin, pas seulement pour vérifier qu’ils nous quittaient bien sans faire d’histoire, mais aussi parce qu’il était largement temps de ramener Miss Black de chez Hagrid.
Un peu plus tard je montai à la bibliothèque pour emprunter un ouvrage de la Réserve, lorsque je découvris la petite bande au complet engagée dans une intense conversation que l’Assurdio probablement lancé par Albus rendait inaudible. Madame Pince, décidément totalement indifférente à ce qui ne la dérangeait pas, les laissait faire. Penchés les uns vers les autres par-dessus la table, ils étaient si concentrés, qu’ils ne m’aperçurent même pas. Je fus frappé par leur air inhabituellement préoccupé. J’aurais donné cher pour savoir de quoi ils s’entretenaient ainsi.
…
Quelques heures plus tard, je me tournais et me retournais dans mon lit incapable de trouver le sommeil. Je ne cessais de me repasser le film des incidents de l'après-midi. Quelque chose ne collait pas dans les attitudes des uns et des autres.
Soudain, je fus traversé par une idée que j'essayais vainement de chasser en me disant que je pouvais bien attendre le lendemain pour en avoir le cœur net. Mais rien n'y faisait, je restais fixé sur cette idée, incapable de m'endormir. De guerre lasse, je finis par me lever en maugréant contre ma propre stupidité, j'allais être crevé toute la journée. Malgré tout, j’enfilai une robe convenable par-dessus mon pyjama et je m’enfonçai dans la cheminée de mon appartement à Poudlard pour ressortir quelques instants plus tard de celle du hall du Manoir des Prince.
La voix de crécelle de mon grand-père s’éleva de l’un des tableaux :
« Mais qu’est-ce que c’est que ce boucan ? Ah, c’est vous, mais qu’est-ce qui vous permet de débarquer ainsi au beau milieu de la nuit pour réveiller les honnêtes gens. »
« Sans doute le fait que je sois chez moi. » grondai-je à voix basse pour ne pas alerter toute la maisonnée. « Quant à réveiller des « honnêtes » gens, encore faudrait-il qu’il y en ait à réveiller ici. »
« Mais dites donc espèce de … » commença-t-il, mais le reste de sa diatribe se perdit dans un couinement outré quand je lui balançais un sortilège sans sommation.
C'était un peu facile, mais je n'étais pas revenu au Manoir en pleine nuit pour perdre mon temps à polémiquer avec ce vieux crétin. Je me dirigeai donc sans attendre vers la bibliothèque et dans la bibliothèque vers le coffret où Albus et moi avions convenu de ranger la baguette que le portrait de Salazar Serpentard avait choisi de lui léguer (*).
J'ouvris le coffret d'un rapide mouvement de baguette … pour constater qu'il était vide. Je restais de longues minutes à contempler la garniture en velours vert où se dessinait encore la forme de la baguette de notre fondateur. Albus était reparti à l'école avec non pas une baguette mais deux et ce constat éclairait d'un jour nouveau les événements de l'après-midi. Une des questions qui m’avait fait me relever au milieu de la nuit était résolue. Je savais désormais pourquoi le témoin de Boswell avait pris un temps un peu trop long pour répondre à ma question quand je lui avais demandé ce qu'il avait réellement vu. Albus avait modifié ses souvenirs et les souvenirs modifiés avaient cet inconvénient que le sujet avait parfois un peu plus de mal à y accéder qu’aux vrais.
Mais d’autres questions restaient sans réponse. Beaucoup d’autres. Comme par exemple, pourquoi Albus s’en était-il pris à ce type ? Qu’avait-il vu qu’il faille lui en effacer le souvenir ? Il fallait que l’enjeu soit de taille pour qu’Albus ait pris ce risque. Mais plus encore, comment se faisait-il que des Langues-de-Plomb qui avaient bien d’autres fonctions à remplir aient opportunément traîné dans les rues de Pré-au-Lard pour surprendre la petite bande en train de faire apparaître ou disparaître ou les deux, une inscription sur un mur ?
Et au-delà de toutes ces considérations, pourquoi et de quoi Rose Granger-Weasley avait-elle peur ? Elle qui semblait n’avoir peur de personne, elle qui n’avait même plus peur de moi depuis longtemps, avait eu indéniablement peur lorsque les Langues-de-Plomb avaient débarqué pour les confronter. En particulier, j’avais nettement perçu de la crainte dans son regard alors qu’elle observait Boswell. Pourtant, elle connaissait bien le chef du département des Mystères qui était l’un des principaux collaborateurs de sa mère, et je n’avais pas l’impression que la crainte qu’il la dénonce auprès de celle-ci ait pu la mettre dans un tel état d’inquiétude. Il y avait là une énigme qui était peut-être la clé de toute cette affaire.
(*) Voir « Le journal de Severus Rogue (3) : les douze perles de minuit ».
Chapitre 17 : Trêve de Noël, tu parles d’une trêve ! by OutThereIsTheTruth
Je fis taire mon impatience à confronter Albus sur ce qui c'était réellement passé avec les Langues-de-Plomb. Je préférais attendre les vacances qui commençaient à la fin de la semaine pour en discuter avec lui entre quatre yeux. Mais quand je transplanai au Manoir des Princes, une demi-journée après le départ des élèves, car j’avais été retenu à Poudlard par une réunion organisée par McGonagall pour faire le point sur les incidents du trimestre et étudier les candidatures qu’elle avait reçu pour le poste de professeur de Métamorphose, Albus avait déjà pris la direction du Manoir Malefoy après avoir déposé le gros de ses affaires à la maison.
Je m'apprêtais à le suivre quand je fus interpelé par la voix agaçante du portrait de mon grand-père :
« Notre héritier est encore une fois parti rejoindre cette fille sans père ! » dit-il sur un ton indigné.
Sans père ... si seulement c'était vrai.
« Et alors ? » répondis-je d'un ton peu amène pour le décourager, sans succès, de continuer.
« Et alors, vous pourriez peut-être pour une fois prendre vos responsabilité en mettant bon ordre à cette histoire. » dit-il avec hauteur
« Qu'est-ce que vous entendez exactement par là ? » grondai-je exaspéré de voir de quel air hautain il me toisait depuis son tableau.
« Sachez qu'à l'époque où elle était à Poudlard, votre mère a un temps fréquenté un garçon dont le profil ne correspondait pas du tout aux attentes de notre Maison. Eh bien, j'ai pris mes responsabilités en allant rencontrer les parents de ce jeune homme pour leur signifier qu'il fallait mettre un terme à cette histoire, après quoi ... » commença-t-il pompeusement.
« Après quoi, » l’interrompis-je. « ma mère s'est enfuie avec un moldu, mon père, pour échapper à votre emprise. Devant la fulgurante efficacité de vos manœuvres, je vais plutôt continuer à gérer l'affaire à ma façon. »
Indifférent à son air offusqué, je le plantai là pour m'enfoncer dans la cheminée sans même prendre la peine de me retourner pour voir lequel de ces foutus portraits riait à gorge déployée.
Je trouvai le Manoir Malefoy en pleine effervescence. J'avais du mal à m'habituer à cette nouvelle conjoncture. Après des décennies pendant lesquelles cette vieille bâtisse avait sonné creux, elle était désormais remplie de cris et de glissades dans les couloirs. D'autant plus remplie que Delphini Black ne pouvant plus aller nulle part ailleurs pour sa sécurité, le Manoir Malefoy était devenu le QG de la petite bande.
J'établis mes quartiers dans le bureau de Lucius, les gamins ayant envahi la bibliothèque, avec le soutien intangible de Narcissa, sous prétexte des devoirs qu'ils avaient à faire. Pour ma part, j'avais besoin de calme pour mettre la dernière main aux 12 recettes de potion susceptibles de métamorphoser Delphini Black en Voldemort. Ensuite, ensuite seulement, je pourrais chercher la solution la moins dangereuse possible permettant de bloquer définitivement ce processus.
Cependant, le calme auquel j’aspirais, aller relever plus du vœu pieux que de la réalité. Le jour de mon arrivée, je me retirai de la table du dîner aussi tôt que la politesse le permettait en espérant pouvoir travailler tranquillement dans la soirée. Mais je n'étais pas installé depuis un quart d'heure dans le bureau de Lucius que celui-ci me rejoignit une bouteille de Whisky Pur Feu à la main. La qualité du breuvage que je connaissais, me retins de montrer trop de mauvaise humeur. Il s'avéra que Lucius n'était pas venu que pour fuir lui aussi une salle à manger trop pleine.
« Ecoute. » commença-t-il. « Je voudrais que tu me promettes de ne pas parler à Albus de ce que je vais te raconter. Il voulait que ça reste entre lui et moi et ça ne se fait pas de se trahir entre serpentards. »
« Grandis un peu, Lucius. » l’enjoignis-je en levant les yeux au plafond. « Albus n’est pas ton camarade de chambrée. C’est mon petit-fils et s’il t’a parlé quelque chose qui t’a inquiété, tu dois me le dire. »
En le voyant hésiter, je rajoutai :
« Je te rappelle que je suis un serpentard moi aussi, et pas le plus mauvais pour garder les secrets. Sauf à ce que ce soit absolument indispensable, je ne parlerais évidemment pas à Albus de ce que tu vas me dire. »
Lucius se recueillit un instant avant de se lancer :
« Albus était à peine arrivé, qu’il est venu me voir ici même dans ce bureau pour me poser une question à propos des Horcruxes. »
J’avais failli lâcher mon verre.
« A propos de quoi ? » beuglai-je.
« Tu m’as très bien entendu. Je ne vais pas me répéter » répliqua-t-il d’un ton pincé. « Je lui ai dit que je ne pouvais décemment pas lui expliquer comment fabriquer un tel objet de magie noire, et … »
« Et tu as bien fait de t’abstenir. Ça va m’éviter de te trucider. » le coupai-je.
« Et il a répondu que ça n’avait pas d’importance, car il ne voulait pas savoir comment ça se fabrique, mais comment ça se détruit. » reprit-il en ignorant mon interruption.
« Comment ça se détruit ! » répétai-je en le regardant avec des yeux ronds.
« Franchement, il avait l’air d’y tenir beaucoup. Du coup, j’étais embêté de ne pas pouvoir lui répondre. C’est pour ça que je t’en parle. » expliqua-t-il.
« Mais pourquoi est-ce que tu ne lui as pas répondu, si c’était vraiment là l’objet de sa question ? » demandai-je.
« Parce que je n’en sais rien, imagine-toi ! » s’écria-t-il. « J’ai une idée assez précise, théorique je te rassure, de la façon dont ça se crée ; une idée nettement plus floue de la façon dont ça pourrait s’utiliser après coup ; mais aucune idée de la façon dont ça se détruit. Enfin rien, au-delà de l’idée qu’il avait lui-même. »
« L’idée qu’il avait lui-même ? » relevai-je.
« L’idée qu’il avait lui-même d’utiliser un Feudeymon. » répondit-il. « J’ai admis que c’était possible que ça marche. Mais je l’ai découragé de se servir d’un Feudeymon quoi qu’il veuille détruire, en soulignant combien c’était une créature dangereuse et difficile à maîtriser. »
« Quoi qu’il veuille détruire ? » répétai-je à nouveau tant j’étais perdu dans ses explications.
« Oui, j’ai essayé d’en savoir un peu plus sur ce qu’il voulait détruire, car sa question ne m’a pas semblé que théorique pour tout te dire. »
« Et alors ? » l’encourageai-je.
« Eh bien, je n’ai pas obtenu grand-chose. Il m’a juste dit qu’il m’avait posé cette question-là, sachant que ce qui pouvait détruire un Horcruxe pourrait forcément détruire n’importe quel autre objet magique. Ce en quoi il a probablement raison. »
En effet, Albus avait raison, mais qu’est-ce que c’était que cette histoire d’objet magique à détruire, même si ce n’était pas réellement un Horcruxe ? Moi qui étais venu chercher la sérénité pour pouvoir travailler, j’étais servi. Au lieu de ça, je me creusais désespérément les méninges pour tenter de comprendre quelque chose à cette nouvelle histoire.
Et je n’étais pas encore arrivé au bout de mes surprises. Le lendemain matin, alors que j’essayais de reprendre mes esprits et mon travail après une nuit agitée, j’eus la surprise de voir Delphini Black pousser la porte du bureau où je me trouvais.
« Votre oncle n’est pas là, Miss Black » l’informai-je en pensant qu’elle cherchait Lucius.
« Je sais. C’est vous que je venais voir, Professeur Rogue. » expliqua-t-elle embarrassée. « Je n’en ai pas pour longtemps, cinq minutes. »
Je l’observais un instant. Elle n’avait pas lâché la poignée de la porte. L’inquiétude se lisait dans ses yeux bleus. Si je manifestais le moindre agacement, elle allait immédiatement s’enfuir. J’étais d’ailleurs tenté de la faire disparaître d’un froncement de sourcils, mais sachant qu’elle avait clairement dû prendre sur elle pour venir ainsi me parler, le motif de son intrusion ne pouvait pas être totalement anodin.
« Entrez dans ce cas et expliquez-moi ce qui vous amène. » répondis-je en évitant de prendre un ton trop sec.
Elle referma la porte derrière elle, mais sans avancer dans la pièce.
« J’aurais besoin que vous me donniez une potion. » dit-elle très vite à voix basse en évitant de me regarder.
« Seriez-vous souffrante, Miss Black ? » demandai-je faute de comprendre le sens de sa demande.
« Non. En fait, je voudrais avoir une potion que je garde avec moi, pour le cas où je serais enlevée. » murmura-t-elle très vite toujours sans croiser mon regard. « Une potion comme celle qu’avait la sorcière qui a essayé de m’enlever, je veux dire une potion comme celle dont elle s’est servie lorsqu’Albus a gagné le duel contre elle. »
Je restai muet quelques instants. Le temps de bien intégrer que cette adolescente de seize ans venait de me demander de lui fournir de quoi s’empoisonner pour le cas où elle serait capturée par ceux qui cherchaient à s’emparer d’elle.
« Est-ce que vous en avez parlé à votre tante ? » demandai-je.
C’était une question stupide, je le reconnais, mais j’avais besoin de gagner un peu de temps pour mettre mes idées en ordre. Elle me fixa l’espace d’un instant avec ahurissement. Elle n’en avait évidemment pas parlé à Narcissa et ne comprenait pas que je puisse lui poser une pareille question, mais en vraie serpentarde qu’elle était, elle eut vite fait de reprendre une expression neutre.
« Bien sûr que non. » répondit-elle simplement « Mais comme vous le savez, je serai majeure dans quelques mois, je suis donc en âge de faire mes propres choix. »
Je pris le temps de la détailler. Elle avait certes grandi ces derniers mois, mais elle avait toujours l’air d’une gamine. Même débarrassée de son uniforme de l’école et vêtue comme aujourd’hui d’une robe plus féminine d’un bleu nuit qui mettait en valeur son teint pâle et ses cheveux bleus. Oui, d’une gamine, mais une gamine qui venait discuter avec moi de sa propre disparition.
« Vous pourriez aussi me faire confiance, Miss Black, et penser que je vais trouver une solution pour vous sauver. » repris-je pour essayer de la détourner de son idée.
« Je vous fais toute confiance, Professeur Rogue. » assura-t-elle avec un accent de sincérité. « Mais j’ai déjà subi deux tentatives d’enlèvement. Et les deux fois, l’enlèvement aurait pu réussir. Malgré toutes les précautions que je dois supporter, vous ne pouvez pas me garantir que ça n’arrivera jamais. »
Je me gardais bien de la contredire. Par deux fois en effet, il s’en était fallu d’un rien pour que ces tarés parviennent à s’emparer d’elle. Elle poursuivit :
« Si la prochaine fois, les choses se terminaient mal, si j’étais capturée, je sais bien qu’il en serait fini de moi, parce que ces gens qui essayent de m’enlever, me sacrifieraient immédiatement pour essayer de faire revenir … »
« Votre père. » terminai-je.
« Non, s’il vous plaît ne dîtes pas cela ! » réagit-elle avec une violence inhabituelle chez elle. « Quelqu’un qui a toujours voulu se servir de moi comme un objet, n’est pas mon père. Un père, un grand-père, un parent, c’est quelqu’un qui vous aime et qui veut vous protéger. Comme vous avec Albus. Vous ne croyez pas que j’ai raison ? »
Son raisonnement était plus mature que son apparence le laissait imaginer.
« Si, Miss Black, je le crois. » répondis-je gravement. « Ce triste individu n’a surement pas mérité d’être votre père. »
« Il n’est pas question que je les laisse se servir de moi pour le faire revenir à la vie, car il deviendrait une menace pour tous les gens que j’aime. Si je dois disparaître, j’ai le droit de choisir comment, et c’est pour ça que je suis venue vous demander cette potion … »
« Je vous promets de réfléchir à votre demande, Miss Black. »
Longtemps après qu’elle se soit éclipsée sur cette promesse, je continuais à regarder dans le vide droit devant moi. Le jour où Voldemort était mort pendant la bataille de Poudlard, ou plus exactement quelques jours plus tard le temps que je reprenne assez conscience à Ste-Mangouste pour comprendre que Voldemort était mort et que moi j’étais vivant, j’avais cru que la bataille que je menais contre lui dans l’ombre était terminée.
Aujourd’hui, je recommençais à douter d’avoir définitivement triomphé du salopard qui avait tué l’amour de ma vie. Je recommençais à craindre qu’une fois de plus il n’ait eu un coup d’avance. Sans un concours de circonstances totalement imprévisible qui avait soustrait Delphini Black à ses gardiens, Voldemort pourrait déjà être de retour à l’heure qu’il est avec sa volonté de destruction et de domination. Mais, je n’avais pas dit non plus mon dernier mot. Maintenant que son plan avait été éventé, je devais réussir à le contrer pour que celui qui se disait le Seigneur des Ténèbres appartienne définitivement au passé.
Chapitre 18 : Contes de Noël by OutThereIsTheTruth
Toutes les vacances se passèrent sans que je trouve un moment suffisamment tranquille avec Albus pour avoir une vraie discussion. Ce n’est que la veille du retour à Poudlard que l’occasion se présenta enfin. Quelques minutes après son retour de chez ses parents où il était allé passer trois jours, Albus se présenta dans mon bureau un gros paquet de livres à la main.
J’étais moi-même en train de trier tous les parchemins sur lesquels j’avais travaillé pendant deux semaines pour finaliser les recettes des douze potions qui, selon moi, étaient la clé de la transformation de Delphini Black en Voldemort. J’avais aussi rassemblé quelques livres de ma bibliothèque personnelle que je voulais emmener à l’école pour travailler à une solution pour empêcher définitivement cette transformation.
« Est-ce que je peux vous confier ces quelques livres ? » me demanda Albus. « Ma malle est pleine. »
Je lui désignai d’un geste distrait ma propre malle pour qu’il y place ses ouvrages.
« Prenons le thé, puisque tu as fini ta malle. » proposai-je en m’installant dans l’un des fauteuils de mon bureau sans attendre sa réponse.
Le temps qu’il s’assoie en face de moi, Tinny avait fait apparaître devant nous un thé copieux. Il n’était plus temps de finasser, j’attaquai bille en tête :
« Je serais curieux de savoir pourquoi tu as pris le risque de modifier les souvenirs du Langue-de-Plomb qui vous avez surpris à faire je n’ai même pas compris quoi, dans une ruelle de Pré-au-Lard, en te servant de la baguette de Salazar Serpentard. »
En dépit de l’empire qu’il avait sur lui-même, Albus ne put empêcher ses traits de trahir une véritable sidération l’espace d’un instant. Mais il se reprit rapidement et, en vrai serpentard qu’il était, commença par me poser une question, histoire de gagner un peu de temps :
« Comment le savez-vous ? »
« Parce que ton « sujet d’expérimentation » avait un peu trop de mal à rassembler ses souvenirs. Pas beaucoup, je te concède que tu as dû faire les choses assez bien dans l’urgence. Mais quand même assez pour que je me pose la question. » expliquai-je avant d’ajouter « Du coup, je suis venu ici le soir même pour vérifier si ton AUTRE baguette se trouvait toujours au Manoir et j’ai pu constater que non. La conclusion n’était pas difficile à tirer. »
Je lui laissais le temps de digérer ces informations avant de demander d’un ton léger pour masquer ma réelle curiosité :
« Me diras-tu maintenant pourquoi tu as fait ça ? »
Il resta un instant immobile avant de se mettre à secouer lentement la tête de droite à gauche.
« Je ne peux pas, je suis désolé. » dit-il
« Tu ne me fais plus confiance, Albus ? » murmurai-je de la voix la plus neutre possible pour éviter de lui révéler combien j’étais bêtement peiné.
« Si, bien sûr. » se recria-t-il. « Je voudrais vous en parler. C'est juste que je ne peux pas. »
Pour le coup, je commençai à m'inquiéter pour de bon.
« Albus, même si tes amis et toi avez fait une bêtise, tu sais que je peux l'entendre. » tentai-je.
Il me connaissait assez bien pour savoir que ma réaction serait bien pire s’il ne me disait rien et que je l’apprenne par un autre biais. Mais il secoua tête à nouveau :
« On n'a pas fait de bêtise. Enfin pas vraiment. »
Pas vraiment ou vraiment pas ?
« Tu me sembles bien préoccupé pour quelque chose qui serait sans gravité. » continuai-je l’air de rien.
« Je n'ai pas dit que c'était sans gravité. » soupira-t-il « Mais je ne peux pas en parler. »
Je cherchai une stratégie pour obtenir quelque chose. Inutile d’insister pour qu'il me parle ou même pour qu'il me dise pourquoi il croyait ne pas pouvoir le faire, il ne lâcherait rien. Inutile de crier, cela ne ferait qu’achever de le braquer.
Mais nous étions entre serpentards. Chez nous, la transaction est un réflexe naturel. J'allai donc lui révéler quelque chose qu'il voulait savoir en espérant que cela l’incite à se confier à moi à son tour.
« Je sais que la vérité n’est pas toujours facile à dire. » attaquai-je « Tu sais que c’est même pour cela que l’on a inventé les contes, pour pouvoir dire des vérités à travers des histoires d’apparence anodine. Comme nous sommes encore à l’époque de Noël, c’est le moment parfait pour les contes. Je vais donc t’en proposer un, tu verras si tu as envie de m’en raconter un à ton tour.
Il leva un sourcil interrogatif et quelque peu dubitatif. Je m'attardai un instant à observer de ce tic. Albus ne me ressemblait pas vraiment. Pour son plus grand avantage, il tenait bien plus de Lily que de moi. Mais ce tic comme ses cheveux noirs et sa haute silhouette étaient clairement hérités de mon côté.
Je m’arrachai à mon observation pour commencer mon histoire :
« Il était une fois un très puissant mage noir, dont l’objectif ultime était de dominer le monde sorcier pour l’éternité. Mais cette domination éternelle supposait qu’il survive aux combats contre ses adversaires comme aux affres du temps. Pour garantir sa survie, il avait placé des morceaux de son âme dans plusieurs objets. Ainsi, même si son corps était détruit, son âme survivrait et lorsque la magie lui permettait de retrouver un nouveau corps, ses pouvoirs seraient intacts. Quant aux adversaires de ce mage noir, ils savaient que, tant que ces bouts d’âme existeraient, leur ennemi resterait en quelque sorte invincible. »
Albus me dévisageait maintenant avec intensité. Il avait compris que j’allais répondre à la question qu’il avait posé à Lucius. Je m’en voulais un peu d’éventer la confidence que m’avait faite ce dernier, mais dans l’immédiat, je ne voyais rien d’autre à échanger avec Albus pour l’inciter à me parler que de répondre à sa question à propos des Horcruxes.
« Cependant, les protections magiques dont ils étaient entourés, renforcées par les pouvoirs que ces bouts d’âmes conservaient, rendaient ces objets presque indestructibles. » repris-je « Insensibles en tout cas à tous les sorts habituels de destruction comme aux tentatives pour les anéantir physiquement. Dans ces conditions, seul quelque chose d’extraordinairement puissant pourrait en venir à bout. »
Je m’arrêtai à nouveau un court instant. Albus retenait son souffle, suspendu à mes lèvres, touillant inutilement son thé pour se donner une contenance.
« Mais il existait un poison capable de transpercer toutes les défenses magiques et de détruire les morceaux d'âmes en même temps que les objets auxquels ils étaient attachés. Le venin du basilic. Or, les adversaires de ce mage noir disposaient d’une épée qui avait été trempée dans ce venin, une épée dont ils se sont servis pour se débarrasser un à un de ces objets maudits. Et c’est ainsi que fut anéanti le sorcier qui s'était cru à tout jamais invincible. »
Je m'arrêtai un court instant, le temps pour lui d’apprécier l'information que je venais de lui donner, avant de demander :
« Et toi, tu ne connais pas de conte de Noël ? »
« Peut-être que si, Grand-Père » murmura-t-il.
Je lui laissai du temps pour réfléchir à ce qu'il allait me dire en me resservant une tasse de thé et en attrapant quelques sandwichs sur la table.
« Je vais vous raconter l’histoire des trois fées qui n’aimaient pas les fêtes. » commença-t-il d’une voix un peu hésitante, sans doute parce que l’histoire prenait à peine forme dans son esprit.
C’était maintenant moi qui remuais mon thé sans nécessité en me concentrant de toutes mes forces sur ce qu’il allait me raconter, histoire de démêler la réalité de la fiction.
…
« Il était une fois trois fées acariâtres qui habitaient une grotte tout près d’un village de sorciers. Or, les sorciers de ce village passaient beaucoup de temps à organiser des fêtes, dont le bruit dérangeait les trois fées. Un jour, après la fête de trop, de trop pour elles, les trois fées commencèrent à chercher un plan pour se débarrasser définitivement du problème et retrouver le calme auquel elles aspiraient.
« Mes sœurs ! » commença l’aînée. « Il est temps de mettre un terme aux agissements de ces sorciers insupportables qui persistent à nous empoisonner l’existence en dépit de nos avertissements répétés. »
« Que proposes-tu ? » lui demandèrent en cœur ses deux sœurs.
« La peur. » répondit l’aînée. « S’ils ont suffisamment peur de sortir de chez eux, ils arrêteront de nous casser les oreilles avec leurs fêtes stupides. »
« Mais comment leur faire peur ? Nos pouvoirs ne sont pas suffisants pour avoir raison des leurs. » remarqua la deuxième sœur.
« Un dragon ferait l’affaire. » répondit la première.
« Un dragon ? » s’inquiéta la plus jeune. « Tu déraisonnes ma sœur. Un dragon serait aussi dangereux pour nous que pour eux. »
« Je ne vous parle pas d'un vrai dragon ». répondit celle-ci. « Quelques jets de flammes lancés dans le ciel à la nuit tombée, accompagnés d'un peu de fumée et de grognements sonores devraient réussir à les convaincre de la présence d'un dragon à proximité de leur village. »
Ainsi fut fait. Les trois fées s'amusèrent des jours durant à simuler la présence d'un dragon pour effrayer les sorciers. Le reste du temps elles étaient tranquilles, car leurs voisins s’enfermaient dans leur maison dès la fin du jour. Mais la dixième nuit, au premier jet de flamme lancé vers le ciel, elles se trouvèrent aspergées à coup Aguamenti. Tapis dans l'ombre sur leur balai, les sorciers s’étaient réunis pour traquer leur ennemi et c’est ainsi qu’ils avaient surpris les manœuvres des trois fées. Le lendemain, une fête mémorable était organisée dans le village pour célébrer le retour à une vie normale.
« La maladie. » proposa alors la deuxième fée. « Nous allons concocter une poudre magique pour donner de la fièvre à tous ceux qui la respirerons et nous la lancerons la nuit sur le village. Une fois cloués au lit, ces sorciers exaspérants nous ficheront la paix. »
Au moment de l’exécution de leur plan, un retournement de vent malencontreux fit que les sorcières respirèrent plus de poudre encore que leurs victimes, ce qui leur laissa à peine le temps de regagner leur grotte avant d’être saisies par la fièvre. Bien avant qu’elles ne soient remises elles-mêmes, les sorciers avaient uni leurs forces et leurs connaissances pour réussir à mettre au point une potion qui les avait guéris … et les fêtes avaient recommencé.
« Moi je sais comment les vaincre pour de bon. » affirma la plus jeune fée en se levant difficilement de sa couchette après des jours de fièvre intense. « Le bonheur ! »
« La fièvre t’as fait perdre l’esprit, ma sœur. » articula difficilement son aînée en la regardant avec inquiétude.
« Pas un instant, je te l’assure. » insista la dernière sœur. « Je propose de donner à ces sorciers en cadeau de réconciliation la bague du bonheur. »
« La bague de notre mère, mais tu n’y penses pas ! » s’insurgea la deuxième sœur.
« Si j’y pense, car nous avons testé vos idées et nous ne sommes toujours pas débarrassés de ces maudits sorciers et de leurs fêtes. » répliqua la plus jeune des fées. « Alors maintenant, nous allons essayer la mienne. »
C’est ainsi que les trois sœurs offrirent à leurs voisins sorciers une bague magique procurant à son porteur un sentiment de bonheur à nul autre pareil.
Au début les sorciers se mirent d’accord pour porter la bague à tour de rôle, un jour chacun. Ils n’en furent que plus heureux et leurs fêtes n’en furent que plus brillantes et plus bruyantes.
« Patience. » réclamait la plus jeune des fées à ses deux sœurs qui la considéraient d’un œil furieux. « Je suis certaine qu’il va nous suffire d’attendre encore quelques jours pour que mon plan fonctionne. »
Et elle n’avait pas tort, car très vite les rapports commencèrent à se dégrader chez les sorciers. Ceux qui avaient porté la bague, avaient bien du mal à la retirer à la fin de la journée et ils restaient ensuite nostalgiques du bonheur ressenti en la portant. Ceux qui ne l’avaient pas encore portée étaient jaloux d’eux et attendaient leur tour avec impatience.
La crise éclata, lorsqu’un sorcier un peu plus puissant que les autres refusa d’enlever la bague à la fin de la journée qui lui était dévolue. Il en résulta un combat au terme duquel les autres réussirent à lui reprendre la bague. Mais s’en était fini de la paix.
Dans ces conditions, les sorciers les moins belliqueux et leur famille eurent tôt fait de quitter le village. Les autres, pour voir plus vite revenir leur tour de porter la bague, formèrent des clans, dont chacun cherchait à s'emparer du précieux objet à son seul avantage. Et le clan qui obtenait la bague, voyait ensuite ses membres s'affronter entre eux pour tenter de la porter plus longtemps.
Bientôt, les sorciers ne se regardèrent plus qu'avec peur ou suspicion. Rapidement, il ne fut plus question pour eux de s’amuser ensemble, ni même de se réunir. Et c’est ainsi que, grâce à la « bague du bonheur » qui avait réussi à semer la zizanie parmi eux, les trois fées acariâtres eurent raison des sorciers qui autrefois les dérangeaient avec leurs fêtes.
…
Albus venait à l’évidence de me dire quelque chose d’important, mais je ne savais pas quoi et surtout je ne voyais absolument pas quel lien il pouvait bien y avoir entre ce conte et le fait qu’il ait cru nécessaire de trafiquer les souvenirs d’un Langue-de Plomb avec la baguette que lui avait légué notre fondateur.
Chapitre 19 : : Fouilles en règle (1) by OutThereIsTheTruth
Le lendemain, quelques heures après qu’Albus soit allé rejoindre Scorpius Malefoy pour se rendre à la gare afin de prendre le Poudlard Express, j’allai chercher Delphini Black au Manoir Malefoy pour la ramener elle aussi à l’école mais par le Réseau des cheminées. A peine quelques instant après avoir quitté sa tante, elle apparaissait dans la cheminée de mon bureau, devant laquelle je l’attendais déjà avec son bagage que j’avais transporté moi-même pour lui faciliter le trajet.
Lorsque j’ouvris la porte de mon bureau pour l’escorter jusqu’à la salle commune des serpentards, je tombai sur une altercation dans le couloir entre mon collègue Filius Flitwick et plusieurs hommes parmi lesquels je reconnus immédiatement le chef des Langues-de-Plomb, Wolfgang Boswell.
« Il n’est pas question que vous procédiez à une telle fouille sans l’autorisation de Madame la Directrice. » protestait Flitwick.
« Je n’ai pas besoin de l’autorisation de qui que ce soit pour procéder à une fouille quand il s’agit d’une question de sécurité. » répliquait son interlocuteur avec hauteur.
« Mais qu’est-ce que c’est que ce cirque ? » grondai-je en avançant de quelques pas dans leur direction.
« Il n'est pas question de cirque mais de sécurité. » s’insurgea Boswell. « Nous avons eu des informations de source fiable nous indiquant que l'un ou l’une de vos élèves se serait procuré un œuf de dragon et entend le ramener frauduleusement à Poudlard dans ses bagages. Devant le danger que représenterait l’élevage d’un tel animal en dehors des structures autorisées, nous nous devons d'intercepter cet œuf. »
« Mais qu'est-ce que c'est que cette fable ridicule ? » tonnai-je. « Et pourquoi venir vous en prendre spécifiquement aux bagages de Miss Black ? »
« Je ne lui impose aucun traitement spécifique. » se défendit le chef du département des Mystères. « Je commence par ses bagages, car elle est rentrée la première à Poudlard et par le Réseau des cheminées. Concernant les autres élèves, j'ai fait stopper le Poudlard Express au milieu du trajet et il ne repartira pas avant que nous ayons pu le fouiller entièrement. »
« Quoi ! » s'étrangla Flitwick. « Arrêter le Poudlard Express ! Vous avez perdu la raison ! »
« Je ne vous permets pas … » commença le chef des Langues-de-Plomb.
« J’en avertis tout de suite Madame la Directrice. » poursuivit Flitwick. « Et je ne doute pas que celle-ci proteste contre votre comportement auprès de Madame la Ministre. »
« Madame la Ministre est bien trop occupée pour être dérangée par de telles sornettes. » s’énerva Boswell immédiatement.
Mais Flitwick se contenta de hausser les épaules en prenant d’un pas déterminé la direction du bureau de McGonagall. Boswell se retourna d’un bloc pour toiser Delphini Black, puis son regard tomba sur le bagage que l’adolescente tenait à la main.
« Miss Black, posez votre malle. Mes hommes vont l’inspecter. »
Delphini Black leva vers moi un regard inquiet. Je masquai avec peine à quel point j’étais furieux. Furieux, de ne pas pouvoir empêcher cette inspection ridicule. Mais Boswell était venu flanqué de trois de ses sbires. Dans ce couloir étroit, avec Delphini Black au milieu, si je tentais de m’opposer par la force à cette inspection, les choses risquaient de mal tourner, alors qu’il n’y avait pas réellement d’enjeu à leur interdire d’agir … à condition toutefois que ses petits camarades n’aient pas eu l’idée insensée de lui trouver un œuf de dragon pour la consoler de son enfermement.
« Vous n’avez rien à cacher Miss Black ? Laissez donc ces messieurs inspecter votre bagage. » l’encourageai-je. « Plus vite ce sera fait, plus vite nous serons débarrassés de leur encombrante présence. »
Boswell m’adressa un regard mauvais, mais je m’en moquais comme de mon premier Riddikulus.
Delphini Black lâcha son bagage d’un geste brusque. Elle n’en aurait sûrement pas fait autant s’il avait contenu quoi ce soit de fragile comme un œuf de dragon. Et je dois dire que ce constat me soulagea grandement.
L’un des Langue-de-Plomb ouvrit la malle sur un signe de son chef et commença à farfouiller dans les vêtements de l’adolescente. Delphini Black cachait sa rage de ne pouvoir empêchait cette fouille en le fixant d’un air méprisant. Jamais, elle n’avait autant ressemblé à sa mère, Bellatrix, qu’en cet instant. Mais le type cessa rapidement de s'intéresser aux vêtements et se mit à inspecter ses livres, ses cours et ses devoirs qu'il commença à répandre sur le sol sous l'œil attentif de Boswell. A le voir faire, je commençais à douter qu'il soit réellement à la recherche d'un œuf de dragon. Je ne manquai pas de le lui faire remarquer d'un ton acerbe :
« Imaginez-vous vraiment trouver un œuf de dragon entre les pages des manuels de Miss Black ? A moins que cette histoire ne soit qu'un prétexte ridicule pour une fouille qui aurait une raison moins avouable. »
Mes propos relevaient surtout de la provocation, mais en parlant au hasard, j'avais dû tomber beaucoup plus près que prévu de la vérité, car le teint de Wolfgang Boswell tourna instantanément au rouge brique.
« Je vous interdis de prétendre quoi que ce soit de semblable ! » brailla-t-il. « Rentrez dans votre bureau et laissez nous procéder à cette fouille en paix. »
« Il n'en est pas question. » rétorquai-je fermement en sortant ma baguette d'un geste prompt. « En tant que directeur de la Maison Serpentard, Miss Black est sous ma responsabilité. »
Les deux Langues-de-Plomb qui n'avaient pas la tête dans la valise sortirent eux aussi leurs baguettes. Nous nous toisâmes d'un œil suspicieux. Je me demandais comment sortir de ce face à face sans violence inutile et dangereuse pour Delphini Black, quand une arrivée imprévue changea soudainement la situation. Hagrid qui jamais ne descendait dans les cachots, arrivait à la rescousse de son élève préférée, sans doute Flitwick l'avait-il averti de ce qui se passait. Dans le couloir des cachots qu'il remplissait presque entièrement en largeur comme en hauteur, sa présence semblait plus imposante que jamais, réduisant clairement les possibilités de retraite de nos hôtes indésirables. Celui qui fouillait dans la malle de l'adolescente blêmit nettement quand le demi-géant vint lui agiter sous le nez un point de la taille d'un petit chaudron. Il en laissa tomber sur le sol toutes les affaires de classe de Miss Black qu'il tenait à la main. Boswell parcourut rapidement du regard les documents qui jonchaient le sol.
« Nous avons vérifié ce que nous voulions. Tout est en ordre, il est temps pour nous de rejoindre le Poudlard Express. » conclut-il en se dirigeant vers la sortie tout en tentant de garder une certaine contenance, mais il ne s’en colla pas moins au mur pour contourner Hagrid du plus loin possible en s’en allant.
Delphini Black n’accorda pas un regard aux quatre sorciers pendant qu’ils s’en allaient. Elle fixait d’un air désolée ses affaires disséminées sur les dalles en pierre. D’un mouvement de baguette, je rangeai le contenu de sa malle, avant de la refermer d’un autre.
Une fois Hagrid ressortit des cachots après avoir escorté Delphini Black jusqu'à la porte de sa salle commune en lui donnant des nouvelles de tous les animaux magiques qu’il avait en pension, j'allais travailler dans mon bureau. Ou plus exactement, j'essayai de travailler, car mes pensées étaient entièrement tournées vers le Poudlard Express. J'attendais non sans une certaine inquiétude le résultat des fouilles qui devaient y être menées, si McGonagall n'avait pas eu la possibilité de l'empêcher.
Chapitre 20 : Fouilles en règle (2) by OutThereIsTheTruth
Ce fut le brouhaha qui m'avertit de l'arrivée des élèves. Je jaillis de mon bureau apparemment pour aller calmer l'excitation des serpentards mais, en réalité, avant tout pour vérifier la présence d'Albus parmi eux. Après quelques braillements bien sentis de ma part assortis de différentes menaces de punition, les élèves de ma Maison rentrèrent en silence dans leur salle commune, j'avais presque dû me forcer à crier tant j'avais été soulagé d'apercevoir dans le couloir la tignasse noire d'Albus à côté de la tête blonde de Scorpius Malefoy.
J'avais à peine fini de mettre un semblant d'ordre parmi les élèves que je vis Nick Quasi-Sans-Tête venir à ma rencontre.
« Professeur Rogue, Madame la Directrice vous mande sans tarder dans son bureau. » déclara pompeusement le fantôme de Gryffondor.
Après avoir jeté un coup d'œil impératif aux préfets de la Maison pour leur signifier de ne pas laisser le désordre se réinstaller, je déférai à l'invitation :
« Merci, Sir Nicholas. J'y vais de ce pas. »
Je trouvai Minerva en émoi. Quant à Flitwick, Chourave et Lupin qui m'avait précédé, ils étaient particulièrement remontés. Les deux derniers, présents dans le Poudlard Express au moment où celui-ci avait été stoppé par les Langues-de-Plomb, nous contèrent une interception qui, je ne sais pas pourquoi, me fit penser aux attaques de train dans les westerns que la mère de Lily nous amenait parfois voir dans un cinéma moldu. Ce souvenir d'enfance me fit esquisser un sourire dont je vis le reflet dans les visages surpris de mes collègues. Je me repris à temps en affichant mon air revêche habituel.
« Et comment ça s'est terminé ? » demandai-je d’un ton sec pour les convaincre définitivement qu’ils avaient totalement imaginé ce sourire.
« Quand Filius m’a averti, je me suis rendue directement au Ministère par ma cheminée. J’ai réussi à voir Hermione qui est tombée des nues. Elle n’était absolument pas au courant de cette opération du département des Mystères. » expliqua McGonagall.
« Hermione a envoyé une Beuglante à Boswell pour lui intimer l’ordre de stopper immédiatement la fouille du train. J’en suis certain, car je n’étais pas loin de lui quand la lettre est arrivée. » enchaîna Lupin. « Et pour être sûr qu’il obtempère sans attendre, Madame la Minsitre a aussi envoyé sur place Harry flanqué d’une demi-douzaine de ses collègues. Boswell était tellement fou de rage que j’ai bien cru qu’il y allait avoir un accrochage entre les Aurors et les Langues-de-Plomb. Mais il a fini par se calmer et il a disparu avec ses sbires. »
« Madame la Ministre m’a assuré qu’elle allait mettre bon ordre aux initiatives de Boswell et que s’en était fini des enquêtes menées par le département des Mystères sur nos élèves. » conclut notre Directrice.
Je quittai le bureau directorial sur cette assurance pour retourner dans le mien, mais le loup-garou me rattrapa dans l’escalier.
« Si tu as cinq minutes, je voudrais te parler de quelque chose dans mon bureau. » demanda-t-il.
Mais n'est pas McGonagall qui veut. S'il imaginait que j'allais me plier à ses ordres, il se fourrait la patte dans l'œil.
« Pas le temps. » grommelai-je en poursuivant mon chemin.
Il m'emboita cependant le pas quand je pris la direction des cachots.
« Le dernier mec qui a été assez stupide pour me suivre dans un couloir sombre, n'est plus là pour en parler. » lui rappelai-je sur un ton grinçant sans me retourner.
« Mais moi, je ne risque rien. » s'amusa-t-il. « Vu que je te manquerais beaucoup trop s'il m'arrivait quelque chose. »
« Je te laisse à illusions. » rétorquai-je en poursuivant mon chemin.
Quand j'arrivai devant mon bureau, il était toujours sur mes talons. A moins de lui lancer un Stupefix ou quelque sort plus agressif, je devais renoncer à l'espoir de m'en débarrasser sans avoir échangé quelques mots avec lui. Je l'invitai donc à entrer d'un geste agacé.
« Trop aimable. » commenta-t-il.
« Tu ne voudrais pas que je t'offre le thé non plus. » râlai-je.
« Eh bien, puisque tu le proposes si gentiment, j’accepte bien volontiers. » répondit-il en allant se vautrer dans un des fauteuils installés devant ma cheminée.
Un instant, je regrettai l'époque pas si lointaine où il n'aurait jamais osé venir prendre le thé chez moi de peur que j'assaisonne son breuvage à la Goutte du Mort-Vivant ...
« De quoi voulais-tu me parler ? » lançai-je après avoir conjuré le thé.
« Je sais que tu as assisté à la fouille de la malle de Delphini Black. Je voulais ton avis sur ce que les Langues-de-Plomb cherchaient « réellement » dans ses bagages et donc probablement dans ceux des autres élèves. Est-ce que tu as cru un seul instant qu’il s’agissait vraiment d'un œuf de dragon ? » demanda-t-il.
« Qu'est-ce qui te fait penser le contraire ? » demandai-je à mon tour.
« Tu ne pourrais pas discuter normalement pour une fois, en répondant aux questions qu'on te pose. » s'agaça-t-il.
« C'est toi qui ne sais pas discuter normalement, comme tous les gryffondors. » répliquai-je. « Tu es venu me demander un renseignement, c'est à toi de commencer par m’en offrir un en échange. »
Tout une éducation à refaire. Ou même à faire.
« C'est bon. » soupira-t-il. « Je vais te raconter ce que j'ai observé dans le Poudlard Express et peut-être daigneras-tu alors me faire part de ton point de vue. »
Je hochai la tête, le deal semblait correct.
« Quand les Langues-de-Plomb sont entrés dans le train, ils se sont dispersés un peu partout pour fouiller des malles, mais Boswell et ses plus proches collaborateurs ont foncé droit vers le compartiment dans lequel s’étaient installés ton petit-fils et mon fils avec leurs amis. Je me suis rapproché discrètement pour voir ce que fabriquaient les Langues-de-Plomb. Je les ai vus explorer tout le contenu de leurs malles, feuilleter leurs livres et éplucher leurs parchemins. Bref, fouiller des endroits dans lesquels ils n’avaient pas la moindre chance de trouver un œuf de dragon. » raconta-t-il.
« Pareil concernant les bagages de Miss Black. » complétai-je sobrement. « Ils ont passés plus de temps à fouiller les documents qu’elle transportait que les endroits susceptibles de dissimuler un œuf de dragon. »
« Du coup, que cherchait réellement Boswell et ses hommes à ton avis ? Et pourquoi les cibler eux en particulier ? » demanda le loup-garou.
« Pas la moindre idée. » laissai-je tomber. « Mais ce qui est certain, c’est qu’ils sont dans le viseur de Boswell depuis un moment. »
« Sans doute pour de mauvaises raisons. » espéra-t-il « Puisque si lui et ses hommes n’ont pas eu le temps de fouiller tout le Poudlard Express avant l’arrivée des Aurors, ils ont pu entièrement fouiller leurs malles à tous sans rien trouver. »
Même avec l’âge, les gryffondors restent d’une naïveté déconcertante.
…
Un peu plus tard, à l’heure du dîner, j’observais les mines préoccupées des six complices répartis entre les tables de Gryffondor, Serdaigle et Serpentard. C’est alors que je repensai aux évènements de la veille, cette idée me déstabilisa au point que je laissai tomber de ma fourchette la nourriture que je m’apprêtais à avaler. Je revoyais Albus rentrer dans mon bureau avec son paquet de livres à la main pour me demander s’il pouvait les mettre dans ma malle. Comment avais-je pu gober cette excuse, alors qu’à y réfléchir je n’avais pas le moindre doute sur le fait qu’Albus soit parfaitement capable d’augmenter la taille de l’intérieur de sa malle en cas de besoin ? En fait, je n’avais rien gobé du tout. Je n’avais pas vraiment écouté, ce qu’il me disait. J’étais juste concentré sur l’idée de réussir à avoir une vraie discussion avec lui avant le retour à l’école. Tout ça pour l’entendre parler de trois fées acariâtres !
Dès la fin du repas, je me précipitai dans mon bureau pour regarder de près ce paquet de livres qui se trouvait toujours au fond de ma malle. Je ne pouvais pas m’empêcher de penser que si Boswell et ses sbires n’avaient rien trouvé dans leurs bagages, c’est que c’est moi qui avais, à mon insu, transporté ce qu’Albus et sa bande voulaient dissimuler, sachant que moi je ne risquais pas de voir mes bagages contrôlés. Un vrai plan de serpentard !
En rentrant dans mon bureau, j’allais droit à ma malle. J’essayai de soulever le premier des livres qu’Albus y avait déposé. Mais tous ses livres et documents avaient été soudés entre eux par un sort, je sortis ma baguette pour annuler le sort en question. Ou plus exactement pour essayer de le faire, car rien n’y fit. Mon incapacité à annuler un sort d’apparence aussi banale ne pouvait avoir qu’une raison, il s’agissait d’une magie que je ne maîtrisais pas, et sans doute d’une magie faite dans une langue que je ne parlais pas. J’en étais là de mes réflexions lorsque j’entendis frapper à ma porte. Albus entra sans se préoccuper du ton peu amène de ma réponse, mais il se figea en m’apercevant avec son paquet de livre à la main.
« Deux précautions valent mieux qu’une, n’est-ce pas ? » lançai-je sans attendre qu’il dise quoi que ce soit.
« C'est un sort en Fourchelang que m'a enseigné Salazar Serpentard. » murmura-t-il en guise d'explication. « Aucune magie standard ne peut en venir à bout d'après lui. »
A première vue, notre fondateur n'avait pas tort.
« Aurais-tu néanmoins l'amabilité de me dire, ce que tu m'as fait transporter ? » demandai-je d’un ton léger, alors qu’intérieurement je commençais à sérieusement bouillir.
« Je ne peux pas. » répondit-il en secouant la tête. « Papa ne me pardonnerait pas, s'il vous arrivait quelque chose à cause de moi. Et moi, je ne me le pardonnerais pas non plus. »
L’argument était tellement inattendu qu’il désarma ma colère. Pire même, je me sentais bêtement ému.
« C’est ridicule, Albus. C’est à moi d’assurer ta sécurité et non l’inverse. » articulai-je sur un ton que je m’efforçai de rendre sévère.
Albus eut un petit sourire.
« Disons qu’on se protège mutuellement alors. » suggéra-t-il.
Me protéger ! Il parlait me protéger, alors qu’achever de me faire faire des cheveux blancs aurait été plus juste.
Chapitre 21 : Retour à Nurmengard by OutThereIsTheTruth
Dans les jours suivants, je gardai à l’œil Albus et ses acolytes. Albus m’avait demandé de lui faire confiance et j’avais accepté de lui rendre son paquet de livres et de parchemins sans savoir ce qu’il contenait. Je ne pouvais pas m’empêcher de me demander si j’avais eu raison. Mais comme je n’observais rien d’inquiétant, je finis par recentrer mon attention sur ma préoccupation la plus immédiate, à savoir faire valider par Hexaphorus les douze recettes de potion que j’avais imaginées comme nécessaire pour transformer Delphini Black en Voldemort. Bien entendu, je n’étais pas naïf au point de lui faire confiance pour me faire une réponse directe. Mais, je me faisais fort, au-delà des mots, d’être capable d’interpréter ses réactions à leur lecture.
J’avais l’autorisation du Ministère pour aller lui rendre visite, mais encore fallait-il que lui accepte de m’accorder une audience. Devoir demander une « audience » à un pareil salopard, ça me rendait malade ! D’autant plus que le salopard en question était bien décidé à en profiter pour me fixer ses conditions. En réponse à mon premier message, je reçus cette réponse laconique : « Ramène-moi le petit serpent. » Je craignais d’avoir compris le sens de sa réponse, mais j’envoyai un second hibou par le truchement du directeur de la prison pour savoir de quel « petit serpent » il voulait parler. « Le tien, bien sûr. » répondit le message suivant.
Il voulait donc que je lui ramène Albus. Je n’étais pas vraiment surpris par sa demande. Albus avait tout pour intéresser un sorcier comme Hexaphorus qui avait une fascination malsaine pour la puissance magique et toute la perspicacité nécessaire pour la détecter chez les autres. J’étais furieux à la perspective de laisser ce sale type tourner autour de mon petit-fils comme un vautour. Mais, faute d’autre solution pour obtenir quelque chose d’Hexaphorus, je demandai néanmoins à Harry l’autorisation de ramener Albus à Nurmengard.
« Je te fais confiance pour savoir si c’est raisonnable et nécessaire. » me répondit laconiquement le hibou d’Harry.
Il m’accordait plus de confiance que je ne m’en accordais à moi-même sur ce coup-là. Le samedi suivant, je n’en pris pas moins la direction de la forteresse de Nurmengard avec Albus.
A peine étions-nous entrés dans sa cellule que le regard de feu d’Hexaphorus se fixa sur Albus. Je m’interposai entre eux en brandissant mes recettes de potion pour obliger le vieillard à y jeter un oeil. Il baissa un regard mécontent vers les documents que je tenais à la main.
« Tu es peut-être un peu moins mauvais que je ne l’imaginais. » laissa-t-il simplement tomber après les avoir parcourus, puis il se décala d’un pas pour pouvoir fixer Albus à nouveau.
« Albus Po … ou plutôt Albus Prince. C’est un plaisir de te revoir. » lança Hexaphorus.
Albus se contenta d’un hochement de tête. Je n’avais pas eu besoin d’insister auprès de lui sur la dangerosité de ce type, Albus en était instinctivement parfaitement conscient et se tenait sur ses gardes plus que jamais. C’était peut-être la plus grande faiblesse d’Hexaphorus que de ne pas savoir cacher combien il convenait de se méfier de lui.
« Albus, sais-tu comment fonctionnent les potions dont ton grand-père vient de reconstituer laborieusement les recettes ? » enchaîna le vieillard.
« Je sais quelle est leur finalité. » répliqua sobrement Albus en évitant de répondre directement à la question.
« Laisse-moi te le raconter. Pour tenter de métamorphoser Delphini Black en Voldemort, il faut détruire méthodiquement chez elle tout ce qui vient du côté de sa mère. Au bout du processus, Voldemort réapparaitrait. » expliqua Hexaphorus avant d’ajouter après un instant de silence. « A condition toutefois qu’il y ait suffisamment de son père en elle. Dans le cas contraire, elle mourrait tout simplement. »
S’il espérait une réaction de la part d’Albus, Hexaphorus en fut pour ses frais. Albus resta impassible, mais la manière dont il protégeait ses pensées, trahissait assez le séisme qui habitait son esprit.
« Les partisans du Seigneur des Ténèbres ont peut-être tort d’essayer de faire revenir leur Maître au lieu d’essayer de lui trouver un successeur. » enchaîna le vieux potionniste sans lâcher Albus du regard.
L’allusion, parfaitement transparente, porta la mauvaise humeur que je dissimulais avec peine à son paroxysme. De son côté, Albus qui avait eu le temps de se remettre de ses émotions, l’ignora délibérément.
« Pourquoi auraient-ils besoin de l’un ou l’autre ? Pourquoi ne peuvent-ils pas exister simplement par eux-mêmes ? » demanda-t-il en retour.
« Voilà des questions qui prouvent que tu es encore bien jeune, Albus. » remarqua Hexaphorus. « En grandissant, tu verras que nombreux sont les sorciers prêts de se mettre sous la protection d’un sorcier plus puissant qu’eux, quitte à abdiquer une partie de leur liberté. »
« Sous la protection de quelqu’un qui les humilie ou qui les torture. Vous parlez d’une protection ! » ironisa Albus. « Je peine à comprendre comment autant de sorciers apparemment sains d’esprit ont pu suivre Voldemort. »
« C’est parce que tu ne te rends pas compte à quel point ses pouvoirs étaient fascinants. » tenta de lui expliquer le vieux potionniste.
Albus secoua la tête d’un air dubitatif.
« On dirait que tu ne me crois pas. » s’agaça Hexaphorus.
« S’il avait vraiment autant de pouvoirs que vous le dites, pourquoi n’en a-t-il rien fait de plus intéressant. » releva son interlocuteur et, comme Hexaphorus le regardait avec une incompréhension manifeste, il ajouta « Exercer sa colère sur ses adversaires, exercer sa colère sur ses alliés. Terrifier les uns et les autres. Je ne vois pas bien quel intérêt ça pouvait avoir. Pour lui, je veux dire. »
Le vieillard considérait Albus d’un air plus circonspect.
« Peut-être avait-il de bonnes raisons d’être en colère. » suggéra-t-il.
« Même s’il avait de bonnes raisons d’être en colère, il aurait pu utiliser ses pouvoirs pour corriger les raisons de cette colère plutôt que de la faire subir aux autres. » répondit Albus.
« Et comment selon toi aurait-il pu corriger ses raisons ? » demanda Hexaphorus, il employait délibérément un ton léger, mais son attention était à son maximum.
La mienne aussi, je dois dire. J’étais plus que curieux d’entendre la réponse. Même s’il ne m’en avait pas parlé depuis un certain temps, je savais tout l’intérêt qu’Albus avait pour Voldemort. Serpentard comme lui, Fourchelang comme lui, puissant comme lui, celui qui s’était fait appeler le Seigneur des Ténèbres, l’amenait à se questionner sur lui-même.
« Eh bien, d’après ce que j’ai appris, Voldemort en voulait aux gens qui ont maltraité et abandonné sa mère. Ceux à cause desquels, elle est morte juste après lui avoir donné naissance. Ceux à cause desquels, il a passé toute son enfance dans un orphelinat moldu. Je crois que c’est parce qu’à cause d’eux, il a grandi seul qu’il était en colère vis-à-vis du monde entier et que ça ne lui a pas suffi de se venger des responsables. » expliqua Albus.
D’Hexaphorus ou de moi, je ne sais pas qui était le plus sidéré. Hexaphorus, parce qu’il apprenait des détails, dont il ne savait probablement rien. Moi, parce que je me demandais d’où Albus pouvait bien sortir les détails en question.
Certes, Lucius et Narcissa Malefoy n’auraient sans doute pas refusé de répondre à ses questions, mais encore aurait-il fallu qu’ils connaissent avec précision la vie de Tom Jedusor avant qu’il devienne Voldemort, et très franchement je doutais que ce dernier ait fait à qui que ce soit ce type de confidence. Ou alors Albus avait contrevenu à mes instructions et utilisé la Legilimencie pour aller « faire son marché » dans l’esprit mal fermé de son père. Mais, dans ce cas, pourquoi n’en aurait-il pas fait autant, lorsqu’il a cherché une solution pour détruire les Horcruxes ? Je ne comprenais donc pas d’où il pouvait sortir des informations aussi détaillées et que ça ne manquait pas de m’inquiéter. Je reportai cependant à plus tard la résolution de ce problème pour ne rien perdre des échanges entre Hexaphorus et Albus.
« Et alors ? Tu ne comprends pas qu’il ait voulu venger sa mère et se venger lui-même ? » sembla s’étonner Hexaphorus.
« Plutôt que de se venger, Voldemort aurait plutôt pu essayer de changer le passé. » avança Albus. « Il aurait pu aller voir sa mère avant son accouchement, un Retourneur de temps aurait fait l’affaire, lui dire de s’accrocher, que son fils allait avoir besoin d’elle, en lui apportant les potions nécessaires pour la soigner et les quelques gallions dont elle avait besoin pour résoudre ses problèmes matériels. Ce n’était pas très compliqué. »
« Ce n’était peut-être pas très compliqué, c’est interdit de retourner dans le passé pour changer. » remarqua Hexaphorus.
Albus eut un geste vague de la main.
« Ce n’était pas plus interdit que le reste de ce que Voldemort a fait. » répliqua-t-il.
« En effet. » admit le vieillard. « Alors comment expliques-tu qu’il ne l’ai pas fait ? »
« Je pense que la colère qu’il ressentait lui convenait très bien, qu’elle était plus importante pour lui que d’essayer de sauver sa mère et d’avoir la chance de passer son enfance à ses côtés. » articula lentement Albus.
« Je crois comprendre que tu n’aurais pas fait le même choix, Albus. » releva Hexaphorus.
« Surement pas, en effet. » répondit mon petit-fils.
« Intéressant. » murmura son interlocuteur.
Le plus intéressant, pour moi, c’est que ses réponses étaient la preuve qu’Albus avait déjà réfléchi longuement à ces questions et que j’avais raison de penser qu’il n’accepterait surement pas qu’un sort contraire s’abatte sur Delphini Black. Si je voulais le préserver lui de la tentation d’utiliser un jour ses pouvoirs pour contrevenir gravement aux règles régissant le monde magique, alors je n’avais pas d’autre choix que de trouver une solution pour la sauver elle maintenant …
Hexaphorus revint aux recettes de potion que j’avais déposé sur la table. Il les considéra pendant quelques instants avant de lever les yeux vers moi.
« Et maintenant, qu’est-ce que tu envisages pour empêcher ça, Severus ? » interrogea le vieillard.
Chapitre 22 : Sur un arbre perché by OutThereIsTheTruth
Après qu’Hexaphorus ait, à sa façon, validé les recettes de potion que j’étais venu lui soumettre, j’avais écourté notre entrevue. J’avais obtenu de lui ce que j’étais venu chercher et n’avais pas la moindre intention de lui faire en retour quelque confidence que ce soit. Il avait beau être enfermé derrière les murs épais de la forteresse de Nurmengard, je n’étais pas absolument certain qu’il soit incapable de communiquer avec l’extérieur.
A l’évidence, Hexaphorus n’était pas un prisonnier comme les autres. Le cachot dans lequel il était enfermé, s’était transformé au fil du temps en un laboratoire de potionniste aussi complet que le mien. Sans doute sa capacité à fournir toutes les potions nécessaires aux habitants de la forteresse, prisonniers comme gardiens, lui valait-elle ce privilège, et je ne pouvais pas prendre de risque qu’une fois de temps en temps, elle lui offre aussi la possibilité de faire passer librement des messages.
Et puis, j’avais une autre raison de hâter notre départ, je voulais vérifier une idée qui venait de me traverser la tête. Dès notre retour, je fonçai directement au bureau directorial. McGonagall ne cacha pas sa surprise de me voir débouler sans précaution dans son domaine.
« Pardon, Minerva, d’arriver à l’improviste, mais je dois parler urgemment à l’un de vos hôtes. » m’excusai-je.
« Mais, je vous en prie, Severus, continuez à faire comme chez vous, puisque vous avez déjà commencé. » soupira-t-elle.
Un rapide demi-tour sur place et je me retrouvais face aux portraits des anciens directeurs et directrices qui tapissaient le mur.
« Dans mon bureau ! Immédiatement ! » lançai-je d’un ton impératif en fixant l’un d’entre eux.
Je repartis du même pas sous le regard sidéré de notre Directrice. En rentrant dans mon bureau, je fus accueilli par des rires. Un très vieux sorcier pouffait dans mon miroir en me regardant par-dessus ses lunettes en demi-lune.
« Ravi que ça vous amuse autant, Albus. » grondai-je entre mes dents.
« Il y a bien longtemps que je ne m’étais pas fait convoquer de façon aussi autoritaire, ça me rajeunit d’au moins cent ans ! » s’amusa-t-il.
Je commençais à faire les cent pas dans mon bureau.
« Au lieu de me donner le tournis, Severus, vous pourriez peut-être me dire ce qui me vaut cette invitation impérative de votre part. » réclama Dumbeldore.
Arrivé au bout du bureau, je me retournai d’un bloc pour lui faire face :
« Je suis sûr que c’est vous qui êtes allé raconter à Albus, au « petit Abus » comme vous dites, l’histoire de la mère de Tom Jedusor. »
« Oui et non. » répondit-il de façon énigmatique.
« Oui et non, quoi ? » m’agaçai-je immédiatement.
« Oui, c’est moi qui lui ai raconté cette histoire. Mais, non, ce n’est pas moi qui suis allé le trouver, c’est lui qui est venu à moi. » expliqua-t-il.
« Il serait allé vous voir dans le bureau de Minerva ? Je peine à le croire. » doutai-je.
« Pas exactement. » admit-il. « J’étais dans mon poste d’observation favori dans la coursive au-dessus du Hall quand il est venu m’interroger. »
« Votre poste d’observation ? » répétai-je complètement perdu.
« Un tableau de sous-bois que j’ai fait installer là-haut quand j’étais Directeur. Je viens m’y poster quelques fois. Je grimpe dans un arbre, bien que ça ne soit plus tout à fait de mon âge, et de là je peux observer, d’un côté, notre cher Rusard qui surveille la porte d’entrée en enguirlandant les élèves pour toutes sortes de motifs plus ou moins imaginaires, et, de l’autre côté, l’entrée de la Grande Salle et même les élèves assis près de la porte. J’adore cet endroit. » raconta-t-il.
« Par Merlin, Albus, vous êtes aussi maboul mort que vivant ! » m’exclamai-je avant d’ajouter. « Cependant, je peine à croire que l’autre Albus ait réussi tout seul à vous retrouver perché sur une branche au milieu de votre de sous-bois ! »
« En effet, c’est le Baron Sanglant qui lui a raconté où il avait des chances de me rencontrer. » précisa Dumbeldore.
Le Baron, bien sûr …
« Albus est venu me voir l’an dernier après que vous lui ayez montré Voldemort dans un de vos souvenirs. » poursuivit Dumbeldore. « Il était très troublé par ce qu'il avait vu et il avait envie de comprendre pourquoi Voldemort en était arrivé à avoir un tel comportement même avec ses partisans. Je lui ai raconté ce que je savais de la jeunesse de Tom Jedusor, car c'est sans doute dans son enfance qu’il faut chercher l’origine de la folie meurtrière dans laquelle il a basculé. »
« Et il ne vous est pas venu à l’esprit de m’avertir que mon petit-fils vous avez posé des questions à ce sujet ? » repris-je sans pouvoir m’empêcher d’ajouter. « Vous n’allez pas recommencer comme avec Harry ! »
« Qu’est-ce que vous voulez dire, Severus ? » s’inquiéta-t-il.
J’étais trop agacé pour faire taire les amertumes du passé :
« Je parle d'une période à laquelle vous vous êtes installé comme figure paternelle dans la vie d’Harry, alors même que j’étais cantonné au rôle de méchant de service ! »
« Oh, mon cher Severus, ne me dites pas que vous m’enviez encore ce petit moment pendant lequel j’ai eu le privilège de m’occuper d’Harry. Si vous regardiez objectivement les choses, vous verriez que c’est moi qui ai tout à vous envier et non l’inverse. » soupira-t-il. « Quant au petit Albus, je ne vois pas bien ce que vous craignez. Il me prend tout juste pour un vieil excentrique, mort qui plus est, dont il partage le prénom, alors qu’il vous adore, qu’il vous admire et que c’est pour éviter de vous obliger à évoquer des souvenirs douloureux qu’il est venu me voir moi pour parler de Voldemort. Sans compter qu’il grandit et qu’il n’y a rien d’étonnant à ce qu’il essaye de multiplier les sources et de croiser les informations sur les sujets qui le préoccupent. »
« En effet. Salazar Serpentard, Lucius Malefoy, le Baron, Lupin et vous. » égrenai-je avant d’ajouter. « Entre tous, vous êtes sans conteste le plus dangereux, Albus. »
« Vous me flattez, mon cher Severus. » s’amusa-t-il. « Mais n’est-ce vraiment que pour souligner le danger que je représente, selon vous, pour votre petit-fils que vous m’avez convoqué toute affaire cessante dans mon bureau ? »
« Pourquoi ? Vous aviez mieux à faire, Albus ? Une petite sieste urgente ? » persiflai-je. « Mais vous n’avez pas totalement tort. Je voulais aussi vous montrer douze recettes de potions, en espérant que vous puissiez avoir une petite idée sur la manière de bloquer le processus de transformation qui s’opérerait chez la personne qui absorberait ces potions. »
Je lui montrai tour à tour chacune des recettes des douze potions que j’avais reconstituées. Quand j’en terminai, le visage de notre ancien Directeur affichait une gravité bien inhabituelle.
« Est-ce que c’est ce que je crois ? » murmura-t-il.
« Si vous croyez qu’il s’agit de la série de potions qui avaient été conçues pour métamorphoser Delphini Black afin de faire réapparaître Voldemort, alors vous avez raison. » répondis-je. « A condition qu’il y ait suffisamment de son père en elle, ce qui ne semble pas évident à première vue. »
« Elle est tout de même Fourchelang comme tous les Gaunt. » remarqua Dumbeldore à voix basse.
« C’est vrai. » soupirai-je. « Ce qui signifie sans doute qu’elle n’est pas la seule à être en danger, car ces fichues potions pourraient aboutir effectivement au retour de Voldemort si on obligeait la petite Black à les absorber. Il va donc falloir … »
« Il va donc falloir prendre un risque ! » m’interrompit le portrait de Dumbeldore.
« De quel risque parlez-vous, Albus ? » m’inquiétai-je.
« Harry ne pourrait plus être transformer en vous, Severus. » affirma-t-il au lieu de répondre à ma question.
« Ce n’est pas grave. Je n’avais pas l’intention de me servir de mon fils pour ressusciter. » ironisai-je.
Dumbeldore continuait de me fixer sans rien dire, comme s’il attendait que je comprenne le sens caché de ce qu’il venait de me dire. Petit à petit ses paroles commencèrent à infuser dans mon cerveau.
« Ce que vous voulez dire, Albus, c’est qu’Harry ne pourrait plus être transformé en moi à cause de l’adoption de sang. Harry n’est pas réellement le fils de James Potter, mais il n’est plus tout à fait le mien non plus. » réfléchis-je à voix haute.
« En effet. » confirma-t-il.
Je secouai la tête d’un air dubitatif :
« Et vous suggérez quoi ? Que j’applique le même traitement à Delphini Black ? Mais Harry était un bébé quand vous lui avez fait boire cette potion, son physique était encore malléable. Il a pu sans dommage prendre les traits de James Potter en grandissant. Mais Delphini Black est adulte ou presque, son apparence ne peut plus se transformer radicalement. Dans ces conditions, la potion d’adoption de sang la tuerait ! »
« Evidemment, c’est l’inconvénient de cette potion dans sa version actuelle. » admit Dumbeldore. « Mais, mon cher ami, vous êtes le meilleur potionniste que j’ai connu au cours de ma très longue vie. Je suis certain que vous allez trouver une solution pour bloquer la transformation physique qui accompagne l’adoption de sang. »
Je recommençais à marcher de long en large les mains dans le dos, puis je m’arrêtai à nouveau pour fixer le portrait d’Albus Dumbeldore dans mon miroir.
« Vous savez, Albus, que même si je trouve une solution, ce sera une solution parfaitement théorique, une solution que je ne pourrais absolument pas tester avant de l’utiliser sur Delphini Black ! » m’écriai-je.
« Je sais, et c’est bien pour ça que je disais qu’il allait falloir prendre un risque. » soupira le Dumbeldore du miroir.
Chapitre 23 : Amulette et devinette by OutThereIsTheTruth
Les jours suivants, j’étais tellement concentré et même obnubilé par les recherches vers lesquelles m’avait orientées le portrait de Dumbeldore que j’étais presque obligé de me forcer pour balancer quelques sarcasmes à mes crétins de collègues et pour distribuer à tous les demeurés qui peuplaient mes cours, les punitions qu’ils méritaient.
Un soir où je travaillais encore à une heure tardive enfoncé dans mon fauteuil préféré devant ma cheminée, un coup léger fut frappé à ma porte. Je levais un regard surpris vers mon horloge dont l’aiguille pointait vers « plus du tout l’heure de recevoir des visites ». Mais avant que j’aie eu le temps d’ouvrir la bouche pour envoyer l’importun visiter les puissances infernales, la porte s’ouvrit sur la seule personne qui avait l’autorisation de rentrer dans mes quartiers à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit. Dans l’encadrement de la porte, Albus était livide. Quand il avança dans la pièce, je me rendis compte qu’il n’était pas seul. Delphini Black, Rose Granger-Weasley, Scorpius Malefoy et Teddy Lupin entrèrent à sa suite avec des mines tout aussi décomposées. Tellement décomposées que je ne songeai même pas à me mettre en colère de voir mon appartement ainsi envahi. Je me levai d’un bond, indifférent à la chute de l’antique grimoire que je consultais à leur entrée.
« Il a enlevé Victoire. Il va la tuer, si on ne la lui apporte pas. Il nous a laissé une heure. On a essayé de lui dire qu’on ne sait pas où elle est, mais il ne nous a pas cru ! » débita Albus à toute vitesse avant même que j’ai pu lui demander de m’expliquer la raison de leur intrusion nocturne.
Je levai une main pour l’interrompre :
« Je ne comprends strictement rien, Albus. Qui a enlevé Victoire Weasley ? Qui menace de la tuer ? »
« Wolfgang Boswell. » répondit Rose Granger-Weasley d’un ton sépulcral.
« Boswell ? Le chef du Département des Mystères ? Ça n’est pas possible. Pourquoi aurait-il fait ça ? » m’écriai-je.
« Si c’est possible. Il est prêt à tout pour récupérer ce machin. Ça le rend complètement fou ! » assura véhémentement la gryffondor.
J’eus une brusque illumination. Je repensai à cette histoire de fées acariâtres incompréhensible que m’avait raconté Albus quelques semaines auparavant.
« La bague du bonheur ! » m’écriai-je en me tournant vers lui.
« Oui. A part que ce n’est pas une bague mais une amulette, et qu’elle procure autre chose qu’un sentiment de bonheur. » précisa celui-ci.
« Et elle procure quoi ? » demandai-je.
« Du temps. » cracha Albus du ton dégoûté qu’il aurait employé pour parler d’une chose parfaitement répugnante.
« Du temps justement, on n’en a pas. » intervint Teddy Lupin d’une voix angoissée. « Il faut absolument aller chercher cette chose maintenant ou il va tuer Victoire ! »
« Ne confondons pas vitesse et précipitation, Monsieur Lupin. Rien ne sert de courir dans tous les sens, il faut établir une stratégie claire avant de sortir d’ici. Où Boswell a-t-il emmené Miss Weasley ? Que vous a-t-il donné précisément comme instructions ? » interrogeai-je.
« Il est tout en haut de la Tour de Serdaigle avec Victoire. Il a jeté un sort dans la pièce où il se trouve pour que seules Rose et Delphini puissent y pénétrer, elles doivent lui apporter l’amulette et il a promis de libérer Victoire en échange. D’après ce qu’on a vu, il a un balai avec lui, on pense qu’il a prévu de s’enfuir directement de là-haut quand il aura récupéré, ce qu’il veut. » résuma Scorpius Malefoy d’une voix qu’il s’efforçait de rendre ferme.
« Je ne comprends pas grand-chose à votre histoire, mais je sais une chose, c’est que vous avez eu tort d’essayer de la régler tous seuls. Et je ne compte pas commettre la même erreur. » affirmai-je avant d’ajouter à l’intention d’Albus en me dirigeant vers ma cheminée. « Je vais chercher ton père. »
Malheureusement, ma cheminée ne réagit pas quand j’entrai dedans avec l’intention de me rendre chez Harry.
« Il a dû faire déconnecter toutes les cheminées de Poudlard du Réseau après avoir réussi à pénétrer dans l’école. Pour le chef du département des Mystères, ce n’est pas très difficile. » s’écria Rose Granger-Weasley en réussissant à pâlir encore.
Je ressortis de ma cheminée avec cette fois une vraie anxiété. La déconnection de ma cheminée du Réseau rendait soudain tangible l’histoire incroyable qu’ils étaient venus me raconter. Aux grands maux, les grands remèdes …
« Où est votre père ? » demandai-je en me tournant vers Teddy Lupin.
« Dans le bureau du professeur McGonagall » répondit-il.
C’est vrai. Je savais qu’ils devaient travailler sur les comptes de l’école ce soir pour préparer une réunion imprévue du conseil d’administration. Ils m’y avaient convié, mais j’avais décliné pour privilégier mes recherches sur les potions d’adoption de sang.
« Mais on ne peut pas aller le chercher. » enchaîna le fils du loup-garou « On a essayé, mais le professeur Babbling s’est postée dans l’escalier qui mène au bureau du professeur McGonagall. Elle a brandi sa baguette et menacé de nous tuer si on approchait. »
« Le professeur Babbling ? Menacer de vous tuer ? Mais c’est impossible ! » m’exclamai-je incrédule.
A part ces runes, je n’avais vu Bathsheda Babbling s’intéresser à quoi que ce soit, alors de là à l’imaginer complice de Wolgang Boswell …
« Elle doit être sous Imperium. » avança Delphini Black. « D’ailleurs, c’est elle qui a dû faire rentrer Boswell dans l’école. »
Petit à petit, un vrai sentiment d’inquiétude s’insinuait en moi. Cela ressemblait de plus en plus à un plan bien ficelé. Si je considérais Boswell comme un esprit obtus – il restait persuadé que ma vraie place était derrière les murs d’Azkaban et que jamais je n’aurais dû être innocenté par le Magenmagot - je ne faisais pas l’erreur de le sous-estimer comme adversaire. De réelles qualités de combattant et un grand sens de l’organisation. Bref, un type redoutable.
« Qu’est-ce que vous avez comme indications pour retrouver ce que veut Boswell ? » demandai-je.
« Une sorte d’énigme incompréhensible. La seule chose dont on est sûr, c’est que ce truc est quelque part dans l’école. » se lamenta Rose Granger-Weasley, avant de sortir un bout de parchemin de sa poche qu’elle lut sur un ton tragique. « Le temps file immobile et ma destinée rejoint celle des autres mortels ! »
Incompréhensible, en effet.
« Bon, soyons pragmatique. » soupirai-je « Si cette … amulette donne simplement « du temps », comme vous dites, il doit être compliqué de vérifier immédiatement son bon fonctionnement. Apportez à Boswell n’importe quel objet pour qu’il libère Miss Weasley, et on réglera le reste après. »
Ils secouèrent la tête d’un air dépité.
« Impossible. » m’expliqua Albus. « Nous ne savons pas à quoi cet objet ressemble, alors qu’apparemment lui en a vu des représentations. »
Encore une impasse. C’était frustrant, mais je n’avais pas le temps de m’agacer, car en jetant un coup d’œil à mon horloge, je vis qu’elle indiquait désormais « dépêche-toi ».
« Il nous reste quelques instants pour chercher une solution à votre énigme. Si nous ne trouvons rien je monterais affronter Boswell. Seul. Il n’est pas question de vous vous mettiez en danger une fois de plus. » indiquai-je.
« Mais Victoire … » s’angoissa Teddy Lupin.
« Réfléchissez à cette fichue énigme, c’est la meilleure façon d’aider à la sauver ! » lançai-je d’un ton impératif. « Miss Granger-Weasley, relisez la nous ! »
« Le temps file immobile et ma destinée rejoint celle des autres mortels. » répéta cette dernière.
Malheureusement, ces mots n’éveillaient toujours pas la moindre lumière dans mon esprit inquiet.
« Ce sont les Parques qui filent la destinée des mortels. » dit soudain une voix qui semblait sortir du mur.
Personne en vue, mais au timbre caverneux, il n’y avait pas à s’y tromper. C’était le fantôme de la Maison Serpentard qui venait de parler. D’ailleurs, Albus fit deux pas en direction du mur, pendant que les autres faisaient instinctivement un pas en arrière.
« Vous avez une idée, Baron ? S’il vous plait, venez nous aider ! » le pria Albus.
« C’est que le professeur Rogue n’apprécie pas que je rentre chez lui sans m’être fait annoncer. » répondit la voix du Baron.
« Ce soir, il s’en fiche. » lui assura Albus d’un ton encourageant.
Sûr que je n’étais plus à ça près …
Le Baron sortit prudemment du mur en coulant vers moi un regard inquiet. Est-ce que, sans m’en rendre compte, j’étais de mauvaise humeur ces derniers temps au point de faire peur même au fantôme de la Maison ?
« Baron, s’il vous plaît, dites-nous vite ce à quoi vous avait pensé en entendant Rose lire cette phrase. C’est vraiment très urgent. » le pressa Albus.
« En fait, les mots prononcés par Miss Granger-Weasley m’ont surtout rappelé une scène à laquelle j’ai assisté il y a longtemps. » répondit le Baron Sanglant qui fronçait ses sourcils fantomatiques comme s’il faisait un effort pour se souvenir de quelque chose.
« Ça vous a rappelé quoi ? » le pressa Albus.
« En fait, cette phrase, ou plutôt une partie de cette phrase, je l’ai déjà entendue prononcée. » dit-il lentement pendant que nous retenions notre souffle pour ne pas troubler sa réflexion.
« Celui qui l’a prononcé, était un homme venu rendre visite à l'infirmerie à son fils malade. » se remémora-t-il. « En redescendant, il s'est arrêté sur le palier du premier étage près de cette sculpture qui représente les trois Parques sous les traits de trois mégères à l’apparence proprement terrifiante. C’est un cadeau que quelqu’un a cru bon de faire à l’école, le directeur de l’époque n’a pas osé s’en débarrasser, mais il l’a relégué dans ce coin sombre pour ne pas faire peur aux élèves les plus jeunes. »
Je l’aurais bien secoué pour qu’il accélère, mais la nature fantomatique de mon hôte m’empêchait de recourir à une telle méthode. Il poursuivit donc à son rythme :
« Alors que moi-même je me tiens généralement loin de cet horrible trio, j’ai eu la surprise de voir cet homme s’en approcher en redescendant de l’infirmerie. En même temps, il regardait partout autour de lui comme pour vérifier que personne ne le voyait faire, c’est parce que je flottais près du plafond qu’il ne m’a pas vu. Il s’est approché des trois Parques et, malgré la distance, il m’a semblé qu’il passait quelque chose autour du cou de l’une d’entre elles, et c’est alors qu’il a prononcé cette phrase bizarre, « Aujourd’hui, ma destinée rejoint celle des autres mortels ». Mais à ce moment-là, le Moine Gras m’a appelé parce que Peeves … »
« C’est ça ! C’est forcément ça ! » s’écria Rose Granger-Weasley sans se préoccuper d’interrompre le Baron Sanglant.
Albus remercia le fantôme avant de se ruer comme les autres vers la porte. Je les suivis non sans prier le Baron de nous accompagner :
« Venez, s’il vous plait, Baron, nous pourrions avoir encore besoin de votre aide. »
Chapitre 24 : Tour de Serdaigle by OutThereIsTheTruth
Les cinq adolescents avaient plusieurs dizaines de mètres d'avance sur moi. Cependant, je les rattrapai sans mal, car en débouchant dans le hall au sortir des cachots, ils s'étaient heurtés à un obstacle inattendu en la personne de Rusard qui débitait sur eux un chapelet d'imprécations et de menaces, et ils hésitaient clairement sur ce qu'il convenait de faire pour s'en défaire. Moi pas. N'ayant pas le temps et encore moins l'envie de discuter, je sortis ma baguette et je stupefixai Rusard ainsi que Miss Teigne deuxième du nom, sans même prendre le temps de m'arrêter.
« Bougez-vous ! » houspillai-je le petit groupe qui me regardait avec effarement.
Ils reprirent leur course, derrière moi cette fois, en direction de l'escalier qui menait à l'infirmerie. Arrivés devant la sculpture des trois Parques, sur un signe de celle-ci, Albus et Teddy Lupin aidèrent Delphini Black, la plus menue du groupe, à se hisser sur le socle au milieu des trois mégères, selon les termes du Baron. Sans perdre de temps, elle commença à explorer les statues que Rose Granger-Weasley éclairait d'un Lumos. Le suspens fut heureusement de courte durée. Du cou de la deuxième statue qu'elle inspecta, Delphini Black détacha quelque chose.
« Je l'ai. » Indiqua-t-elle simplement avant de se laisser glisser dans les bras d'Albus pour redescendre.
Un instant plus tard, nous étions six penchés au-dessus de l'amulette posée sur la paume ouverte de Delphini Black et même sept en comptant le Baron qui voletait au-dessus de nous. C’était un simple disque percé d'un blanc immaculé suspendu à un cordon de la même couleur. Pas étonnant qu'il ait pu rester longtemps attaché au cou d'une statue elle-même blanche sans que personne ne le remarque.
« Ce truc a l'air tellement ... banal. » murmura finalement Miss Black.
« Et inoffensif. » renchérit dans un soupir Rose Granger-Weasley.
Quoi qu’il en soit, nous avions trouvé « ce truc » dont je peinais encore à comprendre le danger qu'il représentait, et cette découverte dans un temps record était tout à fait inespérée.
« Baron, notre gratitude vous est acquise. » affirmai-je. « Puis-je abuser de votre temps jusqu'à vous demander d'aller prévenir Madame la Directrice, et son adjoint qui doit se trouver avec elle, que nous montons au sommet de la Tour de Serdaigle pour libérer Victoire Weasley des griffes de Wolfgang Boswell ? Merci de passer par le plafond ou le plancher pour éviter d’être aperçu par Professeur Babbling qui pourrait bien être complice malgré elle de cet individu. Profitez-en d’ailleurs pour dire à Madame la Directrice et au Professeur Lupin de se méfier, car le Professeur Babbling pourrait essayer de les tuer quand ils voudront sortir du bureau. »
Le Baron s'évapora après avoir accepté d'un hochement de tête la mission que je lui avais confiée. Delphini Black empocha sans plus de cérémonie le pendentif. Et je dévalai l'escalier suivi des cinq adolescents, le temps pressait. Dans le hall, Rusard et Miss Teigne étaient toujours étendus sur le sol.
« Je prends par l'extérieur. » indiqua Teddy Lupin en se dirigeant vers la Tour de Gryffondor.
Il n'était plus temps de le rappeler pour essayer de comprendre ce qu'il entendait faire, je fonçai pour ma part vers la Tour de Serdaigle, les quatre autres sur les talons.
A mi-hauteur, après avoir dépassé l'entrée de la salle commune des serdaigles, j'arrêtai ma course. Je conjurai une beuglante que je tendis à Scorpius Malefoy.
« Restez là, Monsieur Malefoy, et, dans quelques instants, ouvrez cette Beuglante. Faites comme si je vous avais surpris dans l’escalier et que vous essayiez de m'empêcher de monter, ça va distraire Boswell. » lui ordonnai-je.
Je jetai un sort sur mes chaussures pour étouffer le bruit de mes pas et, d'un geste, j'indiquai à Albus d'en faire autant. Boswell devrait croire que Delphini Black et Rose Granger-Weasley montaient seules. Albus profita de notre arrêt pour conjurer aussi un serpent de glace. Je le regardai faire avec une certaine circonspection, car je ne partageai pas totalement sa conviction sur le fait « qu’un serpent de glace, ça peut toujours servir ». En l'occurrence, Albus n'avait pas tort, car il servit.
Albus avait ordonné à sa création de suivre les deux filles et je pus visualiser à quel endroit Boswell avait installé son sort de protection empêchant d'entrer tout autre que Rose Granger-Weasley et Delphini Black quand le serpent de glace se heurta à un mur invisible. J'avais malheureusement raison de ne pas sous-estimer Boswell en tant que stratège comme en tant que sorcier. Il avait installé sa barrière magique suffisamment en amont pour empêcher un éventuel intrus de voir ce qu'il se passait dans la pièce où il se tenait avec Victoire Weasley et où Miss Black et Miss Granger-Weasley les avaient rejoints.
Ma propre ruse fonctionna aussi fort heureusement. A peine, les deux adolescentes étaient-elles rentrées dans la pièce que Scorpius Malefoy ouvrit la Beuglante qui fit éclater ma voix un peu plus bas dans l’escalier :
« Malefoy, Potter, qu'est-ce que vous fabriquez ici au milieu de la nuit avec des airs de conspirateurs. Eh, vous, Monsieur Lupin, non seulement vous ne faites pas régner l'ordre, mais vous encouragez le désordre. Vous faites honte à votre insigne de préfet, ce qui ne me surprend guère de la part d'un gryffondor ! »
« Qu'est-ce qu'il se passe ? » gronda Boswell à voix basse depuis l'intérieur de la pièce.
« J'ai peur que le professeur Rogue n’ait surpris les amis qui nous attendent dans l'escalier. » répondit Delphini Black sur un ton alarmé.
Pendant ce temps, ma voix continuait de tempêter de beaucoup plus bas dans la tour :
« Pourquoi restez-vous en travers de l'escalier ? Vous ne prétendriez quand même pas m'empêcher de monter ! »
En espérant que Boswell soit suffisamment distrait par ce qu’il croyait être mes cris, je conjurai un miroir à un endroit stratégique nous permettre à Albus et moi de voir ce qui se passait à l'intérieur de la pièce. Rose Granger-Weasley et Delphini Black faisaient face à un Wolfgang Boswell aux yeux exorbites. De derrière celui Victoire Weasley était couchée par terre, immobile, probablement ligotée par des liens magiques. Un balai, manifestement un balai de course, même si je n'y connaissais pas grand-chose, était posé contre le mur.
Mais il ne suffisait pas que je voie ce qu'il se passait, il fallait aussi que je puisse intervenir au cas où les choses dégénéreraient. Je m'attaquai au sort qui interdisait l'entrée dans la pièce. Comme je le craignais, il était puissant. J'en avais pour un certain temps d'arriver à l'annuler. Le plus positif était que Boswell ne se rendait pas compte de mes manœuvres, préoccupé qu'il était par ma présence supposée dans l'escalier.
« Bande de petits crétins maladroits ! Comment vos amis peuvent-ils être assez stupides pour s'être faits surprendre par ce mangemort mal repenti de Rogue ? A moins qu'ils ne l'aient fait exprès ! » s’emporta-t-il.
« Ils ne l’ont pas fait exprès. Bien sûr que non ! » lui assura Delphini Black.
« De toutes façons, vous n'avez pas plus de secours à attendre de Rogue que de vos lamentables complices, car ils seront bien incapables d’entrer ici. Alors maintenant soit vous m'apportez ce que je vous ai demandé, soit je jette Victoire Weasley par cette fenêtre et vous ensuite ! » menaça-t-il.
« Inutile de vous énerver et de nous menacer. Nous l'avons. » répliqua Delphini Black en le toisant droit dans les yeux.
Cette réponse n’avait en soi rien de blessante. En revanche, l'adolescente avait mis dans son ton un incroyable mépris. Seule sa mère Bellatrix aurait été capable d’en exprimer autant en si peu de mots. Mais Boswell ne l'avait probablement même pas entendue, car, en même temps qu'elle prononçait ces paroles, elle avait brièvement sortie de sa poche le pendentif qu'elle avait récupéré au cou de la statue pour l'y replonger immédiatement. En l'apercevant, une lueur de folie était passée dans le regard de Boswell.
J’avais eu raison du premier sort lancé par ce taré. Mais immédiatement derrière ce premier périmètre de sécurité, je m’étais heurté à un deuxième sur lequel je travaillais encore, alors qu’à voir le comportement de Boswell, le moment où j'allais devoir intervenir s'approchait à grand pas. A côté de moi, Albus s'agitait. Je ressentais son inquiétude qui montait en même temps que la mienne.
« Donnez-moi cette amulette. Immédiatement ! » criait le chef des Langues-de-Plomb sur un ton de plus en plus hystérique.
« D'abord, vous libérez ma cousine. » réclama d'une voix ferme Rose Granger-Weasley en s'avançant de deux pas pour se placer devant Delphini Black.
Ce simple mouvement et cette petite opposition semblèrent faire basculer le peu de raison qui habitait encore Boswell.
« Doloris ! » hurla-t-il en pointant sa baguette vers Rose Granger-Weasley.
Celle-ci eut heureusement le réflexe de s’écarter, mais pas assez vite. Le sort l’atteignit à l'épaule. Elle s'écroula à genoux dans un gémissement. Il aurait fallu que j’intervienne immédiatement pour neutraliser ce cinglé, mais j’en étais encore à me débattre avec l’invraisemblable système de sécurité qu’il avait mis en place. A croire que son métier l’avait rendu complètement parano.
Delphini Black s’était précipitée pour soutenir son amie. Elle ne vit pas que Boswell pointait sa baguette sur elle. Je sentis Albus se mettre à trembler à côté de moi.
« Accio Immuable » lança le chef des Langues-de-Plomb.
Et le pendentif blanc quitta la poche de Delphini Black toujours accroupie près de Rose Granger-Weasley pour atterrir dans la main de Boswell. A son contact, il parut rentrer littéralement en transe. Quand il se reprit, ce fut pour tendre la main vers son balai. Se hissant dessus avec une agilité d’ancien joueur de Quidditch, il tendit la main pour ramasser Victoire Weasley tel un paquet de chiffons pour la jeter en travers de son balai.
« Vous avez ce que vous vouliez, alors laissez Victoire tranquille ! » s’écria Delphini Black en relevant la tête.
« Tais-toi ! » beugla Boswell sur un ton furieux. « Je fais ce que je veux. Maintenant, c’est moi qui décide de tout et pour toujours ! »
D’un coup de talon, il décolla. J’enrageai de mon incapacité à l’empêcher de s’enfuir, avec une otage en plus. Heureusement, un instant plus tard, je compris ce que Teddy Lupin entendait par « prendre par l’extérieur ». A peine Boswell avait-il franchi la fenêtre que le fils du loup-garou lui asséna un énorme coup qui faisait honneur à ses qualités de batteur au Quidditch, un coup tellement puissant qu’il repoussa le balai et son chargement à l’intérieur de la Tour. Le chef des Langues-de-Plomb tomba lourdement sur le sol en lâchant le pendentif blanc qu’il tenait toujours à la main. En voyant cela, Delphini Black bondit sur ses pieds et, sortant de sous sa cape un objet que je ne reconnus pas dans le miroir, elle se précipita vers le pendentif. Embarrassé par son balai et le corps de Victoire Weasley qui lui étaient tombés dessus, Boswell n’arrivait pas à se lever, mais il réussit à extirper sa baguette de sa poche et la brandit vers Delphini Black en criant :
« Avada … »
Le serpent de glace d’Albus, libéré par mon annulation du dernier sort de protection de Boswell, referma ses mâchoires juste à temps sur la main de ce fou furieux. Il lâcha la baguette et son sort se termina dans un gémissement de douleur. Alors que qu’Albus et moi rentrions en courant dans la pièce derrière le serpent, le gémissement de Boswell se mua en hurlement, quand Delphini Black abattit sur le pendentif le croc qu’elle tenait à la main, un croc de basilic. L’amulette blanche tomba instantanément en poussière. Lassé des braillements du chef, à mon avis bientôt ex, des Langues-de-Plomb, je lui envoyai un sort pour le bâillonner après l’avoir ligoté.
Pendant que je m’occupais de Boswell, Albus avait délivré sa cousine Victoire de ses propres liens magiques. Teddy Lupin qui était rentré par la fenêtre sur son balai, vint l’aider à relever la jeune fille. A peine sur ses jambes, celle-ci envoya un formidable coup de pied dans les côtes de Wolfgang Boswell, elle s’apprêtait à lui en asséner un second quand je la rappelai à l’ordre :
« Miss Weasley, un peu de tenue, je vous prie ! »
« Mais il voulait me jeter par la fenêtre, il a envoyé un Doloris à Rose et essayé de tuer Delphini. » se justifia-t-elle.
« Je sais et c’est pour ça que j’ai fermé les yeux sur le premier coup. » précisai-je.
De leur côté, Scorpius Malefoy et Delphini Black entouraient Rose Granger-Weasley, dont les rictus de douleur montraient qu’elle souffrait encore. Mais j’avais vu suffisamment de gens ayant subi un Doloris, pour savoir qu’il n’y avait rien de grave dans son cas.
Alors que je soupirais de soulagement, la pièce commença d’être envahie. McGonagall et Lupin. Suivis de près des fantômes qui escortaient Flitwick. Pour une fois, le Baron Sanglant avait osé aborder la Dame Grise pour qu’elle aille chercher son directeur de Maison, et celle-ci avait consenti à l’écouter. En chemin, ils avaient rencontré Nick Quasi-Sans-Tête et le Moine Gras qui hantaient tranquillement les couloirs, et ces derniers les avaient aussi accompagnés. Alors que la pièce semblait déjà plus que pleine de gens morts ou vivants, Madame la Ministre débarqua suivi d’Harry et d’une dizaine de ses collègues Aurors. Attiré par le monde, Peeves s’invita pour semer le chaos comme d’habitude. Mais dans le désordre qui régnait en haut de la Tour Serdaigle, toutes ses tentatives pour se faire remarquer restèrent sans effet, et il finit par s’enfuir en nous insultant dans l’indifférence générale.
Chapitre 25 : Explications nocturnes by OutThereIsTheTruth
« Je vous le dis tout net, je ne sortirai pas de ce bureau avant d’avoir compris le fin mot de toute cette histoire ! Avant d’avoir compris pourquoi un de mes principaux collaborateurs vient de partir enchaîné entre quatre Aurors, après être venu jusqu’ici agresser trois élèves de Poudlard, dont ma propre fille ! Avant d’avoir compris pourquoi, quand je lui ai enlevé son bâillon pour lui demander de s’expliquer sur ces agressions, la seule chose qui semblait le préoccuper, c’était qu’on ne marche dans cette espèce de poussière blanche qui était répandue sur le sol en haut de la Tour de Serdaigle. »
Et pour bien affirmer sa volonté d’obtenir immédiatement toutes les explications qu’elle réclamait, Madame la Ministre s’installa sans y être invitée dans l’un des fauteuils du bureau de McGonagall. Les bras croisés, elle toisait d’un air sévère les six adolescents qui s’étaient agglutinés les uns contre les autres sur un vieux canapé rouge hérité de Dumbeldore.
J’avais toujours trouvé Hermione Granger d’un incroyable sans gêne, et ses années à la tête du Ministère n’avaient clairement pas amélioré son caractère. Cependant, pour une fois, la curiosité qu’elle manifestait m’arrangeait bien, car j’étais loin d’avoir satisfait toute la mienne. Je comptais donc sur ses récriminations pour obtenir les éléments d’explications qui me manquaient encore. Notre Directrice se décida à s’assoir dans son propre fauteuil non sans un léger soupir. A son grand âge, je suppose qu’elle aurait volontiers différé les aveux de la petite bande pour pouvoir aller se coucher, et elle devait envier Flitwick qui, une fois l’ordre rétabli dans la Tour de Serdaigle, s’était excusé pour retourner au lit.
Nous n’étions donc que cinq, McGonagall, Granger, Lupin, Harry et moi, à faire face à Albus et ses amis dans le bureau directorial à cette heure tardive de la nuit. Notre Directrice conjura du thé pour nous, et des tasses de chocolat pour les jeunes, avant de confier à son adjoint la responsabilité d’interroger ces derniers.
« Il s’est produit ce soir dans notre école des évènements d’une extrême gravité. » commença Lupin en fixant un regardant incisif sur les adolescents toujours entassés les uns contre les autres comme pour se rassurer. « Nous avons des raisons de penser que vous avez de ces évènement une compréhension qui nous échappe. Ce faisant nous attendons de vous des explications. Complètes et détaillées. »
La petite bande échangea des regards inquiets.
« C’est une longue histoire. » soupira finalement Victoire Weasley dont le visage portait plusieurs ecchymoses.
« Comme l’a dit votre tante, Miss Weasley, nous allons prendre le temps de comprendre votre histoire. Maintenant. » insista le loup-garou.
La curiosité n’étant pas l’apanage des vivants, le Baron qui devait traîner à proximité, s’invita parmi nous en s’installant à côté du canapé occupé par les jeunes. Quant aux portraits des anciens directeurs et directrices qui faisaient soigneusement semblant de dormir, j’étais persuadé qu’ils étaient tout ouïe pour ne pas perdre une miette de ce qui allait suivre. Après un nouveau conciliabule visuel, Rose Granger-Weasley sembla désignée pour commencer le récit :
« En fait, tout a commencé l’été dernier quand nous avons voulu aider le Professeur Rogue dans ses recherches à propos de Delphini … »
« Alors que je vous avais recommandé de vous tenir à l’écart ! » l’interrompis-je d’un ton sec.
« C’est vrai. Mais, Rose voulait juste vous éviter de passer à côté de quelque chose d’important. » réagit Scorpius Malefoy toujours prompt à voler au secours de sa belle.
« Et comment Miss Granger-Weasley envisageait-elle de m’éviter cet écueil ? » demandai-je d’un ton sarcastique.
« Eh bien, le dernier endroit qu’a habité Voldemort avant sa disparition, c’est chez nous, au Manoir Malefoy. Rose a pensé qu’il aurait pu y cacher quelque chose. » expliqua Scorpius Malefoy.
« Quelque chose que votre famille n’aurait pas trouvé depuis toute ces années ? » s’étonna Lupin.
« Il n’y a pas de Fourchelang chez les Malefoy. » intervint Albus. « Donc, quelque chose aurait pu rester dissimulé chez eux pendant toutes ses années sans que personne ne le trouve. »
« Et qu’avez-vous fait à la suite de cette brillante idée ? » demandai-je d’un ton légèrement ironique, mais au fond je m’en voulais de ne pas m’être fait cette réflexion moi-même.
« Eh bien, nous avons simplement fait le tour des pièces du Manoir et dans chacune j’ai demandé aux murs de s’ouvrirent et aux cachettes de se révéler. En Fourchelang, bien sûr. » expliqua Albus avant d’ajouter. « J’ai des sources pour penser que Voldemort ne pratiquait pas de magie très sophistiquée en Fourchelang. »
« Des » sources, tu parles. Juste une source. Un portrait beaucoup trop bavard qui s’ennuyait au fin fond des cachots.
« Qu’est-ce qu’a donné ta petite enquête ? » lui demandai-je d’un ton léger pour masquer ma curiosité réelle.
« En fait, il s’est passé quelque chose très vite. Une niche s’est ouverte dans la bibliothèque. Mais on a quand même fait le tour du Manoir pour vérifier qu’il n’y avait rien d’autre. » répondit mon petit fils.
Mon intérêt et mon impatience montèrent en flèche. Et je n’étais pas le seul. Du coin de l’œil, je vis le Baron tendre une main distraite vers une tasse de thé posée devant lui et observer avec étonnement que la main en question passait au travers de la tasse et du breuvage qu’elle contenait. L’espace d’un instant, il en avait même oublié qu’il était un fantôme !
« Et il y avait quoi dans cette niche ? » interrogea Lupin incapable de faire taire sa propre impatience.
« Un manuscrit. » répondit sobrement Rose Granger-Weasley.
« Que vous n’avez pas jugé bon de m’apporter. » remarquai-je. « Alors que je croyais que vos investigations avaient pour but de m’aider. »
« On a juste voulu jeter un coup d’œil au manuscrit avant. Et quand on a compris comment le lire, on s’est rendu compte que ça n’avait rien à voir avec vos recherches. » se justifia la fille de Madame la Ministre.
« Quand vous avez compris comment le lire. » releva cette dernière. « De quoi parles-tu Rose ? »
« C’est un texte qui n’est lisible que dans un miroir. » précisa celle-ci.
« De l’écriture spéculaire ? Mais qui a bien pu écrire cela ? » s’étonna McGonagall qui semblait moins regretter de ne pas être partie se coucher.
« Un certain Stephen Red. C’est un récit personnel, une sorte de confession post mortem. » expliqua Scorpius Malefoy toujours prompt à utiliser des mots sophistiqués.
« Dont vous n’avez pas jugé bon de me faire part, alors même que les circonstances prouvaient que Voldemort en personne avait pris la peine de le dissimuler là. » notai-je d’un ton sec.
« Mais comme Rose vous l’a dit, Professeur Rogue, le contenu du manuscrit n’avait rien à voir avec les problèmes qui vous intéressaient. » redit Victoire Weasley. « C’est pour ça que nous l’avons gardé pour nous, pour pouvoir le lire tranquillement. Pour nous, c’était surtout une distraction, quelque chose que nous pouvions faire tous ensemble, alors que Delph ne pouvait pas sortir du Manoir Malefoy pour des questions de sécurité. Ce n’est que lorsque Boswell est intervenu dans cette histoire que nous avons pris conscience que c’était grave. »
Harry leva une main pour l’interrompre :
« Avant d’en venir à Boswell, il est peut-être temps de nous dire ce que contient ce manuscrit. »
Albus sortit de sa poche un petit carré de parchemin sur lequel il pointa sa baguette sans prononcer le moindre mot. Une fois le document revenu à sa taille normale, il le tendit à Teddy Lupin.
Chapitre 26 : Don Esteban Rojo de Salinas (1) by OutThereIsTheTruth
Teddy Lupin commença la lecture de ce qui était manifestement une retranscription du manuscrit original réécrite « à l’endroit » :
« Je m’appelle Don Esteban Rojo de Salinas et pourtant je reposerai bientôt au cimetière de Pré-au-Lard sous le nom de Stephen Red. Entre ces deux noms, il y a une histoire, une très longue histoire, qui est celle de ma vie.
Je suis né à Séville en l’an de grâce 1545. Ma famille appartenait à la petite noblesse espagnole. C’est ce que tout un chacun savait de nous. Mais, il y avait une autre vérité qui n’était connue que ceux qui appartenaient à notre communauté, nous étions une famille de sorciers, et à cette époque où sévissait l’Inquisition, la plus grande prudence était de mise. Certes, les sorciers adultes ne risquaient pas grand-chose des moldus, mais des précautions étaient nécessaires pour que les enfants sorciers puissent grandir en sécurité. Heureusement, les habitudes voulaient que les enfants de la noblesse soient éduqués à la maison par des précepteurs et des préceptrices, ce qui les préservait largement du monde extérieur. Mes sœurs et moi avions donc un mode de vie des plus banal, à ceci près que celles et ceux qui venaient nous enseigner étaient pour la plupart d'anciens élèves de Poudlard qui nous apprenaient la magie en plus du latin, de la géographie et des arts.
Dans mon milieu, il était d'usage que les garçons effectuent un long voyage après la fin de leurs études et avant d'avoir eux-mêmes des responsabilités familiales. Pendant des années, avec mes futurs compagnons de ce voyage, nous avions rêvé de ce départ. Nous avions compté les mois, puis les semaines et enfin les jours. Finalement, j'ai quitté Séville à l'âge de 22 ans, avec un cousin, Miguel, un ami, Carlos, qui était aussi le fiancé de ma sœur jumelle, et son frère Juan de deux ans son cadet.
Quelques décennies plus tôt, nos pères étaient partis ensemble pour près de deux ans de voyage, et c'est au cours de ce voyage que mon père avait rencontré l'un des plus grands sorciers de son temps, Léonard de Vinci, qui lui avait enseigné entre autres choses l'écriture en miroir, que mon père lui-même m'a appris dans mon enfance. Le lecteur voudra bien me pardonner la coquetterie qui me fait l'utiliser aujourd'hui en sa mémoire.
Nos pères avaient fait le tour de l'Europe. Mais, en cette deuxième moitié du 16ème siècle, de nouvelles possibilités s’offraient à nous et c’est pour un tour du monde que mes amis et moi nous sommes partis. Je passe les détails d'un voyage enivrant et le récit des plus beaux souvenirs de ma vie, pour en venir à la tragédie qui a déterminé la suite de mon existence.
Mon cousin Miguel avait décidé de nous emmener sur les traces de Magellan. Pour des jeunes espagnols de notre génération, sorciers comme moldus, la traversée du Pacifique représentait l'aventure ultime. C'est ainsi qu’après avoir sillonné longuement les nouvelles terres du roi d'Espagne dans le Nouveau Monde, nous avons embarqués un beau matin dans le port d’Acapulco sur un galion magnifique avec pour objectif de rallier Manille de l’autre côté du grand océan.
Les étapes que nous avions faites au cours de notre traversée nous avait permis de découvrir des îles toutes plus fabuleuses les unes que les autres. Notre déception n'en fut que plus grande, lorsque notre capitaine refusa de nous laisser débarquer sur une île près de laquelle il était venu abriter notre navire pour laisser passer une tempête. Le capitaine nous expliqua que parmi les marins, cette terre trainait une réputation désastreuse, il se murmurait même dans les ports qu'elle était maudite. Des moldus auraient dû se plier à cette interdiction, mais nous étions quatre sorciers, jeunes et présomptueux et bien décidés à visiter l’île près de laquelle notre galion avait jeté l’ancre, nous avons donc mis le capitaine sous Imperium sans le moindre scrupule pour qu’il nous autorise cette visite.
C'était la plus merveilleuse des îles. Celle dont la température était la plus douce, le sable le plus fin, le parfum de l'air le plus exquis, la végétation la plus magnifique. Nous avancions sans nous soucier des autochtones que nous apercevions de loin en loin. Comme les moldus avec lesquels nous voyagions n'étaient pas descendus avec nous à terre, nous aurions pu, en cas de besoin, sortir nos baguettes pour nous défendre.
En admirant les merveilles d’une nature luxuriante, nous avons cheminé jusqu'à une clairière au fond de laquelle cascadait une source. Dans cet endroit paisible, un homme aux cheveux blancs vêtu d’un pagne rouge était assis en tailleur sur une pierre plate. Il était le premier autochtone à ne pas s'enfuir à notre approche. Devant lui était posé un objet pour lequel il manifestait la plus grande vénération. Il ne s'agissait pourtant que d'un petit disque de corail blanc percé d'un trou en son milieu.
Carlos plaisanta de le voir manifester une telle dévotion à un objet aussi banal. Evidemment, la plaisanterie n’était destinée qu’à nous, puisque nous n’avions rencontré aucun îlien comprenant l’espagnol. Pourtant, cet homme le comprenait parfaitement et était même capable de le parler.
« Vous tort de vous moquer de moi, étranger. » répondit-il à la remarque qui ne lui était pas destinée. « Si vous connaissiez le pouvoir de cet objet, vous sauriez qu’il est plus précieux et plus désirable que tout ce que vous possédez. »
« Les pouvoirs ? Quels pouvoirs pourraient bien avoir ce vulgaire caillou percé ? Je pourrais le réduire en poussière sans même le toucher. » ironisa mon cousin Miguel.
« Essayez donc. » dit le vieil homme.
Il n’y avait qu’une infime trace de défi dans son ton, mais Miguel qui était des plus ombrageux, prit immédiatement la mouche. Sortant sa baguette, il la dirigea vers le disque blanc auquel il envoya différents sorts, dont chacun aurait suffi à endommager ou même à briser n’importe quel caillou normal, mais l’objet ressortit intact du traitement. Notre regard sur lui avait cessé d’être méprisant. Nous étions pour le moins intrigués.
« Comment cet objet a-t-il pu résister à tout cela ? » s’étonna mon cousin à voix haute.
« Parce qu’il est immuable, comme le serait celui qui le porterait sur lui. » répondit placidement le vieil homme.
« Vous prétendez que ce machin rend immortel. » demanda Juan en sortant de sa réserve habituelle.
« Pas immortel au sens où il ne préserve pas d’un accident ou d’une autre mort violente. » répondit l’homme au pagne rouge sur un ton neutre. « Mais, celui qui le porterait sur lui serait insensible aux affres du temps et en ce sens-là, oui, il rend immortel. C’est même de ce pouvoir que cette pierre tire son nom, on l’appelle l’Immuable du Temps. »
« Mais si cette pierre a les pouvoirs que vous dites, vieil homme, pourquoi ne la portez-vous pas sur vous ? » demanda Carlos avec une pointe d’insolence. « A vous regarder, cela semble pourtant urgent avant que ce soit le temps qui ait raison de de vous ! »
« Parce que je m’interroge. » répondit son interlocuteur. « Qui peut être certain de mériter l’éternité ? »
« Eh bien, moi ! » claironna Carlos en tendant la main vers l’objet.
« Et pourquoi toi ? » lança Juan d’un ton sec en interrompant d’un geste le mouvement de son frère.
Jamais je ne l’avais entendu employer un tel ton pour s’adresser à son aîné pour lequel il nourrissait la plus grande admiration.
« En effet, pourquoi toi ? » renchérit Miguel sur un ton nettement plus agressif. « Il me semble que c’est à moi et à moi seul que cet objet devrait revenir. »
Carlos tourna vers eux un regard empreint de fureur voire même de folie. Vif comme l’éclair, il tira sa baguette pour lancer un Lashlabask à son frère qui hurla en s'effondrant sur le sol quand les étincelles brulantes le frappèrent de plein fouet. Carlos se retourna alors vers Miguel pour lui asséner un Doloris, mais il n'arriva jamais au bout de son sort, fauché par l'Avada Kedavra envoyé par mon cousin. Quand Miguel se tourna vers moi, un rictus déformait ses traits et ses yeux étaient injectés de sang, mais je ne lui laissai pas plus de chance de m'atteindre qu'il n'en avait lui-même laissé à Carlos. Touché par le sort mortel que je lui avais lancé, il tomba presque sans bruit sur le tapis herbeux.
Je cherchai alors Juan des yeux. Négligeant de récupérer sa baguette qui lui avait échappé des mains quand il était tombé, il rampait vers le rocher où était posé l’Immuable du Temps en dépit des brûlures dont il était couvert. D’un sort, je l’achevai sans la moindre hésitation. Sans ce meurtre de sang-froid, je pourrais peut-être me raconter aujourd’hui n’avoir tué que pour me défendre ou au moins par peur d’être tué moi-même. Mais la mort du petit Juan qui sur le moment ne me menaçait pas directement, est là pour me rappeler que c’était faux. Me rappeler que j’ai bel et bien tué pour pouvoir m’emparer de l’Immuable du Temps.
L’homme au pagne rouge avait disparu pendant que nous nous affrontions. Sans perdre de temps à le chercher, je glissai l’Immuable dans ma poche avant de revenir sur mes pas. Avant d’arriver en vue du galion, j’avais suffisamment repris mes esprits pour comprendre que je devais prendre des précautions pour ne pas être soupçonné par le capitaine et l’équipage d’être responsable de la mort de mes amis. J’utilisai donc ma baguette pour m’infliger les quelques blessures qui crédibiliseraient mon récit. Puis, je pris un air paniqué en arrivant en courant péniblement dans la crique où nous avions laissé notre chaloupe, car le capitaine devait surveiller notre retour à la longue vue. Je me mis à ramer avec difficulté en direction du galion, mais une partie de l’effort me fut économisé grâce à l’aide des marins venus à ma rescousse dans une autre chaloupe.
Le capitaine et ses officiers gobèrent sans difficulté, et sans que j’aie besoin de recourir à des moyens magiques pour les convaincre, mon compte-rendu de l’agression par des forces diaboliques que nous aurions subi sur cette île. Ils étaient tout prêts à entendre un tel récit qui corroborait les histoires qu’ils avaient entendu raconter dans les ports. Tout en regrettant la perte de mes compagnons, le capitaine refusa tout net d’envoyer des hommes pour aller chercher leurs corps. D’ailleurs, notre navire reprendrait sa route dès le lendemain à l’aube pour s’éloigner de ce lieu maléfique.
Mon impunité vis-à-vis des moldus était donc assurée, mais c’était là la moindre de mes préoccupations. Après avoir été obligé d’accepter les soins du chirurgien du bord pour ne pas éveiller les soupçons, je me retirai dans ma cabine. En me retrouvant seul dans cette cabine qu’à peine quelques heures auparavant je partageais encore avec Miguel, le cousin avec qui j’avais été élevé, qui était presque comme mon frère et que j’avais tué, je fus pris pour une énorme bouffée de rage contre ce vieil homme que mes amis et moi avions si stupidement méprisé et qui avait réussi à nous faire nous entretuer.
La nuit était tombée et j’étais certain que personne ne viendrait s’enquérir de moi avant l’aube, car j’étais supposé dormir une douzaine d’heures au moins après avoir absorbé une mixture à l’opium. Je transplanai donc sur l’île bien décidé à en découdre avec l’homme au pagne rouge. J'appelai, mais il se garda bien de se montrer. Alors, je me mis à la recherche de n'importe quel habitant de l’île et, rempli de haine comme je l'étais, je lançai des Doloris à tous ceux qui avaient le malheur de ne pas arriver à se cacher assez vite pour m’éviter. Pour les protéger, l’homme fut rapidement contraint de se présenter devant moi.
Je le ligotai immédiatement avec des liens magiques et je le bâillonnai, car l’expérience m’avait appris à me méfier de son pouvoir de suggestion. De toutes façons, j’avais le moyen d’obtenir les réponses que j’étais venu chercher sans qu’il me parle. A cette époque de ma vie, je n’étais surement pas un Legilimens subtil, mais comme je me moquais totalement des traces que je pourrais laisser, je n’hésitais pas à fouiller son esprit.
Les îliens se servaient de l’Immuable du Temps comme d’une arme. Ils n’avaient pas les moyens de se défendre contre des envahisseurs beaucoup mieux armés qu’eux, mais grâce à l’Immuable, ils arrivaient à faire se battre ceux qui s’aventuraient sur leur île. Ils récupéraient ensuite leur amulette sur les morts ou les blessés pour pouvoir l’exhiber à nouveau devant les visiteurs suivants. J’essayai de fouiller plus avant dans l’esprit du vieil homme pour savoir d’où venait cette amulette. Mais il n’en savait rien, il l’avait hérité de son père qui lui-même la tenait de son père, l’un et l’autre avaient été avant lui les protecteurs et les guérisseurs des habitants de cette petite terre perdue au milieu du grand Pacifique.
Le temps de décider du châtiment que j’allais lui infliger, je me détournai de ma victime toujours étroitement ligotée pour franchir les quelques pas qui me séparaient de la clairière où j’avais laissé les corps de mes amis. Depuis ma fuite, rien n’avait bougé. Miguel, Carlos et Juan reposaient toujours là où ils étaient tombés. A coup de Defodio, je creusai trois tranchées parallèles au milieu de la clairière et après y avoir enfoui leurs corps je recouvris chacune des tombes d’un amas de pierres blanches que je ramenai de la plage par des moyens magiques.
Le retour sur le lieu de mes propres crimes avait bizarrement désarmé ma colère vis-à-vis de l’homme au pagne rouge qui gisait toujours dans un fourré. Le dégoût que j’avais de moi-même à cet instant lui sauva la vie. Sans un mot, je le libérai de ses liens et je transplanai pour retourner dans ma cabine. Là, j’absorbai une des potions de Sommeil que Miguel transportait dans ses bagages et je m’endormis comme une masse. Quand je me réveillai, le soleil était déjà haut dans le ciel et l’île où mes amis reposaient pour toujours avait disparu à l’horizon. Avant même de monter sur le pont pour aller scruter l’horizon, je vérifiai la présence de l’Immuable dans ma poche, c’était déjà devenu un réflexe. Même si je n’en avais pas encore conscience, cet objet avait déjà envahi toute mon âme. … »
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