Madison est une jeune sorcière de 22 ans. Elle sort tout juste de l’Université de la Magie, avec un diplôme de Droit International, et a décroché son premier emploi, il y a deux mois de cela.
Elle arrive tôt au ministère ce matin-là, comme tous les autres. Elle ne perd pas de temps à discuter, ni à boire un café, elle se contente de s’installer derrière son bureau avec la pile de lettres laissées à son attention dans le casier du Département d’Application des Lois Magiques. Pour l’instant, elle n’est que l’assistante de sorciers haut placés du département, mais elle sait qu’elle pourra, un jour, avoir des assistants, elle aussi.
Son bureau est situé à l’entrée du département, et elle a une vue imprenable sur le couloir qui relie le bureau des Aurors et les services administratifs du Magenmagot : autant dire que l’agitation y est continuelle de neuf heures à 17 heures. C’est pour cela qu’elle vient si tôt, elle qui travaille mieux dans le calme. Non pas qu’elle se plaigne d’être postée quasiment dans le passage, au contraire, car cela lui donne l’occasion de croiser beaucoup de gens importants : certains d’entre eux la saluent de loin, et elle a vraiment la sensation d’être partie intégrante de l’engrenage qui fait fonctionner le Ministère.
La première personne à arriver, c’est sa responsable, Hermione Granger-Weasley. C’est quelqu’un de très apprécié : elle est très sérieuse dans son travail et inspire Madison dans le sien. Hermione la salue toujours très chaleureusement quand elle arrive dans le couloir qu’elle traverse en diagonale pour aller dans son bureau, dont elle laisse la porte ouverte. Plus tard dans la matinée, elle la refermera pour terminer un travail important dans le silence, puis elle la rouvrira vingt minutes avant le déjeuner. L’après-midi, ça dépend si elle est en rendez-vous, travaille seule sur ses dossiers ou si elle est en déplacement.
Parfois, Harry Potter vient lui rendre visite. Il ferme toujours la porte derrière lui mais n’oublie jamais d’adresser un sourire à Madison, pas comme Larry Johnson, qui ne lui a pas accordé un seul regard depuis qu’elle travaille ici. Il y en a d’autres, malheureusement, mais Johnson est le seul, jusqu’à ce jour, qui ait complètement ignoré les protestations de Madison, alors qu’elle tentait de l’empêcher d’entrer dans le bureau d’Hermione le jour où elle recevait le Ministre. Madison s’en est sortie avec un avertissement du Ministre, accompagnée de toute la compassion d’Hermione…
Il y a également Paul Fiddle, qu’elle croise plusieurs fois par jour. Il passe dans un sens, la plupart du temps il a l’air très pressé, et quand il revient, passant dans l’autre sens, il tient dans les mains des artefacts tous plus étranges les uns que les autres, les bras tendus comme s’il désirait mettre le plus de distance entre lui et les pièces à conviction. En effet, Fiddle travaille au service des détournements de l’artisanat Moldu, et Madison, issue d’une famille de sorciers, est de plus en plus intriguée par les objets qu’elle voit défiler devant ses yeux. Peut-être qu’un jour, elle osera rendre visite à Fiddle pendant sa pause déjeuner, mais ce n’est pas demain la veille. Elle a beau être une bonne assistante et bien faire son travail, en termes de relations humaines, elle est très timide.
Phoebe White est d’ailleurs quasiment la seule personne du ministère avec qui elle parle d’autre chose que du travail. Elle aussi, est assistante, au Département de Contrôle de l’Equipement Magique. Phoebe est un peu plus âgée que Madison, et elle a un petit-ami qui travaille à l’Office des Portoloins, quatre niveaux plus bas. Mark est vraiment quelqu’un de bien, et Madison, qui est célibataire, est un peu jalouse. Au Ministère, il y a beaucoup de sorciers de son âge, qu’elle voit souvent, et elle se dit qu’elle aimerait bien, un jour, pouvoir sortir avec l’un d’eux. Après tout, ils sont plutôt polis, souriants, et pour la plupart, attirants. Certains la font même rire.
Mais de tous ces sorciers, il n’y en a pas un qui égale celui qui vient en fin de journée, lorsqu’elle a fini de traiter le courrier, organisé minutieusement les rendez-vous du lendemain et achevé de répondre aux quelques demandes personnelles d’Hermione. A ce moment, elle prend de l’avance dans son planning de la semaine. Mais elle est moins appliquée dans son travail, parce qu’elle regarde l’horloge toutes les trente secondes.
Tous les employés partent un à un, elle croise les mêmes personnes qui sont venues travailler ce matin, dont la mine a l’air plus réjouie, pour certains. Madison se demande ce que ça fait de travailler par nécessité. Elle sait que ce n’est pas son cas : elle a choisi ce travail par amour pour la justice et est heureuse d’être l’assistante d’Hermione.
Et à dix-huit heures quinze, il apparaît. Madison le repère de loin dans le couloir désert : parfois, avant même de l’apercevoir, elle reconnaît sa démarche singulière. Mais elle baisse très vite les yeux, faisant mine de vérifier un dernier détail dans son agenda. Quand elle se redresse, il n’est pas encore assez proche pour qu’elle se permettre de l’attendre sans rien faire derrière son bureau, alors elle se lève et va prendre un dossier au hasard dans le meuble derrière elle.
Lorsqu’elle se retourne, il est là, le sourire aux lèvres et lui adresse un petit signe de la main, qu’elle remarque à peine, parce qu’à cet instant, elle se noie dans ses yeux et manque à chaque fois de s’évanouir. Elle s’agrippe au dossier pour ne pas le lâcher, et reste immobile le temps qu’il s’approche de son bureau et lui dise bonsoir. Elle lui répond en bredouillant, à chaque fois. Pourtant, elle s’est entraînée devant son miroir. Mais il n’y a rien à faire : chez elle, il ne se tient pas devant elle, et elle n’est pas autant troublée.
Ensuite, pendant qu’elle pose lentement son dossier sur le rebord de son bureau, il lui demande si Hermione est là. Elle hoche la tête nerveusement, et il lui tourne le dos. La porte est ouverte mais il n’entre pas. Il frappe simplement pour signaler sa présence, avant de s’adosser au mur, les mains dans les poches, juste en face du bureau de Madison.
A cet instant, Madison a le cœur qui bat la chamade, et elle tente de se calmer avant qu’Hermione ne sorte du bureau. Elle reprend ensuite son agenda, et écrit quelques notes dans la marge en se concentrant un maximum, consciente du regard qu’il pose sur elle. Parfois, il engage la conversation, et Madison sent qu’elle rougit comme une tomate quand elle lui répond, parce qu’elle a l’impression d’être à côté de la plaque.
Quand Hermione sort et verrouille sa porte, il se redresse et retourne dans le couloir, lui souhaitant une bonne soirée. Hermione s’approche du bureau de Madison, elle lui adresse quelques dernières recommandations pour le lendemain. Elle lui dit également de ne pas partir trop tard, qu’elle a besoin de retrouver le calme chez elle pour pouvoir se reposer après le travail.
Mais elle a tort. C’est ici qu’elle trouve la tranquillité. Ici, à cet instant, pendant les trois minutes où Ron Weasley et elle occupent seuls le couloir du Département d’Application des Lois Magiques.
Madison adore son travail, parce que trois minutes par jour, un ange lui tient compagnie. Il est marié, et père de deux adorables enfants, et jamais Madison ne se permettra de lui avouer ses sentiments, notamment parce qu’elle a trop de respect pour Hermione. Elle garde ses secrets pour elle, et continue à aimer en silence celui qui est et restera pour toujours l’homme de ses rêves.
Aux ascenseurs, Hermione ne parle pas, et un sourire se dessine sur ses lèvres. Quand Ron s’en aperçoit, il lui demande ce qui la rend si satisfaite, et elle se contente de lui répondre qu’elle est heureuse que la journée soit finie, et qu’elle a hâte de rentrer à la maison pour retrouver leurs deux trésors.
Mais, en réalité, son bonheur du jour va au-delà du quotidien de sa vie familiale qui l’attend bien sagement dans leur maison de Regent Street. Elle a enfin réussi à percer le secret de Madison, et elle n’a pas beaucoup de peine à y croire. Mais elle ne lui en veut pas. Au contraire, ça la rend extrêmement fière, et arrivée dans l’Atrium, elle s’accroche au bras de Ron, la mine réjouie, et regarde son reflet dans les miroirs du bassin.
Hermione a beaucoup d’affection pour Madison depuis le début, parce qu’elle est très sérieuse dans tout ce qu’elle entreprend. Hermione a mis du temps à trouver une assistante qui puisse la comprendre aussi bien qu’elle, et pour rien au monde elle ne se séparera d’elle. Du moins, pas pour l’instant. D’autant plus qu’aujourd’hui, elle réalise que Madison fait beaucoup plus que son travail pour elle : elle lui permet de se rendre compte à quel point elle a de la chance d’avoir un mari extraordinaire.