Fic écrite dans le cadre du concours de Dunne "Lettre à l'avenir"
C’était toujours ainsi que Lord Voldemort concluait ses réunions. C’était bien plus simple pour congédier ses partisans de le faire de cette façon. Lord Voldemort n’aimait pas spécialement les épanchements et il n’avait pas non plus tendance à développer au moment des adieux. Il préférait rester simple et ferme dans ses propos. Les Mangemorts partaient alors avec une crainte de lui qu’il fallait bien reconnaître que le Seigneur des Ténèbres appréciait. Il aimait à être craint et respecté.
Pourtant, aujourd’hui, Lord Voldemort se sentait las. Il aurait dû se sentir victorieux. Il était parvenu à enlever Harry Potter sous le nez du vieil amoureux des Moldus qui servait de directeur à l’école de sorcellerie Poudlard, il avait réussi sa résurrection en se servant du sang de son ennemi, ce qui faisait de lui un sorcier plus puissant qu’il ne l’avait jamais été. Pourtant, il se sentait las parce que ses Mangemorts n’étaient pas ce qu’il avait pu espérer. Lord Voldemort se sentait seul.
Il se leva alors que tout le monde était parti depuis plusieurs minutes et se rendit dans un coin du manoir que lui seul connaissait et où aucun de ses sbires ne pouvait pénétrer. Lord Voldemort avait momentanément installé son Quartier Général au manoir Jedusor. C’était pratique et c’était, pour le moment, un endroit sûr. Personne n’était venu les déranger ici. mais c’était aussi la demeure de son père et de ses grands-parents et il y avait tant de choses qui appartenaient au passé, des choses que les Mangemorts ne devaient pas trouver.
Il se trouvait d’ailleurs dans une pièce où se trouvaient entreposées diverses choses du passé. Il n’avait pas pris le temps de fouiller toute cette zone, même à l’époque, quand il était venu les tuer. Et certaines choses lui avaient visiblement échappées. Son œil fut attiré par un petit coffret. Une lettre posée sur le dessus indiquait sa provenance. L’Orphelinat. Après son départ, la directrice avait probablement renvoyé ses effets personnels aux seuls Jedusor qu’ils avaient pu identifier. Et les Jedusor avaient tout gardé.
Lord Voldemort passa la main sur le coffret. Il ne savait pas ce qui le poussait à faire ce qu’il était sur le point de faire, mais il l’ouvrit. Lui qui avait toujours refoulé les souvenirs du passé parce qu’ils n’en valaient pas la peine… pourquoi ouvrait-il son coffret maintenant ? Mais les questions laissèrent place à la surprise quand il découvrit une autre enveloppe dans le coffret, une mystérieuse enveloppe sur laquelle était écrit d’une écriture qui lui était familière « A Tom ». Lord Voldemort saisit l’enveloppe et l’ouvrit. Instantanément, un souvenir du passé lui revint en mémoire.
« A moi,
Je m’appelle Tom Elvis Jedusor et je suis orphelin. Je ne suis personne. Mais un jour, je serai quelqu’un, je le jure. Et tu le sais car tu es devenu ce quelqu’un. »
Oui, il était devenu quelqu’un, le quelqu’un que ce Tom du passé avait souhaité, et même plus encore que cela. Il n’avait jamais rêvé aussi bien, aussi fort que ça. Il n’avait jamais pensé pouvoir aller aussi loin avant de découvrir le secret de la vie éternelle. Il n’était plus et ne serait jamais plus Tom. Personne était mort, Tom était mort, Quelqu’un était né, Lord Voldemort était né. Lord Voldemort avait réalisé les rêves d’un jeune orphelin seul et abandonné, mieux encore que ce qu’il aurait souhaité.
« J’y arriverai parce que je suis spécial. Spécial comme personne d’autre dans l’orphelinat. Et maintenant que tu es quelqu’un tu es encore plus spécial. Je me suis toujours demandé comment j’avais reçu cette spécialité. Je pense que c’est Père. Parce que Mère est morte. Mais moi, je suis spécial, je ne mourrai pas. Père n’est pas mort, je le sais. Il devait donc être spécial. »
Voldemort eut un petit rire désabusé. Il ne se souvenait pas d’avoir été si naïf. Pourtant, c’était bien d’elle, la morte, qu’il tenait ses pouvoirs. C’était d’elle qu’il tenait l’héritage du grand Serpentard. Son père n’était qu’un grotesque Moldu qui les avait abandonnés, lui et sa mère. Mais sa mère était vraiment faible, une Cracmolle en fait. Finalement, c’était de son grand-père qu’il avait vraiment hérité, grâce à lui qu’il était spécial. Et il suivait les traces d’Elvis Marvolo Gaunt. Il avait tué son père, il avait possédé l’héritage Serpentard, il avait réussi.
« Je me demande comment je serai quand tu liras cette lettre. Peut-être seras-tu très vieux, peut-être ne la liras-tu même jamais. Tu auras sûrement des tas d’autres choses plus importantes à faire. Mais si jamais tu la lis et que tu es devenu quelqu’un, alors je serai satisfait de ce que nous aurons fait. »
Oui, il pouvait être satisfait malgré ses déceptions familiales exceptionnellement amères. Il avait réussi à obtenir tout ce qu’il avait toujours voulu, respect, crainte, loyauté. Il se vengeait de son père sur chaque Moldu que son chemin croisait. Et plus rien ne pourrait l’arrêter maintenant qu’il avait le sang de Potter qui coulait dans ses veines. Bien entendu, il lui faudrait tuer le garçon. Mais ça n’avait pas d’importance. Ce n’était qu’une formalité, simplement une formalité.
« Je m’appelle Tom Elvis Jedusor, et un jour, quand je serai toi, je serai le maître du monde. »
Il l’avait été pendant un laps de temps, il le redeviendrait pour toujours. Il réaliserait le souhait qu’il avait quand il était enfant. Il avait déjà tant parcouru de chemin. Il était devenu quelqu’un, il ne pouvait plus mourir, il avait vengé ce qui avait fait de lui un orphelin abandonné. Et maintenant, il allait devenir le maître du monde, et ni Potter, Le-Garçon-Qui-A-Survécu, ni Dumbledore, le Vieux-Fou-Amoureux-Des-Moldus ne pourrait l’en empêcher. Il n’était plus Tom Jedusor.
Il n’était plus personne.
Il était Lord Voldemort.
Il était quelqu’un.