Ma petite Victoire…
Tu permets que je t’appelle comme ça ? Je sais bien que tu n’es pas tout à fait à moi, pourtant, je suis quand même ta tante et marraine !
Te voilà enfin arrivée, en ce beau jour du mois de mai. Enfin, pas si beau que ça, parce que le soleil a oublié de se montrer. Tu es un peu en retard : tout le monde désespérait ces trois derniers jours, surtout ta Maman pour qui ça n’était pas de tout repos. Après, tu as peut-être eu raison de profiter un peu plus de la chaleur de son ventre, il ne fait tout de même pas très chaud pour la saison.
En tous cas, maintenant, tu es là. L’accouchement a été un petit peu difficile, j’ai entendu dire que tu avais donné du fil à retordre à l’équipe de Médicomages. Une sacrée chipie avant même de naître… Tu faisais déjà coucou à la première échographie magique, et puis ta Maman m’a raconté que tous les soirs, quand elle posait sa main sur son ventre, tu posais la tienne à l’opposé, comme pour la rassurer, lui dire que tu étais là, et que tout allait bien… Le mois dernier, j’ai passé quelques jours à la Chaumière aux Coquillages et j’ai eu l’autorisation de mettre ma main, et subitement, tu as arrêté de bouger. Non mais quelle coquine ! Je me dis que tu as peut-être eu peur, parce que tu ne connaissais pas cette caresse-là, et aussi peut-être parce que j’étais un peu mal à l’aise. Mais je ne t’en veux pas, loin de là. Cette expérience m’avait donné encore plus envie de te serrer dans mes bras.
Toute la famille se réjouit de ton arrivée, bien évidemment. J’ai entendu dire que tu allais faire la connaissance de tes grands-parents dès demain. Profite bien, surtout, parce que tu es la première petite fille, qu’il n’y a personne pour te voler la vedette, pour l’instant. Bien sûr, il y a Teddy, et je suis sûre que lui et toi vous vous entendrez très bien, mais en dépit de ce que ton oncle Harry répète sans arrêt, il ne fait pas techniquement partie de ta famille. J’espère tout de même que tu ne resteras pas longtemps toute seule, avoue que c’est bien mieux d’avoir des frères et des cousins à câliner. Il paraît que ton oncle Percy pense à avoir un enfant. Ce n’est pas sûr que tu puisses rigoler avec lui tous les jours, ceci dit, on ne peut pas toujours tout avoir.
Toutes les deux, on ne se verra que la semaine prochaine, parce que j’ai beaucoup de travail d’ici le week-end et je pense que je ne pourrai pas obtenir une autorisation de Portoloin avant mercredi ou jeudi. Je suis vraiment désolée, enfin à ton échelle, j’imagine que tu ne te rends pas bien compte de tout le temps qui nous sépare. Ça va être très long avant de pouvoir enfin te rencontrer, et j’ai beaucoup de mal à l’accepter, car j’ai peur que ce soit très dur de devoir attendre. Mais après, je sais qu’on aura toute la vie pour apprendre à se connaître.
Nous allons avoir quelques années devant nous d’ici à ce que tu fasses ton premier sortilège et entres à Poudlard… Parce que oui, tu es forcément une sorcière, et tu seras même très douée. Mais en attendant, je viendrai te voir aussi souvent que je le peux : je t’apprendrai à tirer la langue, à te cacher derrière le canapé pour faire peur à Maman, à piquer la baguette de Papa, à te défendre quand Teddy te tirera les cheveux et à dessiner sur les murs avec des feutres indélébiles. Et puis, quand tu seras plus grande, on fabriquera des châteaux de sable sur la plage en plein hiver, on jouera au piano jusqu’à rendre sourds les voisins et on fera d’énormes gâteaux au chocolat juste après qu’on soit sorti de table. Je t’achèterai un chat, parce que tu auras beau supplier ta Maman, elle ne cèdera pas, alors que moi, je ne pourrai pas te résister. Et puis, tu pourras venir me voir quand tu voudras, et j’espère bientôt te donner tout plein de cousins pour pouvoir t’amuser avec eux. Peut-être pas autant à moi toute seule que tous ceux que les frères de ton Papa ont en projet, mais au moins deux ou trois pour que tu puisses avoir un ou une préféré(e).
Ce rôle de marraine, je l’ai accepté les yeux fermés, et je le referai cinquante mille fois s’il le fallait. Tu verras, je vais être la tata chouette, parce que de toute façon, tes parents t’interdiront tout plein de choses, alors je n’aurai certainement pas besoin d’en rajouter une couche. Et puis je n’ai pas envie qu’on se fâche, toi et moi. Tu me le rappelleras, n’est-ce pas ? Tout ce que je te demande, c’est de ne pas me faire tourner en bourrique. Réserve tes mines boudeuses à tes grands-parents, ils ont l’habitude, ils sauront quoi faire dans ces situations. Donne-leur aussi plein de sourires et de tendresse, histoire d’équilibrer le tout. Mais gardes-en pour moi, pour nos parties de rigolades, nos après-midis shopping et nos soirées cuisine.
Je te promets de faire partie de ta vie. Quoiqu’il arrive.
A très bientôt, gros bisous de ta tante,
Gabrielle