Je ne vis plus. Je suis mort. Alors, pourquoi suis-je là, à vous regarder vous lamenter, sans rien pouvoir faire ? J'aimerais crier, hurler, vous dire que je suis là, que je vous vois. Mais non, je suis mort. C'est bête, hein ? Maman, Papa, pardon. Ne pleurez plus, je vous en supplie. Charlie, où étais-tu ? Cela fait depuis longtemps que je ne t'ai plus vu, alors ne commence pas à pleurer. Bill, est-ce des larmes qui coulent sur tes joues ? Percy, que fais tu ? Je t'ai pardonné, cesse donc de pleurer en disant que tu es un idiot. George, ne reste pas là sans bouger, le regard vide, les larmes inondant ton visage similaire au mien. Ron, alors ainsi donc tu sors avec Hermione ? Génial, j'en étais sûr. Vis ta vie avec elle et construis toi ton bonheur. Ce visage baigné de larmes ne te conviens pas. Tiens, Hermione pleure aussi ? Oh ... Ginny. Que t'arrive-t-il ? Quel est ce visage ravagé que je ne te connaissais pas ? Est-ce Harry à tes côtés ? Tiens oui. Il pleure aussi ? Ah c'est bête. J'aurai préféré que vous rigoliez, huh.
Petite sœur... Arrête de pleurer. Car d'ici, c'est bien toi que je n'aurais jamais voulu voir pleurer. S'il-te-plait, arrête de m'appeler comme ça. Arrête d'hurler mon nom. Ton cœur me crie de revenir. Sèche tes larmes, elles ne serviront à rien. Ce n'est pas en pleurant que tu me fera revenir. D'ailleurs, tu ne me refera pas revenir, malgré tes appels incessants. Relève-toi, petite sœur. Ne gâche pas ta vie à pleurer ton imbécile de frère mort. C'est ridicule enfin ! Tes «Fred, reviens ! Ne m'abandonne pas !» me brisent le cœur -que je n'ai plus, soi-disant passant. Allez... Tu es forte. Regarde-toi. Tu as survécu à une possession de Voldemort, ton premier amour est à côté de toi, tu t'es battue par deux fois avec l'Armée de Dumbledore, que tu as dirigée la deuxième fois, tu t'es battue contre des Mangemorts de nombreuses fois, et tu as engagé un duel contre Bellatrix Lestrange. Beau palmarès, hein ? Je suis fier de toi. Et puis quelle belle jeune fille tu es devenue ! La chose qui me manquera le plus dans ce monde sera assurément nos disputes, tu sais, à propos de choses futiles avec George.
Tu te rappelle, de ce jour-là, tu devais avoir dans les six ans. Nous jouions dans le jardin, plus précisément dans le pommier avec George. Percy, Bill et Charlie dégnomaient le jardin et Ron prenait son bain avec Maman. Papa était au ministère, nous étions donc tous les trois dans le pommier. George et moi avaient réussi à monter dans les branches les plus hautes et tu t'acharnait à essayer de monter sur la branche la plus basse. C'était environ à cette époque que tu piquais nos balais et que tu t'entrainais à voler dessus, ce que nous apprirent par plus tard. George et moi se moquions de toi car tu n'y arrivait pas.
-Haha, Ginny elle sait pas monter-euh ! se moqua George en chantonnant.
-C'est même pas vrai ! Hurlais-tu.
George et moi rîment, on te hua aussi. Mais toi, petite têtue que tu étais, tu continuais à essayer de monter. Rageusement, tu donna un coup de pied au pommier, te faisant mal, ce qui provoqua l'hilarité chez nous. Tu nous tira la langue, l'air mauvais, et recommença de plus belle. Tout à coup, tu parvins à te hisser sur cette satané branche. Triomphale, tu te redressa et nous adressa un sourire qui faisait fondre tous les adultes, et dont toi seule avais le secret.
-A-ha ! t’exclamas-tu, en faisant le signe de la victoire. J'ai réussi !
Les branches étaient basses, de ton côté, heureusement. Tu entrepris de grimper encore, mais glissa et tomba. Dans ta chute, tu t'écorchas méchamment les genoux et cela ne m'étonnerait pas si tu en as encore des cicatrices. Lourdement, tu atterris sur le sol, sans crier. George et moi échangèrent un regard paniqué et descendirent du plus vite qu'on pût. On avait plus peur pour toi que de la punition de Maman qu'elle nous donnerait à coup sûr. Quand nous fûmes à terre, tu t'étais déjà assise, les jambes tendues devant toi. Tu les inspectaient avec attention. Du sang s'écoulait de tes genoux écorchés, des brindilles étaient emmêlés dans tes cheveux flamboyants. Tu étais écorchée sur les bras aussi, mais c'était moins important. Ta robe fleurie que tu détestais et que Maman t'avait obligée à porter était déchirée par endroits.
-Ginny ! s'exclama George.
-Ça va ?Tu as mal ? m’enquis-je, inquiet.
Tu nous regarda sans vraiment nous voir et fixa avec encore plus d'attention tes jambes. Tu plissa les yeux et releva la tête. Tes yeux riaient et un énorme sourire s'étirait sur tes lèvres d'enfant.
-J'ai même pas mal, chuchotas-tu.
-Ginny... Soufflèrent George et moi, en parfaite synchronisation.
-Petite sœur est forte ! t’écrias-tu, avant d'éclater de rire.
Très vite, nous rîment avec toi. Nous reçûment la punition la plus mémorable du siècle mais nous étions amusés. À présent, on te considérait comme une extrêmement courageuse petite fille et plus comme le bébé encombrant d'avant.
Alors oui, petite sœur, tu peux te relever. Je serai toujours avec vous, dans vos cœurs. Je ne te demande qu'une chose, petite sœur. Je sais que tu sera la première à te relever, à faire semblant que tout va bien, mais tout ira mieux. Je t'en prie, réalise ton rêve, tu sais, celui où tu deviendra poursuiveuse chez les Holyhead Harpies. Tu m'a promis, tu te rappelles ? Alors, réalise ton rêve. Vis ta vie et ne jette plus des regards en arrière. Tout ira mieux. Je te le promets. Car petite sœur est forte, n'est-ce-pas ?
[Enterrement de Fred, quelques semaines plus tard.]
La cérémonie terminée, Ginny était restée un peu plus longtemps que les autres. George se tenait en retrait. Il jeta un dernier regard douloureux à la tombe et mît sa main sur l'épaule de sa mère qui se moucha bruyamment. Quand Ginny s'était assurée qu'ils étaient assez loin pour ne pas l'entendre, elle se retourna pour être face à la tombe de Fred. Ce jour-là, on était le douze août. Elle caressa la tombe et chuchota:
-Hier, c'était mon anniversaire. J'ai beaucoup apprécié ton... cadeau. Cela a apporté un peu d'agitation dans la maison. La Bombabouze n'était pas nécessaire, cependant. On a passé une heure à nettoyer le salon, tu sais ? Heureusement que George a trouvé mon cadeau dans tes vieilles affaires. C'est un très joli album photo. Je le garderais toujours.
Pensive, elle souffla:
-Ta place est restée vide. Ça m'a fait tellement bizarre... George a tout de même fait un effort pour sourire et mettre un semblant d'ambiance.
Elle sourit à la tombe.
-Je suis majeure maintenant. J'aurais préféré que tu sois là hier. Mais on ne pas tout avoir, n'est-ce-pas ? Je vais bientôt commencer ma septième année. Je compte bien la finir, contrairement à toi ... Harry, Ron et Hermione la recommencent aussi. On sera ensemble.
Elle fit une pause et soupira. Ses yeux devinrent encore plus humides qu'ils ne l'étaient déjà avant.
-Je n'oublierais jamais comment George et toi m'aviez consolée après... Ma première année. Je compte bien tenir ma promesse d'intégrer l'équipe des HolyHead Harpies.
Une brise de vent légère fit voleter les cheveux qu'elle n'avait pas attachés avec le reste en queue de cheval. Elle ferma les yeux un moment et sourit.
-Petite sœur est forte...
Elle rouvrit ses yeux maintenant baignés de larmes et tourna les talons. Elle se dirigea vers la sortie du cimetière. Jetant un dernier coup d'œil derrière elle, elle lança discrètement un sort. Une volute dorée s'envola vers la tombe de Fred et se transforma en fleurs dorées- les préférées de Fred. C'était un sort qu'il lui avait appris. Elle n'arrivait à le faire seulement maintenant. Satisfaite, elle rejoignit sa famille qui transplanèrent vers le Terrier.
À l'unisson, deux âmes séparées se dirent adieu. Le dernier.
Petite sœur est forte.