Colin a vu la mort ce soir. Elle était là tapie dans l’ombre, elle était là guettant l’hécatombe, elle était là quand il ne la figurait pas même encore.
Colin a vu la mort ce soir.
Grande et imposante et surtout traumatisante, elle était l’ennemi en face de lui. Elle était les Mangemorts qui les guettaient de derrière l’éphémère protection, elle était les loups garous qui déjà se languissaient avec appréciation, elle était Lord Voldemort en personne qui pouvait faire tomber le dernier mur les séparant en un instant. Elle était tout cela à la fois et si envahissante.
Colin a vu la mort ce soir.
Il n’a pas vu l’espoir qu’il distinguait si aisément d’ordinaire. Il n’a pas vu les étoiles si nombreuses qui rayonnaient de là-haut, qui étaient au moins aussi belles que leurs idéaux. Il n’a pas vu tous ces gens qu’elles éclairaient, tous ces gens qui se battaient, tous ces gens qui le faisaient depuis des mois déjà. Il n’a pas vu les sourires certes forcés, les étreintes volées, les baisers capturés, les poignées de main échangées comme d’éventuelles dernières.
Colin a vu la mort ce soir. Elle était là tapie dans l’ombre, elle était là observant l’hécatombe, elle était là quand il ne la figurait toujours pas réellement.
Colin a vu la mort ce soir.
Elle se cachait derrière les épais feuillages, elle se dissimulait des combattants de tout âge. Mais lui l’avait bien vu, lui savait qu’elle se tenait là à l’entrée de la forêt. Elle ne pouvait pas être ailleurs, elle n’était pas ce corps effondré à ses pieds, elle n’était pas non plus cet enfant au visage estropié, pas plus qu’elle n’était la personne flottant dans le lac, noyé. La mort était à la lisière de la forêt et elle était une meurtrière. Mais Colin n’était pas à la lisière de la forêt.
Colin a vu la mort ce soir.
Elle a pris le visage d’un ami et l’espace d’un instant, il n’y avait plus rien d’autre au monde. C’était Natalie et ses nattes blondes, c’était la bête et ses crocs immondes, c’était une fille et son bourreau et en une seconde, le bourreau.
Colin a vu la mort ce soir.
Il a couru puis crié, entendu puis supplié, mais c’était bien la mort qui s’exprimait entre les lèvres pâles de son amie. D’elle il ne restait plus rien, et pourtant la forêt était loin et la mort aurait dû l’être elle aussi. Alors Natalie n’aurait pas été un pantin désarticulé, Natalie l’aurait amusé de ses blagues et émerveillé de sa beauté, Natalie aurait été cette fille avec qui il n’aurait pas échangé qu’un premier baiser. Mais elle était morte et au milieu de la cohorte, Colin essuya des larmes de rage un instant de trop.
Colin a vu la mort ce soir. Elle était là tapie dans l’ombre, elle était là se délectant de l’hécatombe, elle était là quand il se la figurait enfin.
La mort a vu Colin ce soir.