C’était la fin de semaine à Poudlard. Les élèves avaient quitté les salles de classe dans un brouhaha enthousiaste. Tout le monde parlait déjà de la sortie à Pré-au-Lard prévue le dimanche après-midi. Il faisait beau, le soleil brillait de plus en plus haut dans le ciel et les écharpes à rayures aux couleurs des maison avaient été rangées au fond des malles.
Après le cours de Métamorphose, la plupart des septième année étaient montés directement à la bibliothèque. Les ASPIC approchaient à grand pas, il ne restait plus qu’un mois pour réviser. Même les plus fainéants faisaient l’effort de travailler. Ou au moins de faire semblant. D’ordinaire, Galaad était l’un des premiers à la bibliothèque. Sixième rayonnage à droite, la petite table individuelle entre le rayon consacré à l’Etudes des Runes et celui de l’Histoire de la Magie. Mais pas ce jour-là.
Ce jour-là, il s’était empressé de dénouer sa cravate vert et argent. Il avait l’impression d’étouffer, il avait besoin de prendre l’air. Il aurait aimé pouvoir aller voler, mais les Serdaigle avaient réservé le stade de Quidditch jusqu’au dîner. C’était frustrant. À la place, il était allé s’asseoir sur les rives du lac. Il avait remonté sa robe et retiré ses chaussures pour plonger ses pieds dans l’eau. Elle était glacée, mais cela ne le dérangeait pas outre mesure.
S’il fermait les yeux et qu’il faisait abstraction des cris stridents des première année qui s’adonnaient joyeusement à la première bataille d’Aguamenti de l’année, il avait presque l’impression d’être les pieds dans le lac du manoir Westchester, en Irlande. De tous les manoirs de sa famille, c’était sans aucun doute son préféré. Justement à cause de la petite cascade et du lac en bas de la colline où avait été bâti le manoir. La seule différence avec Poudlard était qu’il n’abritait pas de calamar géant. Et qu’il n’y avait des gamins qui jouaient aux ricochets à dix mètres de lui. Etaient-ils vraiment obligé de hurler comme des harpies à chaque fois qu’ils faisaient plus de deux ricochets ?
Galaad était vraiment tenté de leur lancer discrètement des Silencio. Mais étant le seul élève de plus de 13 ans dans les parages, il risquait d’être vite démasqué. Il se contenta alors d’essayer de fusiller les enfants du regard, en espérant que ceux-ci auraient assez de savoir-vivre pour comprendre qu’ils dérangeaient et aller jouer ailleurs. Peine perdue, on ne lui accordait pas la moindre attention. Il aurait pu se décider à aller plus loin, mais cela aurait été donner raison aux demi-portions.
— Salut. Je peux m’asseoir ?
Galaad tourna la tête, c’était Potter. Qu’est-ce qu’il lui voulait celui-là ?
— Non.
C’était sorti tout seul. Non, il n’avait pas envie de subir la compagnie de Potter. Les cris et les rires des première année lui vrillaient déjà les tympans, il n’avait pas besoin de supporter en plus la présence de Celui Qui A Vaincu. Mais Potter ne tint absolument pas compte de son avis puisqu’il s’approcha pour s’assoir à côté de lui. Galaad leva les yeux au ciel. C’était bien la peine de lui poser une question si c’était pour ne pas écouter la réponse.
Potter retira lui aussi ses chaussures et remonta son pantalon moldu. Il avait dû aller se changer après les cours, comme la plupart des élèves d’ascendance moldue. Selon eux, les pantalons étaient plus confortables que les robes, ce qui laissait Galaad perplexe. Potter ne manqua pas de les éclabousser en plongeant ses pieds dans l’eau. Galaad lui adressa un regard noir, il dût retirer ses lunettes pour les essuyer.
— Désolé, déclara simplement Potter en haussant les épaules.
Galaad ne répondit pas, il avait tourné la tête en entendant un hurlement plus fort que les autres. Une petite fille était tombée à l’eau. Il ricana en regardant ses amis s’affoler. L’un des plus âgés eut la présence d’esprit de sortir sa baguette pour la sortir de là. Dommage… En tout cas, ce petit incident eut le mérite de disperser les gamins. Comme s’ils avaient peur qu’un professeur arrive et leur colle des retenues pour avoir attenté à la vie de leur camarade.
— Je peux te poser une question ?
Potter revenait à la charge. Galaad poussa un profond soupir et se retourna vers son camarade, agacé.
— Parce que vous comptez m’écouter si je réponds non ? railla Galaad.
— Euh…
— Allez y, posez votre question. Mais n’imaginez pas que je vais vous répondre.
— Tu n’es pas obligé de me vouvoyer, tu sais.
— C’est ma manière de témoigner mon mépris.
— Charmant…
Potter semblait stressé, c’était étrange. Il arrachait nerveusement les brins d’herbe autour de lui. Et à cause de ça, il avait de la terre sous les ongles et Galaad trouvait cela absolument répugnant.
— Vous comptez la poser, votre question ou pas ? Je ne suis pas vraiment d’humeur à jouer aux devinettes.
— Oui, oui… Est-ce que… Est-ce que tu as des nouvelles de Drago ? Je lui ai écrit après le…
— Après le procès, le coupa Galaad en détournant les yeux. Je sais et il ne veut pas vous parler.
Cela faisait un mois que la famille Malefoy avait été jugée. Presque un an après la fin de la guerre. Et les procès n’étaient toujours pas terminés, il y en aurait d’autres pendant plusieurs mois. Son cousin Drago avait eu la chance d’être assigné à résidence en attendant son jugement.
Même s’il savait très bien que les Malefoy avaient étés du mauvais côté pendant la guerre, Galaad n’avait toujours pas digéré le verdict du procès. Quarante-deux ans à Azkaban pour Lucius, cela revenait à un emprisonnement à vie. A une condamnation à mort. Personne ne survivait aussi longtemps à Azkaban. Narcissa et Drago avaient été graciés. Heureusement.
— Je ne pouvais vraiment rien faire pour son père.
— Il le sait très bien, grinça Galaad.
— Il refuse vraiment de me parler ?
— Et qu’est-ce que ça peut vous faire ?
Potter ne répondit pas immédiatement, il se contenta d’arracher une nouvelle touffe d’herbe. Galaad avait bien du mal à comprendre ce qu’il espérait et ce qu’il attendait de lui. Qu’il demande à Drago de lire sa lettre et de lui répondre ? Tout ça pour quoi ? Pour que Potter puisse avoir un poids en moins sur la conscience ? Comme si ça le dérangeait de savoir qu’un « sale Mangemort » allait finir ses jours en prison, dévoré par les Détraqueurs. Il n’était même pas ami avec Drago.
— Je ne sais pas trop, je me sens un peu responsable.
— Sans doute parce que c’est effectivement le cas.
— Tu dois me trouver stupide, lança Potter d’un ton ironique.
— C’était déjà le cas, confirma Galaad.
Potter eut un petit rire, Galaad haussa les épaules.
— Quoi qu’il en soit, ça serait vraiment sympa de ta part de lui parler. J’aimerai vraiment qu’il me réponde, même si c’est pour me dire d’aller me faire voir.
— Je n’y manquerai pas.
— De lui demander de me répondre ?
— De lui demander de vous dire d’aller vous faire voir, corrigea le jeune homme.
En réalité, Galaad était plus qu’intrigué. Qu’avait bien pu écrire Potter à son cousin pour qu’il ait à ce point besoin d’une réponse ? C’était étrange et il comptait bien se renseigner.
Potter s’était à nouveau muré dans le silence et Galaad ne comptait absolument pas faire la conversation. À la place, il fouilla dans son sac pour sortir un paquet de cigarette. C’était à Joren, il l’avait récupéré à la fin de leur dernier rendez-vous. Il sortit l’une des dernières cigarettes et la cala au coin de ses lèvres en tirant sa baguette de sa manche. Joren avait une espèce d’objet moldu pour faire apparaître une flamme, mais Galaad n’en voyait pas l’utilité. Un simple sortilège suffisait.
— Tu sais que c’est moldu, ça ? demanda Potter en fronçant les sourcils.
Evidemment qu’il savait. Disons qu’il faisait une exception. C’était les cigarettes de Joren ; elles avaient l’odeur qui imprégnait ses vêtements la plupart du temps. Au début, il détestait cette odeur de tabac, mais avec le temps elle était devenue familière. Une caractéristique du garçon qui le prenait dans ses bras dès qu’ils étaient à l’abri des regards. Il ne savait pas vraiment comment il avait commencé à fumer avec lui. C’était seulement arrivé comme ça. Sans raison. Comme leur premier baiser dans le parc du château, un soir d’octobre. Ce baiser au goût de sucette à la pomme.
En pensant à ce souvenir, Galaad eut un petit sourire en coin. Il sentait le regard de Potter sur lui. Oui, c’était un peu étrange. Galaad Westchester, le Sang-Pur conservateur, fumait des cigarettes moldues.
— Entre nous, Potter. Il y a quoi dans cette lettre ?
— Je ne vois pas en quoi ça te regarde, se défendit Potter.
— Alors je ne vois pas pourquoi je devrais parler à mon cousin, répondit Galaad du tac au tac.
— Pour lui demander ce qu’il y a dans ma lettre.
Galaad hocha la tête, Potter avait raison. Il était trop curieux pour ne pas parler à Drago.
— Tu pourras lui dire que s’il me répond, je pourrais peut-être lui obtenir un droit de visite. Pour son père.
— Comme c’est gentil…
— Je suis très sérieux.
Il avait en effet l’air de l’être. Il alla même jusqu’à poser sa main sur l’épaule de Galaad qui se raidit immédiatement. De quel droit se permettait-il de le toucher ? Il se dégagea d’un mouvement brusque.
— Gardez vos distances, nous n’avons pas élevé les hippogriffes ensemble.
— Tu comptes vraiment me vouvoyer jusqu’à la fin de l’année ?
— Et vous devriez apprendre à faire de même. Ce n’est pas parce que vous êtes Celui Qui A Vaincu que les sorciers de la haute seront indulgents avec vous. Vous feriez bien de lire quelques livres sur le protocole, vous risquez d’en avoir besoin. Comme vous n’avez pas eu d’éducation…
Galaad n’avait pas prononcé le mot « Moldu », mais c’était suffisamment sous-entendu pour que Potter voit rouge. C’était même le but. Qu’il s’énerve et qu’il s’en aille.
— Je crois que je vais vous laisser, Westchester.
— Monsieur Westchester, corrigea le jeune homme avec un air suffisant.
— Monsieur Westchester, répéta froidement Potter. J’ose espérer que vous parlerez néanmoins à votre cousin.
— J’ose espérer que vous apprendrez à utiliser correctement le mot « néanmoins ».
— Et puis, tu sais quoi ? Va te faire foutre.
Gagné. Potter se releva en le fusillant du regard. Galaad jeta son mégot dans le lac avant de lancer à son camarade qui s’affairait à remettre ses chaussures.
— Quarante-deux ans, Potter. Quarante-deux. Je ne sais pas ce que vous lui voulez et ce que vous attendez de lui. Mais vous pouvez être sûr d’une chose : il ne vous pardonnera jamais.
— Je n’ai pas à me faire pardonner, rétorqua Potter en le toisant de toute sa hauteur. Avec tout le sang qu’il avait sur les mains, il les méritait amplement.
— Nous en avons tous, du sang sur les mains. Vous y compris.
En voyant Potter s’avancer, Galaad porta la main à sa baguette, pensant qu’il allait le frapper. Mais le Gryffondor s’arrêta brusquement et tourna les talons. Galaad le regarda s’éloigner, un petit sourire aux lèvres.
Il s’alluma une deuxième cigarette et sortit une plume et un parchemin. Il était temps qu’il écrive à Drago.
Note d'auteur :
Participation au concours A vos claviers de Saam & Extraa.
J'ignore totalement ce qu'il y aura dans ce recueil de textes en vrac, ce sera un peu la surprise au fil de l'été...
Note de chapitre:
Bonjour,
Voici ma participation au thème 1 du défi A vous claviers saison 2. Les contraintes sont les suivantes :
- Le thème est au bord de l'eau.
- Le nombre 42 a une signification particulière
- Faire apparaître les 5 sens : ouïe, vue, goût, toucher, odorat
- Faire apparaître les 4 éléments eau, terre, feu, air
- Entre 1500 mots et 2300 mots.
Mise en contexte :
Galaad Westchester, 17 ans, Serpentard, grande famille de Sang-Purs, cousin de Drago Malefoy (par sa grand-mère !). Il a un an de moins que Harry & Cie. Il sort en secret avec un Gryffondor de son année, Joren (comprenez que les Sang-Pur ne sont pas très gay-friendly, surtout pas les parents de Galaad).
J’ai choisi de faire retourner à Poudlard Harry pour une 7e année après la guerre, un choix de sa part pour éviter le battage médiatique et être en quelque sort « protégé » entre les murs de Poudlard.
Bonne lecture !
Note de fin de chapitre :
C'est tout ^^'
J'espère que j'aurais l'occasion d'écrire la suite de cette petite affaire au cours de l'été, parce que je suis un peu frustrée de ne pas pouvoir raconter cette histoire entre Drago et Harry x)
N'hésitez pas à laisser un commentaire et n'oubliez pas d'aller voter !
Vous devez s'identifier (s'enregistrer) pour laisser une review.