Voici ma participation au concours de Saam et Extraa, A vos claviers ! Je ne sais absolument pas où elles nous mèneront mais cet été promet d'être palpitant ;).
Premier thème, on est partis !
•Le thème est au bord de l'eau.
•Dans votre texte le nombre 42 a une signification particulière.
•Vous devez faire apparaître les 5 sens.
•Vous devez faire apparaître les 4 éléments
•Votre texte devra faire entre 1500 mots et 2300 mots.
Merci à ma bêta d'amour pour avoir corrigé ce premier défi et merci pour son avis précieux !
J'espère que ça vous plaira, je vous souhaite une bonne lecture :)
A quarante-deux ans, Cho avait déjà quelques rides qui apparaissaient du jour au lendemain et ne la quittaient plus. Dans son esprit, elle voulait être encore jeune, être dans l’air du temps mais son corps lui démontrait le contraire. Il y avait eu un trop plein qui l’avait fait grandir trop vite. Vieillir trop tôt.
Cho ferma les yeux pour ne voir que le noir et sentir pleinement la sensation de ses mains sur la terre et celle de ses pieds qu’elle plongeait lentement dans l’eau froide du lac. Et puis l’air soufflant doucement dans ses cheveux. Elle aurait pu rester là pendant des heures, la tête levée vers le soleil, son visage captant sa douce chaleur. Les images de la guerre étaient encore floues mais elles n’allaient pas tarder à revenir en force. Cet instant de paix, Cho le recherchait constamment mais elle n’y parvenait jamais. Elle était toujours hantée, habitée par cette partie de sa vie où elle voyait la mort à chaque recoin.
Le halo de lumière qui passait au travers de ses yeux clos lui faisait inévitablement penser au feu. Cho se souvenait de ce feu engloutissant le château de Poudlard, de ces flammes qui brûlaient la peau lorsqu’ils n’avaient d’autres choix que de passer presqu’au travers pour s’échapper. Elle entendait encore le bruit des explosions qui éclataient de part et d’autre d’elle et les sorts provenant d’elle ne savait où. Elle n’avait plus aucun repère. Lorsqu’elle rouvrit les paupières, pourtant, elle fut surprise de ne voir que la forêt paisible, le lac tranquille et le son des enfants qui jouaient. Elle aurait dû sentir seulement l’odeur des pins mais c’était celui de la chair calcinée qui lui montait au nez.
Cho dut inspirer profondément pour se calmer. Ses mains tremblaient et elle les posa sur ses genoux pour en contrôler les soubresauts. Elle ferma les yeux encore un instant et inspira. Puis expira. Plusieurs fois. Jusqu’à ce qu’elle ne ressente plus cette peur qui lui tordait le ventre. Tout cela était du passé, elle devait oublier, ne pas y penser. Mais elle ne pouvait plus empêcher ce flot d’images revenant dans son esprit. Elle faisait des efforts tous les jours pour qu’elle cesse d’être hantée mais ces cauchemars refaisaient surface à des moments où elle ne pouvait s’y attendre.
Ces corps qui tombaient à la renverse, ces sorts qui passaient si près d’elle qu’elle en frissonnait encore en y repensant… Ces années si terribles qu’elles en avaient laissé des traces marquées au fer rouge, Cho avait du mal à les effacer de sa mémoire. Son cœur se serrait horriblement en pensant que ce début de guerre avait commencé avec la mort d’un homme. Cédric.
Elle avait cessé de compter les années. Il était mort depuis trop longtemps pour qu’elle continue d’aligner les nombres. Et ça lui faisait si mal. Elle se sentait coupable de ne plus se souvenir de son visage, du son de sa voix alors que la guerre demeurait si précise. Elle avait gardé des photos mais elle ne parvenait pas à les regarder. Les vestiges du bon temps lui serraient la gorge, lui donnaient l’impression qu’ils la lacéraient de coups. La disparition de Cédric avait été trop brutale, avait une signification trop horrible pour qu’elle s’en remette, même après presque trente ans.
Elle n’avait jamais pu expliquer sa douleur, n’avait jamais su mettre des mots sur ce jour où elle avait perdu son premier amour. C’était comme si on lui avait transpercé le corps de plusieurs coups de couteaux, sans relâche, sans lui laisser le temps de reprendre sa respiration. Pendant des mois, sa souffrance n’allait qu’en augmentant et l’image de Cédric restait constamment quelque part, près d’elle. Il lui manquait. Sa présence, sa façon de lui toucher la joue lorsqu’ils se voyaient, le goût de ses baisers et leurs discussions sans fin la nuit, dans une salle de classe ou près de la tour de Serdaigle. Tout lui manquait.
Elle avait tenté de l’oublier, de ne pas refouler certains sentiments qu’elle ne pouvait empêcher d’apparaître mais il y avait des jours où elle se sentait terriblement coupable. Coupable de vivre, de sourire, de rire, de tomber sous le charme d’autres garçons. Et elle ne savait pas comment lui dire pardon. Elle se sentait si faible face à la douleur, si lâche lorsqu’elle se surprenait à vivre alors que la guerre hurlait dehors, alors que le symbole de la mort de Cédric ne cessait de flotter au-dessus de sa tête.
Puis il y avait eu Oliver.
Ils s’étaient rencontrés après la Victoire, dans la Grande Salle. Bien sûr, Cho le connaissait avant pour avoir été le capitaine de l’équipe de Gryffondor mais elle n’avait jamais eu de conversations avec lui. Pourtant, ce fut sur son épaule qu’elle pleura toute la peur qu’elle avait ressentie pendant ces heures où la mort l’avait frôlée de trop près, toute la souffrance qu’elle avait en voyant ces corps allongés, immobiles, sur ce sol de pierre. Elle avait encore perdu des proches. Et le souvenir de Cédric était plus présent que jamais en cet instant.
Il avait accueilli ses larmes avec une infinie compassion et ne lui avait rien dit. Il s’était simplement mis à lui caresser doucement le dos pour tenter de la consoler et ne parla que bien plus tard.
Ils s’étaient revus le lendemain, étaient retournés à Londres ensemble et peu à peu, ils firent connaissance. Cho se sentait bien avec lui. Oliver la comprenait, la laissait débiter son flot de paroles lorsqu’elle en avait besoin et commença lui aussi à se confier. La guerre l’avait poussé à arrêter le Quidditch et il avait pris conscience des choses importantes. Il se sentait grandi, abattu aussi, par les années d’horreur que le monde sorcier venait de vivre et avait à présent envie de se poser les bonnes questions, de repartir sur quelque chose de nouveau. Cho s’était dit que c’était l’occasion.
Pendant un an, ils avaient fait le tour du monde. Ils étaient devenus les meilleurs amis du monde et avaient partagé des moments que Cho ne pourrait jamais oublier. Ils étaient partis loin pour se reconstruire, pour cicatriser les plaies trop profondes de la Bataille. En rentrant en Angleterre, ils n’auraient pas pu dire qu’ils allaient bien. Ils allaient mieux.
Cho ne savait plus exactement comment ils s’étaient mis ensemble. Ça s’était fait naturellement quand elle y pensait. Ils s’étaient embrassés un soir alors qu’il l’avait invitée à boire un verre après une journée harassante à trier des papiers. Depuis, ils ne s’étaient plus quittés. Ils avaient mis du temps à sauter les pas qu’un couple normal pourrait faire en quelques années. Ils n’étaient pas mariés et aucun d’eux n’en ressentaient le besoin. Ils s’aimaient, cela suffisait bien.
A quarante-deux ans, Cho ne pouvait toujours pas dire qu’elle allait bien. Il y avait des blessures qui se rouvraient parfois, peut-être trop souvent, mais Oliver était là. Elle se posait la question presque tous les jours : serait-elle toujours là sans lui ? Elle n’en savait rien. Et ne voulait pas savoir.
« Tu vas bien ? lui demanda soudain un voix qui l’apaisait tant. Tu m’as l’air pensive. »
Oliver s’assit à côté d’elle, la faisant sortir de ses pensées.
« Oh, je repensais un peu à tout… Mais ne t’en fais pas, ça va, répondit-elle avec un sourire alors qu’il la prenait dans ses bras. »
Des éclaboussures d’eau vinrent interrompre ce moment et Oliver tourna soudain la tête vers l’autre bout du lac, souriant à son tour. Cho se mit à rire en voyant ses deux enfants s’amuser à jeter les pierres qu’ils parvenaient à trouver. Elle se leva doucement, fit mine d’épousseté sa robe et se mit à les poursuivre autour de l’eau en riant. A quatre et six ans, ses garçons ne courraient pas bien vite et elle réussit rapidement à les rattraper et en les prenant par la main, ils se jetèrent tous les trois dans ce lac limpide.
La guerre était un peu plus loin dans son esprit. Avec ses enfants, elle était capable de tout et son cœur battait un peu plus vite en pensant qu’avec Oliver, ils l’avaient aidée à se sentir mieux. A être heureuse malgré les blessures, malgré les souvenirs qui lacéraient son cœur.
Quarante-deux ans n’était pas un âge où les gens faisaient habituellement de bonnes résolutions. Mais Cho se décida pourtant à en faire ; il était enfin temps pour elle d’oublier.
Merci d'avoir lu ! J'attends vos avis avec impatience ! ;)