Ron était dans une situation embarrassante... c'était le moins que l'on puisse dire.
Luna le regardait de ses immenses et magnifiques - comment ça, magnifiques ? Depuis quand trouvait-il les yeux de Luna magnifiques ? Enfin bref - et semblait attendre une réponse.
Qui ne venait toujours pas. Tout simplement parce que le rouquin ne savait absolument pas quoi dire.
C'était quoi la question déjà ? Ah oui. Pourquoi. C'était une très bonne question, d'ailleurs. Pourquoi ? Merlin, qu'est-ce qui lui avait pris ?
***
Deux semaines plus tôt
Ron venait de prendre le petit déjeuner (et pensait déjà au repas de midi... en même temps, nous parlons de Ron) quand il sentit un projectile l'atteindre en plein crâne. Sonné, il tituba avant de se ramasser et de tomber par terre... les fesses en premier. Il se releva en jurant et tentant de masser son coccyx douloureux sans perdre les restes de sa dignité. Heureusement, il n'y avait personne dans le couloir ; il n'y avait donc aucun témoin...
"Ronald ?"
Tout compte fait... il y avait bel et bien un témoin.
Un témoin complètement loufoque et dérangé répondant au nom de Luna Lovegood.
Il soupira et se retourna en direction de la jeune fille.
"Tu t'es fait mal ?"
Ron tiqua. Quoi ? Elle avait prononcé une phrase sans mentionner d'hippogriffes bleus à trois pattes ou autres bizarreries de ce genre ? En tout cas, il faudrait peut-être répondre à sa question...
"Je... je crois pas.
- Qu'est-ce qui s'est passé ?
- Je marchais tranquillement, et puis là j'ai reçu j'sais pas trop quoi sur la tête et..."
Il s'interrompit brusquement lorsque le visage de Luna s'illumina. Alors comme ça, ses souffrances la rendaient heureuse ? Allons bon...
Mais il fut détrompé en l'entendant s'exclamer :
"Mes chaussures !"
Se retournant, il constata que c'étaient bel et bien des chaussures derrière eux - donc a priori, celles de Luna - et que ce devait être ça qui l'avait atteint à la tête.
"Mais pourquoi quelqu'un me les aurait lancé dessus ? demanda Ron, tandis que Luna récupérait son bien.
- Je ne pense pas que quelqu'un te les aurait lancé dessus... Elles devaient être accrochées au plafond et, quand tu es passé dessous, elles ont dû tomber.
- C'est bien ma veine... mais que faisaient tes chaussures accrochées au plafond ?
- Les gens font souvent ça, pour me faire une blague... En tout cas merci ! Sans toi, je ne les aurais sans doute même pas vues !"
Et elle se hissa sur la pointe des pieds pour lui embrasser la joue.
Ron sentit ses oreilles et son visage s'embraser alors qu'elle s'élognait d'une démarche sautillante. Au moment de bifurquer, elle lança :
"Fais attention aux Joncheruines ! Il y en a plein qui gravitent autour de toi !"
Le roux sourit. Oui, venant de Luna, l'absence de remarque de ce genre aurait été vraiment étonnante...
***
Les jours qui suivirent, Ron essaya de voir s'il ne pouvait pas voir les affaires de Luna dans le château. Après tout, qu'y avait-il de mal à lui rendre service ?
Il lui rapporta successivement un bonnet, des chaussettes et des boucles d'oreille en forme de radis. Chaque fois, le visage de la jeune fille était radieux. Et chaque fois elle le récompensait en l'embrassant sur la joue.
Ron se surprit à y prendre goût. En fait, il n'attendait que ça : trouver quelque chose appartenant à Luna afin de le lui rapporter. Et quand, au bout d'une semaine, il ne dénicha rien, il fit la chose la plus stupide qu'il ait jamais faite (c'est dire).
Il prit lui-même les affaires de Luna pour les lui rendre par la suite.
Il commença par une écharpe qu'il cacha derrière une armure. Le lendemain, il la ramenait à Luna, et elle le remerciait à sa manière, toujours de la même façon.
Il continua avec des mitaines, un collier avec un bouchon de Bierraubeurre en guise de pendentif puis des chaussures.
Au début, cela ne lui posait pas de problème. Tant qu'il lui rendait ses affaires, tout allait bien, non ? Et il n'était pas près à renoncer à sa récompense, de toute manière.
Mais peu à peu, la culpabilité se fit sentir. Que dirait Luna si elle s'en apercevait ? Elle le haïrait, à coup sûr.
Et puis arriva le drame.
Il était en train de glisser un ruban à cheveux derrière un tableau dont les personnages étaient endormis quand Luna arriva au bout du couloir.
Et le vit. En train de cacher une de ses affaires.
Ils se figèrent tous les deux.
"Ronald ?
- Luna, je..."
Elle s'approcha de quelques pas sans lui laisser le temps de terminer. Elle leva ses yeux vers lui et posa la question.
"Mais... pourquoi ?"
Ah. Très bonne question, ça. Pourquoi ? Merlin, qu'est-ce qui lui avait pris ? Dire qu'il avait trouvé ça intelligent... Il se traita mentalement de tous les noms. Luna devait le détester, maintenant...
"Je... je ne sais pas... j'aimais bien te rapporter tes affaires alors... euh... ben... je..."
Il bafouillait, devenant de plus en plus rouge, quand Luna fit un geste qui eut le mérite de le surprendre et de le faire taire. Elle lui sourit.
"Il suffisait de demander, tu sais... On se voit demain dans la grande salle !"
Et elle partit, l'air étrangement joyeuse. Rêveur, un grand sourire béat aux lèvres, Ron effleura de ses doigts ses lèvres... où Luna venait de l'embrasser.