C’était fini. Il avait gagné. Mais il n’en tirait aucune joie… bien au contraire. Maintenant la peur l’habitait plus que jamais.
- Bonsoir, Drago.
Une conversation aimable, polie. Hors des événements. Hors du monde.
- Il se battent à l’étage inférieur. Ce ne sera plus très long… Je suis monté le premier. J’ai… j’ai un travail à accomplir.
- Eh bien, dans ce cas, accomplis-le, mon garçon.
Oui, il avait désarmé Dumbledore, le plus grand sorcier de tous les temps. Le vieil homme n’avait pas eu peur. Lui, si. Et c’était lui qui avait les cartes en main pourtant. Ils avaient discuté. Comme si de rien n’était. Comme si sa conscience venait enfin à son secours.
- Drago, Drago, tu n’es pas un tueur.
- Comment le savez-vous ? Vous ne savez pas de quoi je suis capable. Vous ne savez pas ce que j’ai fait !
- Oh, si, je le sais.
En bruit de fond il avait entendu les bruits d’un combat. Des gens se battaient en bas. Et lui n’agissait pas. Il ne pouvait pas. Il n’y arrivait pas. Pas encore. Il n’était plus aussi sûr de ce qu’il devait faire. De ce qu’il voulait réellement faire. Envie de vomir. De partir. De s’enfuir.
- Je comprends. Tu as peur d’agir seul tant qu’ils ne t’auront pas rejoints.
- Je n’ai pas peur ! C’est vous qui devriez avoir peur !
- Pourquoi donc ? Je ne crois pas que tu vas me tuer, Drago. Tuer n’est pas aussi simple que le croient les innocents.
Et Dumbledore l’avait écouté. Pour la première fois il avait eu toute son attention. Il lui avait prouvé qu’il était quelque chose. Quelqu’un. Qu’il n’était plus un gamin. Qu’il était un homme, désormais.
Il lui avait tout raconté. L’armoire à Disparaître. Les tentatives d’empoisonnement. Et Rogue ! Ce vieux fou avait vraiment cru que Rogue lui était resté fidèle… Alors qu’il l’avait trahi… Dumbledore y avait cru jusqu’au bout… même face à la mort il n’avait cessé d’y croire. Il n’avait jamais cessé de croire qu’une rédemption était toujours possible… même avec ça sur le bras… L’imperium sur Mme Rosmerta, les pièces protéiformes… Oui, cette année toutes ses idées, il les avaient prises à Granger…
- Quant à me tuer, Drago, tu as eu de longues minutes pour le faire. Nous sommes seuls. Jamais tu n’aurais pu espérer me trouver si peu en état de me défendre et pourtant, tu n’as toujours pas agi…
En fond de décor, comme un éclairage morbide sur une scène macabre, la Marque des Ténèbres illuminait le ciel d’une lueur malsaine. Le piège pour attirer Dumbledore dans la Tour d’astronomie. La bataille qui faisait rage, comme un horrible bruit de fond. Quelqu’un est mort. Quelqu’un de l’Ordre. Un corps inanimé au sol. Du sang.
- il ne reste plus beaucoup de temps, quoi qu’il arrive. Alors examinons tes options, Drago.
- Mes options ! Je suis là avec ma baguette à la main… Je m’apprête à vous tuer…
- Mon cher ami, cessons de jouer à ce jeu. Si tu avais dû me tuer, tu l’aurais fait dès que tu m’as désarmé, tu n’aurais pas perdu de temps à bavarder agréablement sur les moyens mis en œuvre.
- Je n’ai aucune option ! Je dois aller jusqu’au bout ! Sinon il me tuera ! Et il tuera toute ma famille !
- Je mesure la difficulté de ta position. Pourquoi donc crois-tu que je n’ai pas essayé de t’arrêter plus tôt ? Parce que je savais que tu aurais été tué si Lord Voldemort s’était rendu compte que je te soupçonnais. Je n’ai pas voulu te parler de la mission qu’il t’avait confiée et dont j’étais au courant, de peur qu’il ne se serve contre toi de la légilimancie. Mais maintenant, au moins, nous pouvons dialoguer sans détour… Aucun mal n’a été fait, tu n’as blessé personne, bien que tu aies eu de la chance que tes victimes imprévues aient survécues… je peux t’aider, Drago.
La peur. La peur qui lui donnait la nausée.
- Non, vous ne le pouvez pas. Personne ne le peut. Il m’a ordonné de le faire, sinon, il me tuerait. Je n’ai pas le choix.
- Rejoins le bon camp, Drago, et nous te cacherons mieux que tu ne saurais l’imaginer. En plus je peux envoyer des membres de l’Ordre chercher ta mère dès ce soir pour la cacher aussi. Actuellement, ton père est en sécurité à Azkaban… Le moment venu, nous pourrons le protéger à son tour… Passe du bon côté, Drago… Tu n’es pas un tueur…
- Je suis arrivé jusqu’ici, non ? Ils pensaient que je ne sortirais pas vivant de ma tentative, mais je suis là… et vous êtes en mon pouvoir… C’est moi qui ai une baguette à la main… vous, vous êtes à ma merci…
- Non, Drago. C’est ma merci qui compte à présent, pas la tienne.
Il avait baissé sa baguette. Peut-être l’espoir était-il encore permis. Peut-être pas. Des Mangemorts étaient entrés. Une horrible odeur de terre, de sueur, de sang. Le Mal était là, comme une peste. La fin du monde. Le dévorateur du soleil. Fenrir. Le dégoût. Et toujours cette nausée angoissante…
- Ce n’est pas moi qui l’ai fait venir. Je ne savais pas qu’il serait ici…
Le monstre était là, à côté de lui. Avec lui. Malgré lui.
Puis ils lui avaient demandé de le faire.
- Nous avons des ordres. C’est Drago qui doit le faire. Vas-y, Drago, dépêche-toi.
Envie de vomir. Terrassé par la peur. Un tremblement incontrôlable. Faire le bon choix. Se résigner ou lutter. Le choix. On a toujours le choix. Mais il n’est pas toujours simple, et le temps manque. Et la peur. La peur de se tromper. La peur de mourir. La peur qui envahit tout. Et Dumbledore toujours aussi calme, de plus en plus faible. A sa merci. Non. Lui à la sienne. Sa seule chance de sortir de tout ça.
- Allez, Drago, vas-y !
Sortir de tout ça. Fuir. Maintenant. Le plus loin possible. Loin de tout ça. Ne plus vivre ça, même de loin. L’oppression. L’étouffement.
- Vite, Drago, maintenant !
La peur. Toujours la peur. La peur qui s’empare du corps, qui enfièvre l’esprit. Ses mains, son corps, il tremble. Fenrir s’approche. Des voix autour de lui, le monde qui tourne. Des sensations vagues. Le vertige. L’oubli de ce qui s’est passé ensuite.
- Stupéfix !
- Courez, Drago !
Et le noir. Maintenant. Plus d’espoir.
- tu n’es pas un tueur
- Tu as peur
- Je ne crois pas que tu vas me tuer
- Tuer n’est pas aussi simple que le croient les innocents
- tu n’as toujours pas agi…
- Je n’ai aucune option !
- je peux t’aider, Drago.
- il me tuerait.
- Je n’ai pas le choix.
- Tu n’es pas un tueur…
- C’est ma merci qui compte à présent, pas la tienne.
- Allez, Drago, vas-y !
- Tu n’es pas un tueur…
- le choix.
- Tu n’es pas un tueur…

photo trouvée sur le site http://pinker.wjh.harvard.edu/photos/cape_cod/pages/moon%20over%20Cape%20Cod%20Bay.htm