Les murs étaient d'un marbre impeccable. Il émanait du château une sérénité probablement due aux nombreux sorts destinés à le protéger. Le terrain de Quidditch était calme, comme s'il attendait patiemment la venue d'anciens et de nouveaux élèves y disputant des matchs endiablés. Le saule cogneur se tenait fier et droit, espérant tromper les quelques téméraires qui auraient osé s'aventurer trop près de lui. Les remontrances incessantes de Rusard ainsi que les regards perçants et fourbes de sa chatte Miss Teigne ne réussissaient à briser le paisible cadre qu'offrait Poudlard à cet instant. James Potter prit un grand bol d'air frais, ébouriffa ses cheveux et sourit : cela avait beau faire sept ans, jamais il ne se lasserait de la vue de son école lors du premier jour de la rentrée. C'était comme un matin de Noël, où absolument rien ne pouvait ébranler la joie et la fébrilité des élèves.
-Rêveur Cornedrue ?
Sirius Black se tenait aux côtés de son meilleur ami, son éternel fin sourire postiché sur ses lèvres parfaites.
-Essaye plutôt « heureux ».
-Ne me dis pas que tu es devenu romantique en l'espace d'un été ? se moqua le troisième de la bande, Remus Lupin, lui aussi d'un enthousiasme qui lui était peu commun. Ses traits qui habituellement lui donnaient un air malade rayonnait, et ses yeux couleur miel pétillait de bonheur.
-Tu aimerais bien, sourit l'intéressé.
-Là je te reconnais ! s'écria Sirius en lui tapant amicalement dans le dos. Et toi Queudver, quelque chose à rajouter ?
Le dernier du petit groupe, Peter Pettigrow, sembla étonné qu'on lui donnât la parole. Rougissant quelque peu, il répondit de sa timide voix :
-He bien... J'espère qu'il y aura du pudding au diner.
Sous les rires de James et Sirius, les quatre amis- qui s'étaient fait connaître sous le nom des Maraudeurs- s'échangèrent un regard complice et passèrent les portes de l'école de magie, une même promesse dans le cœur : ça allait être une année mémorable.
-Les premières années, mettez-vous en rang derrière moi. Dépêchez-vous ! J'imagine que pour la plupart d'entre vous, vos parents vous ont déjà amplement parlé de Poudlard bien avant que vous ayez reçu votre lettre. Pour ceux qui ne seraient pas encore très accoutumés à la magie, voici ce qu'il vous faut savoir pour la cérémonie de ce soir : Mr. Dumbledore, le directeur de l'établissement, va commencer par vous adresser un discours de bienvenue puis listera les quelques points les plus importants du règlement. A prendre très au sérieux.
Lily Evans sourit lorsqu'elle vit sa professeure de sortilèges, le professeur Mcgonagall, toiser les jeunes de onze ans terrifiés par-dessus ses minuscules lunettes.
-Bien, reprit-elle en se redressant. Après cela aura lieu la répartition dans l'une des quatre maisons de l'école : Gryffondor - Lily la vit bomber le torse en prononçant le nom-, Poufsouffle, Serdaigle et Serpentard. Le Choixpeau sera placé sur votre tête et vous indiquera dans quelle maison vous allez passer les sept prochaines années.
-Et s'il l'on sait déjà dans quelle maison on va finir, est-ce réellement nécessaire ?
Le ton hautain qu'avait employé le jeune garçon aux cheveux blonds ne trompait personne. Il n'y avait que Serpentard pour accueillir des étudiants aussi vaniteux.
Mcgonagall lui lança un regard si perçant qu'il parut vouloir se cacher derrière la mèche qui lui barrait le visage.
-Ridicule. Soupira Nelly Wilbongs, qui se tenait aux côtés de Lily. S'il savait l'humiliation qu'il va ressentir à chaque fin d'année, quand Gryffondor aura encore une fois remporté la coupe des maisons.
Toutes deux venaient d'entrer dans la Grande Salle. Elles furent accueillies par Sir Nicolas, l'un des nombreux fantômes du château, ainsi que par une multitude de plats qui n'attendaient que d'être engloutis. Sans oublier les élèves de Poudlard, tous assis à leur table respective, selon la maison dont ils faisaient partis, le sourire aux lèvres, surexcités d'être enfin retournés dans leur collège pour une année entière. La dernière, en ce qui concernait Nelly et Lily.
-Tu t'imagines qu'il y a sept ans on était à leur place ? fit la seconde avec une pointe de nostalgie.
-Je ne préfère pas. Tu étais déjà tellement énervante à cette époque, rétorqua sa meilleure amie, un sourire malicieux au coin des lèvres.
Lily sourit. Elle se rappelait parfaitement avoir rencontré Nelly dès son premier jour d'école, lorsque toutes deux avaient été réparties à Gryffondor, la maison du courage. Un lien s'était immédiatement créé et très vite les deux jeunes femmes, pourtant bien différentes sur quelques points, ne se quittaient plus.
-Tu as bien bronzé cet été ! fit remarquer Lily à sa meilleure amie.
Nelly était une jeune femme grande aux longues jambes et à la taille très fine. Sa peau, matte au naturel, s'était encore matifiée avec le soleil des vacances. Ses cheveux étaient eux aussi foncés, de même que ses grands yeux bruns.
-J'aimerais te retourner le compliment, mais tu as toujours l'air d'une poupée.
Lily éclata de rire. Elle-même abordant des longs cheveux bouclés et d'un roux foncé, presque auburn, sa peau laiteuse ne bronzait pas facilement. Cependant, quelques taches de rousseur supplémentaires étaient apparues sur son nez durant les vacances d'été. La jeune femme avait de surcroit de magnifiques yeux verts, en amande.
Les deux jeunes filles s'installèrent à la table des Gryffondors alors qu'Albus Dumbledore prenait place sur l'estrade, le regard bienveillant mais ferme. Il ne lui suffit que de s'éclaircir brièvement la gorge pour que le vacarme ne se transforme en murmure.
-Mes chers élèves. Quel plaisir que de se retrouver en ce début d'année ! Bien que je pus passer le reste de la soirée à vous dire à quel point vous tous m'avez manqué, je vais choisir de passer rapidement au règlement que notre concierge, Mr. Rusard, m'a sommé de vous rappeler. Il est interdit de quitter le château sans autorisation, comme il est interdit de quitter son dortoir après le couvre-feu. L'accès au troisième étage est également interdit. Pour ce qui est des premières et deuxièmes années, vous ne pouvez participer aux visites annuelles de Pré-au-Lard. Enfin, notre concierge prie certains élèves de collectionner les bonnes notes plutôt que les retenues. Mr. Rusard est fatigué de devoir trouver de nouvelles punitions.
Le temps qu'il prît pour s'éclaircir la voix lui permit de lancer un œil malicieux bien que sévère vers quatre élèves en particulier. James, Sirius, Remus et Peter, quant à eux, arborèrent leur plus beau sourire.
-Bien, je crois m'être fait comprendre, continua le directeur avec un petit rire. Je demande aux premières années de s'avancer, afin que la répartition commence !
Durant les longues, très longues minutes où le Choixpeau déterminait dans quelle maison tel et tel élève appartenait, Lily ne quitta pas l'estrade des yeux, applaudissant avec ferveur lorsqu'un petit nouveau était assigné à Gryffondor et détériorant le fait qu'autant de jeunes soient envoyés à Serpentard. Elle ne pouvait comprendre par quelle malédiction cette maison existait encore. La maison de la ruse, comme le Choixpeau la présentait. « De la bêtise et de la cruauté, oui », pensa-t-elle. Sans même s'en rendre compte, son regard dériva vers la table des serpents et se posa sur un certain noiraud qui avait la tête plongée dans son assiette.
-Dites-moi les gars, vous comptez travailler un peu cette année, ou vous considérez toujours qu'ouvrir un livre avant un examen soit un affront à votre propre intelligence ?
La répartition venait de se terminer. Les Maraudeurs mangeaient avec appétit tout en discutant vivement de l'année qu'ils venaient d'entamer.
-On verra le moment venu, répondit James en haussant les épaules. Pour l'instant, je suis plutôt impatient de voir ce que l'équipe de Quidditch va donner !
Ça n'était un secret pour personne, James Potter et le Quidditch ne faisait qu'un. C'était pour son talent indéniable en tant qu'attrapeur qu'il était devenu le capitaine de l'équipe de Gryffondor.
-Peut-être que cette année tu vas enfin te rendre compte que Mckigan ne fait absolument rien mis à part jouer de ses muscles !
Cassidy Potter mâcha dans sa pomme de terre, l'esprit fébrile.
-Tu l'auras sans doute remarqué, mais jouer de ses muscles peut être utile quand tu es gardien. En ce qui concerne le fait qu'il te drague, à toi de te débrouiller.
Sa jeune sœur lui lança un regard noir. Cadette d'un an de James, Cassidy n'en était pas moins en septième année. En effet, il n'y avait en réalité que onze mois qui séparaient les deux frères et sœur, et ça avait été pour cette raison que leurs parents avaient insisté auprès de Dumbledore pour qu'ils puissent effectuer leur scolarité ensemble. La jeune femme ressemblait en tout point à son frère, si ce n'était les nombreux centimètres en moins, ses yeux d'un bleu vif et les quelques mèches caramel qui se fondaient dans ses cheveux brun foncés. Garçon manqué et insensible aux frasques de son grand frère, l'adolescence avait cependant poussé Cassidy à se comporter davantage en tant que fille. Excepté sur le terrain de Quidditch.
Cassidy tira puérilement la langue.
-Ou peut-être qu'elle aime ça mais qu'elle veut faire semblant que non se moqua Dorcas Meadowes, la meilleure amie de Cassidy.
Dorcas était aussi à Gryffondor. Beaucoup plus féminine que son amie, c'était elle qui avait appris à Cassidy tout ce qu'il y avait à savoir du maquillage et des garçons et c'était à cette époque que leur amitié s'était cimentée. Dorcas était petite, très mince et délicate. Ses longs cheveux noirs et lisses contrastaient avec le vert de ses yeux.
-Ou peut-être qu'elle est jalouse. Tu ne m'avais pas dit que tu voulais devenir gardien, Cassy ? demanda Sirius, mine de rien.
La jeune fille haussa les épaules.
-Sérieusement ?! s'enquit James. Je ne peux pas réellement me permettre de perdre une attaquante comme toi, désolé. En plus, être gardien, c'est fait pour les mecs.
-Si on pouvait éviter de parler Quidditch, ça ramène toujours votre côté macho, à vous les mecs, ronchonna Alice Fortescue, une amie de la bande, en remettant en place une mèche de ses courts cheveux noirs de jais.
Frank Londubat, son petit ami- bien plus grand et baraqué et joueur de Quidditch de surcroit- s'empêcha de rire alors que Sirius lui adressa une terrible grimace. Alice lui lança une pomme de terre à la figure en lui tirant la langue.
-Au fait James, dis-moi par quel miracle, ou devrais-je dire malheur, Albus Dumbledore a cru bon de te nommer préfet-en-chef, alors que tu n'as jamais été préfet et qu'en plus de ça, tu collectionnes les retenues ? demanda la jeune fille, soudain dubitative.
James ébouriffa ses cheveux et pris un air suffisant.
-J'imagine qu'il s'est tout simplement rendu compte de mon talent et qu'il a pensé, à juste titre, que je serais un merveilleux modèle pour les petits froussards de première année.
Chaque année, deux préfets-en-chef étaient élus, afin notamment de former les nouveaux préfets de cinquième année, de s'occuper des tours de garde les plus importants et d'être, en règle générale, un modèle de vertu pour les autres élèves. James n'avait jamais été préfet, puisque c'était Remus qui avait été nommé ainsi en cinquième année. Sans doute le directeur avait-il pensé que le jeune homme, souvent la voie de la raison des Maraudeurs, pourrait calmer les frasques de ses meilleurs amis. Le petit groupe en avait déduit que Remus avait failli à sa mission, puisque c'était James qui avait été nommé préfet-en-chef. « S'il pense que je vais me calmer, il se met le doigt dans l'œil », avait dit le jeune homme dans un éclat de rire lorsqu'il avait reçu son badge, un Remus décomposé à ses côtés. Lily Evans avait été nommée en tant que deuxième préfète-en-chef. James sourit à cette pensée.
-Sans doute, et il serait si fier de t'entendre les appeler les « froussards de première année », lança Remus, sarcastique mais cependant bon joueur. S'il te plaît, inculque-leur de bonnes valeurs.
-Bon point Lunard ! Inculque-leur les valeurs des Maraudeurs, il nous faudra bien une relève quand nous serons partis, sourit Sirius.
Ce fut ainsi que leur première soirée se déroula, dans l'amitié, la bonne humeur et l'insouciance. Cependant, malgré les blagues incessantes de son meilleur ami et les réprimandes régulières de Remus, James ne pouvait s'empêcher de jeter régulièrement de petits coups d'œil à sa droite. Décidément, ses cheveux roux ne cesseraient jamais de flamboyer.