Hermione était entrée un matin d’été.
Des plumes flamboyantes lui avaient été présentées, des fourrures resplendissantes lui avaient été avancées et d’attrayantes attentions lui avaient été octroyées.
Pattenrond avait soufflé un matin d’été.
C’était une habitude qu’il avait prise à chaque nouveau client qui pénétrait dans la boutique, à chaque nouveau client qui pénétrait dans ce qui était sa maison et serait probablement un jour son tombeau.
On devinait encore au travers de son soupir un semblant de tristesse, bien que la résignation l’étouffât au fil du temps.
Hermione était entrée et Pattenrond avait soufflé, et puis leurs regards s’étaient croisés.
Il n’était pas le plus beau des chats et il aurait été parfaitement inutile de le nier. Ses pattes arquées devaient sans doute alourdir sa démarche et Hermione imaginait sans trop de peine quel genre de vannes viendrait à l’esprit des garçons s’ils voyaient jamais sa face aplatie.
Elle n’était pas la plus belle des filles et il aurait été parfaitement inutile de le nier. Ses cheveux indisciplinés alourdissaient un visage banal et les vannes quant à son sourire étaient trop fréquentes pour qu’Hermione ne puisse vraiment les ignorer.
Et puis leurs regards s’étaient croisés.
Et chacun d’eux y avait observé danser cette petite lueur qui leur était si familière.
Il respirait l’intelligence. Elle n’aurait su dire exactement pourquoi, mais c’était un fait. Le mélange d’aspholède et d’armoise donnait un somnifère si puissant qu’on l’appelait la Goutte du Mort vivant, jeter un sort à quelqu’un requérait de fixer des yeux la personne visée, Locomotor Mortis permettait de bloquer les jambes de n’importe qui et ce chat gros chat roux était intelligent.
Elle respirait l’intelligence. Peut-être était-ce même pour cela, qu’elle avait daigné lui porter intérêt. Pour cela que ses grands yeux, au travers desquels on devinait mille questions et au moins deux fois plus de réponses, s’étaient arrêtés sur son panier, à lui, et pas sur les grandes cages qui habillaient l’entrée et ravissaient les sorciers. Pour cela qu’elle avait compris, avant même que la vendeuse ne le lui précise, qu’il se trouvait là depuis bien plus longtemps que tous les autres chats réunis.
Et puis leurs regards s’étaient croisés –encore.
Il n’était pas l’animal qu’elle avait rêvé, elle n’était pas la propriétaire qu’il s’était imaginée.
Mais de même qu’Hermione ne pouvait tolérer qu’un animal reste si longuement enfermé pour d’injustes raisons, Pattenrond ne pourrait jamais accepter que l’on fasse le moindre mal à une fille comme Hermione sur d’injustes critères.
Ils n’étaient pas parfaits –on le leur rappelait chaque jour-, ils n’étaient pas toujours aimés –ils en avaient bien conscience-, ils n’étaient pas irréprochables –et savaient que personne ne pouvait prétendre l’être.
Mais tout ce qu’ils faisaient, ils le croyaient juste.
Qu’importait les erreurs éventuelles, qu’importait les incompréhensions, qu’importait les ennemis croisés et fabriqués et qu’importait les injustes jugements.
Tout ce qu’ils faisaient, ils le croyaient juste.
Et les justes s’adoptaient l’un l’autre.
C’était un matin d’été, Hermione était rentrée et Pattenrond avait soufflé mais ça n’était pas comme d’habitude, non, parce que cette fois sa vie commençait et qu’ils s’en étaient allés, un matin d’été.