Luna connaissait bien la réserve paisible de Gurray Village, ses hauts arbres se dressant sur la butte dissimulée aux Moldus, sa terre battue, son odeur de feuilles humides, de fleurs fraichement écloses, d’eau ruisselante. Ses pieds avaient tant foulé les planches ocre des cabanons nichés entre les branches qu’ils n’avaient plus de secrets pour elle. Aussi, lorsqu’elle y atterrit un matin d’été, la tête tournant encore du voyage en Portoloin, ni les piles de parchemin ni les portraits au fusain accrochés aux murs ne purent la retenir à l’intérieur, et elle délaissa bien vite Monsieur Lovegood à ses discussions administratives avec la propriétaire des lieux. L’échelle de corde qui se balançait sous la petite trappe, attirante danseuse, ploya rapidement sous le poids de la fillette.
Luna aimait la nature dans son impétuosité. Arrivée au bas des cordages, elle s’adossa au gros tronc centenaire qui soulevait la cabane de l’entrée et retira souliers et chaussettes. Le parterre mou chatouillant ses orteils nus, elle s’en alla par les chemins tortueux qu’elle savait par cœur. Des bruissements l’accompagnaient, traçant sa route, multitude d’animaux timides cachés dans les fourrés, observant cette jeune humaine qui semblait dans son élément. Parfois, une créature passait, s’arrêtait devant elle pour la regarder doucement : Luna tendait alors une main enfantine et l’être la reniflait, ou s’en allait. Jamais elle ne tentait de les caresser, avertie à maintes reprises par Mistress Mueller qu’un animal sauvage ne devait être apprivoisé sinon quoi il perdrait son comportement sauvage, impulsif et chasseur. Elle les habituait donc simplement à sa présence.
La jeune sorcière sauta au-dessus d’un caillou puis traversa un ruisseau, l’eau claire léchant ses pieds. Deux poissons colorés firent la course entre ses chevilles. Elle ressortit pour s’enfoncer dans l’herbe douce, se dirigeant vers une petite clairière couronnée de fleurs.
La cour des papillons, scène d’un ballet virevoltant, emplie de couleurs. Les oiseaux gracieux valsaient entre les plantes pour son plus grand bonheur. La blondinette se dénicha un siège fait de deux racines épaisses, entrelacées, s’y installa pour les admirer. Leurs ailes filtraient la lumière du soleil à la façon des bougeoirs sortis pour Noël.
Mais ce jour-là, elle n’eut pas le temps de se laisser glisser dans la contemplation : un adolescent vint troubler son champ de vision. Agé d’une quinzaine d’années, un appareil photo à la main, un carnet enfoncé dans la poche de sa robe de sorcier, il tournoyait autour des oiseaux, semblant guetter leur moindre mouvement. La jeune fille, curieuse, trottina à lui pour s’enquérir de ce qu’il faisait.
— J’étudie leurs déplacements, fut la réponse, très sérieuse, de l’inconnu. Les jobarbilles bougent de façon très précise, de sorte à ne jamais se trouver sur le chemin d’un de leurs congénères ou de les gêner avec leurs ailes.
— Tu aimes l’ornithologie ? demanda-t-elle, ravie de trouver un camarade passionné comme elle.
— Non. Je m’inspire de leurs trajectoires pour créer des stratégies de Quidditch.
D’une pression de doigt, il captura la pirouette d’un volatile. Luna, d’abord déçue par sa négation, tilta au dernier mot.
— Quidditch ? Est-ce que tu es dans une équipe à Poudlard ? Tu es à Poudlard pas vrai, tu es trop jeune pour être joueur professionnel.
— Ouais. Je suis le capitaine de Gryffondor.
— Je ne pensais pas que le Quidditch était pris aussi sérieusement à Poudlard, observa-t-elle. Tu dois vraiment être passionné pour préparer tes stratégies pendant les vacances.
— Tu n’es pas à Poudlard ? s’étonna-t-il en la détaillant. Tu y entres en septembre sans doute. Le Quidditch est une affaire très, très sérieuse pour nous. Une maison remporte la coupe chaque année, et je dois absolument la gagner l’année prochaine.
— Pourquoi ?
— Pour la fierté ! Et puis, ça permet de se faire bien voir des recruteurs.
— Donc tu voudrais entrer dans une équipe professionnelle après ?
— Oui, dit-il avec aplomb.
— Tu as l’air aussi déterminé que Gryffondor sur le point de se battre en duel.
— Je ne connaissais pas cette expression, s’étonna le brun, haussant un sourcil.
— Ce n’est pas une expression… Gryffondor avait réellement une détermination légendaire pour gagner ses duels. Tu ne connais pas la légende ?
— Non.
— Je peux te la raconter si tu veux. C’est dommage un Gryffondor qui ne connaît pas les histoires sur sa propre maison…
— A un autre moment, plutôt. Le Quidditch ne peut pas être interrompu.
— Ah oui. Tu es vraiment obnubilé, alors, remarqua-t-elle de sa voix flûtée.
— Hm, hm.
Luna recula, le laissant tranquille à ses réflexions. A la place, elle se gorgea les prunelles des tourbillons du nuage d’oiseaux, examinant les jobarbilles se poser sur les corolles de pétales, redécoller, tourner autour de leurs partenaires. Blottie dans son écrin d’écorce, elle aurait pu s’endormir si la pluie ne s’était mise à tomber. Pas que les gouttes la dérangeaient ; au contraire, elles glissaient sur sa peau, la rafraîchissaient, traçaient de petits motifs en pointillé sur sa robe et s’échouaient sans bruit à ses pieds. Mais le sportif, lui, rangea dans la précipitation son carnet sur lequel il gribouillait furieusement quelques instants auparavant, et se précipita sous les branchages pour s’abriter. Il fixait, ennuyé, le rideau qui s’intensifiait en bon climat anglais.
— C’est la première fois que tu viens ici, n’est-ce pas ?
— Hein ? sursauta-t-il.
— Il y a des cabanes dans les arbres.
Devant son air déboussolé, Luna soupira et dégagea un barreau l’échelle de corde cachée par le labyrinthe de feuilles. Elle entama l’escalade, enjoignant le garçon à la suivre.
La cabane était plus petite que celle de l’entrée, mais plus chaleureuse. Des cousins rouges et bleus se disséminaient dans l’unique pièce, surveillés par une bibliothèque étroite, parée de romans décolorés. Une lampe en tête de dragon, mâchoire ouverte, pendouillait éteinte au plafond. La sorcière s’assit sur un tapis représentant des oisillons endormis sur un grimoire ouvert, couvés par une lune souriante. Il entra à sa suite, étonné, embrassant l’espace d’un cercle des pupilles.
— Merci, heu…
— Luna. Je t’en prie.
— Ok, moi c’est Olivier.
Un ange passa.
— Tu veux écouter l’histoire de Gryffondor, maintenant ?
— Si tu tiens à la raconter, pourquoi pas, fit-il en jetant un coup d’œil à l’extérieur détrempé. Les oiseaux se sont cachés de toute façon.
*
« Godric Gryffondor naquit au dixième siècle, dans un petit village reculé d’Angleterre. Aîné de cinq enfants, il grandit entre la forge de ses parents et le bruit constant de la place du marché qu’il traversait tous les jours pour quérir des vivres. Habitant un hameau bordé d’une forêt et dont il connaissait chacun des pavés, des visages, où tout le monde le connaissait ; en ces temps, déjà, il était apprécié pour son courage et sa loyauté. Fils d’une longue lignée sorcière, il ne se préoccupait pas des statuts de sang à l’instar de son voisinage, seulement à moitié magique. Le Code international du Secret Magique n’avait pas encore été ratifié, aussi Moldus et Sorciers cohabitaient sans trouble. Ainsi, celui qui deviendrait l’une des figures emblématiques de son époque fit ses premiers dans l’existence, accompagné de rires joueurs et de compagnie.
« Il apprit dès son plus jeune âge à manier enclume et marteau, et se passionna très tôt pour le fer rougeoyant. S’amusant à façonner de petites armes avec lesquelles il jouait en compagnie de ses amis, il s’avéra doué pour manier l’épée, n’hésitait pas défier ses camarades en duel qui s’achevaient invariablement l’adversaire au sol, lui remportant des sachets de caramels ou de gâteaux au miel. Il n’était pas rare de le voir se balader sur la place, son fidèle brin en fer rouge, qu’il avait passé des heures à forger, tintant fièrement à sa ceinture d’enfant.
« A onze ans, il acquit comme tous les presque adolescents sa première baguette et s’initia à l’art de la Magie. Il aima tant cela que sa maîtrise des Sortilèges dépassa bientôt ses connaissances de forgeron, et les formules remplacèrent les armes dans ses défis. Il se plaisait également à enseigner en cachette quelques sorts rudimentaires à ses frères et sœurs, se révélant bon professeur. L’éducation étant cependant onéreuse à cette époque, ses connaissances le limitèrent vite à sa grande tristesse. A seize ans, pour pallier ses lacunes, il inventait ses propres sorts informulés et rêvait d’accéder à un enseignement, au grand dam de ses parents qui ne voulaient pas le voir troquer son destin de successeur à la ville, lointaine. Sa baguette aussi fut un sujet de discorde : en bois de bouleau, courte, contenant simplement une écaille de truite pour raisons économiques, elle n’avait pas réellement choisi son sorcier. Le jeune Godric sentait la fluidité lui manquer, et ne rêvait que d’économiser pour une baguette plus personnelle, d’ordinaire réservée aux nobles et aux riches commerçants.
« Une occasion en or se présenta à lui quand, à l’orée de ses dix-sept printemps, un fabriquant de baguettes en quête de renommée fit savoir, à grands coups d’annonces criées sur la place centrale, qu’il offrait d’en confectionner une spécialement pour le meilleur duelliste du Comté. Un tournoi fut rapidement mis en place par la famille noble en personne. Tous les individus de plus de onze ans, de l’enfant le plus novice jusqu’à la doyenne la plus expérimentée, furent appelés à se présenter devant l’émissaire moustachu et vêtu de noir pour s’inscrire. Comme on pouvait s’y attendre, Godric remporta ses affrontements un à un. Alors qu’il immobilisait, désarmait, faisait chuter ses adversaires, attrapant toujours la baguette de l’autre à la volée, il grandissait peu à peu dans l’admiration des gens des alentours. Pour la finale, on raconte qu’une centaine d’yeux vinrent observer sa dextérité tant louée. On dit même que les enfants du Comte lui-même vinrent observer le combat mais, dissimulés dans la foule, personne ne put jamais en témoigner.
« Bien entendu, le jeune homme roux remporta la victoire ainsi qu’une belle baguette d’érable, toute en souplesse et contenant, pour sa plus grande fierté, un ventricule de dragon ; animal selon lui le plus noble que la Nature ait porté. Dans le même temps, son enseignement attira les badauds qui décidèrent finalement de lui confier leurs jeunes. Il les formait quelques jours par mois, en faisant de meilleurs artisans et gagnant par la même occasion quelques Mornilles, des outils ou des chutes de cuir réutilisées par la maisonnée. »
*
— Tu connais l’histoire par cœur ? s’étonna Olivier.
— Oui. Ma mère me l’a racontée pendant des années, et je la relis souvent maintenant.
*
« Ses parents, cependant, ne savaient pas de quel œil voir la nouvelle occupation de leur fils aîné, qui délaissait progressivement la forge. L’héritier des Gryffondor avait-il oublié sa vocation première, sa destinée à reprendre le commerce familial ? De plus, alors que la renommée commençait à lui tendre les bras, ses idées, elles, commençaient à tomber dans les oreilles d’un public plus large. Et le tout juste homme avait un caractère fort, bravache, qui lui déliait la langue un peu trop souvent au goût de la bienséance.
« Un jour en particulier, alors qu’il revenait après avoir passé l’après-midi en compagnie de ses élèves improvisés, il trouva dans l’atelier deux Gobelins réclamant à son père une bague, moulée par leurs ancêtres, que l’humain portait en alliance. Or, l’impétueux Godric, empli de préjugés sur les Gobelins métallurgistes qui faisaient concurrence à ses parents, sentit la colère l’envahir et chassa les deux inconnus par une pluie de propos houleux. Goutte qui fit déborder le vase : ses nombreuses altercations passées avec des Gobelins lui revinrent violemment à la figure par l’intermédiaire d’un émissaire, dépêché par le Comte lui-même, lui rappelant l’équilibre fragile des accords signés entre le Comté et le peuple aux oreilles pointues. Si les humains donnaient matière à querelle, écrivait-il, c’était tout le marché de l’armement Gobelin qui se fermait à leur espèce. Dans une ère rythmée de guerres et de conquêtes, ces armes n’étaient pas objets à négliger, bien plus solides et durables que ce que produisaient les pauvres forges humaines.
« Un lourd tribut tomba sur sa famille : pour réparer l’injure, les Gryffondor avaient ordre de retourner dix bijoux en possession humaine à leurs créateurs. Même en ajoutant la bague de fiançailles à la dot, la punition demeurait impossible au vu du prix de telles créations. Le jeune adulte, pour sortir sa famille de l’impasse, fit valoir ses talents de duelliste et s’engagea pour un an au service de l’armée du Comte en tant que maître d’armes, enseignant ainsi à la gentry l’art de l’offensive.
« Ces mois de service, s’ils lui permirent de gagner les Gallions nécessaires à ses parents, ne se révélèrent pas sans difficulté. Le vingtenaire ne connaissait rien des us de la petite noblesse. Il parlait fort, n’hésitait pas à exprimer la moindre de ses pensées et rien ne l’énervait plus que les regards hautains de ses élèves. Plusieurs l’auraient défié pour atteinte à l’honneur, si ç’avait été sans sa réputation. Il finit par éviter tout contact, se repliant aux allers-retours entre son atelier et la chambre qui lui avait été confiée, dans une aile écartée. Evidemment, son racisme ne désemplit pas, malgré les remontrances répétées et au risque de signer la fin des accords avec les artisans. De nombreux autres esprits partageaient ses pensées cependant, plus discrètement : qui se glissait chez lui pour demander des conseils, qui lui faisait relire ses stratégies, mais toujours en silence et secret. Pion dans la grande machinerie qui prenait ses aises, il assista à l’embrasement par la haine du Royaume-Uni. Ainsi débuta la première guerre entre Sorciers et Gobelins, initiatrice de longs combats. Jamais il ne prit ouvertement part aux affrontements, se tenant éloigné du sang versé, la logistique le satisfaisant pleinement.
« Dans l’ambiance brouillonne, la dette plongea dans l’oubli. Sans la menace de la surveillance du Comte, Godric abandonna simplement le manoir pour retrouver sa famille, les Gallions dans ses poches lui assurant une vie confortable dans son village natal. Mais il déchanta bien vite, arrivé chez lui : la précieuse bague parentale avait déjà été donnée. La colère, aidée par ses mois d’exil et l’atmosphère générale, lui monta à la gorge suivie du désir illogique de se prouver sa supériorité. S’enfermant dans la forge qui lui avait tant manquée, il fit fondre les pièces d’argent et autres somptueux colifichets. Suant des heures au-dessus de l’enclume, les mouvements de marteau malmenant ses muscles, refusant de quitter la pièce, il prit la résolution de verser tout son être dans une seule et unique arme, la plus belle que le monde aurait jamais vue. Pendant deux jours, les bruits de métal résonnèrent dans la maisonnée à l’inquiétude de ses parents ; mais finalement il sortit, tenant entre ses bras éreintés une épée étincelante, toute de brillant faite, gracieuse comme une hirondelle, pure comme les nuages se dissipant devant l’aurore. A la forge il avait allié la Magie, cet art dont il pensait les Gobelins dépourvus, incapables : il avait cueilli la puissance, le courage et l’honneur et les avait couchés dans l’écrin d’argent. Enfin, car sa colère le consumait toujours, il en avait serti le pommeau de deux rubis opaques comme le sang. Ainsi naquit l’arme la plus admirée de son époque, qui ajouta encore à sa renommée.
« Il poursuivit, paisible, sa vie au village, jouant de temps à autre les conseillers de guerre, passant le plus clair de son temps à se battre, aussi bien à la baguette qu’à l’épée, quand il croisait le chemin de Moldus. La vie, néanmoins, semblait avoir perdu de sa saveur : les jours s’égrenaient et elle lui paraissait simple, son éclat terni. La cour lui manquait, mais pour rien au monde il ne se serait soumis à nouveau à un Comte qui l’asservissait.
« Godric Gryffondor, allant sur ses vingt-et-un an, ressentait l’appel du voyage. Ses frères et sœurs avaient grandi et le voyaient s’égarer dans ses pensées. Les leçons se raréfiaient. Jusqu’au jour où le jeune homme aux longs cheveux saisit un sac de vivres, ses baguette et épée, et prit la route, à pied.
« Il se dirigea vers les plaines sauvages d’Ecosse, avide de nouveaux horizons, Transplanant seulement pour enjamber la mer. On racontait en ces temps que des dragons sauvages vivaient entre les montagnes verdoyantes, à l’abri des regards. Il marchait le jour, passait la nuit chez de bonnes gens acceptant de lui offrir une miche de pain, un peu de soupe et un coin auprès du feu en échange de la réparation d’un toit percé, du déblayage d’un arbre déraciné ou de l’apprentissage de quelques formules utiles. Quand aucune chaumière ne se dessinait aux alentours, il dormait à ciel ouvert, les étoiles pour compagnie. Le printemps succéda à l’été et la lande était belle, toute parée de couleurs et de reflets de soleil.
« Il eut beau chercher, arpenter les collines hasardeuses, Gryffondor trouva beaucoup de créatures dignes de bestiaires enluminés, mais qui lui étaient inconnue ; jamais de dragons. En revanche, il rencontra un jour une maison de pierres, détonnant fort curieusement avec le paysage désert.
« C’était une soirée tiède, après trois semaines d’aventure. La nuit s’apprêtait de sa robe d’encre, tombant lentement sur le ciel clair. Il eut du mal, au premier regard, à croire qu’une habitation se tenait dans cet isolement parfait, bâtie de pierres grises qui semblaient récentes. Il s’approcha de quelques pas cligna des yeux, incrédule : elle ne disparut pas, grossit même dans son champ de vision. C’était curieux : pourquoi des gens viendraient s’installer à un tel endroit, éloigné de tout ? Quel ermite prenait la peine de construire une porte en arcade, paraît sa devanture de petites lampes comme un couple de lucioles se posant sur un rocher ?
« Il toqua à la porte, demandant l’hospitalité pour la nuit. Deux femmes lui ouvrirent à qui il expliqua brièvement sa situation. Elles le laissèrent entrer.
« Au centre d’une chaleureuse pièce principale, trônait une table en bois croulant sous les ouvrages, les feuilles de parchemin raturées. Des plans, des manuels de Magie, des listes pour ce qu’il pouvait en voir. Il déposa sa sacoche sur un coin de tapis comme elles l’y invitaient.
« La première à se présenter avait de longs de cheveux bruns, un ventre arrondi et une posture assurée, menton relevé et épaules rejetées en arrière. Elle se nommait Rowena Serdaigle, était joaillière et écossaise de toute son âme. La seconde avait les cheveux aussi roux que les siens, surmontant des yeux bleus. Ronde, galloise, plus âgée que sa camarade, elle répondait au nom de Helga Poufsouffle. Toutes deux étaient sorcières émérites, possédaient des baguettes qui, à son grand étonnement, rivalisaient avec la sienne autant en beauté qu’en puissance.
« Fidèle à lui-même, il leur proposa un duel que Rowena accepta avec une surprise amusée. Sous l’œil vif de Helga, le trio s’installa dans la lande crépusculaire : les sorts ne furent pas longs à fuser, d’abord retenus comme les adversaires se jaugeaient puis, estimant le niveau de l’autre, de plus en plus retords. Godric était rompu au duel, mais Rowena maniait mieux sa baguette, semblant vibrer en même temps qu’elle. Il ignorait la plupart des formules qu’elle lançait et ne fut pas réellement surprit qu’elle remporte la manche, même s’il s’était battu de tout son cœur, comme il en avait l’habitude, ravi de trouver, une fois n’était pas coutume, une adversaire de sa trempe.
« La rencontre s’acheva autour de thés fumants, à l’abris sous la toiture solide. Discutant, le barbu apprit pour son plus grand ravissement que les piles bancales décorant le séjour étaient des notes, les deux amies ayant le projet fou de créer la première école de sorcellerie ouverte au peuple anglais. Elles étaient convaincues que limiter l’enseignement aux familles riches pouvant payer des précepteurs était injuste, que tout le monde méritait d’accéder à un apprentissage décent, peu importaient la naissance ou les prédispositions du destin, et il se rangea avec joie à leur avis. L’entreprise demeurait cependant à l’état de rêve, par faute de financements. La discussion se conclut donc sur une promesse de revanche en duel, et un rire volatile. »
*
— Et voilà comment son obsession pour les duels permit à Gryffondor de se lier avec Serdaigle et Poufsouffle, termina Luna.
— Mais comment Serdaigle et Poufsouffle se connaissaient déjà ? questionna Olivier. Pourquoi elles se trouvaient dans la campagne ?
— C’est une autre histoire, fit la blonde. Je te la raconterais si tu veux. Mais un autre jour, il s’est arrêté de pleuvoir là et mon père doit me chercher.
Elle vit avec amusement le brun se tourner, surpris, vers la fenêtre et s’illuminer d’un sourire en voyant l’air sec. Dans un dernier salut jeté à la volée, il redescendit de la cabane et retourna observer les papillons.
— Totalement obnubilé, pensa Luna à voix haute, rieuse.