— C'est incroyable ! Magnifique ! Fabuleux ! s'était réjoui l'archéologue sous-marin chargé de l'expédition.
— Franck, tu devrais te calmer, ton cœur va finir par lâcher ! avait temporisé aussitôt sa collègue et amie, soucieuse.
— Mais te rends-tu compte, Rebecca, de l'ampleur de cette découverte ! Je supervisais cette mission afin de faire le jour sur des épaves de navires de guerre napoléoniens, et voilà que je tombe sur une immense cité engloutie, oubliée depuis des siècles, pleine de richesses à découvrir ! C'est fantastique !
— Là je crois que nous l'avons définitivement perdu, avait ricané Amset, dans un anglais approximatif.
— C'est pourquoi il nous faut absolument faire une pause ! Se précipiter ne mènerait qu'à commettre des bêtises. Il est de notre devoir de prévenir le gouvernement français ainsi que les autorités égyptiennes ! Et l'Institut européen d'archéologie sous-marine ! avait pourtant insisté Rebecca Taylor.
— C'est moi qui l'ai fondé, cet institut, ils ne m'en voudront pas d'avoir tardé à faire quelques démarches ! avait aussitôt objecté Franck Goddio.
— Miss Scamander, je vous demanderai de faire le nécessaire. Et ce malgré les protestations de notre cher mentor et ami devenu hystérique, que notre réussite semble faire sombrer dans la folie, avait donc fini par ordonner Rebecca, avec un franc sourire.
— Avec plaisir, Madame !
Elle avait tourné les talons et s'était précipitée jusqu'à un endroit discret d'où elle avait transplané.
Après de brillantes études à Ilvermorny, Lauren Scamander avait fait le choix d'une carrière assez atypique – faisant ainsi honneur à sa famille – en prenant le parti de suivre une équipe d'archéologues sous-marins Moldus. Bien entendu, elle ne s'était pas attendu à ce que moins d'une année plus tard, ces derniers fassent une découverte majeure pour le monde sorcier. Mais c'est ainsi qu'elle s'était retrouvée devant le Grand Manitou suprême de la Confédération internationale des Sorciers, Babajide Akingbade, à expliquer comment elle pensait avoir découvert la Cité engloutie de Thonis-Heracleion.
Bien vite, une équipe de Chercheurs-Mages avait été diligentée. Mais une étrange magie, si vieille que personne n'avait le moindre souvenir de ses secrets, protégeait le cœur de la ville. Il avait fallu de nombreux conjurateurs de sorts et quelques mois de recherches afin de passer le champ de force qui contraignait l'eau et tout être à rebrousser chemin, empêchant de fait les Moldus de s'approcher davantage. Ces derniers avaient déjà sortis de la mer de multiples pièces, statue du Dieu Api, sculptures impressionnantes d'anciens pharaons et divinités. Mais ce qui intéressait particulièrement la communauté magique se situait derrière le dôme.
Lorsque Lauren mit le pied pour la première fois de l'autre côté, elle eut le souffle coupé. Face à elle, parfaitement conservé à travers les siècles, apparaissait un gigantesque temple dont les piliers immenses semblaient pouvoir frôler la surface, pourtant à peine visible de là où ils se trouvaient. Faites de pierres de granit, décorées de peintures égyptiennes vieilles de plus d'un millénaire, les colonnes lui donnèrent le sentiment de n'être que peu de chose à l'échelle du temps.
— Vous voilà muette, miss Scamander.
Elle secoua la tête.
— Nous devons être très prudents, nous ne savons pas ce qui nous attend à l'intérieur.
— Avez-vous une idée de ce que cet endroit pourrait être ?
— Peut-être. Mais je n'ose même pas y penser.
Accompagnée de quelques sorciers triés sur le volet, la jeune femme pénétra dans la bâtisse, baguette allumée, le cœur battant la chamade.
— Vous devriez rester derrière moi, s'inquiéta alors l'un des conjurateurs, tout en posant une main protectrice sur l'épaule de la jeune femme.
Cette dernière la balaya d'un mouvement du bras.
— Je sais me défendre seule, protesta-t-elle.
— Loin de moi l'envie de vous offenser, Miss Scamander. Mais vous êtes vitale à cette mission.
— Personne n'est irremplaçable.
— Pour moi, vous l'êtes, murmura-t-il, tout en s'effaçant pour la laisser passer.
Si Lauren fut interloquée de sa remarque, elle ne releva pas pour autant. Elle venait de trépigner d'impatience durant des semaines, elle n'allait certainement pas être distraite par des considérations secondaires. Elle leva sa baguette face à elle, illuminant le couloir principal qui desservait de nombreuses pièces annexes et autres galeries. Elle fit le choix dans un premier temps de les ignorer, avançant droit devant elle, curieuse de découvrir jusqu'où menait ce corridor. Finalement, après avoir marché ce qui lui semblait être une demi-éternité, ils débouchèrent sur une grande antichambre où trônaient cinq statues colossales, humanoïdes à tête animales.
Lauren les détailla, de sa gauche vers sa droite :
— Sobek, le Dieu crocodile, représente l'eau et est le gardien du Nil. Bastet est la Déesse chat, maternelle, elle est la protectrice du foyer et de la musique. Horus, le Dieu Faucon, Dieu du Ciel. Sekhmet, la Déesse à tête de lionne, est une guerrière. Enfin, nous avons Anubis, le Dieu à tête de Chacal qui veuille sur les défunts.
— Nous savons tous qu'il s'agissait simplement de sorciers souhaitant s'amuser un peu avec les Moldus, ricana quelqu'un dans son dos.
— C'était une autre époque, ils devaient bien s'amuser ! enchérit un autre.
Mais Lauren ne prit pas la peine de répliquer. La statue du milieu, la plus grande, sembla s'animer sous le rayon de lumière que produisait sa baguette. Elle orienta sa tête de faucon sur le petit groupe qu'ils formaient, et soudain une voix raisonna :
— Bienvenus, jeunes gens. Vous êtes ici pour étudier les arts mystiques. Chacun d'entre vous possède en son cœur une force et des valeurs différentes. C'est pourquoi chacun d'entre vous pourra rejoindre l'un de nous. Nous sommes chargés de votre protection et veillerons à votre sécurité. Prenez place dans le cercle.
La statue redevint immobile sitôt son discours achevé, laissant un silence angoissant planer dans la pièce. Finalement, un murmure s'éleva à l'arrière de la troupe.
— Une école. Nous avons trouvé une école de magie...
Mais c'est Lauren qui, le timbre haché, eut les mots justes pour qualifier leur découverte :
— Nous avons retrouvé l'Académie Perdue.