Pour la vingt-cinquième fois en une minute, je regardai la grosse pendule du salon.
La grande aiguille délicatement sculptée n’avait évidemment pas bougée, mais même la petite aiguille était restée immobile, comme pour me narguer. Seule la trotteuse marquait de son pas implacable les secondes qui s’égrenaient. Lentement. A une lenteur exaspérante. Tic. Tac. Tic. Tac.
Au énième Tic que je suivais en faisant claquer ma langue sur mon palais, je m’arrêtai brusquement et tendis l’oreille.
Etaient-ils arrivés ? Mais ce n’étaient pas eux, et j’esquissai une moue boudeuse.
Tic. Tac. Tic. Tac.
J’avais sept ans, et, assise sur le canapé en cuir du salon privé, j’attendais qu’ils arrivent. Mais ils n’arrivaient pas, et je m’ennuyais. Pour passer le temps, je regardais les aiguilles bouger, la trotteuse tressaillir à chaque seconde. Tic. Tac.
La pendule en bois précieuse que Père avait ramenée de France était très belle.
Le bois était poli avec soin, le cadran reluisait. Je pouvais me voir dans la vitre peu opaque.
J’avais sept ans, mais Mère disait que j’étais très jolie. Ça me faisait toujours plaisir, même si je savais que pour Mère, ce n’était pas un compliment. J’étais jolie, c’était un fait.
Dans la vitre, je voyais une petite fille aux joues roses, aux cheveux noir de jais noués en un chignon tressé, et surtout aux grand yeux violets bordés de longs cils noirs.
Mère disait que mes yeux étaient “améthystes”. Ça voulait dire qu’ils étaient très mauves, et qu’ils scintillaient à la lumière.
Mère disait aussi que, si j’avais les yeux améthystes, c’était parce que Père avait les yeux sombres, et qu’elle les avait d’un bleu océan. Alors les couleurs s’étaient mélangées, et mes iris étaient devenus violets. Enfin, améthyste.
Je levai les yeux vers la petite aiguille. Elle avait bougée. De peu, mais elle avait bougé, et c’était déjà ça. Je souris avec excitation. Plus qu’une dizaine de minutes d’attente, et je les reverrais.
Dans le verre, je vis une petite fille heureuse et impatiente, le rose aux joues, ses yeux violets emplis de bonheur.
Je ris.
Reg disait toujours que mes yeux étaient les plus expressifs du monde, et les plus beaux aussi. Sirius, lui, disait toujours que mes yeux étaient moches et trop grands.
Et je faisais mine de le bouder, parce que j’adorais quand Reg me défendait, quand la dispute entre les frères s’envenimait et quand j’intervenais pour régler le tout. Reg bougonnait un peu, mais un regard de ma part et il se taisait. Sirius faisait mine de m’écouter puis, par derrière, il me chatouillait si fort que je pleurais de rire.
Le plus silencieusement possible, parce que Mère et Lady Black disaient toujours que ce n’étaient pas digne d’une jeune fille au sang pur.
Je disais oui de ma voix la plus douce, puis quand elles ne voyaient rien, Sirius m’entraînait dans les bois du manoir et je forçais Reg à nous suivre. Là, nous étions libres. Plus de révérence gauche, plus de vouvoiement imposé.
De toutes façons, nous n’étions pas fait pour ça. Sirius protestait tout le temps, mes yeux à moi lançaient toujours des éclairs, et Reg subissait en silence.
Aujourd’hui, nous serions encore libres.
Des mois que je ne les avais pas vus, parce que Père et Mère m’avaient emmenée en France et que je les avais quittés à regret.
Je regardai l’horloge. Je souris de plus belle, et me précipitai hors du salon.
Je courus jusqu’au hall, bousculant un elfe qui portait une bouteille de vin. Sûrement pour mes parents et ceux de Reg et Sirius. Normalement, ça m’aurait dérangé que Père boive, mais aujourd’hui j’en souriais. Nous nous éclipserons discrètement, et nous serons seuls.
Perdue dans mes pensées, je manquai me heurter à une jupe crème délicatement brodée.
Je relevai la tête pour croiser le regard glacial de Mère.
« Lyra, je te l’ai déjà dit, une jeune fille ne court pas dans un manoir et ne se heurte pas aux adultes. Imagine si tu avais rencontré Lady Black ? »
Je baissai les yeux, penaude. Mère s’adoucit.
« Je te pardonne cette fois, mais que je ne t’y reprennes plus.
-Oui, Mère, fis-je joyeusement, avant de repartir le plus dignement que je pouvais. »
Je sentis le regard de Mère me suivre alors que je tournai les talons.
J’aimais beaucoup Mère. Elle était si belle, avec ses longs cheveux châtains et ses yeux si bleus. Et même si elle était parfois sévère, j’étais sûre qu’elle m’aimait.
Je savais que j’avais de la chance. Sirius m’avait déjà dit que sa mère lui criait dessus et avait honte de lui. Reg, lui, ne disait jamais rien sur ce sujet, mais je savais qu’il aimait Walburgea Black. C’était sa mère, après tout.
Moi, comme eux, je ne pouvais m’empêcher de la craindre. Je savais que c’était la meilleure amie de Mère, à Poudlard, quand Mère n’était que Druella Rosier et pas encore Druella Rowle. Mais Walburgea avait toujours été Walburgea Black, et restait cette femme sombre et effrayante qui tyrannisait les frères Black.
Mon pas ralentit, et je m’immobilisai sur une marche de l’escalier. Discrètement, je passai ma tête par dessus la rampe en bois lustrée. Un elfe s’inclinait à la grande porte d’entrée, puis exhorta une famille que je connaissais bien à le suivre.
Ouvrant la marche, il y avait Lady Black, qui tendis son manteau gris à un petit elfe pour dévoiler une robe sombre, avec un corset qui me paraissait incroyablement serré.
Je l’avais déjà entendu parler du poids qu’elle avait pris après la grossesse de Reg. A regarder la taille de guêpe de Lady Black, je ne pus que grimacer. Je n’avais pas vraiment hâte de porter des corsets, pour ma part.
Aux côtés de la sorcière se tenait Orion Black, un peu en retrait. Il était très beau - toute la famille Black était magnifique - mais Mère ne l’aimait pas. Quand je lui avais demandé pourquoi, elle m’avait sèchement rembarrée. Je pensais qu’elle n’aimait pas Lord Black parce qu’il était trop effacé. Sirius et Reg ne me parlaient jamais de leur père, et je ne le connaissais pas vraiment.
De toute façon, il ne m’intéressait pas.
Je souris de toutes mes dents en apercevant deux jeunes garçons qui fermaient la marche, le dos impeccablement droit. Je respirai un instant pour contrôler ma joie, papillonnai des cils et descendis le plus dignement possible.
Je vis le regard de Sirius s’illuminer en me voyant, et ne manquai pas le sourire en coin Reg. Une fois arrivée devant les Black, j’esquissai une révérence maladroite.
« Lyra, vous avez encore embellie, sourit froidement Walburgea. La France vous a réussi. »
Je la remerciai d’une voix un peu tremblante, me sentant détaillée par ses yeux aciers.
Je savais qu’elle ne m’aimait pas beaucoup. Sûrement critiquait-elle ma tenue, ou mon maintien, ou mon chignon qui s’était défait en une tresse d’où s’échappaient des mèches d’ébène.
Quoiqu’il en soit, je pouvais être sûre que, ces critiques, elle en ferait part à Mère, qui me punirait sûrement.
Je fus sauvée de ce mauvais pas par Mère, qui arrivait. Elle eut une somptueuse révérence à l’attention de Lord Black, puis salua plus chaleureusement sa femme.
Alors qu’elle conduisait leurs parents dans le salon, je me glissai auprès de Reg et Sirius et calquai mon pas sur le leur. Ils me prirent tous deux par la main, et nous montâmes à l'étage, loin des retrouvailles glaciales de nos parents.
Je sentis un des deux garçons me presser la main, mais je ne dis rien. Nous ne nous parlions pas souvent lorsque l’on pouvait nous entendre. Non, il nous fallait l’intimité de notre repère pour ça. Enfin, de mon repère.
Alors je grimpai courageusement les escaliers de plus en plus escarpés pour rejoindre la plus haute tour du manoir. J’entendais presque Reg souffler, taquiné par son grand frère.
Moi, j’étais la plus jeune, mais étais habituée à ces montées incessantes. C’était le prix à payer si je voulais vivre dans ma tour, comme une princesse.
Essoufflée, je conduisis les deux frères jusqu’à une porte en bois gravé d’arabesques, que je poussai sans ménagement. Un énorme sourire aux lèvres, les joues rendues roses par l’effort, je souris et déclarai solennellement: « Bienvenue ! »
Sirius et Reg lâchèrent aussitôt ma main pour pénétrer dans la pièce, et je les suivis avec ravissement.
Ma chambre était assurément mon endroit favori de tout le manoir. J’adorai mon lit à baldaquin en draps blanc, argent et bleu, j’adorai la coiffeuse en bois massif qui trônait dans un coin, j’adorai la bibliothèque bien remplie qui ornaient une partie des murs j’adorai le tapis soyeux, j’adorai les rideaux azurs, la fenêtre en arcades, la vue magnifique.
Je me tournai vers les deux frères, qui arboraient tous deux un immense sourire.
Sirius le premier me prit dans ses bras, et je me laissai aller à l’étreindre. Il m’ébouriffa les cheveux, et je lus dans ses prunelles acier sa joie de me retrouver.
« Tu m’as manquée, Lyly, souffla-t-il, son beau visage illuminé de bonheur.
-Ah bon ? fis-je mine de m’étonner. Je ne savais pas que j'étais si importante. »
Sirius ricana et me pinça gentiment la joue. Je ris à mon tour, et me tournai vers Reg. Il regardait la scène d’un air qui se voulait détaché, mais l’éclat amusé de ses yeux argents ne me trompa pas.
J’ouvris les bras, les yeux pétillants de malice:
« Câlin ? proposai-je de ma voix la plus mièvre, et Reg éclata de rire. »
Son rire cristallin semblait encore résonner dans l’air alors qu’il m’étreignait, moins fort que son frère, mais tout aussi tendrement, peut-être même plus.
Je me laissa aller à cette étreinte, sans dire mot. Merlin, qu’ils m’avaient manqués.
Je m’écartai enfin et les dévisageai tour à tour.
Sirius avait un peu grandi, et faisait plus grand que ses huit ans passés. Ses cheveux aussi noirs que les miens étaient légèrement décoiffés, tombant avec désinvolture sur son front pâle. Des mois que je ne m’étais pas chamaillée avec lui, que je n’avais pas été la cible de son sarcasme et de ses moqueries.
Et je réalisai qu’il m’avait vraiment manquée. C’était un peu le grand frère que je n’avais pas, que je n’avais eu mais que j’aurais tant voulu avoir.
Regulus, lui, était la copie miniature de son aîné. Il avait sept ans, comme moi. Ses yeux argents reflétaient un éclat serein qui ne transparaissait pas dans ceux de Sirius. Reg était calme et réfléchi, contrairement à moi qui était plus fougueuse, ou à son frère qui était franchement intenable.
Mais je l’adorai. Reg était mon meilleur ami, mon confident. Tout ce que je n’aurai jamais pensé dire à Sirius, je l'avouai à demi-mots à Reg et il me serrait contre lui, présence muette mais si consolatrice.
Reg et moi, nous n’avions pas besoin de parler pour savoir que nous étions tristes ou en colère. Il n’aimait pas trop les débordements d’affections, je ne voulais pas m’épancher sur mes émotions. Alors nous nous asseyions près de l’autre, au manoir comme à Square Grimmaud, et nous ne disions rien.
« Mère dit que t'es allée à Paris, commença Reg, envieux. Alors ? »
Je leur racontai mon voyage alors qu’ils ouvraient de grands yeux émerveillés.
Sirius croisa les bras, boudeurs.
« Tu ne t’es pas ennuyée, toi ! Et dire qu’on t’attendait avec impatience.
-Je vous ai manquée tant que ça ? fis-je mine de m’étonner, alors que je savais très bien la réponse. »
Oui, je leur avais manquée, tout comme je fixai le ciel parisien en me demandant, chaque nuit, si nous voyions les même étoiles.
Un jour, quand j’étais petite, Père était très content. Ça m’avait frappée, parce que Père était toujours triste, d’habitude. Mais ce jour là, il m’avait appelée sa petite étoile en me caressant la joue.
Du coup maintenant, j’aimais beaucoup les étoiles. Mère disait que c’est ridicule, mais moi j'étais très fière d’avoir un nom de constellation. Mère disait que c'était Lady Black qui me l’avait choisi, parce que Père et Mère hésitaient. C’est pour ça que, même si je n’aimais pas Lady Black, je lui montrais beaucoup de respect.
Parce qu’avec un nom d’étoile, j'étais encore plus proche de Sirius et Reg.
« C’est tout ? insista Sirius alors que je gardai le silence, rêveuse. C’est nul. »
Je réfléchis un instant, et ajoutai:
« Il y avait pleins de Veracrasses dans le jardin du manoir. J’en ai écrasé un, sans faire exprès. »
Mère disait que notre hôte ne prenait pas soin de son jardin, parce qu’il y avait pleins de nuisibles. Je ne savais pas ce qu’étaient des “nuisibles” - Mère disait que j’apprenais vite mais que je manquai encore de vocabulaire - mais j’avais failli hurler quand mon pied avait rencontré la grosse limace grise. Je ne savais même pas ce que c’était, un Veracrasse, avant. Et Reg non plus, visiblement.
« C’est quoi, un Veracrasse ? demanda-t-il.
-C’est un mollusque vert et gris, qui est paresseux et moche, fit Sirius. Tu ne sais même pas ça ? »
Pour le provoquer, je me tournai vers Reg avec un grand sourire.
« Un peu comme Sirius ! déclarai-je, ravie. Mou, moche et paresseux. »
Sirius cessa de sourire et son frère pouffa.
« Sirius le Veracrasse, chantonnai-je, les yeux brillants, alors que Reg riait sur mon lit à baldaquin. »
Ledit Veracrasse nous fusilla du regard, puis eut un grand sourire espiègle.
« Très bien, je suis un Veracrasse, admit-il sous nos rires. Toi, t'es quoi alors, Lyly ?
-Moi ?
-Tu sais pas ? Moi, j’ai une idée. Tu es un Doxy.
-C’est quoi, un Doxy ? fis-je en pouffant.
-Une sorte de fée, décrit Sirius. Petite, mince, agile. »
Je souris.
« Mais empoisonnée. Moche. Et parasite. »
Je perdis mon sourire. Je ne savais pas ce que voulait dire “parasite”, mais le ton moqueur de Sirius me fit arrêter de rire instantanément.
Le rire de Reg, en revanche, redoubla.
« Je suis pas un Doxy, m’offusquai-je.
-Lyly le Doxy, chanta Sirius en me parodiant. -Je suis pas un Doxy ! me défendis-je. Reg, dis-lui que je suis pas un Doxy ! »
Mais le plus jeune Black était écroulé de rire sur mon lit à baldaquin.
« Lyly le Doxy et Sirius le Veracrasse, nous nargua-t-il entre deux éclats de rire. »
Son frère lui adressa un regard meurtrier, alors que j’esquissai un léger sourire.
Le rire de Regulus était différent de celui de Sirius. Déjà, parce qu’il était très rare. Reg ne se déridait pas souvent, contrairement à son aîné.
Et puis, le rire de Reg n’avait rien à voir avec les sortes d'aboiements de Sirius. Reg riait gauchement, sincèrement, d’un rire qui était très peu communicatif pourtant. On aurait dit un léger piaillement d’oiseau.
Et pourtant, je me sentais envahie d’une douce chaleur, rien qu’en écoutant ce rire.
J’avais envie qu'il ne s’arrête jamais.
« Parce que tu crois que tu vas y échapper ? dis-je, espiègle. J’ai un surnom pour toi: le Botruc !
-Si tu veux, se redressa Reg, ses iris argents pétillant de malice. C’est toujours mieux que le Doxy.
-Lyly le Doxy ! approuva Sirius. »
Je fis la moue.
« Puisque vous êtes tous méchants, vous n’aurez pas le cadeau que je vous ai ramené. »
Leurs rires s’évanouirent aussitôt, et ils me firent des yeux de chiens battus.
« Pardon, Lyly, tenta de m’amadouer Sirius. Allez… »
Je secouai mes mèches d’ébène le plus sérieusement possible, comme faisait Mère quand elle était fâchée.
« Vu que je suis un Doxy, je vais pas être gentille avec vous.
-Mais t'es un gentil Doxy, dit Reg, et je ne pus retenir un sourire. »
Je me dirigeai vers ma table de chevet où reposait leur cadeau, enveloppé dans du papier de soie. Sous leur regard avide, je le déballai pour en sortir le collier.
Leur regard alternèrent entre mes mains et mon visage, alors que je leur expliquais mon idée.
« Quand nous étions à Paris, Mère m’avait confiée à une gouvernante qui m’avait promenée dans la ville. Quand nous nous rendions dans le Paris Moldu…
-Moldu ! m’interrompit Reg, réprobateur.
-Oui, Moldu, cracha Sirius. »
Les deux frères s’affrontèrent du regard sous mes yeux. Je me demandai quelle dispute encore les avait énervés.
« Donc nous marchions près d’une grande tour en verre, et il y avait pleins de vendeurs ambulants.
-Moldus, fit dédaigneusement Reg.
-Oui, Moldus, fis-je à la place de Sirius. Mais c’est pas important dans mon histoire, laissez moi terminer ! »
Il se tut.
« Et là, un Moldu m’a proposé un collier d’amitié !
-Un collier d’amitié ? fit Sirius, déboussolé. Il voulait être ton ami ?
-Mais non, fis-je en levant les yeux au ciel, sans préciser que j’étais aussi intriguée que lui au départ. En fait, c’est un beau collier marron avec un coeur au bout. Et le coeur est divisé en trois parties ! »
Je brandis mon cadeau à la lumière.
C’était effectivement une chaine brune, qui brillait un peu, au bout de laquelle pendait un coeur fragmenté en trois morceaux. Lorsque l’on tirait un peu sur le pendentif, les trois morceaux se séparaient.
Le Moldu m’a dit qu’il fallait offrir deux morceaux aux deux personnes que l’on aimait le plus, et garder le dernier pour moi.
« Et tu vas le donner à qui ? demanda Sirius, avide. »
Je levai les yeux au ciel. Les garçons étaient vraiment stupides, parfois !
« A un Veracrasse, un Botruc et un Doxy, ironisai-je, et le visage de Reg s’illumina. »
Evidemment, j’avais aussitôt pensé aux deux frères Black. Comme ça, Reg, Sirius et moi serions liés pour toujours.
« J’ai pas envie d’être lié pour toujours à Regulus, moi, bougonna alors Sirius.
-Et j’ai pas envie de porter un truc Moldu, fit son cadet. Mère dit qu’ils sont sales. »
Je les fis taire d’un regard et séparai les pièces du coeur. Ils s’approchèrent de moi pour observer le petit pendentif à peine doré, qui ne paraissait pas bien reluisant.
« C’est quoi comme matière ? demanda Sirius.
-Aucune idée, avouai-je. De l’or brun.
-Ou de l’argent marron, proposa Reg.
-En tout, cas, c’est moche, renchérit Sirius. »
Je refermai la paume qui tenais la morceau de Sirius, vexée.
« Si c’est comme ça, tu n’auras pas ton cadeau, fis-je avec une moue boudeuse. Si c’est moche.
-T’es susceptible, se moqua Sirius. Mais c’est pas grave, j’aime bien les choses moches. »
Il me fit un clin d’œil et j’échangeai un regard mi-amusé mi-désespéré avec Reg.
Je leur donnai leur morceau respectifs, qu’ils saisirent d’un air solennel.
« Il faut les mettre sur une chaîne, précisai-je en joignant le geste à la parole, comme le Moldu m’avait dit. »
Mère m’avait offert trois chaînes, une or, une argent et une d’une belle couleur marron-orangée. Je passai les deux premières au cou des frères, et enfilai mon propre collier. Je sentais sur moi les regards émerveillés de mes amis.
Soudain, les deux Black me prirent tous deux par la main.
Si la poigne de Sirius était forte et énergique, la paume de Regulus me pressa doucement la main. Je levai les bras de mes deux amis, un sourire incontrôlable aux lèvres.
À nos cous scintillait désormais un éclat brun. D’or marron, ou d’argent terne, peut-être.
Un éclat de bronze, en fait, mais ça, nous ne le savions pas encore.
OoOoO
Une fine pluie tombait sur le béton, martelant tristement les rues de Londres. Les gouttelettes tombaient de plus en plus fort sur les grandes maisons luxueuses, et jamais le Square Grimmaud ne m’avait paru aussi triste.
Les mains en visière, je tentais de repérer les numéros 11 et 13. Je serrais ma cape noire d’une main, et de l’autre je tenais un parchemin froissé, couverte de l’écriture penchée de mon meilleur ami.
J’avais neuf ans, bientôt dix, et je sonnai courageusement à la porte du 12, Square Grimmaud, qui venait d’apparaître devant mes yeux blasés.
Je n’avais pas le droit de sortir seule, encore moins les cheveux détachés et vêtue d’une simple robe noire, mais je m’en fichais. Reg m’avait appelée, et jamais je n’allais ignorer sa détresse. Alors je m’étais glissée hors du manoir, avait supplié Stinky de me faire transplaner à Londres en assurant que j’allais me débrouiller.
Maintenant que mes longs cheveux noirs dégoulinaient d’eau et que je grelottais de froid, je le regrettais amèrement.
Mais j’avais le sentiment que je ne me plaindrai plus dès que Reg me prendrait dans ses bras.
La porte s’ouvrit enfin dans son habituel grincement. Je me retrouvai devant un elfe à peine plus petit que moi, les oreilles tombantes d’où s’échappaient des poils blanc, la peau excessivement parcheminée.
Il s’inclina.
« Miss Rowle, croassa-t-il alors que ses yeux perçants me fixaient. C’est un plaisir de vous revoir. Je m’en vais annoncer au petit maître votre arrivée.
-Lady et Lord Black sont-ils là ? demandai-je d’une voix faussement assurée en risquant un coup d’oeil dans le grand couloir.
-Non, Miss Rowle. La Maîtresse a dit à Kreattur qu’elle se rendait chez Madame sa cousine, accompagnée du Maître. »
De quelle cousine parlait-il, je n’en avais aucune idée, mais je suivis le vieil elfe dans la noble demeure des Black.
Plus petite, ça m’avait beaucoup surprise que mes amis n’habitent pas dans un manoir, comme le notre ou celui des Rosier.
D’après Regulus, cette maison était magnifique et regorgeait des trésors du noble passé des Black.
D’après Sirius, cette maison était "flippante" et regorgeait de têtes d’elfes décapités.
Je frissonnai en jetant un coup d’oeil à l’escalier dont la rampe reposait sur des crânes elfiques.
Nul doute que je préférais ma propre demeure, même si elle était froide et impersonnelle.
Kreattur s’inclina devant moi et me laissa monter à l’étage, jusqu’à la chambre de Regulus. A peine eut-il tourné les talons que je ne pus m’empêcher de le regarder partir.
Kreattur était un elfe étrange. Il était vieux, déjà, alors que tous les elfes du manoir Rowle étaient plus ou moins jeunes. Et en plus il pensait parfois tout haut, même si ça n’arrivait que très rarement. Il détestait Sirius, qui le lui rendait bien, mais aimait beaucoup Reg. Et il adulait littéralement Lady Black, ce qui m’énervait un peu.
Je me rassurai en disant que peu de gens aimait cette mégère. Reg aurait fait de gros yeux en m’entendant penser, et Mère m’aurait à coup sûre tuée, sans parler de Père. Mais comment aimer Lady Black après ce qu’elle faisait ?
Je grimpai rapidement les escaliers pour me retrouver devant la chambre de Reg. Sans prêter attention au R.A.B écrit sur la porte en lettres émeraude, je rentrai dans la pièce.
Un rapide regard pour retrouver tous mes repères.
Les chambres de Reg et Sirius étaient à peu près pareilles. Même somptueux lit à baldaquin, même tapis vert, même fenêtre élégante, même rideaux sombres. Mais je préférais la chambre de Sirius, parce qu’elle me paraissait plus personnelle. La seule touche de Reg dans la chambre de mon ami, c’était notre photo. Une photo animée où je riais aux éclats, avec Sirius en fond et ma main dans celle de Reg.
Ça, et le Botruc en peluche que je lui avais offert. Moi, j’avais eu un Doxy de sa part, et nous avions acheté un Veracrasse à son frère. Je ne me rappelai même plus de quand dataient ces surnoms stupides et si puérils.
L’époque lointaine où nous étions unis, sans doute…
Je me débarrassa de ma cape et de mes chaussures boueuses, puis levai la tête vers Reg.
Il était assis sur son lit et fixai la fenêtre. Il faisait comme s’il ne m’avait pas entendu entrer, alors que je savais très bien qu’il savait que j’étais là.
Je m’assis à ses côtes sur l’édredon tout doux. Dommage qu’il soit vert, je n’aimais pas cette couleur.
Sirius non plus, apparemment.
« Alors ? fit brusquement Reg sans me regarder. Tu en penses quoi ? »
Je balançai mes pieds, d’avant en arrière, de moins en moins fort.
« Ce n’est pas vraiment une surprise, dis-je enfin. »
Le “pas vraiment” était important, parce que j’avais failli m’étrangler quand j’avais reçu la lettre de Sirius. Mais après réflexion, ça n’aurait pas dû m’étonner. Il nous l’avait bien fait comprendre, il n’aimait pas les Black, il n’aimait pas le milieu des Sang-Purs. Alors, au fond, sa Répartition n’avait rien de surprenant.
« Qu’est-ce que tu vas faire ? reprit Reg, toujours sans me voir. »
Mes pieds se balançaient de plus en plus doucement, mais je ne voulais pas les arrêter.
« Comment ça, qu’est-ce que je vais faire ? répétai-je. Qu’est-ce que tu veux que je fasse ?
-Est-ce que tu vas arrêter de lui parler ? »
Cette fois-ci, le mouvement de mes pieds cessa et je me tournai vers Reg, étonnée.
« Bien sûr que non ! fis-je sur le ton de l’évidence. Andry n’est pas allée à Serpentard, et pourtant je lui parle toujours ! »
Andry, c’était Andromeda, la cousine de Reg et Sirius. Je l’aimais beaucoup, parce qu’à chaque fois que je la voyais elle m’ébouriffait les cheveux et disait que j’étais une petite fée.
Je me rappelais que son père était un peu fâché quand elle avait été envoyée à Serdaigle, et pas à Serpentard comme tous les Black. Mère disait qu’Andromeda avait “mal tournée”, parce qu’elle était trop gentille avec les Sang-de-Bourbe. Mais moi, je ne voyais pas le problème parce que Andry était la plus-sympa-fille-de-presque-seize-ans que je connaissais. Et même si elle était moins jolie que Cissy et moins forte que Bella, elle était super intelligente !
Je ne l’avais jamais dit à Mère et Père, mais moi, j’aimerais bien ressembler à Andry, plus tard. Comme ça, moi aussi j’aurais un amoureux comme Ted - même si c’était un Sang-de-Bourbe, ce n’était pas grave, Andry m’avait dit qu’il était beau et intelligent mais qu’il fallait garder le secret quand même.
Reg remua sur le lit, mal à l'aise.
« Andry, ce n’est pas pareil, souffla-t-il. C’est ma cousine.
-Sirius, c’est ton frère, arguai-je.
-Oui, mais Sirius a été envoyé à Gryffondor, et ce n’est pas la même chose.
-Ah bon ? fis-je, étonnée. Quelle différence avec Serdaigle ? »
Je ne connaissais pas bien les autres maisons que Serpentard. Père disait que, à part Serpentard, les autres n'étaient pas “dignes de son intérêt".
Mais Serdaigle devait bien être digne d’intérêt, puisque Andry y était.
Pareil pour Gryffondor. Sirius n’aurait pas atterri dans une mauvaise maison.
« Serdaigle, c’est pour les gens rêveurs mais intelligents, expliqua Reg. Et Gryffondor, c’est pour les courageux.
-Sirius est chez les courageux ! m’écriai-je, ravie. C’est normal qu’il ne soit pas à Serpentard, alors !
-A Serpentard, on est courageux aussi, rétorqua Reg. On est juste plus intelligents.
-Sirius est bête, normal qu’il soit allé chez les Gryffondors, ris-je pour dérider mon ami. »
Celui-ci esquissa un sourire, et je souris à mon tour, victorieuse.
« Les bêtes, c’est les Poufsouffles, me confia-t-il. Là-bas, ce sont tous des cancres ! Mère dit aussi qu’il y a plein de Sang-de-Bourbe. »
Ted, l’amoureux d'Andry, était un Sang-de-Bourbe de Poufsouffle, mais il n’était pas bête. Peut-être que Reg se trompait.
« En tout cas, Sirius avait l’air content, dans sa lettre ! fis-je en me rappelant les quelques lignes griffonnées à la hâte que j’avais reçues il y a quelques jours. Il s'est déjà fait un ami, apparemment. »
J’étais contente pour lui, mais ne pouvais m’empêcher d’être un peu jalouse. Reg et moi allions à Poudlard dans un an, mais le temps me paraissait si long !
« Je n’ai pas reçu de lettre, moi, marmonna Reg, et je lui administrai un gentil coup de coude pour qu’il retrouve le sourire. Mère et Père n’ont rien eu eux non plus. Ils ont appris la nouvelle ce matin.
-D’où ta lettre ? compris-je soudain. »
Il hocha la tête.
« Père était très fâché, mais Mère… Elle était folle de rage. Elle a crié que Sirius allait déshonorer les Black, que ce n’était qu’un traitre-à-son-sang et qu’elle espérait que je n’allais pas devenir comme lui. Et puis après sa voix s’est brisée, et elle a répété “Merlin” plusieurs fois. Je crois qu’elle a même versé quelques larmes, alors qu’elle ne pleure jamais, d’habitude. »
Le regard argent de Reg se fit plus vague, comme s’il était plongé dans ses pensées.
« Si je suis moi-aussi envoyé à Gryffondor, je suis sûre que Mère va être très triste, m’avoua-t-il. Et en plus les Black auront honte de moi. »
Je lui pressai le bras, silencieuse. Je n’avais jamais imaginé aller autre part qu’à Serpentard, et encore moins que lui, Reg et moi serions séparés. Maintenant, ça me paraissait possible. Probable, même.
« Et pourtant, un moment, quand j’ai reçu la lettre de Sirius que tu m’as envoyé où il disait qu’il était heureux d’être à Gryffondor… »
Il ne termina pas sa phrase, et je lui pris la main.
Oui, je comprenais. L’espace d’un instant, Reg s’était imaginé rejoindre son frère chez les Gryffondors, vivre sa scolarité sans se soucier de l’honneur des Black, du futur de sa famille, de ses devoirs d’héritiers.
Je le comprenais, parce que je m’étais sentie pleine d’espoir après avoir lu la lettre de Sirius. Moi aussi, je voulais être courageuse. Choisir quelque chose que ma famille n’aurait jamais fait. Essayer. Être la première à m’asseoir cher les lions, être la première Rowle à aller ailleurs que chez les Serpentards. À être autre chose que la petite fille parfaite que tous voulaient que je sois.
J’avais presque dix ans, mais j’avais peur de grandir. Parce que je savais que, chez nous, les enfants au sang pur, l’innocence ne durait pas longtemps.
Je n’avais pas envie de me marier pour rapporter des galions et des sourires à mon Père, je n’avais pas envie de mépriser des Sang-de-Bourbe que je ne connaissais pas.
Je n’avais pas envie de perdre Sirius, parce que les Gryffondors et les Serpentards étaient sensé se détester. De tout façon, avais-je envie d’aller à Serpentard ?
Reg me prit dans ses bras, et je le serrais de toutes mes forces. Il était plus grand que moi. Ses yeux argents semblaient perdus, ses pensées au loin…
Moi, j’aurais aimé que ces yeux gris me regardent. Qu’ils se plongent dans mes yeux améthystes.
Je le serrais plus fort. Il était chaud. Alors que ses bras se refermaient sur moi, je sentis le tintement de sa chaîne argent. Au bout pendait une partie du coeur marron que je leur avais offert, à sept ans, à Sirius et lui.
De ma main libre, je tirai sur mon propre pendentif. Est-ce que Sirius, dans la tour des Gryffondors, faisait de même avec son collier or ?
Reg me serra plus fort. Il tremblait.
En fait, je me fichais pas mal des maisons de Poudlard.
Quand Regulus Black me serrait contre lui, je ne craignais plus rien.
OoOoO
« Black, Regulus. »
Je regardai mon ami se détacher de la file des premières années et s’avancer d’un pas mal assuré vers le Choixpeau. Je regardai Sirius, à la table des Gryffondors, qui faisait mine d’être détendu. Mais je regardai ses mains, qui trituraient sa chaîne en or.
Oui, il avait peur. Peur de savoir ce que Reg choisirait.
Le professeur McGonagall posa le chapeau sur les cheveux noirs de Reg. Le Choixpeau prit alors un air d’intense concentration.
Pour ma part, je croisai les doigts. Je voulais qu’il soit à Gryffondor. Comme ça, je pourrais les rejoindre, Sirius et lui.
Une minute passa. Puis deux.
Je commençais à entendre les chuchotements des élèves. Un mot revenait. Chapeauflou. Le Choixpeau ne savait pas où mettre Reg.
Alors c’était à Reg de décider.
Je fermais les yeux. S’il te plaît, Botruc, pensai-je de toutes mes forces en priant pour qu’il m’entende. Rejoins Sirius.
Une large déchirure apparut soudain sur le chapeau, et il s’écria: « SERPENTARD »
La table des serpents applaudit bruyamment alors que j’ouvrai brusquement les yeux.
Reg se dirigea lentement dans sa nouvelle maison, le visage fermé.
Chez les Gryffondors, j’aperçus l’air déconfit de Sirius, qui se reprit bien vite. Il avait l’air en colère.
La Répartition continuait, mais je n’écoutai plus rien. Je ne voulais qu’une seule chose, et ça avait raté.
Je baissai les yeux pour ne pas croiser le regard acier de Reg, qui me fixait à sa nouvelle table.
Je ne voulais pas choisir. Je ne voulais pas choisir entre Gryffondor et Serpentard, je ne voulais pas choisir entre mon avenir et celui tracé par ma famille, je ne voulais pas choisir entre Sirius et Regulus. Mais je n’avais pas le choix.
Alors quand mon nom résonna dans la Grande Salle, quand le regard de Sirius fut posé sur moi, quand Reg me fixait intensément, quand j’aurais voulu être ailleurs, je dus m’avancer vers le tabouret.
J’aurais voulu hurler quand la directrice-adjointe me coiffa du Choixpeau. J’aurais voulu déchirer le couvre-chef, casser à jamais le système des maisons. J’aurais voulu que Serpentard n’existe pas, que Reg soit à Gryffondor et que je l’y rejoigne.
Une voix résonna dans ma tête.
Intéréssant…Tu hésites entre Serpentard et Gryffondor, c’est ça ?
Je ne voulais pas. Je ne voulais pas choisir entre mes deux meilleurs amis. Je ne voulais pas être répartie.
Tu as la fougue des Gryffondors et leur grandeur d’âme.
Je ne pensais plus à Reg ou à Sirius, maintenant. Je pensais à Mère. Qu’allait-elle dire si je ne faisais pas honneur à mes ancêtres?
Mais tu as l’ambition et la ruse des serpents, et tu descends d’une famille noble.
Et puis je pensai à Père. Je pensai à toutes ces fois où il m’avait craché au visage, l’haleine empestant le vin. À tous ces bleus que j’avais cachés, honteuse. Aux mois, aux années de soumission à venir. Et une chaleur nouvelle monta en moi.
Je n’avais que dix ans, et ma vie était déjà tracée. L’acceptai-je ? La réponse était évidente. Non. Je n’étais pas un patin entre leurs mains.
Je n’avais que dix ans, presque onze, mais mes prochaines années ne servant pas dictées par ma famille. Ni par Père et ses airs, ni par Mère et son sourire.
Un courage hors du commun…ça m’aura pris du temps mais tu as évidemment ta place à
« GRYFFONDOR »
Je me levai, les jambes tremblantes, mais le regard empli de fierté.
D’une démarche que j’espérais digne, je m’assis chez les Gryffondors. Ma nouvelle maison.
Je tapai la main tendue de Sirius qui rayonnait, sentant sur moi les yeux argents de Regulus.
« Mon Doxy préféré ! rit mon aîné, radieux. »
Je l’observai attentivement. Sirius avait changé. Il était moins sombre, peut-être. Plus ouvert aux autres.
Autour de nous, la Répartition continuait. Les premières années étaient envoyées à Serdaigle, Gryffondor, Poufsouffle et Serpentard, dans un défilé incessant.
Pour moi, il n’y avait que deux choix. Sirius ou Regulus. Et je n’avais pas choisi. Et je ne choisirai jamais.
Je les voulais tous les deux. Sirius avec son rire de chien, ses mèches désordonnées et son sourire sincère. Regulus avec son regard argent, son sourire en coin et ses étreintes tendres.
Je me retournai pour observer mon Serpentard préféré. Nous échangeâmes un regard serein. La Répartition et les conversations continuaient, mais nous n’en avions cure. Reg me regardait, impassible, et je lui rendais son oeillade calme.
Enfin, il sourit. D’un sourire à peine perceptible, d’un sourire en coin, mais il sourit. Et moi je ne souriais pas, parce que je n’en avais pas besoin.
Regulus disait toujours que mes yeux étaient les plus expressifs du monde, et les plus beaux.
Alors ma joie et mon amour devaient certainement transparaître dans mes prunelles améthystes. Ou simplement violettes.
Qu’importe la haine de Père, les pleurs de Mère et la honte des Rowle.
Quand Regulus Black me souriait ainsi, j’oubliais tout.