Lily entra dans l'amphithéâtre dans lequel le professeur Binns dispensait son cours d'Histoire de la Grande-Bretagne et s'installa dans un rangée vide du milieu, envoyant rapidement à Marlène une photo de M. Podgy qui avait littéralement piqué du nez sur son lit le matin même et s'était endormi dans une espèce de position bizarre, le haut de la tête plaqué contre sa couverture, et le reste de son corps droit comme s'il était assis. Ce chat était spécial et elle l'aimait pour ça.
« Salut Evans ! lui lança Dorcas Meadowes en se laissant tomber à côté d'elle, la faisant légèrement sursauter au moment où elle pressait le bouton « envoyer ». »
Elle ne réalisa qu'elle avait sélectionné plusieurs contacts que lorsqu'elle vit le message partir. Elle salua brièvement Dorcas tout en ouvrant sa messagerie et constata avec horreur que deux autres personnes avaient reçu la photo de M. Podgy : James, et Severus Rogue, son ex petit-ami. Elle poussa un juron sonore et sa camarade de classe lui jeta un regard curieux.
« J'ai... envoyé un message à mon ex par erreur, expliqua Lily en grimaçant.
- Qu'est-ce que c'était ?
- Une photo de mon chat.
- Montre ! »
Lily pencha son écran vers Dorcas qui gloussa bruyamment juste au moment où le professeur Binns arrivait. Une seconde plus tard, Bertram Aubrey s'échouait sur la chaise à côté de la jeune femme brune. Il jeta un coup d'oeil à la photo.
« Joli chat, Evans, commenta t-il en sortant ses affaires. »
Elle n'avait aucune idée qu'il connaissait son nom. Elle le remercia d'un simple sourire et, alors qu'elle s'apprêtait à ranger son téléphone dans son sac, Dorcas lui intima de le laisser entre elles.
« Je veux savoir ce que ton ex va répondre. S'il ne dit pas qu'il est trop mignon, c'est que tu as bien fait de t'en débarrasser.
- Il ne va probablement rien renvoyer, bredouilla Lily alors que le cours commençait.
- Aujourd'hui, nous allons parler de l'impérialisme, annonça le professeur Binns.
- Super, ça va encore être passionnant, entendit-elle Bertram chuchoter avec lassitude à l'oreille de Dorcas qui hocha la tête.
- Je ne sais pas si le sujet est plus barbant que le prof ou si c'est l'inverse, répondit-elle. Et je ne comprends même pas pourquoi on doit se farcir ces cours alors qu'on est en Littérature. »
Au même moment, le portable de Lily vibra. Elle l'attrapa aussitôt et constata avec surprise que la réponse ne venait ni de Marlène, ni de Severus, mais de James. Dorcas lui jeta un regard impatient.
« Alors ? Qu'est-ce qu'il dit ?
- Ce n'est pas mon ex, répondit Lily en ouvrant le message. »
James Littérature : Je me demande ce que penserait ton chat s'il ouvrait ta galerie et trouvait toutes les photos que tu prends de lui quand il dort.
Elle fronça les sourcils et émit un rire confus tout en tapant une réponse.
Lily : Désolée, j'ai fait une fausse manipulation, ce message ne t'était pas destiné, mais quoi qu'il en soit, il ne serait pas choqué. Je n'ai que celle là. Tu as eu une réponse du professeur McGonagall ?
Elle n'avait pas eu de ses nouvelles depuis une semaine et plus elle avait pensé à la façon dont les choses s'étaient passées, plus elle s'était dit que c'était probablement normal. Ils ne se connaissaient même pas et elle ne savait pas quelle audace cachée en elle depuis toujours elle avait trouvée pour s'adresser à un garçon comme lui. A un garçon tout court. A un autre être vivant. Un autre être vivant qui n'était pas un animal. Il renvoyait l'image d'un garçon populaire, et ce n'était habituellement pas ceux avec lesquels elle était le plus à l'aise.
James Littérature : Tu n'as pas que celle là. Tu mens. Aucun propriétaire de chat n'a qu'une seule photo de son chat qui dort dans sa galerie.
James Littérature : J'ai rendez-vous avec elle ce soir.
« Le splendide isolement protège à ce moment là la liberté de commerce du Royaume-Uni et...
- Mon dieu, tuez moi, murmura Dorcas alors que la voix monotone du professeur Binns semblait avoir déjà eu raison de la moitié des étudiants. Si j'avais su que j'aurais à subir des cours d'Histoire, j'aurais fait autrement.
- Ils disent que c'est pour avoir tout le contexte de l'écriture des œuvres, lui chuchota Bertram en haussant les épaules. »
Lily : Est-ce qu'il y aura des bougies ?
Elle appuya sur « envoyer », et reporta son attention sur son cours, essayant du mieux qu'elle le put d'effacer le sourire malin qu'elle arborait et qui ne tromperait pas Binns le moins du monde. Non, le nouvel impérialisme ne la passionnait pas. Bizarrement, elle se trouvait d'avantage happée par sa conversation téléphonique avec un presque parfait inconnu. Son téléphone vibra de nouveau.
Marlène : Il faut que tu le mettes au régime.
Lily esquissa une moue vexée et renvoya simplement un émoji qui crachait de la fumée par les narines. Son chat était parfait, et personne au monde n'était autorisé à dire le contraire. Elle savait que Marlène faisait exprès pour la titiller, et elle y parvenait parfaitement bien.
James Littérature : Je n'avais pas réalisé qu'elle s'attendait sûrement à CE genre de rendez-vous. Quel restaurant est-ce que tu me conseilles ?
Elle esquissa un sourire et commença à taper une réponse, bien consciente que les pages de son cahier restaient vides et qu'elle le regretterait probablement quand elle se retrouverait devant sa feuille d'examen.
Lily : Il y a un italien qui est très sympa en bas de chez vous.
Elle laissa son téléphone en évidence tout en essayant de se concentrer sur le cours, mais elle n'y parvint que très difficilement. Dorcas et Betram à côté d'elle n'avaient pas l'air plus attentifs. Ils discutaient et jetaient des boulettes de papier en direction d'autres élèves avec qui ils étaient amis qui étaient assis plus bas. Une nouvelle vibration attira son attention sur sa conversation de groupe avec Marlène et Mary.
Mary : Toujours ok pour ce midi ?
Marlène : Je termine à midi trente, je vous rejoins à la cafet'
Marlène : Prenez moi une salade pleaaase
Mary : Tu me dégoûtes à manger sainement.
Lily : Mary, midi dans le hall. Si je ne suis pas morte d'ennui d'ici là.
Lily : Au fait. Abattez moi. J'ai envoyé la photo de M. Podgy à Severus sans faire exprès.
Mary : Quelle photo de M. Podgy ? Pourquoi est-ce que je n'ai rien reçu ?! Et plus important... Pourquoi est-ce que tu mentionnes encore le nom de ce pauvre mec ?
Marlène : +1
Lily : Je ne l'ai pas fait exprès ! Il n'a pas répondu de toutes façons.
Mary : S'il le fait, envoie lui un doigt d'honneur de ma part.
Marlène : Et un autre de la mienne.
Mary : J'ai vu une photo de lui passer sur Facebook hier. Devine ce qu'il faisait ?
Marlène : Plus personne n'utilise Facebook, Mary.
Marlène : Il lançait des chatons contre un mur ?
Marlène : Ou enfonçait des aiguilles dans une poupée vaudou à notre effigie ?
Marlène : Il a vraiment une tête à faire ça.
Lily : ?
Mary : Il était à cette manifestation pour le retrait de la loi du droit à l'avortement dans le centre ville avec ses copains.
Marlène : Oh, juste un jour de plus dans la vie d'un crétin.
Mary : Et je ne veux pas m'avancer, mais la voiture de la directrice du centre LGBT a brûlé le même jour, et d'après la photo que j'ai vue, ses copains et lui étaient dans le quartier jusque tard dans la nuit.
Mary : Ce n'est peut-être pas eux, mais ce n'est pas comme s'ils ne l'avaient jamais fait avant.
Mary : Vous vous souvenez de la moto carbonisée du prof d'histoire l'année dernière ?
Marlène : Bien sûr qu'on s'en souvient.
Marlène : RETIRE. LE. DE. TES. AMIS.
Mary : Il n'est pas dans mes amis ! Nous avons juste Barnabas en commun, tu sais, ce gars qui avait cette énorme maison et duquel tu m'as demandé de me rapprocher au collège pour que nous puissions profiter de sa piscine.
Marlène : ANNULE LA MISSION.
Lily : Je n'arrive pas à croire que Severus fasse ça.
Lily : Je veux dire, je te crois sur la manifestation, et je sais aussi bien que toi qu'il y a de fortes chances pour que ses copains et lui aient quelque chose à voir dans l'incendie de cette voiture, je me demande juste comment j'ai pu ne pas voir tout ça avant.
Lily : Changez-moi les idées avant que je ne repense au fait que je me sois mise nue dans le même lit que lui.
Mary : Est-ce que je peux voir cette photo de M. Podgy, maintenant ?
Lily laissa échapper un rire qu'elle ravala dès qu'elle sentit le regard du professeur Binns sur elle. Elle envoya rapidement la photo de son chat sur le groupe de discussion, mit son portable en silencieux, et tenta du mieux qu'elle le put de se concentrer sur le cours. Elle y parvint. Plus ou moins. Elle était focalisée sur la voix du professeur, mais elle jurait qu'il avait des pouvoirs magiques, parce qu'il parvenait à l'endormir alors qu'elle luttait depuis plusieurs années contre l'insomnie.
Peu d'étudiants faisaient encore l'effort de paraître attentifs, et même si le vieux professeur jetait des regards réprobateurs par ci, par là, sa classe lui échappait et Lily se demandait comment il pouvait encore trouver le courage de se lever tous les matins en sachant qu'aucun de ses élèves ne serait concentré plus d'un quart d'heure.
La matinée fut longue et fastidieuse et Lily se sentit profondément soulagée quand elle toucha enfin à sa fin. Elle se hâta de ramasser ses affaires qu'elle fourra à la va vite dans son sac, puis descendit les escaliers de l'amphithéâtre après avoir adressé un bref signe de main à Dorcas, et retrouva Mary qui l'attendait devant la cafétéria, portable en main.
« Est-ce que celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom t'a répondu ? demanda t-elle et Lily leva les yeux au ciel.
- Tu peux prononcer son nom, il y a prescription, répondit-elle en roulant les yeux. Et non, il n'a pas répondu.
- Ça fait quoi ? Huit mois que je n'ai pas vu ses cheveux gras ? Et pourtant, c'est toujours trop peu à mon goût. »
Lily esquissa une grimace et commanda le même sandwich que sa meilleure amie tout en récupérant une salade pour Marlène au passage, et elles s'installèrent à la table la plus éloignée de l'entrée, celle de laquelle elles pouvaient observer les élèves et les professeurs passer, celle à laquelle elles s'installaient tous les midis quand elles pouvaient déjeuner ensemble. Et puis elle jeta un coup d'oeil à son portable pour le remettre en vibreur, et soudainement, elle n'eut plus très faim.
Sev : Je me demandais quand tu me réécrirais. Tu es libre ce soir ? Ça fait un moment maintenant et tu n'as jamais voulu écouter ce que j'avais à dire. Tu me dois ça.
Elle sentit sa gorge se serrer et elle commença à avoir la nausée. Elle posa son téléphone devant Mary pour qu'elle puisse lire le message, et elle le récupéra pour lui répondre.
« Ew mais qu'est-ce qui ne tourne pas rond chez lui ?! Ne réponds pas à ça, lui conseilla son amie.
- Tu le connais, Mary. Si je ne lui dis pas clairement que c'était une erreur, il continuera de m'écrire. »
Elle l'entendit proférer une insulte alors qu'elle tentait de taper quelque chose qui ne laissait aucune place au doute. Elle effaça son message plusieurs fois de suite, avalant sa salive de plus en plus difficilement alors qu'elle avait l'impression que son estomac se retournait.
Severus et elle s'étaient connus lorsqu'ils n'étaient encore que des enfants. Leurs parents habitaient le même quartier et ils s'étaient rencontrés un après-midi ensoleillé dans un parc environnant. Ils étaient rapidement devenus amis et avaient fréquenté le même collège et le même lycée avec Mary et Marlène.
Elle était sortie avec lui au début de leur année de terminale. Cela avait duré quelques mois. Ils n'étaient jamais tombés dans la même classe et elle n'avait jamais rencontré ses amis jusqu'à cette soirée un peu arrosée lors de laquelle elle avait rapidement réalisé qu'elle se trouvait en compagnie des personnages les plus ignobles qui lui eut été donné de rencontrer.
Mary et Marlène n'avaient jamais vraiment apprécié Severus et elles avaient plusieurs fois tiré la sonnette d'alarme, mais Lily, pour une raison qui lui échappait totalement, avait toujours évité de regarder la vérité en face. Ce ne fut qu'après cette soirée où elle les entendit clairement fustiger sa meilleure amie pour son homosexualité qu'elle comprit à quel point elle s'était mise des œillères. Severus n'avait pas été le dernier à critiquer et les mots qu'il avait employés ce soir là résonnaient toujours dans sa tête.
Elle aurait voulu les oublier, et dès qu'il les avait prononcés, elle s'était mise à lui hurler dessus qu'elle ne voulait plus avoir affaire avec lui. Il n'avait pas compris. Elle avait essayé de lui expliquer, mais il s'était juste excusé comme si ce n'était qu'une maladresse alors qu'elle était restée trop longtemps à les entendre proférer des propos qui la tenaient éveillée le soir pour pouvoir avaler un mensonge pareil.
Il avait continué à lui écrire pendant plusieurs mois, l'avait attendue à la sortie du lycée presque chaque jour, et avait fait en sorte de prendre le même bus qu'elle pour rentrer chez lui jusqu'à ce qu'ils terminent leur dernière année de lycée, et ce malgré le fait qu'elle lui ait explicitement demandé plusieurs fois de la laisser tranquille. Cette fausse manipulation lui coûtait moralement bien plus que ce qu'elle ne laissait transparaître.
Lily : Erreur de ma part. Le message était pour Marlène. Merci de ne plus m'écrire.
Clair. Concis. Efficace. Elle envoya le message et reposa son portable entre elle et Mary sur la table. Sa meilleure amie croqua dans son sandwich et une seconde après, alors que ses yeux bruns tombaient sur l'écran du téléphone, elle manqua de s'étouffer. Lily dut lui taper plusieurs fois dans le dos pour la faire revenir à elle.
« Est-ce que tu as proposé un rencart au voisin sexy ?! s'exclama t-elle en pointant du doigt l'un de ses derniers messages envoyés. »
Lily suivit son regard et rougit légèrement lorsqu'elle comprit pourquoi Mary avait l'air si ahurie. Plus par réflexe que par véritable désir de dissimuler la pièce à conviction, elle récupéra son portable et le déposa dans son sac.
« Mary, c'est à moi que tu parles, pas à Marlène, soupira la jeune femme. Bien sûr que non, je ne lui ai pas proposé de rencart. Je... Il a aussi reçu la photo de M. Podgy parce que j'ai paniqué quand Meadowes s'est assise à côté de moi et que j'ai copié le message à lui et à Severus sans faire exprès.
- Est-ce que je suis la seule à qui tu ne voulais pas envoyer cette photo ? s'enquit-elle, un poil vexée. »
Lily s'apprêtait à répondre lorsque Marlène s'avachit sur la chaise en face d'elle, balança son sac à main sur celle qui se trouvait à sa droite, et tira sa salade vers elle en leur lançant un tonitruant :
« On parle de quoi ?
- Du fait que Lily propose des rencarts à mon voisin sexy, répondit Mary avec un sourire narquois avant de croquer de nouveau dans son sandwich.
- Je ne propose pas de rencart à...
- Rémus ? la coupa Marlène.
- Non, l'autre.
- Sirius ?
- Non, il y en a encore un, c'est...
- Oh, le joueur de basket ?
- Celui là ! s'exclama Mary avec un peu trop d'entrain au goût de Lily.
- Bon sang Evans, tes goûts sont nettement meilleurs que ces dernières années, la taquina Marlène en haussant les sourcils d'un air suggestif.
- Ce n'est pas... Je ne lui ai rien proposé, c'est juste...
- C'est le même gars à qui tu as donné ton numéro de portable la semaine dernière ?
- Pourquoi est-ce que tu le lui as dit ? gémit Lily en se tournant vers Mary. »
La jeune femme brune grimaça pour toute réponse alors que Marlène ricanait à l'opposé. Lily avait délibérément omis de partager cette information avec elle parce qu'elle la torturerait jusqu'à ce qu'elle trouve une autre distraction qui valait le coup. Et à sa connaissance, rien ne valait plus le coup, aux yeux de Marlène, que de taquiner Lily parce qu'elle avait échangé avec un garçon. C'était un fait trop rare pour qu'elle passe à côté.
« Est-ce qu'il t'a répondu pour les cours particuliers ?
- Il a dit qu'il avait rendez-vous avec le professeur McGonagall ce soir, répondit Lily qui tripotait nerveusement le sachet dans lequel se trouvait son sandwich, toujours intact.
- Hmm... J'espère que tu l'as informé que tu aurais bien besoin de réviser l'anatomie parce que ça fait un moment que tu...
- Marlène ! s'exclama Lily en lui envoyant un regard dissuasif avant de balayer la cafétéria des yeux pour vérifier que personne ne l'avait entendue alors que Mary semblait encore s'étouffer de rire avec sa nourriture.
- Détends-toi, Lily, gloussa t-elle.
- Je lui ai proposé de l'aider avec ses cours, pas... Un cinq à sept.
- Évidemment, appuya Mary en lui adressant un sourire bienveillant. Tu sais quoi ? Je ne te l'ai pas dit l'autre jour, mais je suis fière de toi. »
Elle lui pressa amicalement l'épaule et elle n'eut pas besoin de s'expliquer d'avantage pour que Lily comprenne. Depuis « L'affaire Severus », comme elles l'appelaient entre elles, la jeune femme rousse avait beaucoup de mal à entamer de nouvelles relations, qu'elles soient amicales ou amoureuses.
Elle était anxieuse à l'idée d'apprendre à connaître les gens, et plus spécifiquement, à l'idée de leur faire confiance. Mary et Marlène étaient les seules personnes sur cette terre à qui elle aurait pu confier sa vie en dehors de ses parents à qui elle ne ne racontait plus tous ses secrets comme elle avait pu le faire lorsqu'elle n'était encore qu'une enfant. Leurs relations s'étaient compliquées au fur et à mesure des années et Lily avait commencé à s'appuyer un peu plus sur les filles. Ses camardes ne lui disaient pas toujours ce qu'elle voulait entendre, mais elles étaient systématiquement honnêtes et humaines et leur amitié était probablement l'un de ses plus précieux trésors.
« Ne le sois pas, reprit Lily en esquissant une moue désabusée. Je ne sais même pas comment j'ai pu lui adresser la parole.
- Tu veux dire que le magnétisme était tel que tu n'as pas pu lutter ? la taquina Marlène en remuant sa salade avec sa fourchette.
- Parce que tu es comme ça, tu aides les gens quand ils ont des problèmes et c'est plus fort que toi, argumenta Mary en même temps.
- C'est professionnel, Marly, répondit Lily. Ce n'est pas comme si j'essayais d'être amie avec lui ou quoi que ce soit, je... C'est juste pour les cours.
- Tu sais ce qu'on dit... C'est professionnel jusqu'à ce que ça ne devienne personnel.
- Qui dit ça ?
- Moi, répondit Marlène en haussant les épaules. Tu sais quoi ? Mary a raison. Je suis fière de toi, moi aussi. Même si c'est juste professionnel, comme tu dis. C'est déjà quelque chose. Je veux dire, bien sûr que tu as l'habitude du tutorat maintenant, mais je sais que le premier pas vers les autres te paraît compliqué parfois, et c'est toi qui l'as fait cette fois-ci. C'est vraiment génial, Lily. »
La jeune femme hocha mécaniquement la tête et se perdit dans ses pensées. Elle n'avait jamais été spécialement timide et elle ne se considérait toujours pas comme telle. C'était plus compliqué que cela. Elle avait perdu l'habitude de rentrer dans des nouvelles relations, et elle avait, en même temps, perdu l'envie de risquer d'être déçue.
Elle savait que toute relation venait avec ses bons moments et ses mauvais, mais tout était très simple avec Mary et Marlène et elle ne connaissait aucune déception. Bien sûr qu'il leur arrivait de se chamailler, mais ce n'était jamais grave, jamais irrémédiable, et son cœur ne se brisait pas comme il s'était brisé quand elle avait réalisé à quel point elle s'était trompée sur Severus.