Je pense à vous mille fois par an
C'était un sentiment compliqué à décrire, un mélange de tristesse, de frustration… un tout petit peu de colère aussi… parce que ce n'était pas juste.
Mais quand il y pensait, Neville se disait que ce qui prédominait vraiment c'était le manque. C'était un peu bizarre d'ailleurs, il trouvait ça étrange qu'ils lui manquent alors qu'ils n'étaient même pas morts, alors qu'il pouvait leur rendre visite si souvent. Et puis au fond, il ne les avait jamais vraiment connus, il n'avait pas de souvenirs d'eux… avant… Alors c'était étrange de les regretter, non ? Mais pourtant c'était bien cela qu'il éprouvait, ses parents lui manquaient… affreusement, à lui en faire mal au cœur parfois, surtout certains soirs, quand tout lui semblait trop lourd. Quand il avait soudainement envie courir se blottir dans leurs bras et de sentir leur chaleur. Il n'en avait aucun souvenir mais pourtant il savait bien que leur étreinte était si douce. Sa mère avait une voix magnifique quand elle chantait des berceuses. Son père avait des grands bras forts, mais des mains toutes douces pour le bercer. C'étaient ces câlins-là, cet amour débordant qui lui manquait…
Ce n'était pas qu'il n'aimait pas sa Grand-Mère, c'est vrai qu'elle n'était pas toujours très tendre, mais ils s'aimaient, il le savait. C'est juste qu'il aurait voulu que ce soit sa Maman qui lui lise des histoires le soir, son Papa qui le félicite quand il aurait appris à lire, qu'il aurait bien aimé se disputer un peu avec eux aussi, être content de partir en vacances chez sa Grand-Mère, avoir deux petites sœurs et un petit frère.
Il aurait bien voulu qu'en leur montrant sa lettre d'admission à Poudlard, ils le serrent fièrement dans leur bras et qu'ils aillent lui acheter ses fournitures ensemble. Il aurait bien aimé voir leurs grands sourires, qui lui manquaient atrocement, plutôt que ce regard vide et juste un nouveau papier chiffonné qu'il garderait pourtant précieusement. C'était peut-être bête, il avait déjà de la chance que ses parents soient encore en vie, que sa Grand-Mère s'occupe bien de lui… mais tout de même il aurait bien aimé les voir ailleurs que dans une chambre d'hôpital…
Il aurait bien voulu leur écrire pour leur dire qu'il s'était fait de bons amis à Poudlard, qu'il aimait beaucoup l'école mais qu'il avait un peu de mal à suivre les cours… il aurait bien voulu qu'ils le rassurent en lui disant qu'il finirait par trouver sa voie… parce que certains jours c'était vraiment dur d'avoir des parents qui ne se souvenaient pas de lui… Parce que certains jours, même à onze ans, il souffrait toujours de l'absence de cet amour qu'il n'avait jamais connu, comme si son cœur allait exploser. C'était ridicule non ? De vouloir autant quelque chose qu'il ne connaissait pas.
Il aurait tellement voulu leur dire pour la fois où il avait réussi à vaincre l'Epouvantard, qu'ils soient fiers de lui… Il aurait bien voulu leur raconter le Tournoi des Trois Sorciers, le bal avec Ginny où il avait réussi à danser la valse.
Il aurait bien voulu avoir pleins de photos d'eux à faire voir à ses amis, pour pouvoir leur montrer que sa mère était incroyablement belle, surtout quand son père la regardait. Il aurait voulu pouvoir inviter ses amis pendant les vacances, comme Ron le faisait et Harry aurait reçu des cadeaux de la part de Molly Weasley et d'Alice Londubat. Sa mère ne lui aurait pas fait de pâtés, mais elle posséderait la recette des meilleurs muffins du monde, ceux qui fondaient la bouche et qui avaient un goût de paradis.
Il aurait aimé qu'à l'adolescence ils le rassurent, lui expliquant que son mal-être allait passer… et que de temps en temps ils se disputent un peu, parce que Neville les aurait trouvés trop étouffants parfois.
Il aurait bien aimé qu'ils lui écrivent quand tous les Mangemorts s'étaient échappés, pour lui dire de ne pas s'inquiéter, qu'ils faisaient attention et qu'ils ne leur arriveraient rien. Lui leur aurait répondus qu'il s'entraînait avec des amis et qu'il devenait meilleur de jour en jour, qu'il avait même réussi à faire un Patronus. Bien sûr qu'il avait été content que sa Grand-Mère le regarde fièrement mais il aurait tant aimé à la place que ses deux parents courent le prendre dans leurs bras en lui disant qu'il n'aurait pas dû prendre autant de risques.
Il aurait bien voulu qu'ils soient eux aussi obligés de s'enfuir pendant qu'il montait la résistance de Poudlard… Parce que cette année il s'en était voulu de les laisser tous les deux dans leur chambre d'hôpital, sans plus personne pour leur rendre visite.
Neville aurait voulu faire beaucoup de choses avec ses parents… Il avait vraiment voulu les rendre fiers et poursuivre leur lutte. Mais surtout, il aurait aimé qu'une fois Voldemort vaincu tout s'efface et redevienne comme avant… Pendant un court instant il avait eu ce fol espoir… Que tout s'arrange et que ses parents redeviennent ceux dont il n'avait aucun souvenir, seulement les regrets des jours heureux.
Evidemment, ce n'était qu'un rêve. Ceux qui leur avaient fait tant de mal étaient morts, mais pour Alice et Frank ça ne changeait rien, ils étaient toujours perdus dans leur monde. Neville continuait sa vie et eux continuaient à lui manquer.