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138e Nuit d'écriture


Chers membres d'HPF,

Nous vous informons que la 138e édition des Nuits d'HPF se déroulera le Vendredi 15 décembre à partir de 20h. N'hésitez pas à venir découvrir les nuits. vous inscrire !
Pour connaître les modalités de participation, rendez-vous sur ce topic.
A très bientôt !



De L'équipe des Nuits d'HPF le 30/11/2023 17:32


137e Nuit d'écriture


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De L'équipe des Nuits d'HPF le 12/11/2023 21:45


Journées reviews


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De Equipe de modération d'HPFanfiction le 12/11/2023 21:43


Journées Reviews - octobre 2023


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De Equipe de modération d'HPFanfiction le 16/10/2023 16:00


136e Nuit d'écriture


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De L'équipe des Nuits d'HPF le 15/10/2023 11:38


Changement de règlement sur la place des avertissements de contenu (TW et CW)


A partir d'aujourd'hui, la place des avertissements de contenu dans une fiction sera au choix de l'auteur·ice. Trois solutions possibles :


1 - Comme ce qui est fait actuellement, vous pourrez continuer à préciser les avertissements de contenu en note du début de chapitre concerné
2 - Ecrire la liste complète des avertissements de contenu dans la note d'histoire du premier chapitre
3 - Ecrire la liste complète des avertissements de contenu dans un premier chapitre à part, à mettre au tout début de votre fic

Dans les cas 2 et 3, nous vous demanderons d'indiquer, au début de chaque chapitre concerné "Contient un avertissement de contenu", avec le lien menant à la liste complète, afin de faciliter le travail de la modération, tout en permettant aux lecteur·ices de ne pas s'y référer s'iels le souhaitent.

Merci à vous et bonne lecture sur nos sites !


De le 06/10/2023 18:34


L'enfant terrible par Bloo

[2 Reviews]
Imprimante
Table des matières

- Taille du texte +
Note d'auteur :

Les personnages appartiennent à J.K Rowling.
Note de chapitre:

Et me revoici avec un nouvel OS à Gabrielle et Dennis, qui me fait penser que je vais bientôt devoir leur créer une série - c'est juste que je voudrais relire les anciens textes avant pour réajuster tout mon headcanon.

Cette nouvelle vous est fournie par le NaNoWriMo 2022 et, je l'espère, en appellera d'autres :D .

Bonne lecture !

Ça a commencé avec délicatesse, et presqu’insidieusement. Le gobemouche gris s’est posé sur le volet en bois, des brindilles dans son bec noir, et Dennis a dit : il ne faut pas le laisser faire son nid. Parce que le Fléreur de Dennis avait eu une portée et qu’assurément les neuf créatures viendraient croquer les oisillons si d’aventure le nid s’enracinait. Gabrielle n’avait jamais voulu de ce Fléreur, mais il était venu avec la bague, et la maison de pierres, et à tout ça elle avait dit : oui oui oui. Avec un pincement au cœur, Gabrielle a donc défait chaque jour les efforts du gobemouche, se rappelant les passereaux multicolores qui tournoyaient dans le jardin de ses grands-parents, à l’hiver.

Et puis, Dennis et Gabrielle ont rallié l’Angleterre, pour fêter l’anniversaire d’une nièce pleurer la mort d’un frère et essayer entre-deux de se réjouir de leurs premières vacances à deux depuis le mariage. Certainement, le gobemouche est venu chaque jour, et quand ils sont rentrés, ils n’ont pas eu le courage de lui arracher le fruit de son labeur. L’oiseau enfin a trôné au coin de la fenêtre, et puis couvé, et puis volé et volé et volé encore pour apporter à manger aux quatre juvéniles maculés, et Gabrielle a jeté un sort de protection pour éloigner les Fléreurs.

Mais pour son mariage, il n’existait pas de formule magique ; ça a commencé avec délicatesse, et presqu’insidieusement, ce n’était plus un gobemouche mais un corbeau, un oiseau de mauvais augure, dont les fêlures ont niché dans les cœurs bleuis de Gabrielle et Dennis.



*



À six ans, Gabrielle était pour ainsi dire une casse-cou, qui collectionnait les bleus et autres éraflures et que d’aucun aurait aisément qualifié de « garçon manqué », si elle n’avait pas été si jolie, si Vélane, si similaire à Fleur sa grande sœur.

Il fallait pourtant ne pas connaître les sœurs Delacour pour les imaginer deux images semblables.

Certes, elles étaient belles comme le jour doré qui l’emporte sur une nuit d’hiver enneigée, mais c’était peut-être leur seul point commun. Fleur, malgré ses manières et ses allures de reine, était une fille courageuse, disciplinée, généreuse, et profondément désintéressée.

C’était la première leçon que Gabrielle se souvenait avoir apprise : elle serait mais ne serait jamais, jamais si bien que son aînée.

Alors, à six ans, Gabrielle l’extravertie dévalait les ruelles pavées d’une cité provençale sans se soucier de bousculer les badauds, et Fleur courait, et leurs parents couraient aussi, toutes et tous ils couraient derrière elle et ils criaient :

— Mais quelle enfant terrible !



*



Quelle enfant terrible, Gabrielle se sent-elle ce matin d’été, celui qu’elle pressent être, déjà, le premier du reste de leur vie, et pas la vie qu’ils se sont promis l’un à l’autre dans les allées fleuries de sa région chérie.

— Je t’ai dit que je n’en voulais pas.

— Je n’ai pas compris que tu étais sérieuse.

— Tu crois que je ne le suis jamais ?

— Je ne pensais pas que tu l’étais pour ça.

— Et pourquoi je ne l’aurais pas été ? C’est peut-être ce qu’il y a de plus important.

— Précisément, Gabrielle : c’est ce qu’il y a de plus important, et nous ne sommes pas d’accord.

Fleur, malgré ses manières et ses allures de reine, était une fille courageuse, disciplinée, généreuse, et profondément désintéressée. Gabrielle, souveraine en son royaume solitaire, était ce qu’on appelait communément une peste : égocentrique, susceptible, caractérielle. Alors, aux mots de Dennis qui sonnaient mitrailleurs, qui la tiraillaient plus qu’elle ne l’aurait jamais concédé, Gabrielle a réagi de la seule façon qu’elle maîtrise à la perfection, c’est-à-dire avec dédain.

Elle a enfourné ses madeleines fourrées aux framboises du jardin, les a jetées plus que servies sur la nappe en lin brodée de fils d’or offerte par son beau-père et au bien au-dessus des moyens de Crivey, et puis, elle s’en est allée dans les bosquets, ignorant Dennis qui la sommait d’affronter, avec elle, un problème qu’elle ne se souvenait pas avoir engendré.

C’était peut-être la première fois, même, qu’elle était plus blessée que vexée, parce que Dennis pouvait bien dire ce qu’il voulait, elle avait été honnête et ne comprenait pas ce revirement, cette amertume qui venait soudain leur grignoter les entrailles et se moquait aussi bien de ses vaines tentatives pour l’éviter qu’un gobemouche s’était préoccupé de voir son nid défait à chaque nouvelle bouffée d’aurore.

— Et quand même, quelle enfant terrible tu fais, Gabrielle, assène-t-elle aux hérons qui la contemplent, stoïques, depuis les blés s’étendant de l’autre côté de la clôture.



*



À six ans Gabrielle dévalait les pavés les ruelles escarpées les chemins cabossés les bosquets épineux les plages ensablées et même les plages de galets où ses genoux terminaient invariablement ensanglantés Gabrielle, Gabrielle courait dévalait s’époumonait et derrière elle ils criaient, derrière elle ils devaient bien dévaler à leur tour, derrière elle s’époumonaient père et mère et grands-parents et oncles et tantes et cousins et cousines et un jour même la belle-famille toutes, tous, ils s’époumonaient : et si seulement elle était un peu plus comme sa sœur.



*



Un matin, Gabrielle a donné des noms comme ça, des noms pour rire aux oisillons qui l’empêchaient depuis des semaines de fermer ses volets. La mère la première a écopé d’un prénom : elle serait Giselle le gobemouche. Et ses enfants seraient, dans l’ordre où Gabrielle et Dennis les apercevaient, derrière leurs épais voilages : Myrtha, Bathilde, Berthe et le plus beau, celui que Giselle nourrit toujours en premier, Gabrielle le prénomme Albrecht.

Parce que d’une façon, Gabrielle n’est pas si différente de Fleur, en tout cas elle a son romantisme, elle aussi, et son amour de l’opéra, mais elle s’était si bien employée à pousser dans la direction opposée à celle de sa sœur qu’elle avait laissé pourrir des pans d’elle-même dans la terre de leur enfance.

Et un matin, un autre, Albrecht est mort.

Gabrielle l’a retrouvé dans l’herbe jaune, le croupion tacheté de sang, le même rouge qui perlait à la gueule du Fléreur.

Elle a dit à Dennis : regarde ce qu’a fait ton Fléreur – ce n’était plus le Fléreur ou leur Fléreur mais son Fléreur à Dennis qui avait amené le malheur.

Et Dennis a rétorqué : je te l’avais bien dit.

Alors Gabrielle s’est époumonée : moi aussi, je te l’avais bien dit, et tu ne m’as pas écoutée.



*



C’est à dix ans que Gabrielle avait cessé d’en vouloir à sa sœur. Mais elle n’avait pas vraiment eu le choix : on l’avait plongée dans les eaux noires et glacées du lac de Poudlard, et le monde entier avait su avant elle-même que Gabrielle était ce que Fleur avait de plus cher.

Le monde entier avait dit de Fleur la combattante Fleur la courageuse la choisie la promise de Fleur l’héroïne, le monde entier avait dit de cette fleur qu’elle était la plus précieuse et Gabrielle, elle, Gabrielle était chanceuse.

N’est-ce pas qu’elle était chanceuse ?

Riche, belle à se damner, aimée et entourée et protégée et destinée, Gabrielle n’avait aucune raison d’être malheureuse, tout du moins.

Elle avait cessé d’en vouloir à sa sœur – parce qu’haïr le reste du monde lui striait assez le cœur et qu’elle ne l’avait pas assez grand pour se permettre tant de colère.

Alors, à dix ans, Gabrielle avait fait quelque chose qu’elle ne s’était jamais autorisée : au retour de Fleur, sur le quai de la gare de Carpentras où la jeune femme désormais diplômée avait atterri à l’issue d’un périple en train depuis les Pyrénées, qu’ils avaient organisé avec ses amis pour profiter le plus longtemps possible les uns des autres, sur le quai de la gare de Carpentras, Gabrielle avait tressé ses cheveux. Elle avait soigné sa tenue, enfilé le jupon blanc qui lui faisait horreur, le reste du temps, et elle avait même pris le soin de cirer ses souliers dorés. Gabrielle était belle comme le lever du soleil ; mais, lorsque Fleur avait débarqué, elle avait couru si vite, si bien que ses nattes s’étaient défaites, et elle était tombée, heurtée par un voyageur, et elle s’était relevée et surtout, elle s’était jetée dans les bras de sa sœur.

— Ma merveilleuse petite sœur, avait chuchoté Fleur.

Et Gabrielle se l’était répété ce mot jusqu’au milieu de la nuit claire : merveilleuse, merveilleuse, c’était certain, elle le préférait à terrible, mais elle était une âme de feu alors, elle ne l’aurait certainement jamais avoué à qui que ce soit.



*



— Dennis n’est pas avec toi ? s’enquit Alphonsine.

C’est l’anniversaire d’Apolline, la mère de Gabrielle et Fleur et la sœur de leur tante Alphonsine, ils se sont tous réunis dans la villa aux teintes chatoyantes du Luberon, et Gabrielle a même fait l’effort de cueillir cinquante-cinq brins de lavande dont elle a l’odeur en horreur, les fleurs trônent dans un immense vase en terre cuite parsemées des traces de main de Gabrielle. Et Gabrielle les regarde, et elle ferme les yeux, elle souffle, parce qu’évidemment ça n’était pas suffisant, rien n’est jamais suffisant pour la tante Alphonsine et Gabrielle ne sera jamais suffisante pour sa famille.

— Non, parce que Dennis et moi, on va sûrement se séparer.

Gabrielle est égocentrique, elle est susceptible et caractérielle mais elle n’est pas une hypocrite et, elle l’a compris quelque part entre ses vingt ans et son divorce imminent, elle n’est pas non plus superficielle.

Elle n’est pas Fleur, sa sœur parfaite qui la fixe depuis l’autre côté de la tablée, sa fille aînée, une enfant du milieu et un garçon blond comme les blés à ses côtés, la main de son mari dans la sienne.

Elle n’est pas Fleur, mais elle est Gabrielle, et elle veut que ce soit assez, et elle pense que ce n’est pas trop exiger de sa famille que le respect de ce qu’elle est, même si ça n’est ni une épouse épanouie, ni une mère de famille, ni une héroïne ni une briseuse de sorts ni une aventurière ni une voyageuse ni rien qui ne soit vraiment à elle.

— Et s’il vous faut une explication, je vous la fourre sur un plateau : il veut des enfants, je n’en veux pas. Je suis désolée, mais pour ce côté-là de la famille, il faudra vous contenter de mes nièces et de mon neveu. Mais vous conviendrez, je crois, que je ferais une terrible mère.



*



Gabrielle avait onze ans, et la tante Alphonsine et le cousin Marius et Juliette et Clémence et Childéric et Henri et Gustave, toutes, tous, ils parlaient et à ses yeux c’était comme s’ils criaient : tes mains sur la table, et attention à ta robe, mais qu’est-ce que c’est que ce bulletin ces résultats et j’ai entendu dire que, on m’a rapporté que, bavardages futilités et la voie toute tracée par ta sœur dans tout ça, quel dommage, et tes cheveux, ils t’iraient si bien attachés, Gabrielle parle moins fort, Gabrielle répond quand on te parle, Gabrielle-ci et Gabrielle-ça et quelle enfant terrible Gabrielle jamais comme il faudrait.

Gabrielle a vingt-cinq ans et son départ tonitruant de la maison du Luberon ne figure même pas parmi ses trois sorties les plus mémorables.



*



— Oh, Gabrielle.

— Ne commence pas.

— Mais, ma chérie…

— Aujourd’hui, je ne veux être la chérie de personne.

Fleur est venue la première. Évidemment, que Fleur est venue la première, pour inspecter d’abord, quelques mois en arrière, les vieilles pierres qu’avaient acquises Dennis et Gabrielle après leur mariage secret.

Elle était alors la seule que cette cérémonie en catimini n’avait pas étonnée.

La seule à deviner que, sous ses parures, Gabrielle était une heureuse nature qui ne s’embarrassait pas des convenances. Elle n’avait pas eu le monde entier à ses pieds mais un monde quand même, ses jeunes camarades d’enfance et puis les élèves de Beauxbâtons et les jeunes et les moins jeunes et globalement les gens qu’elle fréquentait ils l’avaient tous été, aux pieds de sa beauté. Et parmi eux, des filles, des garçons lui avaient promis monts et merveilles, des filles, des garçons lui avaient offert un monde doré et une vie enchantée, et Gabrielle s’était détournée.

Parce qu’un matin Dennis était entré dans sa vie et, petit à petit, comme s’écoulaient les jours étaient nés leurs amours. Gabrielle aimait son petit monde autour d’elle parce qu’il valait toujours mieux que la solitude affreuse qu’elle ressentait depuis toujours. Mais elle était une enfant perdue dans son royaume.

Un matin, Dennis était entré dans sa vie.

Il n’avait pas réagi à ses mesquineries habituelles, n’avait pas ri à ses plaisanteries souvent cruelles, l’avait malmenée lors de débats, en classe, mais aussi il avait vu, il l’avait entendue : son immense passion pour la botanique, sa mémoire implacable en histoire, son rêve de courir et courir et courir encore, plus vite, toujours. Il lui avait proposé des randonnées interminables dans les vallées qui cerclaient l’école, l’avait contemplée se rouler dans les hautes herbes et dévaler s’en aller grimper sauter se jeter sans retirer les brindilles de ses cheveux, ne lui offrant que ses sourires radieux et ses yeux, à Gabrielle, ses yeux avaient enfin cessé d’être vitreux.

Gabrielle n’avait pas besoin d’une assemblée captivée d’un mariage princier et de la bénédiction de qui que ce soit parce qu’elle savait ce qui importait réellement.

C’était que Dennis lui offre des fleurs jaunes ses préférées sans s’obstiner avec les roses rouges, c’était qu’il la laisse disparaître des heures entières dans les massifs sans jouer les possessifs les incompréhensifs c’était qu’il la croit, qu’il la voit, c’était qu’il l’aime égocentrique, susceptible, caractérielle et honnête et sportive et brillante et passionnée et vraie vraie vraie Gabrielle la terrible merveille.

Et Fleur est venue la première. Parce qu’elle aussi connaît sa sœur et pour ça que la sœur a cessé de la jalouser la détester pour simplement l’aimer comme elle sait faire : en grand, en très grand.

— C’est irréparable, entre vous ? s’est enquit Fleur sans prendre de détour.

Gabrielle a regardé par la fenêtre. Tous les arbres avaient perdu leurs feuilles à l’exception des sapins qui perçaient les crêtes, au loin, il ne restait au jardin que de rares cosmos, de la terre, de la mousse détrempée et un nid de gobemouches décomposé que Dennis a projeté dans les hortensias fanés en fermant enfin les volets.

— Pour l’instant, je ne veux pas d’enfants.

— Tu n’en as jamais voulu.

— Et toi, tu m’as prise au sérieux ?

— Évidemment.

Dennis lui disait toujours ça évidemment quand elle lui demandait et toi est-ce que tu m’aimes comme ça est-ce que tu m’aimes pour moi qu’est-ce que tu vois dis-moi, Dennis.

— Il doit espérer que je changerai d’avis.

— Gabrielle, chérie, ne change pas ce que tu es au plus profond de toi pour quelqu’un, et même pas pour ton mari.

— Mais je croyais que c’était lui, qu’il savait le mieux qui j’étais, en vrai de vrai.

— Non, c’est toi qui sais le mieux, et c’est pour ça que tu as choisi Dennis plutôt qu’un autre. Tu sais qui tu es, Gabrielle. Et tu sais ce que tu n’es pas. Tu n’as jamais laissé personne te faire dévier de ta route et ça, depuis que tu es une enfant, parce que tu as toujours eu cette force et cette honnêteté absolue.

— Tu veux dire que j’ai toujours été terrible.

— Je veux dire que tu es une femme qui a toujours su ce qu’elle voulait et même si ce qu’elle veut n’est pas ce qu’on attend traditionnellement d’elle.

Silence. Le vent a frappé les carreaux fait ployer l’herbe gorgée d’eau et s’envoler les branches mortes des rosiers que Gabrielle a laissé tomber à ses pieds lorsque Fleur est arrivée. Et elle l’admire, sa sœur. Elle s’est installée sans façon dans le salon, les pieds nus sur le jeté brodé qui habille le canapé, elle a les cheveux négligemment attachés en un chignon. Fleur sait qu’elle est belle et qu’elle n’a pas d’effort à fournir pour le paraître et c’est ce qui la rend aussi confiante que clairvoyante : tandis que les autres s’attardent sur son apparence elle perce et déjoue leurs croyances. Fleur entrevoit Fleur devine Fleur perçoit et Gabrielle l’aime pour ça.

À la tombée du jour, emmitouflées dans de grosses écharpes en laine aux mille nuances de rose, elles sont sorties par le sentier côtier, pour regarder tournoyer dans le ciel pourpré les cormorans et les fous de Bassan, les mouettes et les goélands, les aigrettes et hérons et sternes et même, avant que le soleil ne plonge tout à fait dans les eaux noires, une petite colonie de macareux moines qui chaque soir s’ébrouent quelque part entre les Sept Îles et le mesnil où Gabrielle et Dennis ont bâti leur mirage d’une vie à deux, mariage heureux.



*



À dix-sept ans Gabrielle et dix-neuf ans Dennis s’étaient enfuis de Beauxbâtons une nuit d’été pour le seul plaisir d’enfoncer leurs quatre pieds dans l’océan Atlantique au matin.

Gabrielle s’était toujours languie de l’océan et le bruit des vagues et l’odeur du sel et les flots les oiseaux le sable chaud avaient apaisé le cœur meurtri de Dennis.

Il l’avait embrassée pour la première fois, sur la bouche, enfin, et c’était si doux qu’elle en avait oublié toute la frustration accumulée à chaque baiser sur la joue, sur la tempe, sur son front dressé d’espérance.

Et ils s’étaient laissés bercer par l’inlassable écume.

Après une année à se cacher loin de Poudlard, une autre à se noyer dans les larmes plutôt que les études, Dennis accusait un retard de deux années dans sa scolarité et avait alors émis le souhait de changer d’école. Gabrielle, de deux ans sa cadette, l’avait accueilli c’est-à-dire, véritablement accueilli, comme sa famille avait et près d’un an durant accueilli les sorcières et les sorciers qui fuyaient l’Angleterre. Gabrielle n’avait pas vécu dans la vraie peur et certainement pas enterré sa sœur mais elle savait, elle comprenait, elle avait vu et entendu et consigné et séché bien des larmes à faire mourir les siennes dans son oreille chaque nuit, insomnies.

Ils s’étaient cherchés pendant un an s’embrassant s’enlaçant mais se refusant à nommer et puis enfin ils s’étaient laissés bercer par l’inlassable écume.

Et Dennis avait dit : je dois rentrer m’occuper de Liliane – c’était l’amoureuse qu’avait eue Colin avant de mourir – et de Liberty – c’était leur fille enfant de paix enfant sans père qui prenait Dennis pour le sien.

Et Gabrielle avait souri : Dennis était loyal, Dennis était gentil, évidemment qu’elle avait souri, parce qu’elle avait réalisé qu’elle était amoureuse de lui.



*



— Je t’ai dit que je n’en voulais pas.

— C’est vrai.

— Et toi aussi, tu m’avais dit ça sur la plage, tu t’en souviens ?

— Je m’en souviens.

— C’était vrai ?

— Ça l’était.

— Et ça ne l’est plus ?

— Non, ça ne l’est plus.

— Qu’est-ce qui a changé d’autre ?

— Rien d’autre n’a changé.

— Tout a changé.

— Ça, ce n’est pas vrai.

— Tu l’as dit toi-même, que nous n’étions pas d’accord et que c’était ce qu’il y avait de plus important.

— Je n’ai pas été juste, et je n’ai pas été vrai.

— Alors dis-moi, le plus important, c’est quoi ?

— Je ne sais pas.

— Ce n’est pas moi ?

— Et moi, est-ce que je suis le plus important, pour toi ?

— …

— …

— Un jour, tu m’as dit que ta vie n’était pas ta vie. Que t’occuper de Liliane, de Liberty, c’était vivre la vie de Colin, et pas celle que tu aurais choisie.

— Je m’en souviens.

— Tu es important, Dennis.

— Important comment ?

— Important en grand, en très grand, en très, très, très grand parce que, moi : je t’aime.

— Je t’aime aussi.

— Je suis contente que, ça, ça n’ait pas changé.

— Moi aussi.

— Mais je ne peux pas vivre une autre vie que la mienne, même pas pour toi.

— Et je ne te demanderai jamais ça.

— Je ne te le demanderai pas non plus.

— …

— …

— Je t’aime.

— Je t’aime moi aussi.



*



À dix-sept ans Gabrielle était amoureuse de Dennis. Et elle l’était à dix-huit ans quand elle l’a suivi au Royaume-Uni pour partager autre chose que des bouts de sa vie. Et elle l’était encore à vingt ans quand elle est partie, faire le tour de l’Asie devenu le tour de la planète et ses trésors fleuris, elle l’était encore, à vingt-deux ans, quand elle est rentrée mais dans son pays à elle et pas au pays de Dennis.

À vingt-trois ans, à vingt-quatre ans et à vingt-cinq ans, Gabrielle aimait Dennis et Dennis aimait Gabrielle mais Gabrielle et Dennis n’étaient pas heureux alors, ils vivaient d’un côté de la mer et de l’autre, l’un pour l’autre et l’un sans l’autre.

Gabrielle avait aimé d’autres garçons ; elle avait surtout aimé d’autres filles.

Elle n’avait jamais cessé d’aimer Dennis aussi.

Et ils s’étaient retrouvés ; à force de s’écrire, de se regarder grandir d’une rive et de l’autre, ils l’avaient franchie, à contre-courant. Gabrielle avait compris qu’elle l’aimait en grand quand, le retrouvant sur leur berge à deux, elle n’avait rien ressenti de la passion dévorante qui l’animait, des années auparavant, qui l’animait et l’abîmait surtout. Elle n’avait rien ressenti de ce feu rien de douloureux et au contraire, dans les bras ouverts de Dennis, ce qu’elle avait vraiment senti c’était la douceur de l’eau. C’était aussi la chaleur de sa peau, l’électricité qui parcourait ses membres quand il y posait sa paume, mais surtout c’était la douceur de l’eau.

La passion s’était tarie, ils en avaient connu d’autres, chacun de leur côté, mais il restait le plus important : des sentiments sincères et profonds la connaissance la confiance l’apaisement.

Gabrielle avait compris, elle l’avait senti que dans ses bras à lui, elle était vraiment chez elle, et que dans ses bras à elle, il était vraiment chez lui.



*



Alors, ensemble, ils ont ramassé les feuilles mortes dans le jardin à l’abandon. Ils ont semé des graines de cosmos partout où ils s’embrassaient et ils se sont embrassés à chaque fois que l’un de leurs oiseaux leur offrait un ballet dans le ciel hivernal.

Et Dennis a fabriqué des nichoirs.

Il est rentré un midi, une pile de livres sous le bras, et ils concernaient tous les passereaux, et leur habitat, et pour les chardonnerets, pour les mésanges bleues et charbonnières et nonettes et à longue queue, pour les geais des chênes, pour les hirondelles, pour les pics-verts, pour les sitelles, pour les pinsons, pour les moineaux, pour les tourterelles, pour les troglodytes mignons et bien sûr pour les gobemouches gris, Dennis à sa magie a façonné des nids qui bientôt ont habillé chacun des arbres et même chacun des pans de la maison.

Et Gabrielle a souri avant de fabriquer, sans sa baguette, les cheveux tressés les membres emprisonnés dans une épaisse salopette en jean et une marinière, Gabrielle a fabriqué un abri pour les Fléreurs – pour protéger les nichoirs, toutefois, elle s’en est tenue à la magie.

Et le printemps a été magique, plus merveilleux encore parce qu’il emportait dans ses pluies nourrissantes et ses soleils éclatants le terrible hiver.

Les boutons d’or ont percé la terre nue les premiers, les pâquerettes les ont suivis et très vite les pissenlits et puis soudain les premiers cosmos nacrés pourprés rosés qui ont fait éclore avec eux les coquelicots, les camomilles les moutardes les bourraches et la chicorée sauvage et la nigelle de Damas.

Et puis, les petits de Myrtha, Bathilde et Berthe sont partis.

Ils ont déployé leurs ailes au-dessus de la prairie multicolore qu’était devenue la maison de Gabrielle et Dennis.

Ils se sont envolés à l’été.

Et leurs petits à l’été d’après.

Et à celui d’encore après les gobemouches ont même fait des nids sur l’abri des Fléreurs parce que les Fléreurs étaient partis à leur tour et Dennis aussi.



*



— Moi, Gabrielle Delacour, déclare te prendre toi, Dennis Crivey, pour légitime époux, à partir de ce jour et devant… devant, devant la tourterelle qui roucoule dans ce marronnier-là, et devant le chat qu’on aperçoit par la fenêtre de cet appartement-ci – je crois que c’est un chartreux. Et devant eux, devant la tourterelle et le chartreux, moi, Gabrielle Delacour, je fais la promesse solennelle de t’aimer, mais pas de d’être fidèle, car ceci me semble très désuet, mais de t’être loyale, ça, oui, je te fais la promesse de t’être loyale. Et je fais aussi la promesse solennelle de te chérir si tu me chéris toi aussi, pour le meilleur et pour le pire, dans la richesse et dans la pauvreté, dans la santé et dans la maladie, dans nos joies et nos peines et là, je ne vais pas mentionner la mort, parce que présentement, je la souhaite si loin que je ne peux pas me la figurer. Et je ne veux pas que tu m’aimes et que je t’aime pour la seule raison qu’une tourterelle et un chartreux ont été témoins un jour de cet échange. Alors, moi, Gabrielle Delacour, je fais la promesse solennelle de t’aimer, c’est-à-dire de te respecter, de t’accompagner, et surtout de t’épanouir, et ma limite elle sera là : je t’aime, tu m’aimes, aimons-nous jusqu’à nous épanouir et si ça n’est plus le cas, et bien, je promets au moins de chérir toujours le souvenir de notre amour.



*



Ça a commencé avec délicatesse, et presqu’insidieusement. Les Fléreurs sont partis les premiers et après eux, les livres de Dennis, et puis ses habits, et un jour, Dennis lui-même. Et il a dit : je t’aimerai toujours mais j’ai besoin de construire une famille. Parce que Dennis avait changé grandi évolué et Gabrielle aussi avait changé grandi évolué et le chemin qu’ils avaient espéré emprunter à deux s’étaient avérés deux sentiers séparés par un précipice. Avec un pincement au cœur, Gabrielle a donc défait un jour après l’autre leurs milliers de photographies qui habillaient les murs, se rappelant pour chacune d’elles le son d’une voix et le son d’un rire d’un soupir d’un sourire se rappelant la mélodie de l’amour.

Et puis, Dennis s’en est allé pour de bon, et il n’est plus resté de lui qu’un fantôme contre lequel Gabrielle se cogne, parfois, le matin surtout, quand elle ouvre les volets et découvre un jardin vivant, un jardin même éclatant au printemps et à l’été et désormais, un jardin solitaire. Mais le gobemouche est venu chaque jour. Et la tourterelle. Et le chardonneret. Et la mésange bleue la mésange charbonnière la mésange nonette la mésange à longue queue le geai des chênes l’hirondelle le pic-vert la sitelle le pinson le moineau le troglodyte mignon. Et, sur les roches où venaient mourir les eaux agitées, sont aussi venus chaque jour le cormoran, le fou de Bassan, la mouette, le goéland l’aigrette le héron la sterne le macareux moine et les images, un mirage, un rêve.

Alors, Gabrielle a coupé ses cheveux au carré, les a maintenus fermement dans un foulard délavé et a jeté sur son dos un sac et un calepin et des pinceaux parce qu’elle aime Dennis mais surtout elle aime la vie et elle aime sa vie et elle s’est dressée sur la grève fière comme elle sait si bien faire.

Le jour d’après elle s’est dressée cette fois sur la pointe où se fracassaient les vagues.

Et, le jour d’encore après, Gabrielle s’est envolée parcourir le monde qui, à présent qu’elle était grande et terriblement grande, lui paraissait aussi vaste et familier et prometteur que le sien, à portée de main, enfin.

Note de fin de chapitre :

Merci d'avoir lu !

J'ai énormément hésité à cocher Tragédie/Drame mais je crois finalement qu'il n'y a ici ni tragédie, ni drame. Parce que Gabrielle et Dennis s'aiment ou se sont aimés d'un amour sincère, et que parfois, ça ne suffit pas, parfois, on change on grandit on évolue et on sépare, et ça n'est pas grave. Leur vie ne s'arrête pas ici : ils auront chacun-e un millier d'aventures à vivre encore et Gabrielle l'a bien compris.

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